Le déficit en hormone de croissance chez l`enfant

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BIOLOGIE
THÉMATIQUE
HORMONALE
À TAPER
Le déficit en hormone de croissance
chez l’enfant : formes cliniques
et biologiques
Nora Soumeya Fedala a, Ali El Mahdi Haddam b, Akila Zenati c, Farida Chentli a
RÉSUMÉ
L déficit
Le
défi i en GH est une étiologie
é i l i rare de
d retard
d staturo-pondéral
dé l (RSP)
(13,27 %). Son diagnostic est tardif (8,48 ± 4,3 ans chez le garçon et
6,9 ± 3,8 ans chez la fille). Le retard statural est sévère (-4,7 ± 1,8 DS chez
les garçons ; - 4,9 ± 2,3 DS chez la fille). Le bilan hormonal a confirmé le
diagnostic positif par la non réponse aux tests de stimulation de la GH
(tests au glucagon-propranolol et à l’insuline) et le dosage de l’IGF1 significativement abaissés. La recherche d’autres atteintes hypophysaires a
révélé une insuffisance antéhypophysaire multiple dans 49 %.
Retard staturo-pondéral – déficit en hormone de croissance –
insuffisance antéhypophysaire – GH.
1. Introduction – Généralités
Le retard statural est un motif fréquent de consultation [1, 2].
Ses étiologies sont nombreuses et leur fréquence respective
diffère quelque peu selon que l’on soit en endocrinologie
ou en pédiatrie. Bien que la pathologie endocrinienne ne
soit en cause que dans un peu moins de 10 % des cas [3,
4], sa reconnaissance est primordiale car elle conduit à un
traitement spécifique qui améliore le pronostic statural.
Le déficit en hormone de croissance (GHD) est une cause
rare de RSP [1, 4, 5]. Sa prévalence exacte est méconnue
dans les pays émergents comme l’Algérie. En Europe et
aux États-Unis, elle est diversement estimée et varie entre
1/4 000 et 1/10 000 [4, 6]. Cette variabilité s’explique par le
polymorphisme clinique, les limites des tests de stimulation
de l’hormone de croissance et les problèmes d’interpréta-
Service d’endocrinologie
Laboratoire central
Centre hospitalo-universitaire Bab El Oued
02, bd Said Touati Bal El Oued 16000
Alger – Algérie
b Service d’endocrinologie
Hôpital Bologhine
Bains Romains 16600
Alger – Algérie
a
c
* Correspondance
[email protected]
SUMMARY
Growth hormone deficiency (GHD) in child :
clinical and biological aspects.
Statural delayed is very frequent in paediatric
and endocrinology consultation. Growth hormone deficiency (GHD) is rarely (13,27%). The
diagnosis is delayed (8,48 ± 4,3 years for boys
and 6,9 ± 3,8 years for girls). The statural deficiency is severly (-4,7 ± 1,8 SD for boys and
-4,9 ± 2,3 SD for girls).
No response to stimulated tests (glucagonpropranolol and insulinemia) and low IGF1 confirmed the GHD.
Multiple hormonal deficiencies are associated
in 49%.
Statural delayed – growth hormone deficiency –
pituitary insuffisency – GH.
tion de la valeur seuil diagnostique, puisque ce n’est qu’en
1998, soit près d’un siècle après les premières descriptions
du GHD que le consensus sur les valeurs référentielles a
été établi [7].
Dans notre pays, de nombreux écueils entravent la démarche diagnostique et thérapeutique. Pourtant, l’absence
de diagnostic précoce et de traitement adéquat ont des
conséquences néfastes : la petite taille définitive, avec le
retentissement psychologique qui en découle. De plus, il
faut également souligner que les patients déficitaires en
GH sont connus pour avoir une espérance de vie réduite à
l’âge adulte en raison d’une augmentation de la fréquence
des cardiopathies ischémiques [8, 9] et des risques accrus
de fractures par ostéoporose [10, 11] autant des problèmes
de santé publique qui appellent à un diagnostic aussi précoce que possible et à une prise en charge thérapeutique
efficace afin de réduire les coûts directs et indirects liés aux
conséquences du déficit en GH.
Les objectifs de cette étude ont été d’évaluer la fréquence
des GHD parmi les étiologies des RSP en consultation
d’endocrinologie et d’en analyser les différents tableaux
clinico-biologiques.
2. Population et méthodologie
2.1. Population
article reçu le 29 octobre 2008, accepté le 17 février 2009.
© 2009 – Elsevier Masson SAS – Tous droits réservés.
693 enfants (470 garçons, 223 filles) et adolescents impubères d’âge inférieur ou égale à 17 ans ont été adressés
REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - AVRIL 2009 - N°411 //
63
en consultation d’endocrinologie entre 2001 et 2006 pour
retard statural défini par une taille inférieure ou égale à
– 2 DS par rapport à la moyenne des tailles sur les courbes
de Sempé et Pedron [12]. Tous ces patients ont bénéficié
d’un interrogatoire minutieux, d’un examen clinique le plus
complet possible et d’un ensemble d’explorations paracliniques (radiographie du poignet et de la main gauche de face,
formule numération sanguine, bilan rénal, glycémie à jeun,
bilan hépatique, bilan lipidique, ionogramme sanguin, bilan
phosphocalcique, vitesse de sédimentation, protides totaux,
copro-parasitologie des selles, dosage des anticorps antiréticulines et anti-endomysium, biopsie jéjunale, thyroