UNIVERSITE MOHAMMED V- SOUISSI FACULTE DE MEDECINE ET DE PHARMACIE -RABAT- ANNEE: 200 THESE N°: Le cancer kystique du rein A propos de 3 cas THESE Présentée et soutenue publiquement le :……………………….. PAR Mlle. Salwa LAHLOU KASSI Née le 02 Janvier 1984 à El Jadida Pour l'Obtention du Doctorat en Médecine MOTS CLES Kyste rénal – Cancer du rein – Classification de BOSNIAK – Imagerie – Examen anatomopathologique. JURY Mr. A. LACHKAR Professeur d'Urologie Mr. Y. NOUINI Professeur Agrégé d'Urologie Mr. A. IKEN Professeur Agrégé d'Urologie Mr. A. EL QUESSAR Professeur Agrégé de Radiologie PRESIDENT RAPPORTEUR -1- Toutes les lettres ne sauraient trouver les mots qu’il faut… Tous les mots ne sauraient exprimer la gratitude, l’amour, le respect, la reconnaissance… Aussi c’est tout simplement que Je dédie ce Travail …. -2- A ma chère mère Autant de pages qui ont suffit pour la réalisation de ce travail, ne suffiraient pour exprimer la profondeur de l’estime, de l’amour et d’admiration que j’éprouve envers toi. Tu m’as donné tant d’affection et de courage, tu as toujours été derrière mon bonheur et ma réussite et tu as tant veillé sur moi pour me conduire au terme de mes études. En ce jour mémorable, je t’offre le fruit de tes sacrifices longtemps consentis à mon égard. Je t’aime beaucoup A mon cher père Aucune dédicace ne saurait traduire la profondeur des sentiments d’affection, d’admiration et de respect que je porte à ton égard. Tu m’as toujours conseillé et éclairé le chemin avec beaucoup de patience et de pédagogie. Tu es et tu resteras toujours l’exemple dans ma vie personnelle et professionnelle. Que ce travail soit le fruit de l’affection et de la bienveillance que tu as consenti pour mon éducation et ma formation. Je t’aime beaucoup -3- « Puisse Dieu vous prêter santé, bonheur et longue vie afin que je puisse vous combler à mon tour. » -4- A ma chère sœur En témoignage de ma grande affection et de mon profond amour, des liens d’amitié et de fraternité qui nous ont toujours lié, je te dédie petite sœur ce travail, tout en te souhaitant santé, bonheur et réussite dans ta vie personnelle et professionnelle. Que Dieu te préserve le meilleur avenir, te protège et consolide les liens sacrés qui nous unissent. Je t’aime beaucoup -5- A mon cher frère En témoignage de la complicité et de l’amour fraternel qui nous ont toujours unis, je te dédie petit frère mon travail, avec toute la tendresse que j’éprouve pour toi et tous mes vœux de succès personnel et professionnel. Que Dieu te protège et t’offre santé et bonheur. Je t’aime beaucoup -6- A mes grands parents Pour votre affection et vos prières qui m’ont toujours comblé. Que Dieu vous procure santé, bonheur et longue vie. Je vous aime beaucoup A l’aimable Fatima Je te dédie ce travail en guise de remerciements pour ton soutien et ta longue bienveillance à mon égard. Aucune dédicace ne saurait te traduire la profondeur de mon estime et de ma gratitude. Je t’aime beaucoup -7- A la mémoire de ma tante Houria Qui m’a toujours souhaité le meilleur, je dédie mon travail à son âme, tout en priant Dieu le tout puissant de la bénir et de lui offrir la paix en nous voyant comme elle l’a toujours souhaité. A mes tantes et leurs aimables époux A mes oncles et leurs adorables épouses Vous qui avez suivi tout mon itinéraire scolaire et universitaire, et partagé avec moi la joie de ma réussite. Je vous dédie ce travail, avec tout mon respect et mon affection. A mes cousins et cousines Je vous dédie ce travail en témoignage de mon affection la plus sincère, avec tous mes vœux de bonheur et de réussite dans votre vie familiale et professionnelle. A toute ma famille -8- A mes chères amies et consœurs Samia et Lamia Aucune dédicace ne pourrait exprimer, à leur juste valeur, mon profond amour et ma grande estime à votre égard. En souvenir des moments chaleureux que nous avons passé ensemble, de votre soutien et de votre présence, je vous dédie ce travail et je vous souhaite tout le bonheur dans votre vie familiale et professionnelle. Que Dieu préserve notre chère et sincère amitié. A mes chers amis et confrères Youssef LHIMEUR Hala ABOU SAHIBI & Mohammed RAHMANI Nadia LOUDYI Nahed FATHI AHMED Fatima-Zahra EL MEKKAOUI Souhail AHMIMECHE Racha LAHLOU Ahmed Imadeddine EL FILALI Zakaria LAKHADER -9- A mes chers amis Malak EL MELIANI Kamar BOUCHARA Rabée EL KASRAOUI Youness MILOUDI A tous mes amis que je n’ai pas cité mais qui n’en demeurent pas moins chers En souvenir des meilleurs moments passés à vos côté : j’y penserais toujours avec beaucoup de nostalgie. Veuillez trouver dans ce travail l’expression de mon respect le plus profond et mon affection la plus sincère. A tous ceux qui ont contribué, de près ou de loin, à l’élaboration de ce travail - 10 - Remerciements - 11 - A notre Maître et Président de Thèse Monsieur le Professeur A. LACHKAR Professeur en Urologie au CHU Ibn Sina RABAT Nous sommes très touchés par l’insigne honneur que vous nous faites en acceptant d’assurer la présidence de notre thèse. Votre extrême amabilité, vos compétences professionnelles, vos qualités humaines et votre disponibilité à l’égard des étudiants nous inspirent admiration et respect. Nous vous prions cher maitre, de bien vouloir trouver dans ce travail, le témoignage de notre profonde reconnaissance et de notre grande estime. - 12 - A notre Maitre et Rapporteur de Thèse Monsieur le Professeur Y. NOUIN I Professeur en Urologie au CHU Ibn Sina RABAT Nous tenons à vous exprimer toute notre reconnaissance pour l’honneur que vous nous avez fait en acceptant de diriger ce travail. Malgré vos intenses préoccupations et responsabilités, vous nous avez toujours réservé un accueil avec bienveillance, sympathie, gentillesse et bonne humeur qui nous a permis d’apprécier vos qualités humaines et professionnelles. Nous vous prions cher maitre, de bien vouloir trouver dans ce travail, l’admiration et le respect que nous vous témoignons. - 13 - A notre Maitre et Juge de Thèse Monsieur le Professeur A. IKEN Professeur en Urologie au CHU Ibn Sina RABAT Vous nous faites un grand honneur en acceptant aimablement de juger notre travail. Nous portons une grande considération tant pour votre extrême gentillesse que pour vos qualités humaines et professionnelles. Veuillez trouver ici cher maitre, l’expression de notre très haute considération. A notre Maître et Juge de Thèse Monsieur le Professeur A. EL QUESSAR - 14 - Professeur en Radiologie au CHU Ibn Sina RABAT Nous sommes infiniment sensibles à l’honneur que vous nous faites de siéger parmi notre jury de thèse. Vos qualités humaines et professionnelles ne peuvent que susciter l’estime et le respect de tous. Qu’il nous soit permis ici, de vous exprimer notre haute considération et nos vifs remerciements. - 15 - Abréviations TDM : Tomodensitométrie. IRM : Imagerie par Résonnance Magnétique. ECBU : Examen Cytobactériologique des Urines. NFS : Numération Formule Sanguine. Hb : Hémoglobine. OMS : Organisation Mondiale de la Santé. ASP : Abdomen Sans Préparation. DPC : Dilatation Pyélocalicielle. C+ : avec injection de produit de contraste. C- : sans injection de produit de contraste. UIV : Urographie Intraveineuse. PCUS : Produits de Contraste Ultrasonores. UH : Unité Hounsfield. IL : Interleukine. IV : Intraveineuse. NKML : Néphrome Kystique Multiloculaire. LDH : Lactico-Déshydrogénases. AFU : Association Française d’Urologie. TNM : Tomodensitométrie. CHU : Centre Hospitalier Universitaire. - 16 - SOMMAIRE INTRODUCTION ............................................................................................................... 1 OBSERVATIONS ................................................................................................................. 3 Observation n°1 ......................................................................................................................... 5 Observation n°2 ........................................................................................................................ 10 Observation n°3 ......................................................................................................................... 14 DISCUSSION ........................................................................................................................ 21 I-EPIDEMIOLOGIE ........................................................................................................... 22 A- FREQUENCE GLOBALE .................................................................................. 22 B- SELON L’AGE .................................................................................................... 22 C- SELON LE SEXE ............................................................................................... 22 II- PATHOGENIE ............................................................................................................. 23 III- SYMPTOMATOLOGIE CLINIQUE ET CIRCONSTANCES DE DECOUVERTE ............................................................................................................. 25 IV- IMAGERIE ................................................................................................................. 27 A- ABDOMEN SANS PREPARATION ....................................................................... 27 B- UROGRAPHIE INTRAVEINEUSE ........................................................................ 28 C- ARTERIOGRAPHIE SELECTIVE DE L’ARTERE RENALE ............................... 29 D- ECHOGRAPHIE ........................................................................................................ 30 E- TOMODENSITOMETRIE ....................................................................................... 34 F- IMAGERIE PAR RESONNANCE MAGNETIQUE ............................................... 41 V- PONCTION - ASPIRATION ET BIOPSIE PERCUTANEE.................................. 43 A- TECHNIQUE ET COMPLICATIONS ...................................................................... 43 B- INDICATIONS .......................................................................................................... 44 C- RESULTATS ............................................................................................................. 45 VI- DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL ............................................................................. 47 A- LE KYSTE BENIN REMANIE ................................................................................ 47 B- L’ABCES DU REIN .................................................................................................. 47 - 17 - C- LE KYSTE HYDATIQUE DU REIN ....................................................................... 49 D- LES PSEUDOTUMEURS INFLAMMATOIRES DU REIN ................................... 50 E- LE NEPHROME KYSTIQUE MULTILOCULAIRE ............................................... 51 F- LE KYSTE SIMPLE DU REIN ................................................................................. 53 VII- DIAGNOSTIC PEROPERATOIRE ....................................................................... 55 A- LES ASPECTS MACROSCOPIQUES ..................................................................... 55 B- L’EXAMEN EXTEMPORANE ............................................................................... 56 VIII- BILAN D’EXTENSION ......................................................................................... 59 A- ECHOGRAPHIE ........................................................................................................ 59 B- TDM ........................................................................................................................... 59 C- CAVOGRAPHIE ....................................................................................................... 59 IX- TRAITEMENT ........................................................................................................... 60 X- ANATOMIE PATHOLOGIQUE .................................................................................... 64 A- LA CLASSIFICATION DES TUMEURS KYSTIQUES DU REIN : selon le Comité Cancérologie de l’Association Française d’Urologie (CCAFU) ............. 64 B- LES TUMEURS KYSTIQUES MALIGNES ............................................................ 65 a- Le carcinome à cellules rénales kystique multiloculaire ................................. 65 b- Le carcinome tubulo-kystique .......................................................................... 67 C- LES TYPES HISTOPATHOLOGIQUES ................................................................. 69 a- Le carcinome à cellules claires ......................................................................... 69 b- Le carcinome papillaire ................................................................................... 70 c- Le carcinome chromophobe ............................................................................. 71 d- Le carcinome des tubes collecteurs de Bellini .................................................. 72 D- LE PRONOSTIC ........................................................................................................ 73 XI- EVOLUTION ET PRONOSTIC .............................................................................. 75 CONCLUSION ...................................................................................................................... 76 RESUMES ............................................................................................................................... 78 BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................... 85 - 18 - Introduction - 19 - Le cancer kystique du rein Introduction Le cancer kystique du rein se présente sous forme d’un kyste atypique, ce qui pose au clinicien un réel problème diagnostique : s’agit-il d’un kyste bénin ou d’un cancer ? Selon les séries, le cancer du rein se présente dans 5 à 17,5 % des cas sous forme kystique. En raison de la rareté de cette forme de cancer ainsi que de son caractère peu agressif, les auteurs ont longuement débattu sur la conduite diagnostique et thérapeutique. Plus que jamais, de nombreuses questions se posent aux cliniciens concernant cette forme particulière de cancer du rein : quelles sont les places respectives de l’échographie et de la TDM (examen tomodensitométrique)? Y’a t’il une place pour l’IRM (imagerie par résonance magnétique)? La cytoponction ou la biopsie percutanée permettent-elles toujours d’éviter une exploration chirurgicale ? La classification tomodensitométrique des masses kystiques du rein établie par Morton BOSNIAK en 1986 et modifiée en 1993, sert toujours de base de prise en charge thérapeutique malgré ses imperfections. Notre travail se base sur une étude portant sur trois dossiers, colligés dans le service d’Urologie « A » de l’hôpital IBN SINA de RABAT, de patients porteurs de kystes rénaux atypiques dont deux seulement se sont avérés être des cancers. Le but de ce travail est de montrer les difficultés de diagnostic d’un cancer kystique du rein, de dégager à travers l’étude de ces cas cliniques et la revue de la littérature, les différents aspects cliniques, radiologiques et pathologiques, et de faire le point sur les stratégies diagnostique et thérapeutique actuelles. - 20 - Observations - 21 - Le cancer kystique du rein Observations A travers 3 observations, nous soulevons les différents problèmes que pose cet aspect du cancer rénal. - 22 - Le cancer kystique du rein Observations OBSERVATION N°1 DU DOSSIER : 29 094 / 06 Patient âgé de 62 ans, marié et père de 04 enfants, originaire de Taza et habitant Témara, hospitalisé le 04 /12 /06 au service d’Urologie « A » du Centre Hospitalier IBN SINA de RABAT pour prise en charge d’un kyste rénal atypique gauche. Concernant ses antécédents, il s’agit d’un patient ancien tabagique pendant 25 ans à raison de ½ paquet / jour, sevré il y a 20 ans, suivi pour diabète non insulinodépendant depuis 8 ans et actuellement sous insuline, et qui présente une malformation congénitale des deux membres inférieurs. Il a été opéré en 1980 pour hernie inguinale droite. Sa symptomatologie urologique remontait à 3 mois par l’installation d’une hématurie totale, caillotante et intermittente sans lombalgies ni autres signes accompagnateurs. Le patient n’avait pas consulté jusqu’à son hospitalisation en « Médecine E » pour décompensation acidocétosique déclenchée par une infection urinaire, où le bilan radiologique (échographique) a objectivé une masse kystique rénale gauche, et le patient fût adressé au service d’Urologie pour complément de bilan et pour prise en charge. L’examen général trouve un patient en bon état général, aux conjonctives légèrement décolorées, ayant une malformation des membres inférieurs. L’examen urogénital est strictement normal, notamment les fosses lombaires qui sont libres, le toucher rectal est normal. Le reste de l’examen somatique est sans particularité. - 23 - Le cancer kystique du rein Observations Bilan : Echographie abdomino-pelvienne : (photo n°1) Réalisée en première intention, montre un rein gauche mesurant 115x70mm, bien différencié, siège d’une lésion arrondie médio rénale à double composante kystique et tissulaire, à paroi fine, mesurant 55x57x57mm, refoulant les structures sinusales et les cavités excrétrices et déformant le contour du rein, évoquant soit un kyste hydatique stade II, soit un processus tumoral rénal nécrosé. Le rein droit est normal. Le carrefour vésico-prostatique est normal. Le foie et la rate sont sans anomalies. On note l’absence d’adénopathies profondes. La persistance du doute diagnostique fait pratiquer un examen tomodensitométrique. - 24 - Le cancer kystique du rein Observations Photo n°1 : Echographie du rein gauche montrant une lésion arrondie médio rénale à double composante kystique et tissulaire, à paroi fine, mesurant 55x57x57mm. TDM abdomino-pelvienne sans et avec injection de produit de contraste (uroscanner) : (photo n°2 et n°3) Trouve un kyste séreux simple sinusal rénal gauche de 60x55mm refoulant les cavités pyélocalicielles qui ne sont pas dilatées (BOSNIAK I). - 25 - Le cancer kystique du rein Observations Photo n°2 : TDM avant injection du produit de contraste Photo n°3 : TDM après injection du produit de contraste TDM abdominale montrant un kyste simple au niveau du rein gauche. - 26 - Le cancer kystique du rein Observations Bilan biologique : Urée et créatinine : normales Glycémie : 1,12g /l (↑) hémoglobine glyquée : 10,8% (↑) Sérologie hydatique : < 1/160 (réaction non significative) ECBU : infection urinaire à Escherichia coli. NFS montre une anémie par spoliation sanguine avec une hémoglobine à 5,4 g / dl pour laquelle le patient fût transfusé de 05 culots globulaires. Malgré cet aspect rassurant de la TDM, le contexte clinique pousse à une exploration chirurgicale. Traitement et anatomie pathologique : Le patient a bénéficié d’une néphrectomie totale élargie dont l’étude anatomopathologique avait trouvé un aspect morphologique et immunohistochimique évoquant un carcinome des tubes collecteurs de Bellini grade 4 de Furhman, stade pT2 Nx Mx . Le patient n’a plus été revu après sa sortie du service. - 27 - Le cancer kystique du rein Observations OBSERVATION N°2 DU DOSSIER : 29 002 / 06 Patient âgé de 58 ans, de profession agricole, marié et père de 03 enfants, originaire et habitant Khénifra, hospitalisé le 16/10/06 au service d’Urologie « A » du Centre Hospitalier IBN SINA de RABAT pour masse de l’hypochondre gauche. Patient tabagique chronique à raison de 20 paquets/années, qui a constaté 20 jours auparavant, une masse de l’hypochondre gauche isolée sans lombalgies ni hématurie, ni autre signe accompagnateur, le tout évoluant dans un contexte apyrétique avec conservation de l’état général. L’examen clinique trouve un patient en bon état général, apyrétique, aux conjonctives normo-colorées. L’examen abdominal trouve une masse palpable au niveau de l’hypochondre gauche sans contact lombaire. Le reste de l’examen est sans particularité. Bilan : Echographie abdomino-pelvienne : (photo n°4) Montre au niveau du rein gauche une masse médiorénale d’échostructure mixte kystique et tissulaire, avec de nombreuses travées en nid d’abeille, le pôle supérieur est indemne. Le rein droit est normal. La rate est normale et refoulée vers le haut. - 28 - Le cancer kystique du rein Observations Photo n°4 : Echographie du rein gauche montrant une masse d’échostructure mixte avec aspect en nid d’abeille. TDM abdomino-pelvienne sans et avec injection de produit de contraste (uroscanner) : (photo n°5 et n°6) Trouve un processus tumoral hétérodense rénal gauche polaire inférieur de 128 x 78 mm s’étendant sur une hauteur de 13 cm avec envahissement des cavités calicielles en regard. Après injection de produit de contraste, on note un rehaussement de la paroi et des cloisons qui sont multiples (BOSNIAK III). Une thrombose de la portion terminale de la veine rénale homolatérale a été notée avec présence de multiples ganglions satellites et latéro-aortiques gauches. Le rein droit est normal. - 29 - Le cancer kystique du rein Observations Photo n°5: TDM avant injection du produit de contraste Photo n°6: TDM après injection du produit de contraste TDM abdominale montrant une masse rénale gauche polaire inférieure, hérérodense, avec réhaussement de la paroi et des cloisons après injection du produit de contraste. - 30 - Le cancer kystique du rein Observations Devant ces images échographiques et tomodensitométriques, le diagnostic d’une tumeur rénale kystique a été retenu, et une exploration chirurgicale était alors indispensable. Bilan d’extension : La radio pulmonaire : normale. L’échographie hépatique ainsi que la TDM ne montraient pas de foyer hépatique ou autre, ni d’épanchement péritonéal. Bilan biologique : Urée, créatinine, glycémie : normales. ECBU : stérile NFS : normale avec une Hb à 14,5 g/dl Traitement : La néphrolyse totale trouve un énorme kyste polaire inférieur et médiorénal, à paroi épaisse, détruisant pratiquement les 2/3 du rein. La ponction ramène un liquide hémorragique. Le patient a bénéficié alors d’une néphrectomie totale élargie. Etude histo-pathologique : L’étude anatomopathologique de la pièce de néphrectomie trouve un carcinome à cellules rénales kystisé de grade 3 de Furhman, stade T2NxMx selon OMS 2004. Le patient n’a non plus été revu après sa sortie du service. - 31 - Le cancer kystique du rein Observations OBSERVATION N° 3 DU DOSSIER : 29 127 / 06 Patient âgé de 64 ans, ancien boucher, marié et père de 05 enfants, habitant Rabat, hospitalisé le 18/12/06 au service d’Urologie « A » du Centre Hospitalier IBN SINA de RABAT pour prise en charge d’une douleur lombaire droite. Il s’agit d’un patient connu asthmatique sous corticoïdes inhalés, opéré en 1986 pour cataracte bilatérale, et qui présente depuis deux mois des lombalgies droites sans irradiation particulière, évoluant dans un contexte d’apyrexie, sans notion d’hématurie ou d’émission de calculs, sans signes irritatifs ou obstructifs associés. L’examen général trouve un patient en bon état général, apyrétique, aux conjonctives normo-colorées. L’examen urogénital découvre une sensibilité du flanc droit avec la perception d’une masse donnant le contact lombaire. Bilan : Abdomen sans préparation (ASP) : (photo n°7) L’ombre rénale droite est augmentée de taille, avec présence de calcifications en regard. Présence d’une lithiase urétérale droite. - 32 - Le cancer kystique du rein Observations Photo n°7 : ASP montrant les calcifications en regard du rein droit, et la lithiase urétérale droite. Echographie abdomino-pelvienne : (photo n°8) Montre que le rein droit est le siège d’un énorme kyste mesurant 70x70 mm multicloisonné avec dilatation pyélocalicielle (DPC). Le rein gauche est de taille et de morphologie normale. - 33 - Le cancer kystique du rein Observations Photo n°8 : échographie du rein droit montrant un kyste multicloisonné avec DPC. TDM abdomino-pelvienne sans et avec injection de produit de contraste (uroscanner) : (photo n°9, n°10 et n°11) Montre un rein droit augmenté de taille, siège d’une formation kystique impure contenant de fines calcifications, à paroi finement calcifiée mais à contenu demeurant homogène, sans aucune prise de contraste pariétale ou intra lésionnelle (BOSNIAK II). Ce processus présente un développement au niveau de la lèvre antérieure et mesure 87 mm de grand axe. - 34 - Le cancer kystique du rein Observations Par ailleurs, on note une distension des cavités pyélocalicielles droites en amont d’une lithiase de 6 mm de l’uretère lombaire. Le rein gauche est de taille normale, de contours réguliers, ne présentant pas d’anomalie focale. Photo n°9 : TDM abdominale en coupe frontale sans injection du produit de contraste, montrant une masse kystique rénale droite, siège de fines calcifications. - 35 - Le cancer kystique du rein Observations Photo n°10 : TDM en coupe coronale C- Photo n°11 : TDM en coupe coronale C+ TDM abdominale montrant une masse kystique rénale droite, siège de fines calcifications, avec absence de prise de contraste. - 36 - Le cancer kystique du rein Observations Devant cette symptomatologie ainsi que les données de l’imagerie médicale, une exploration chirurgicale est réalisée. Bilan d’extension : La radio pulmonaire : normale. L’échographie hépatique ainsi que la TDM ne montraient pas de foyer hépatique ou autre, ni d’épanchement péritonéal ou péri rénal, ni d’adénopathie satellite. bilan biologique : Urée, créatinine, glycémie : normales. ECBU : stérile Sérologie hydatique : négative NFS : normale avec une Hb à 13 ,7 g/dl Traitement : Le diagnostic de kyste hydatique du rein ne pouvant être éliminé, le rein est abordé par voie rétropéritonéale. L’examen anatomopathologique extemporané fût réalisé sur un fragment de 1cm prélevé après ouverture du fascia de Gérota. Résultat de l’extemporané : processus tumoral d’allure urothélial avec un aspect histologique en faveur d’un carcinome tubulo-papillaire de grade 2 de Fuhrman. - 37 - Le cancer kystique du rein Observations Ce résultat ambigu amène à la réalisation d’une néphro-urérérectomie élargie emportant une collerette vésicale. Compte rendu de l’examen anatomo-pathologique définitif : A la coupe de la pièce de néphrectomie, on a noté la présence d’une formation kystique de 5 cm de grand axe avec présence d’un nodule à proximité du kyste. L’examen microscopique était en faveur d’un carcinome tubulo-papillaire de grade 2 de Furhman avec nodules satellites, associé à un kyste rénal bénin. A ce jour le patient ne présente aucun signe clinique ou paraclinique de récidive locale ou de métastase. - 38 - Discussion - 39 - Le cancer kystique du rein Discussion I. EPIDEMIOLOGIE : A. FREQUENCE GLOBALE : Le cancer du rein représente environ 3% des cancers de l’adulte et est le troisième cancer de l’appareil urinaire par ordre de fréquence après le cancer de la vessie et de la prostate. Selon les séries, le cancer du rein se présente dans 5 à 17,5% des cas sous forme kystique.[1] [2] PFISTER et COLL [3] retrouvent une fréquence de 45% de cancer kystique dans leur série faite de 31 kystes atypiques du rein. L’association kyste-cancer dans le même rein est de présence exceptionnelle, vraisemblablement inférieure à 1 %.[4] Chez l’un de nos trois cas, l’examen anatomopathologique a retrouvé cette association, alors qu’il s’agissait d’une suspicion de cancer kystique à l’imagerie, ce qui montre les difficultés de diagnostic de ces formes de tumeurs. B. SELON L’AGE : La moyenne d’âge dans notre étude est de 62 ans ce qui correspond aux données de la littérature. [3] [5] C. SELON LE SEXE : Nos 3 patients sont des hommes, ce qui concorde avec les données de la littérature où le sexe masculin prédomine. [3] [5] - 40 - Le cancer kystique du rein Discussion II. PATHOGENIE Les rapports entre kyste rénal et cancer ont été étudiés par différents auteurs. GIBSON et HARTMAN ont étudié la pathogénie de ces cancers sous deux angles différents : [6] - GIBSON [7] distingue 4 types d’associations d’un cancer et d’un kyste dans un même rein : Type I : il existe deux lésions bien distinctes : un kyste séreux et un cancer solide, sans rapport mutuel mais situés dans le même rein. Il s’agit probablement d’une pure coïncidence. Ce type ne pose pas de vrais problèmes diagnostiques. Type II : il représente la forme kystique du cancer du rein. C’est le type le plus fréquent. Type III : le microcancer naît dans la paroi externe d’un kyste séreux. Type IV : le kyste naît au voisinage de la tumeur. Pour GIBSON la tumeur donnerait naissance au kyste par compression artérielle ou tubulaire. Les types III et IV sont exceptionnels (0,3 à 0,7% pour STEG) - 41 - Le cancer kystique du rein - HARTMAN Discussion [8] évoque 4 types de mécanismes à l’origine du développement kystique des cancers du rein : Développement intrinsèque de kystes multiloculaires. Cette forme serait retrouvée dans 40% du cancer kystique. Développement intrinsèque d’un kyste uniloculaire ou cystadénocarcinome. Cette forme représenterait 30% des cancers kystiques. Il existe souvent une nécrose centrale. Nécrobiose kystique du cancer. Elle est retrouvée dans 20% des cas. Le contenu kystique est nécrotico-hémorragique. La cancérisation secondaire de l’épithélium d’un kyste bénin serait beaucoup plus rare. - 42 - Le cancer kystique du rein Discussion III. SYMPTOMATOLOGIE CLINIQUE ET CIRCONSTANCES DE DECOUVERTE Les cancers kystiques du rein sont actuellement majoritairement de découverte fortuite, lors de la réalisation d’un examen d’imagerie, en particulier l’échographie et la TDM abdomino-pelvienne. [9] Lorsqu’ils sont symptomatiques, les signes cliniques qui les accompagnent rejoignent ceux des cancers solides et des kystes bénins symptomatiques par l’effet volume. [10] Ils peuvent être à l’origine de douleurs lombaires ou abdominales, ou alors de coliques néphrétiques par compression de la voie excrétrice. Une douleur aigue ou subaigue doit faire évoquer une rupture, une hémorragie ou une infection du kyste. La douleur lombaire a été le mode de révélation chez l’un de nos malades (observation n° 3). Parfois une masse abdominale peut se voir lorsque la tumeur est assez volumineuse, ce qui a été le cas chez 2 de nos patients. Ce symptôme peut être découvert par le patient lui-même (observation n° 2) et/ou objectivé à l’examen clinique (observation n°3). L’hématurie est un signe assez fréquent dans la pathologie tumorale du rein, et a été le mode de révélation chez l’un de nos malades (observation n°1). Selon certains auteurs, sa présence dans les cancers kystiques serait secondaire à une nécrose intra tumorale. [6] - 43 - Le cancer kystique du rein Discussion Quoiqu’il en soit, une hématurie ne doit jamais être attribuée à un kyste simple non compliqué. STEG [11] rapporte seulement 57 hématuries attribuables à un kyste simple sur 1342 malades étudiés. La majorité des auteurs s’accordent à réfuter tout lien de causalité entre l’hématurie et le kyste bénin du rein. La compression de la veine rénale par la tumeur kystique peut provoquer des œdèmes et une protéinurie, de même qu’une hypertension artérielle peut être la conséquence d’une ischémie rénale segmentaire par compression vasculaire.[12] D’autres circonstances de découverte ont été décrites, notamment une fièvre au long cours, l’altération de l’état général et l’infection urinaire, mais ces aspects demeurent beaucoup plus rares par rapport aux signes cliniques suscités. [6] [10] Néanmoins, ils peuvent survenir ultérieurement notamment l’altération de l’état général qui accompagne souvent les tumeurs quelque soit leur localisation, et l’infection urinaire qui peut se voir en cas de cancer rénal ce qui a été le cas chez l’un de nos patients (observation n°1). - 44 - Le cancer kystique du rein Discussion IV. IMAGERIE Certains examens complémentaires ont peu d’intérêt dans le diagnostic des tumeurs kystiques du rein, cependant lorsqu’ils sont réalisés ils peuvent constituer des éléments de présomption et orienter vers la présence d’un processus tumoral rénal sans en affirmer la nature. D’autres examens par contre, sont d’un grand apport en matière de kystes et tumeurs du rein et sont par conséquent indispensables pour le diagnostic, notamment la TDM, qui permet en outre d’orienter vers la prise en charge thérapeutique. A. ABDOMEN SANS PREPARATION : Le cliché d’abdomen sans préparation n’a aucun intérêt, il est normal dans la majorité des cas, il peut rarement montrer un syndrome de masse de tonalité hydrique ou des calcifications. Ces anomalies radiologiques n’ont aucune spécificité, ils traduisent la présence d’une masse kystique qui peut être aussi bien bénigne que maligne. [12] [13] Réalisé chez l’un de nos patients, cet examen a montré une augmentation de taille de l’ombre rénale tumorale, avec présence de calcifications en regard (observation n°3). - 45 - Le cancer kystique du rein Discussion B. UROGRAPHIE INTRAVEINEUSE (UIV): Comme dans tout cancer du rein, les formes kystiques peuvent se manifester à l’UIV par un syndrome tumoral. [14] Celui-ci est caractérisé par une déformation du contour rénal (bosselure, soufflure d’un pôle ou augmentation du volume de tout le rein) et/ou par une déformation des cavités excrétrices (le refoulement de plusieurs groupes caliciels, l’écrasement des cavités avec leur aplatissement et/ou amincissement, l’étirement d’une cavité par le développement de la tumeur donnant un aspect rectiligne d’un calice et/ou l’envahissement qui est un signe de certitude de malignité avec érosion, lacune ou amputation calicielle). Un rein muet (absence de néphrographie tubulaire et d’opacification des voies urinaires) peut également se voir [14], témoignant d’un envahissement massif avec destruction complète du parenchyme rénal par la tumeur. Le kyste rénal simple est caractérisé par l’absence de signes de malignité à l’UIV, avec la présence du signe de l’éperon (image donnée par le raccordement de la tumeur rénale avec le parenchyme normal). Ce signe peut parfois être absent dans certains cancers nécrosés où des clichés précoces de néphrographie montreraient une rétraction du parenchyme rénal au contact du syndrome tumoral, avec la présence d’une coque péritumorale épaisse et irrégulière. [6] Selon certains auteurs [15], l’urographie intraveineuse a peu d’intérêt dans le diagnostic des tumeurs kystiques du rein car l’aspect urographique ne permet pas de trancher. Son intérêt comme examen de dépistage est actuellement estompé par l’échographie. [6] [12] [13] Cependant quand elle est réalisée, il est nécessaire de rechercher les signes évocateurs de malignité. Ainsi, une irrégularité même minime de la paroi d’un calice signant l’envahissement de la voie excrétrice doit attirer l’attention et doit inciter à poursuivre les investigations radiologiques. [6] - 46 - Le cancer kystique du rein Discussion C. ARTERIOGRAPHIE SELECTIVE DE L’ARTERE RENALE : N’est pas un examen de première intention pour le diagnostic des tumeurs kystiques du rein. [6] [16] D’ailleurs, elle est beaucoup moins souvent utilisée qu'autrefois où elle était utile comme argument de malignité. En effet, l’artériographie visait à détecter une néo vascularisation qui est un signe évocateur de malignité. L’hypervascularisation anarchique devait être recherchée à la périphérie de la masse kystique en multipliant les incidences. Néanmoins, son absence ne pouvait éliminer une tumeur maligne notamment en cas de tumeur nécrosée ou hypo vascularisée [17], ces formes réalisaient des pièges diagnostiques redoutables avant l’ère de l’imagerie moderne. Certains auteurs avaient proposé l’injection d’angiotensine qui faciliterait la visualisation d’une vascularisation pathologique. [6] [18] Actuellement, l’artériographie n’est indiquée que si une cartographie vasculaire est jugée utile pour la chirurgie. [9] En effet, l’étude de la vascularisation du rein est nécessaire en préopératoire si une néphrectomie partielle est envisagée (tumeur maligne de petite taille ou sur rein unique ou s’il existe un doute sur la malignité ne pouvant être tranché qu’après examen extemporané). Elle permet aussi d’effectuer une embolisation préopératoire en cas de tumeurs à haut risque de saignement peropératoire. [19] - 47 - Le cancer kystique du rein Discussion D. ECHOGRAPHIE : Bien que moins sensible que la tomodensitométrie, l’échographie est souvent l’examen initial dans le dépistage des anomalies kystiques rénales, et trouve son intérêt dans la surveillance des modifications de volume et de structure d’une image kystique préexistante. Le kyste simple a une forme arrondie ou ovoïde, anéchogène avec renforcement acoustique postérieur, aux contours réguliers et bien définis. La paroi, très fine, est normalement indiscernable des structures environnantes, réalisant une simple interface avec le kyste. Lorsque tous ces critères sont présents, la fiabilité du diagnostic est proche de 100 %. [20] Lorsque certains de ces critères manquent, on ne peut pas affirmer le caractère bénin du kyste ; il est donc nécessaire de poursuivre l'exploration radiologique par tomodensitométrie. [12] Les cancers du rein d’aspect kystique donnent des images de structure mixte. On retrouvera typiquement une masse arrondie à paroi épaisse et irrégulière, renfermant des échos intrakystiques, des cloisons épaisses ou calcifiées, des calcifications péri et surtout intrakystiques, avec un renforcement postérieur insuffisant par rapport à la taille du kyste (puisque la tumeur maligne empêche le passage des échos). Cependant, ces critères échographiques peuvent plus ou moins manquer ou être insuffisamment détectés pour pouvoir établir une classification selon BOSNIAK et nécessitent la réalisation d’une TDM. De plus, plusieurs études - 48 - Le cancer kystique du rein Discussion ont montré que l’échographie a tendance à sous stadifier les lésions (24 sousstadifications soit 64,86% selon l’étude de LOOK et WALLERAND). [9] Autrement dit, le mérite de l’échographie est d’être un examen anodin qui, devant une image liquidienne atypique, incite à poursuivre les investigations radiologiques. Par contre, si l’échographie conclue à un kyste simple aucun examen complémentaire n’est nécessaire. Ce qui a été le cas pour nos trois patients, où l’échographie a montré dans tous les cas un aspect de kyste atypique, avec retentissement sur les cavités pyélocalicielles dans deux cas, ce qui a imposé le recours à d’autres explorations, en particulier la TDM. L’écho-doppler est un examen intéressant pour son caractère non invasif et sa sensibilité en matière d’envahissement de la veine rénale et de la veine cave inférieure, il doit être réalisé chaque fois qu’un envahissement veineux est suspecté cliniquement (présence d’une varicocèle par exemple) ou sur le scanner abdominal. [14] Selon certains auteurs, l’échographie-doppler serait devenue la méthode d’imagerie de première intention pour la plupart des affections rénales. [21] Elle est assez performante pour analyser les anomalies de la macrocirculation. [22] Cependant, elle se heurte toujours à certaines limitations portant en mode B, sur la visualisation de petites lésions dont la rétrodiffusion n’est pas différente du parenchyme sain, et en mode Doppler, sur l’étude des flux lents, avec des difficultés de mise en évidence des vaisseaux intra parenchymateux. [21] [23] - 49 - Le cancer kystique du rein Discussion Le recours à des produits de contraste ultrasonores (PCUS) pourrait combler certaines de ces lacunes, d’où l’intérêt de l’échographie de contraste. L’ECHOGRAPHIE DE CONTRASTE : L’utilisation des PCUS pourrait améliorer le contraste tissulaire et fournir des éléments diagnostiques fiables pour la différenciation des lésions, autorisant une relecture plus assurée et diminuant ainsi le caractère opérateur-dépendant associé à l’échographie. [23] Ce nouveau concept introduit en 1968, est devenu mature et plusieurs agents de contraste sont aujourd’hui disponibles en pratique clinique (LEVOVIST, SONOVUE…) [21] En effet, l’échographie de contraste s’est développée au cours de ces dernières années pour l’exploration cardiaque et hépatique [23], et l’efficacité ainsi que la tolérance des PCUS ont été considérablement améliorées avec l’introduction des microbulles stabilisées. Les bulles sont formées par l’agitation forte d’un millilitre d’air avec un soluté de perfusion habituel. Elles sont plus stables si on utilise des macromolécules, ou éventuellement le sang du patient. Une fois formées, elles sont injectées rapidement sous contrôle échographique. L’air ou un autre gaz, a une impédance acoustique très élevée comparativement au sang et aux tissus humains. Ainsi, la quantité du signal ultrasonore réfléchie par les tissus dont la microcirculation contiendra des microbulles sera notablement augmentée, elle pourrait dépasser jusqu’à 100 fois celle du sang normal. Ce signal recueilli est d’autant plus important que le diamètre des microbulles est grand et que leur concentration dans le réseau vasculaire est élevée. Cependant, il faudrait créer des bulles de taille - 50 - Le cancer kystique du rein Discussion suffisamment petites par rapport à celles d’un capillaire pour éviter le risque de dilacération du vaisseau sanguin si la taille de la bulle est proche de son diamètre, et aussi les protéger par une coque afin d’en prolonger la durée de vie. Deux autres mécanismes accroissent de façon majeure le signal recueilli : - L’oscillation des microbulles soumises au faisceau ultrasonore responsable de la production d’un signal non linéaire à l’origine de 2 techniques d’imagerie avec contraste : l’imagerie harmonique conventionnelle et l’imagerie harmonique par inversion de pulse. - La destruction des microbulles soumises à une pression acoustique élevée à l’origine d’un autre mode d’imagerie de contraste : l’émission acoustique stimulée. [24] L’échographie de contraste a trouvé ses applications dans l’appareil urinaire. Elle permet d’améliorer la détection des anomalies de la macro et microcirculation du rein, en particulier pour la visualisation des artères rénales, la caractérisation des sténoses vasculaires et la détection des infarctus. Elle pourrait être utile dans les traumatismes du rein, les infections rénales, la recherche du reflux vésico-urétéral ou le diagnostic de la torsion d’un testicule. Elle paraît prometteuse pour l’étude de la pathologie tumorale surtout l’évaluation des pseudotumeurs du rein et la caractérisation des kystes atypiques. [22] [25] - 51 - Le cancer kystique du rein Discussion En effet, une étude récente a montré que l’échographie de contraste est un examen approprié pour l’évaluation des masses kystiques du rein en se basant sur la classification de BOSNIAK. [26] Elle permet de compléter la TDM dans la mesure où elle donne des informations supplémentaires sur la perfusion des cloisons du kyste et sur la vascularisation du cancer kystique du rein. [27] Cependant elle pourrait mieux visualiser le nombre de septa, l’épaisseur des cloisons et / ou de la paroi, la composante solide et le rehaussement par rapport au scanner, avec pour résultat l’augmentation du stade et la modification de la stratégie du traitement. [28] D. TOMODENSITOMETRIE : C’est actuellement l’examen de référence pour les kystes et les tumeurs du rein. BOSNIAK a établi une classification tomodensitométrique des masses kystiques du rein en 1986 révisée en 1993 (Tableau 1) [9], et qui a pour objectif de classer selon des critères morphologiques, les kystes atypiques en fonction de leur risque évolutif. Les éléments radiologiques pris en compte sont : - L’aspect homogène du kyste - La présence de cloisonnements intra kystiques plus ou moins épais - L’épaisseur et le rehaussement après injection de produit de contraste de La paroi du kyste - La présence de calcifications. - 52 - Le cancer kystique du rein Discussion Le type I de BOSNIAK (figure 1) correspond à un kyste simple non compliqué réunissant tous les critères radiologiques de bénignité avec une fiabilité proche de 100 %, ce type ne nécessite pas de surveillance. [29] Le type II de BOSNIAK (figure 1) regroupe les kystes présentant quelques atypies minimes, mais pouvant être considérés comme bénignes. [12] - 53 - Le cancer kystique du rein Discussion Il existe de fines cloisons (≤2) et la paroi est invisible. Les calcifications pariétales ou septales sont fines, il n’y a pas de rehaussement après injection de produit de contraste ou bien il existe un rehaussement modéré d’une cloison fine [9] évoquant le plus souvent un kyste bénin remanié (hémorragie intrakystique ancienne par exemple). Une lésion classée BOSNIAK II ne nécessite également pas de surveillance. [29] Le type IIF de BOSNIAK (figure 1) englobe les kystes suspects nécessitant une surveillance. [29] Il se caractérise par la présence de fines cloisons (> 3), avec une paroi à la limite de la visibilité (≤1mm). Il peut y avoir une paroi épaisse ou une cloison épaisse ou nodulaire mais sans aucun rehaussement. [30] Il existe d’épaisses calcifications. Cette lésion est spontanément hyperdense (50 à 90 UH) sous forme d’un petit kyste < à 3 cm, sous capsulaire, homogène, aux limites régulières non modifié après injection de produit de contraste. Sont excluses de ce groupe les tumeurs > ou = à 4 cm et celles de siège intraparenchymateux. On note enfin l’absence de rehaussement ou un rehaussement modéré des cloisons fines ou des parois. [9] Ces tumeurs peuvent être bénignes, mais elles nécessitent une surveillance notamment tomodensitométrique : la stabilité de ces lésions affirme leur bénignité et leur progression indique la malignité. [31] - 54 - Le cancer kystique du rein Discussion Le type III de BOSNIAK (figure 1) correspond aux kystes suspects de malignité et justifient une exploration chirurgicale. [29] Ces lésions présentent des calcifications irrégulières, ainsi qu'une paroi ou des cloisons épaisses, irrégulières, et/ou prenant le contraste. Le type IV de BOSNIAK (figure 1) est typiquement un cancer kystique, avec une spécificité à 100%. [32] Ces kystes contiennent une composante tissulaire vascularisée visible sous la forme d'une paroi épaisse et irrégulière, des végétations, avec un net rehaussement après injection de produit de contraste. Cette lésion correspond le plus souvent à un carcinome à cellules claires massivement nécrosé, l’indication d’une exploration chirurgicale est donc formelle. [29] - 55 - Le cancer kystique du rein Discussion BOSNIAK I : kyste simple B IIF: 3 fines cloisons BOSNIAK II : fines séptations B IIF: minime prise de contraste B IIF : cloisons calcifiées BOSNIAK III : multiples cloisons, paroi épaisse. B IV : nodule prenant le contraste. B IV : épaississement prenant le contraste. Figure 1: Aspects tomodensitométriques des masses kystiques du rein. [33] - 56 - Le cancer kystique du rein Discussion La TDM permet également de détecter d’autres anomalies renforçant l’hypothèse néoplasique telles qu’une thrombose de la veine rénale, adénopathies hilaires ou locorégionales (ce qui a été le cas chez l’un de nos patients : thrombose de la portion terminale de la veine rénale + multiples ganglions satellites et latéro-aortiques), un envahissement des structures voisines ou bien des métastases hépatiques, osseuses, surrénaliennes visibles sur les mêmes plans de coupes. Dans l’étude de PFISTER [3] de 31 kystes atypiques, cet examen a fait suspecter fortement un diagnostic de malignité dans 18 cas justifiant une lombotomie avec néphrectomie élargie d’emblée, il a permis une confirmation du diagnostic de cancer kystique du rein dans 6 cas, doute diagnostique dans 5 cas et 2 erreurs (kystes bénins compliqués). Dans notre série, la TDM a été faite chez nos 3 patients, et elle n’a permis de conclure à un cancer kystique que dans un cas (kyste classé BOSNIAK III associé à une thrombose veineuse rénale et des adénopathies). Paradoxalement, elle a été moins sensible que l’échographie dans un cas où elle a montré une lésion de densité hydrique et homogène sans composante charnue, visualisée à l’échographie, sans paroi visible ni de rehaussement après injection de produit de contraste correspondant à un kyste simple du rein (BOSNIAK I). Dans un cas, elle a permis de classer la tumeur dans la IIème catégorie de la classification de BOSNIAK, mais elle n’a pas pu déceler un nodule tumoral associé. En effet, il s’agissait à l’examen anatomopathologique d’un kyste rénal bénin associé à un cancer solide. - 57 - Le cancer kystique du rein Discussion Ceci montre les réels problèmes que pose cette pathologie, car même si la TDM constitue le « gold standard » dans l’interprétation des tumeurs du haut appareil, elle peut être source d’erreur en matière de cancer kystique. Dans ce cas, l’IRM, l’angiographie et la ponction du kyste avec analyse cytologique et biochimique constitueraient des moyens d’affiner le diagnostic. [34] Dans notre étude, devant la suspicion du diagnostic, nous avons procédé directement à l’exploration chirurgicale après bilan d’extension lésionnel. En effet, il existe certains pièges scannographiques qui peuvent poser parfois des problèmes d’interprétation : - certaines lésions de moins de 10 mm de diamètre dont la densité est surestimée par les effets de volume partiel avec le parenchyme rénal. Ces micronodules peuvent être considérés par argument de fréquence comme des lésions kystiques bénignes. - les effets de volume partiel au niveau de la base d’implantation du kyste peuvent donner un aspect faussement épaissi de sa paroi. - une coupe axiale passant à proximité de la zone d’implantation du kyste, correspondant à l’extrémité de l’éperon parenchymateux peut également simuler une paroi épaisse. - un défaut d’étalonnage de la machine peut modifier la densité apparente du kyste qui doit être comparée à une densité de référence (contenu du bassinet ou de la vessie par exemple). [12] [13] D’où l’intérêt de réaliser des coupes fines (3 ou 5 cm), d’utiliser un filtre adapté à l’étude de la densité, et de réaliser - 58 - Le cancer kystique du rein Discussion systématiquement des coupes avant injection du produit de contraste, limitant ainsi la formation de ces images. Toutefois, leur reconnaissance nécessite le respect des règles d’interprétation notamment la mesure de la densité sur la coupe passant par la plus grand diamètre du kyste, avant et après l’injection du produit de contraste, l’analyse attentive des coupes adjacentes facilite la reconnaissance de la plupart de ces images pièges. [13] L’angioscanner peut également être utile en matière de kystes malins en montrant une atypie vasculaire au niveau du plan de raccordement de la tumeur avec le parenchyme, ou un rehaussement hétérogène des tissus tumoraux, ou encore une hyperdensité des plages de nécrose intra tumorale. Au total, les données de la littérature affirment que la TDM offre des avantages certains avec une grande fiabilité diagnostique (ce qui n’a pas été toujours le cas dans notre courte série), elle permet de réunir les signes évocateurs de malignité et constitue un examen systématique devant toute image kystique atypique à l’échographie. E. IMAGERIE PAR RESONNANCE MAGNETIQUE : C’est un examen d’imagerie important dans l'évaluation des masses kystiques du rein [35], car même si son apport par rapport à la TDM n’est pas très supérieur, il permet néanmoins de mieux analyser le contenu des kystes atypiques et est actuellement recommandé en 2ème intention. [9] Un kyste rénal simple, comme toute masse liquidienne, a des signaux T1 et T2 longs. Une faible intensité du signal intrakystique est recueillie en séquences pondérées en T1, ceci semblerait être un critère fiable de lésion bénigne. [6] [14] - 59 - Le cancer kystique du rein Discussion En séquences pondérées en T2, le kyste simple présente un hypersignal intense et homogène. Sa paroi n’est pas visible. L’injection de chélate de gadolinium permet d’étudier la distribution intra vasculaire et extra vasculaire interstitielle du produit de contraste dans la tumeur et dans le rein normal, renseignant ainsi sur le rehaussement de la tumeur et des vaisseaux. Si un rehaussement tissulaire est confirmé le kyste est considéré comme suspect. [9] Bien que la classification de BOSNIAK des kystes rénaux fût conçue en se basant uniquement sur les images tomodensitométriques, certains auteurs considèrent qu’elle peut être utilisée avec l’IRM pour l’évaluation de la plupart des masses kystiques du rein. [36] En effet, dans la majorité des cas, les renseignements apportés par l’IRM sont similaires à ceux de la TDM en ce qui concerne ces lésions. Néanmoins, l’IRM peut parfois détecter plus de cloisons, ou peut montrer un épaississement de la paroi et /ou des septa, ou encore mettre en évidence un rehaussement non diagnostiqués par la TDM, ce qui peut amener à une reclassification des kystes. [30] [36] Ceci peut être sans effet dans la majorité des cas, cependant il faut être prudent lors de l’interprétation des images IRM des kystes atypiques du rein de la catégorie IIF et III, dits « borderline », lorsqu’il n’y a pas de corrélation avec la TDM. [36] Un kyste classé IIF au scanner peut apparaître dans la catégorie III à l’IRM ce qui ne sera pas sans conséquences sur la prise en charge : le premier requière seulement une surveillance et le second nécessite une exploration chirurgicale. Des études ultérieures seraient nécessaires pour définir une attitude adéquate face à ces cas. [30] - 60 - Le cancer kystique du rein Discussion V. PONCTION-ASPIRATION ET BIOPSIE PERCUTANEE A. TECHNIQUE ET COMPLICATIONS : La ponction biopsique consiste à prélever un fragment du kyste rénal (paroi, cloison, végétation) pour analyse cytohistologique. Une autre voie diagnostique consiste en l’analyse de la composition du liquide intrakystique. Le choix de l’une ou de l’autre technique dépend de l’importance de la composante tissulaire de la lésion. Le prélèvement peut être guidé par une échographie ou par une TDM selon l’expérience du médecin, et effectué sous anesthésie locale après vérification de l’hémostase. Une hospitalisation ambulatoire est le plus souvent requise. Les risques sont principalement hémorragiques (hématurie macroscopique dans 9 % des cas, hématome sous capsulaire rénal dans 6 % des cas). [37] Un pneumothorax peut également être rencontré, essentiellement après ponction d’une tumeur située au pôle supérieur du rein. La contamination du trajet de ponction par des cellules malignes reste très discutée et estimée à moins de 0,001 %. [38] Les cas rapportés ne concernent que les tumeurs solides : [39] [40] [41] [42] [43] [44] Aucun cas de contamination du trajet après ponction d’une tumeur kystique du rein n’a été rapporté. [37] - 61 - Le cancer kystique du rein Discussion B. INDICATIONS Il existe des situations où l’évaluation histologique s’avère nécessaire avant la décision thérapeutique. C’est le cas des kystes d’allure intermédiaire (IIF et III) afin d’éviter d’une part une chirurgie parfois inutile, et d’autre part de laisser évoluer une lésion potentiellement maligne (sensibilité de 71 %, et valeur prédictive positive de 91 % selon LANG et AL [45]). Une étude a été réalisée par des Urologues et des Radiologues Américains portant sur le rôle de la biopsie scanno – guidée avant toute chirurgie, dans laquelle une biopsie percutanée a été réalisée pour 28 kystes classés BOSNIAK III. Parmi ces masses biopsiées, 17 (60.7%) étaient malignes et 11 (39,3%) étaient bénignes (six kystes hémorragiques, trois kystes inflammatoires, un adénome métanéphrique et un oncocytome kystique). La bénignité de ces lésions a été prouvée par leur stabilité sur une durée de 1 à 2 ans. Par conséquent, la biopsie guidée leur a permis de prévenir une chirurgie inutile dans 39 % des cas. Les auteurs concluent ainsi, que les masses kystiques classées BOSNIAK III ne nécessitent pas directement une exploration chirurgicale, et que le caractère bénin ou malin de ces lésions peut être affirmé par la biopsie scanno-guidée. [46] Les tumeurs kystiques de type BOSNIAK I et IV ne sont pas candidates à une ponction : les premières sont rarement malignes (0 à 13 % des cas) et les secondes sont malignes dans 90 à 100 % des cas. Cependant la présence d’une tumeur kystique, quelque soit son type BOSNIAK, sur rein unique anatomique ou fonctionnel peut justifier le prélèvement. [14] - 62 - Le cancer kystique du rein Discussion Il est possible bien entendu de s’aider du contexte clinique du patient (antécédents personnels / familiaux, syndrome paranéoplasique éventuel), de l’évolution des critères radiologiques de la tumeur, de l’IRM, dans l’hypothèse rare de découvrir une anomalie suspecte que le bilan échographique ou tomodensitométrique n’aurait pas détecté. La cytoponction ou la biopsie percutanée de la tumeur peuvent constituer dans ce cas des moyens d’affiner le diagnostic. C. RESULTATS : Les faux négatifs sont essentiellement représentés par les difficultés de localisation d’une cible tumorale de petite dimension. En effet, on peut observer deux types de kystes cancéreux : les grosses tumeurs nécrosées, et les îlots tumoraux accolés au kyste rendant la ponction de la masse tumorale aléatoire. Des auteurs ont conclu que la ponction biopsique était utile pour la prise en charge des kystes atypiques IIF et III sans pour autant être proposée de façon systématique. [45] En ce qui concerne l’analyse du liquide du kyste, les éléments à prendre en considération sont : L’aspect du liquide. Sa composition chimique. La cytologie. L’image obtenue par kystographie. - 63 - Le cancer kystique du rein Discussion Un liquide de ponction hémorragique est suspect de malignité, en effet lorsque la cytologie est positive, le liquide est hémorragique 4 fois sur 5 [37], par contre un liquide de ponction clair ne permet pas d’éliminer une lésion maligne, KLEIST [47] présente 17 cancers kystiques ponctionnés avec dans 8 cas un liquide clair rassurant. L’étude de la composition chimique du liquide de ponction doit être orientée vers le dosage du taux de lipides et de cholestérol, en effet des taux élevés seraient évocateurs de malignité. D’autres études se basent sur le dosage de protéines ou de déshydrogénase sans pouvoir conclure à une quelconque spécificité de ces composants pour le diagnostic de tumeur maligne. [47] [48] Des espoirs semblent fondés sur la recherche de cytokines (IL-1 et IL-6) et de marqueurs tumoraux. [37] En effet, une étude réalisée en France et reconnue par le ministère de santé français a démontré que la mesure de la protéine CA-9 dans le surnageant d’une cytoponction à l’aiguille fine peut être utilisée pour différencier entre kystes malins et bénins du rein. [49] La cytologie n’a de valeur que si elle est positive avec une sensibilité de 22 % et une valeur prédictive négative de 46,7 % selon BIELSA GALI, une cytologie négative ou non spécifique ne peut en aucun cas éliminer l'existence d'un carcinome. [50] [51] Enfin, la kystographie ne donne un élément d'orientation qu'en présence de végétations endo-kystiques [52], elle peut montrer en cas de kyste malin une paroi irrégulière. [6] - 64 - Le cancer kystique du rein Discussion VI. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL A. LE KYSTE BENIN REMANIE : Les remaniements d’un kyste rénal (séquelles d’infection ou d’hémorragie, remaniements inflammatoires) posent le problème de diagnostic différentiel avec une tumeur kystique du rein. [12] Un kyste bénin remanié ne réunit pas tous les critères radiologiques du kyste simple (contenu « hydrique » parfaitement homogène, limites régulières sans paroi décelable, ni cloison, sans calcification et non modifiée après injection IV de produit de contraste), on parle alors de kyste atypique. Tous les degrés d’atypie peuvent exister depuis le kyste contenant seulement une fine cloison et sûrement bénin, jusqu’à la masse kystique manifestement tumorale comportant une portion charnue vascularisée. [13] B. L’ABCES DU REIN : [12] [13] L’abcès du rein peut être confondu avec une tumeur kystique ou encore une tumeur nécrosée surtout s’il présente une néo vascularisation périphérique. Cliniquement il survient habituellement dans un contexte évocateur, et il existe souvent des signes de néphrite ou de périnéphrite associés. Certains signes radiologiques sont en faveur de l’abcès (Figure 2), notamment la présence d’un sédiment ou de bulles de gaz qui sont caractéristiques d’une collection infectée. - 65 - Le cancer kystique du rein Discussion Néanmoins, un cancer rénal peut donner un tableau infectieux, c’est le cas du cancer secondairement infecté. La ponction suivie d’un drainage percutané permet le diagnostic de l’abcès. Sinon, lorsque le drainage n’est pas indiqué (petit abcès et germe identifié), le diagnostic est confirmé par la guérison sous traitement antibiotique. Figure 2: Aspect tomodensitométrique d’un abcès rénal [53] - 66 - Le cancer kystique du rein Discussion C. LE KYSTE HYDATIQUE DU REIN: Le kyste hydatique ou l’hydatidose est une parasitose bénigne liée au développement de la forme larvaire d’Echinococcus granulosus. Elle sévit principalement dans les pays d’élevage du mouton qui est l’hôte intermédiaire privilégié, l’homme étant un hôte intermédiaire accidentel. L’hôte définitif est représenté par les canidés. Le kyste hydatique rénal est à évoquer devant toute masse kystique du rein. Il est néanmoins rare même dans les pays à forte endémie, et ne représente que 2 à 4 % de l’ensemble des localisations de la maladie. Les deux principales localisations sont hépatiques (50 à 75 %) et pulmonaires (15 à 40 %), liées à la pénétration du parasite à travers le système porte. [54] La classification de GHARBI regroupe les différents aspects échographiques du kyste hydatique. Cependant, il est parfois impossible de distinguer un kyste hydatique de type IV (formation pseudo tumorale, d’échostructure hétérogène, à contours irréguliers) ou V (formation à parois hyperéchogènes avec cône d’ombre postérieur, correspondant au kyste hydatique calcifié) de Gharbi, d’une tumeur kystique. La TDM est l’examen de référence car elle permet une meilleure analyse du contenu du kyste. [12] Elle montre une masse hyperdense et multicloisonnée (évoquant des vésicules filles) entourée d’un halo périphérique hypodense. La membrane ne se rehausse pas après injection de produit de contraste contrairement au cancer kystique du rein. Le rehaussement de la membrane ou des septa ne s’observe qu’en cas de communication avec la voie excrétrice et ce de façon tardive. [55] - 67 - Le cancer kystique du rein Discussion La découverte d’autres localisations de l’hydatidose en TDM et d’une hyperéosinophilie sérique aident au diagnostic. La sérologie hydatique n’est pas toujours positive. D. LES PSEUDOTUMEURS INFLAMMATOIRES DU REIN : Les pseudotumeurs inflammatoires sont des tumeurs bénignes rares, de pathogénie inconnue, et qui peuvent être à l’origine de signes locaux ou généraux. [56] Ces pseudotumeurs peuvent se développer au dépens de plusieurs sites anatomiques, mais restent exceptionnelles au niveau du rein. [57] Leur diagnostic préopératoire est difficile malgré les progrès de l’imagerie médicale.[58] Elles posent plus particulièrement le problème de diagnostic différentiel car leur aspect radiologique est le plus souvent trompeur. En effet, l’imagerie peut parfois visualiser un aspect de kyste atypique (masse kystique à composante tissulaire, paroi épaisse, végétations endokystiques, rehaussement de la paroi par le produit de contraste), et fait craindre un cancer kystique du rein, ce qui implique une exploration chirurgicale. Seule une corrélation radiohistopathologique permet de poser le diagnostic. [58] - 68 - Le cancer kystique du rein Discussion E.. LE NEPHROME KYSTIQUE MULTILOCULAIRE : (Figure 3) Le néphrome kystique multiloculaire (NKML) est une tumeur bénigne qui survient chez le petit garçon avant l’âge de 5 ans [12] [51] et à prédominance féminine vers l’âge de 40 – 60 ans. [29] [59] A l’imagerie elle forme un kyste multiloculaire de grade III de la classification de BOSNIAK. Cette tumeur doit être différenciée du carcinome kystique multiloculaire à cellules claires et du carcinome à cellules rénales partiellement kystisé. [51] [60] Aucun examen d’imagerie n’est assez fiable pour distinguer avec certitude une tumeur bénigne de type NKML de la forme maligne kystique multiloculaire. La présence de fines calcifications le long des cloisons interloculaires et la protrusion intrapyélique de la tumeur seraient des éléments évocateurs du NKML. L’utilité de l’échographie de contraste est en cours d’évaluation. Le diagnostic final n’est qu’histologique. [59] Il n’est pas exclu que le carcinome kystique multiloculaire à cellules claires provienne de la cancérisation d’un NKML préexistant. Ce dernier, circonscrit par une épaisse capsule fibreuse, est composé de multiples logettes kystiques ne communiquant pas entre elles, ni avec le bassinet, séparées par des septa faites de tissu fibreux plus ou moins myxoïde ou collagène, et tapissés d’un épithélium de cellules cubiques ou aplaties jamais retrouvé dans un carcinome kystique multiloculaire. [51] [60] Celui-ci renferme des logettes à contenu liquidien, hémorragique ou nécrotique, et les cloisons sont fines et bordées de cellules claires aux caractéristiques morphologiques du carcinome à cellules rénales de grade 1 de Fuhrman. [29] [51] Cette tumeur maligne étant de bon pronostic, la tumorectomie avec exérèse en zone saine est considérée comme curatrice selon certains auteurs.[60] - 69 - Le cancer kystique du rein Discussion Aspect macroscopique Aspect tomodensitométrique Figure 3 : Néphrome kystique ou kyste multiloculaire. Les cloisons fines ou un peu plus épaisses ne comportent aucun matériel tumoral. [60] - 70 - Le cancer kystique du rein Discussion F. LE KYSTE SIMPLE DU REIN : Les kystes rénaux simples sont les plus fréquents et les moins graves de toutes les affections kystiques du rein. Leur fréquence augmente avec l’âge et peut atteindre plus de 30% au delà de 70 ans. [61] Le plus souvent ils sont asymptomatiques, et leur découverte dans la majorité des cas est fortuite lors de la réalisation d’une échographie ou d’un scanner abdominal. [12] Toutefois, les patients peuvent parfois développer une hématurie ou des douleurs lombaires faisant craindre un cancer. [61] Un kyste simple (Figure 4) correspond au type I de la classification tomodensitométrique de BOSNIAK : sa densité est hydrique (-10 à 20 UH), son aspect est homogène, ses limites sont régulières sans paroi visible avec absence de rehaussement. [1] Occasionnellement, il peut atteindre une grande taille et simuler une masse tumorale. [61] Les auteurs rapportent un cas de kyste rénal survenant chez un patient de 48 ans. Celui-ci était porteur d’un volumineux kyste au niveau du rein droit. Une ponction fût réalisée ramenant 800 ml de liquide jaunâtre avec des taux de protéines et de LDH élevés, la cytologie n’a pas trouvé de cellules malignes. Trois mois après l’aspiration, le patient a présenté une douleur insupportable du flanc droit pour laquelle une néphrectomie fût réalisée. L’analyse histologique de la pièce opératoire a trouvé un aspect de carcinome à cellules rénales. Ainsi devant un kyste simple, il ne faut pas toujours exclure la possibilité d’une tumeur maligne même si c’est extrêmement rare. [62] - 71 - Le cancer kystique du rein Discussion Figure 4 : Aspect tomodensitométrique d’un kyste rénal simple [53] - 72 - Le cancer kystique du rein Discussion VII. DIAGNOSTIC PER-OPERATOIRE A. LES ASPECTS MACROSCOPIQUES : Certains critères macroscopiques per opératoires sont très évocateurs de malignité, permettant ainsi d’indiquer une analyse anatomopathologique en extemporané. Ces critères sont : L’aspect tissulaire du kyste. La richesse de la vascularisation péri kystique et en particulier de la vascularisation veineuse. L’épaisseur et l’irrégularité de la paroi du kyste. La présence de calcifications. Un liquide intra kystique sanglant, brunâtre ou noirâtre. La présence de bourgeons ou de végétations intra kystiques. Dans une étude assez récente, les constatations per opératoires ont permis le diagnostic de cancer dans 85,7%. [9] Dans notre étude, l’analyse per opératoire a orienté vers la néphrectomie totale élargie dans deux cas, et dans un cas le doute per opératoire a amené à réaliser une étude histologique en extemporané. - 73 - Le cancer kystique du rein Discussion B. L’EXAMEN EXTEMPORANE : C’est un examen anatomopathologique réalisé en per opératoire et qui consiste à congeler un fragment tumoral dans un cryostat afin de réaliser des coupes immédiatement examinables au microscope. Le rôle de cet examen est de conditionner l’attitude thérapeutique immédiate au cours de la même anesthésie en guidant le geste opératoire. Concernant le cancer du rein, on a le plus souvent recours à l’examen extemporané, non pour établir le diagnostic de malignité, mais pour différencier une tumeur strictement intra rénale d’une tumeur extra capsulaire et ainsi adapter selon ce résultat le geste chirurgical. [37] Pour des lésions peu volumineuses, sa sensibilité est proche de 90% et sa spécificité de 100% dans la distinction des tumeurs solides de stade T3 et des tumeurs T1 ou T2. [63] L’examen extemporané permet aussi d’évaluer la qualité des marges chirurgicales lors d’une néphrectomie partielle ou d’une tumorectomie. Le problème est plus complexe pour les tumeurs kystiques. L’examen extemporané a en effet ici pour objectif de déterminer la nature maligne ou non de la tumeur, avant même la détermination du stade pathologique. Cependant, de nombreuses études ont montré qu’il pouvait exister une discordance entre l’analyse histologique définitive et l’examen extemporané, celui-ci peut parfois conclure à un résultat faussement négatif. C’était le cas dans une étude portant sur 37 patients ayant un kyste atypique du rein, dont 7 seulement ont bénéficié d’une analyse anatomopathologique en extemporané, aucune n’a permis d’établir le caractère malin des kystes, alors que dans ces 7 - 74 - Le cancer kystique du rein Discussion cas, l’analyse histologique définitive a retrouvé la présence d’îlots cancéreux accolés au kyste. [9] Dans une autre série, qui est ancienne et ne portant que sur 4 cas, les auteurs rapportent avoir réalisé un examen histologique extemporané chez des patients ayant une tumeur rénale kystique d’aspect macroscopique douteux. Il a conclu dans 3 cas à un cancer et dans un cas à un kyste multiloculaire qui s’est avéré être malin après le résultat histologique définitif. [6] Ceci peut être expliqué par deux hypothèses : - L’analyse extemporanée peut être réalisée sur des prélèvements pratiqués en dehors d’une zone tumorale, en particulier lorsqu’il s’agit d’un micro foyer tumoral développé dans la paroi du kyste. - L’analyse histologique peut être gênée par la nécrose plus ou moins hémorragique qui accompagne certaines lésions. Ainsi, pour être fiable, l’examen extemporané ne doit pas être réalisé sur une biopsie à l’aveugle, mais doit intéresser la totalité de la paroi kystique d’une pièce de néphrectomie partielle. [6] Les équipes demandant cette analyse en extemporané ont obtenu de bons résultats : leur série se composait de 205 malades opérés pour un kyste du rein. Après réalisation de l’imagerie (UIV et /ou échographie rénale, voire un examen tomodensitométrique dans 80% des cas), il persistait un doute préopératoire dans 31 cas quand au caractère bénin de ces kystes. La certitude histologique - 75 - Le cancer kystique du rein Discussion reposait sur l'analyse en extemporané de la totalité de la paroi kystique, voire de la pièce de néphrectomie partielle avec une fréquence du cancer de 45%. Les auteurs préconisent par conséquent dans le diagnostic des kystes atypiques, un examen tomodensitométrique systématique avec au moindre doute l'exploration chirurgicale et en particulier la néphrectomie partielle avec examen extemporané. [3] Dans notre étude, l’analyse anatomopathologique extemporanée a été réalisée dans un cas, portant sur un fragment tumoral de 1 cm et le résultat concordait avec le contrôle histologique après néphrectomie, sauf qu’il s’agissait ici d’un kyste rénal bénin associé à une tumeur solide de découverte histologique. - 76 - Le cancer kystique du rein Discussion VIII.BILAN D’EXTENSION : Il est le même que celui du cancer du rein. Ce bilan se charge de l’étude de l’extension locorégionale, veineuse, ganglionnaire et également la recherche de localisation métastatique à distance. Les organes les plus souvent atteints sont le poumon, le foie, le squelette, le rein controlatéral et le cerveau. D’autres localisations sont beaucoup plus rares (estomac, thyroïde, vagin...). A. ECHOGRAPHIE : Elle fournit des renseignements précieux sur l’extension extra capsulaire, sur l’envahissement des viscères (foie, rate, surrénale) et des plans voisins (plans profonds, péritoine), elle met en évidence des adénopathies du hile ou du pédicule, voire de la chaine lomboaortique, ainsi que l’envahissement veineux. B. TDM : Elle renseigne sur l’extension à la graisse péri rénale, à la veine rénale et à la veine cave, aux ganglions régionaux et aux organes de voisinage. C. CAVOGRAPHIE : Pratiquement plus utilisée depuis l’avènement de l’échographie et de la TDM. Elle permettait le diagnostic d’extension veineuse. Les autres explorations à la recherche de métastases à distance seront pratiquées en fonction des signes d’appel (radio pulmonaire, radios du squelette…). - 77 - Le cancer kystique du rein Discussion IX. TRAITEMENT : Le traitement curatif du cancer kystique du rein repose sur la chirurgie après avoir affirmé le diagnostic, précisé son extension locorégionale, veineuse et métastatique grâce à des explorations préopératoires précises. Les autres thérapeutiques (radiothérapie, chimiothérapie, immunothérapie, hormonothérapie) n’ont pas fait preuve de leur efficacité. Chirurgie partielle ou radicale ? Le traitement du cancer kystique du rein est la néphrectomie totale élargie emportant la graisse péri rénale, le fascia de Gérota et la surrénale après ligature première du pédicule rénal. Le curage ganglionnaire hilaire, voire régional permettant une lymphadénectomie para-aortique et para-cave, reste sujet à discussion. La voie sous-costale permet un abord premier des vaisseaux avant la mobilisation du rein tumoral afin d’éviter la dissémination métastatique péropératoire. C’est une incision qui suit le rebord costal à environ deux travers de doigt sous celui-ci. Sa mortalité et sa morbidité restent faibles. La lombotomie est une voie simple et rapide, elle impose une dissection de la loge rénale avant de pouvoir contrôler le pédicule vasculaire. Elle est indiquée pour des tumeurs de petite taille et dont l’absence d’extension vers la veine cave inférieure est certaine. Cette voie d’abord a l’avantage d’être moins traumatique car respecte la cavité péritonéale, ce qui permet une reprise du transit plus rapide en postopératoire. Sa morbidité reste faible. - 78 - Le cancer kystique du rein Discussion Dans notre étude, les trois malades sont abordés par lombotomie à cause de l’absence de certitude diagnostique. La discussion d’une néphrectomie partielle est de règle chez les patients ayant un rein unique anatomique ou fonctionnel, une insuffisance rénale chronique et en cas de tumeur rénale bilatérale. Certains auteurs [9] préconisent d’emblée la néphrectomie partielle du fait du caractère peu agressif, démontré dans la littérature, des cancers kystiques. Dans cette étude, tous les patients ont bénéficié de ce geste conservateur, et aucun d’eux n’a présenté de récidive locale sur un recul d’environ 4 ans. La néphrectomie partielle peut se concevoir comme un premier temps opératoire pouvant permettre une analyse large du parenchyme rénal en extemporané limitant le risque de faux négatifs, l’analyse portant alors sur l’ensemble du kyste et non pas sur des fragments biopsiques. La suite de l’intervention sera modulée par les résultats de cet examen extemporané. La simple énucléation de la lésion est rendue possible par l’existence d’un plan de clivage entre le tissu rénal et le kyste, elle est la plus simple mais la moins sûre. En effet, l’énucléation du kyste peut être incomplète laissant en place le « pied tumoral », comme l’a démontré l’étude de MARSHALL [64] qui montre bien que dans 43% des cas, il existe un résidu tumoral sur la pièce de néphrectomie élargie lorsqu’une simple énucléation de la lésion a été pratiquée. - 79 - Le cancer kystique du rein Discussion Classiquement l’attitude était, devant l’exploration chirurgicale d’un kyste suspect, de réaliser une néphrectomie partielle avec examen anatomopathologique extemporané permettant l’analyse de la totalité de la tumeur kystique. [34] Quand l’examen extemporané était positif, la néphrectomie totale élargie était alors indiquée. Cette attitude radicale était modulée en présence d’un rein unique, d’une tumeur bilatérale ou d’un rein controlatéral pathologique. Si l’examen extemporané était négatif, la question était de savoir s’il s’agissait d’un vrai ou faux négatif ? L’aspect macroscopique de la lésion kystique prenait alors toute son importance, l’aspect nécrotico-hémorragique aseptique du contenu du kyste sur la pièce de néphrectomie partielle était hautement suspect de malignité [34], et devait donc entrainer la réalisation d’une néphrectomie totale élargie dans le même temps opératoire, ou ultérieurement en cas de positivité du contrôle histologique définitif si l’aspect macroscopique n’était pas évocateur. Actuellement l’attitude thérapeutique est plus nuancée, les éléments particuliers à prendre en compte pour la chirurgie de ces tumeurs sont le volume de la lésion parfois important, la nature fragile de la capsule et la nature peu infiltrative de la lésion. [29] La taille de la lésion kystique n’est en aucun cas un argument contre la chirurgie conservatrice selon les conclusions du Comité Cancérologique de l’AFU 2007.[29] Il convient de réaliser, comme dans les tumeurs pleines, la dissection complète du rein pour le mobiliser et rendre l’accès plus facile. - 80 - Le cancer kystique du rein Discussion La paroi du kyste est potentiellement fragile, et il est recommandé de ne pas la perforer pour éviter tout risque de dispersion tumorale. La nature peu infiltrative de la lésion permet la pratique d’une néphrectomie partielle sous réserve d’un suivi rigoureux. En effet, dans 20% des cas [65], il existe un cancer infraclinique associé sur le même rein à distance du cancer commun. Selon le les conclusions du Comité Cancérologique de l’AFU 2007 et la revue de la littérature, [29] la néphrectomie partielle laparoscopique pour tumeur kystique représente un niveau de difficulté supérieure à celle pour tumeur solide, et doit être toujours considérée comme en cours d’évaluation. Aucune recommandation ou incitation ne peut être apportée que ce soit pour le traitement par néphrectomie partielle laparoscopique, ni pour l’exploration laparoscopique d’une tumeur kystique, du fait du risque de perforation et de dissémination. [29] - 81 - Le cancer kystique du rein Discussion X. ANATOMIE PATHOLOGIQUE : A. CLASSIFICATION DES TUMEURS KYSTIQUES DU REIN : selon le Comité Cancérologie de l’Association Française d’Urologie (CCAFU) [29] Tumeurs malignes - Carcinome multiloculaire kystique - Carcinome tubulo-kystique Tumeurs bénignes - Néphrome kystique - Tumeur mixte épithéliale et stromale - Lymphangiome kystique - Angiomyolipome kystique NB : Le carcinome tubulo-kystique et l’angiomyolipome kystique n’appartiennent pas encore au registre des tumeurs reconnues par l’OMS. - 82 - Le cancer kystique du rein Discussion B.LES TUMEURS KYSTIQUES MALIGNES : a. Le carcinome à cellules rénales kystique multiloculaire : Il représente 1 à 4% des carcinomes du rein, et se voit 3 fois plus chez l’homme que chez la femme en cinquième décade. [66] Macroscopiquement, ces tumeurs d’un diamètre de 3 à 15 cm se délimitent du parenchyme rénal adjacent par une capsule fibreuse. Elles forment une masse unique exclusivement cloisonnée en multiples cavités kystiques généralement de grande taille. Les cloisons sont fines, bordées de cellules claires, et contiennent dans leur épaisseur des nids de cellules claires, parfois des calcifications ou des îlots de métaplasie osseuse. Par définition, il n’y a jamais de massifs proliférants de cellules claires dans les septa. [60] (Figure 6) Cette tumeur doit être différenciée du néphrome kystique multiloculaire (tumeur bénigne multicloisonnée), et du carcinome à cellules rénales partiellement kystisé (cloisons plus épaisses). Seul l’aspect histologique permet d’affirmer la nature exacte de la lésion. - 83 - Le cancer kystique du rein Discussion Aspect macroscopique Aspect tomodensitométrique Figure 6 : Carcinome kystique multiloculaire [51] - 84 - Le cancer kystique du rein Discussion b. Le carcinome tubulo-kystique : C’est une tumeur rare [67], non encore reconnue par l’OMS comme tumeur kystique maligne du rein. De localisation médio-hilaire dans la plupart des cas, elle présente une architecture microkystique, et ses caractéristiques immuno-histochimiques combinent les phénotypes des tubes proximaux et distaux. [29] (Figure 7) Elle est en cours d’individualisation dans la littérature. Philippe CAMPARO [67] a étudié 13 cas de carcinome tubulo-kystique du rein. Histologiquement, toutes ces tumeurs étaient composées de tubules et de kystes de taille variable séparés par des septa fibrovasculaires. La bordure épithéliale des tubules et des kystes se caractérisait par des cellules à cytoplasme abondant éosinophile avec un nucléole proéminent. Selon cet auteur, le carcinome tubulokystique du rein devrait être considéré comme un sous-type de carcinome à cellules rénales devant être distingué des autres tumeurs kystiques malignes ou bénignes du rein. - 85 - Le cancer kystique du rein Discussion Figure 7 : Petit carcinome tubulokystique de bas grade découvert fortuitement dans un rein polykystique. [60] - 86 - Le cancer kystique du rein Discussion A. LES TYPES HISTOPATHOLOGIQUES : [4] [60] Toutes les tumeurs épithéliales malignes décrites dans la nouvelle classification des tumeurs du rein proposée par l’OMS en 2004 peuvent se présenter sous forme de tumeur kystique, à l’exception du carcinome rénal avec translocation Xp11 et le carcinome tubulo-mucineux à cellules fusiformes de bas grade qui sont deux nouvelles entités à côté du carcinome à cellules rénales multiloculaire kystique. Jusqu’à nos jours, il n’a pas été décrit de formes kystiques pour ces deux nouvelles entités. [60] a- Le carcinome à cellules claires : C’est de loin la plus fréquente des tumeurs malignes du rein de l’adulte et peut parfois prendre un aspect kystique. Il peut s’agir d’emblée d’une forme kystique ou d’une nécrose kystique d’une masse solide. Cet aspect a été retrouvé chez l’un nos patients. Lorsque cette tumeur est multiloculaire, elle peut n’apparaitre que sous la forme de kystes multiples bordés de cloisons extrêmement fines. (Figure 8) L’affirmation du caractère malin de la lésion est alors problématique, autant dans l’interprétation radiologique qu’histologique. Elles sont reconnues comme une entité à part dans la nouvelle classification sous la dénomination de carcinomes kystiques multiloculaires à cellules claires que nous avons traité cidessus. - 87 - Le cancer kystique du rein Discussion Figure 8 : Carcinome à cellules claires kystique. Ce kyste bien limité multiloculaire comporte des cloisons extrêmement fines, mais on aperçoit dans l’épaisseur de certaines cloisons une fin liserée tumoral jaune caractéristique d’une prolifération tumorale à cellules claires. [60] b. Le carcinome papillaire : Il représente 10% des tumeurs malignes du rein. Cette tumeur peut apparaître mi-compacte mi-kystique ou entièrement kystique, voire nécrotique du fait de sa faible vascularisation et de son évolution lente, elle est dans ce cas riche en cristaux de cholestérol ce qui lui donne un aspect « graisseux » en imagerie. Le pronostic de ces tumeurs est plus favorable que pour l’adénocarcinome papillaire habituel. [4] (Figure 9) - 88 - Le cancer kystique du rein Discussion Figure 9 : Carcinome papillaire de siège périphérique : Tumeur de 3 cm de diamètre bien limitée compacte mais hétérogène. Les zones de striation blanche jaunâtre correspondent au matériel lipidique emmagasiné dans l’axe des franges papillaires de la tumeur. [60] c. Le carcinome chromophobe : Il représente 5 à 7 % des carcinomes rénaux. Deux variantes histologiques ont été décrites : la variante à cellules claires, qui peut en imposer pour un carcinome à cellules claires, et la variante à cellules éosinophiles longtempsconfondue avec l’oncocytome. Les remaniements nécrotiques et hémorragiques sont rares et l’apanage des tumeurs ayant acquis un volume important. Dans certains cas, la tumeur peut se présenter comme une lésion multikystique avec des cloisons plus ou moins épaisses contenant des cellules chromophobes. (Figure 10) - 89 - Le cancer kystique du rein Discussion Figure 10 : Carcinome chromophobe : tumeur en grande partie kystisée [60] d. Le carcinome des tubes collecteurs de Bellini : (Figure 11) Il représente moins de 1 % des tumeurs du rein. Il avait été identifié une variante kystique de bas grade. Cette entité est actuellement séparée des tumeurs de Bellini et en cours d’individualisation dans la littérature sous le terme de « carcinome tubulo-kystique de bas grade » que nous avons traité ci-dessus. Dans notre série, ce type histologique a été retrouvé chez un patient porteur de cancer kystique avec à l’examen anatomopathologique un carcinome des tubes collecteurs de Bellini mais de haut grade de Furhman (grade 4). - 90 - Le cancer kystique du rein Discussion Figure 11 : Carcinome de Bellini : Tumeur mal limitée infiltrant de façon massive le parenchyme rénal. [60] B. LE PRONOSTIC : Notons que le grade de Furhman demeure un élément pronostique applicable à tous les types de tumeurs épithéliales du rein, le caractère peu agressif des cancers kystiques du rein a été démontré dans la littérature. [68] En effet, les cellules renfermées dans les septa du carcinome à cellules rénales kystique multiloculaire sont à rattacher à un carcinome à cellules rénales de grade 1 de Furhman. [29] Tous les cas de carcinomes multiloculaires rapportés dans la littérature ont été de bon pronostic avec peu d’évolution métastatique. [60] [66] - 91 - Le cancer kystique du rein Discussion Le carcinome tubulo-kystique est également de bon pronostic car sans récidive ou évolution métastatique, son individualisation dans la littérature est sous le terme de « carcinome tubulo-kystique de bas grade » comme nous avons cité ci-dessus. [29] Néanmoins, dans l’étude de Philippe CAMPARO [67], l’un des 13 cas de carcinome tubulokystique a présenté une métastase ganglionnaire pelvienne. Dans l’étude de LOOK et WALLERAND [9] portant sur 37 kystes atypiques dont 10 se sont avérés malins, l’analyse anatomopathologique définitive retrouve le plus souvent une tumeur de bas grade (Furhman 1 et 2), quasiment toujours localisée (p T1 et p T2). Tous les patients ont bénéficié d’une néphrectomie partielle et aucun n’a présenté de récidives locales avec un recul moyen de 50 mois. Dans notre étude, les deux cancers kystiques étaient de haut grade de Fuhrman (respectivement grade 4 et grade 3) ce qui ne concordait pas avec les données de la littérature. L’évolution à cours et à long terme n’a pu être connue car ces patients ont été perdus de vue. - 92 - Le cancer kystique du rein Discussion XI. EVOLUTION ET PRONOSTIC : Les facteurs déterminant le pronostic de ces tumeurs kystiques sont les mêmes que pour le cancer solide [15] (Âge>60 ans, altération de l’état général, stade TNM et grade histologique, type histologique, infiltration vasculaire et ganglionnaire, localisation secondaire). Les carcinomes à forme kystique sont habituellement peu agressifs et de bas grade ce qui diminue leur processus métastatique. Cependant la gravité réside dans le retard de diagnostic de malignité de ces lésions dont l’aspect radiologique peut parfois être rassurant. Ce pronostic serait certainement amélioré par un diagnostic précoce grâce à l’analyse minutieuse de l’échographie et la TDM de tout « kyste rénal suspect », avec au moindre doute l’exploration chirurgicale avec examen extemporané de la totalité de la paroi kystique seule garante d’un diagnostic précoce et donc d’un pronostic meilleur. - 93 - Conclusion - 94 - Le cancer kystique du rein Conclusion Au terme d’une étude portant sur 3 observations de patients porteurs de kyste rénal suspect colligés dans le service d’Urologie « A » du CHU IBN SINA de RABAT, et à travers une revue de la littérature, nous pouvons retenir que toute anomalie de l’imagerie médicale dans l’exploration d’un kyste rénal laisse planer le doute sur sa bénignité. Le risque d’un diagnostic erroné diminuerait considérablement avec une exploration complète basée essentiellement sur la pratique d’un examen tomodensitométrique. Si au terme de ce bilan le doute persiste, l’exploration chirurgicale nous paraît s’imposer. Celle–ci ne permet pas toujours de trancher même avec le recours à l’analyse extemporanée de préférence de la pièce de néphrectomie partielle. La néphrectomie totale élargie était la thérapeutique de référence. La néphrectomie partielle peut être discutée étant donné la faible agressivité habituelle du cancer kystique, et les données actuelles semblent valider cette attitude thérapeutique. - 95 - Résumés - 96 - Le cancer kystique du rein Résumés RESUME Le kyste rénal est une pathologie fréquente qui peut dans certains cas correspondre à une tumeur maligne. La difficulté est souvent de pouvoir affirmer ou infirmer le caractère bénin ou malin du kyste. A travers l’étude de 3 cas cliniques de patients porteurs de kyste rénal suspect, hospitalisés au service d’Urologie « A » de l’hôpital IBN SINA de RABAT, et à la lumière de la littérature, nous avons essayé de déduire un certain nombre de conclusions permettant de faire le point sur la stratégie diagnostique de ces lésions : La clinique est le plus souvent de peu d’utilité pour différencier kyste bénin et cancer. L’imagerie est par contre un élément essentiel pour le diagnostic : - l’échographie permet de suspecter le diagnostic en montrant une formation kystique atypique nécessitant la réalisation d’un scanner. - la TDM est l’examen de référence permettant, dans la majorité des cas, de confirmer ou de suspecter fortement le diagnostic en se basant sur la classification de BOSNIAK des masses kystiques du rein, et en détectant des stigmates de néoplasie (envahissement régional, adénopathies, thrombus rénal…). Cela a été le cas pour l’un des patients de notre étude. - L’IRM semble permettre une analyse très précise du contenu du kyste. - 97 - Le cancer kystique du rein Résumés - l’ASP et L’UIV ne sont pas d’un grand apport en matière de cancer kystique du rein. - l’artériographie est utile si une néphrectomie partielle est envisagée. L’étude histologique de la tumeur kystique peut se réaliser: - en pré-opératoire à travers la cytoponction ou la biopsie percutanée qui peuvent constituer des moyens d’affiner le diagnostic. Il est licite d’y avoir recours lorsque les investigations radiologiques n’apportent pas la conviction, et dans des cas de rein unique où l’indication doit se poser avec certitude, quoique l’incidence des faux négatifs n’est pas négligeable. - en per-opératoire grâce à l’examen anatomopathologique extemporané. Cet examen effectué sur la totalité de la pièce de néphrectomie partielle semble intéressent et devrait être réalisé chaque fois qu’il y a un doute diagnostique afin d’éviter un geste radical inutile. Le traitement curatif repose sur la néphrectomie totale élargie. Un geste conservateur peut être discuté du fait de la faible agressivité de ces tumeurs. Le retard de diagnostic de malignité de ces tumeurs kystiques aggrave leur pronostic malgré leur faible agressivité habituelle. Ce qui nécessite de pousser les investigations devant toute image kystique suspecte. - 98 - Le cancer kystique du rein Résumés SUMMARY The renal cyst is a frequent pathology which can sometimes correspond to a malignant tumour. The difficulty is often to be able to affirm or cancel the benign or malignant character of the cyst. Through the study of 3 clinical cases of patients carrying suspect renal cyst, hospitalized in the department of UROLOGY “A” at the IBN SINA hospital in RABAT, and through the review of the literature, we tried to deduct some conclusions which allows giving a progress report on the diagnostic strategy of these lesions: Clinical study is not always useful to differentiate benign cyst and cancer. The imagery is on the other hand essential for the diagnosis: - Ultrasonography can suspect the diagnosis by showing an atypical cystic formation requiring the realization of the computed tomography. - The CT is the reference examination; it allows to confirm or to suspect strongly the diagnosis while being based on the BOSNIAK classification of cystic renal masses, and by detecting signs of neoplasy (regional invasion, metastatic nodes, renal thrombus…). That was the case for one of the patients of our study. - The MRI seems to allow a very precise analysis of the contents of the cyst. - 99 - Le cancer kystique du rein Résumés - The abdomen radiography and the intravenous urography have not great contribution as regards cystic cancer of the kidney. - The arteriography is useful if a partial nephrectomy is considered. Histological examination of the cystic tumour can be carried out: - Before the operation through the ponction or the percutaneous biopsy which can constitute means of refining the diagnosis. We can use them when the radiological investigations do not bring the conviction, and in case of only kidney where the indication must be applied with certainty, though the incidence of the false-negative results is not negligible. - Intraoperative thanks to the frozen section histological examination. It seems interesting when it’s carried out on the totality of the partial nephrectomy specimen, and it should be done when there is a doubt diagnoses in order to avoid an useless radical surgery. The curative treatment is the total enlarged nephrectomy. The partial surgery can be discussed because of low aggressiveness of these tumours. The delay of diagnosis of malignity of these cystic tumours worsens their prognosis in spite of their low usual aggressiveness. This requires improving investigations when we have a suspect cystic image. - 100 - Le cancer kystique du rein Résumés - - - - 101 - Le cancer kystique du rein Résumés - - 102 - Bibliographie - 103 - Le cancer kystique du rein [1] Bibliographie BOSNIAK M.A. The current radiologic approach to renal cysts. Radiology 158 (1986), pp. 1–10. [2] ROSSI D., RICHAUD C., TAIB E., SERMENT G. Problèmes diagnostiques et thérapeutiques posés par des masses rénales ou parentérales d'allure kystique. J. Urol. (Paris), 1988 ; 94 : 3 : 127-131. 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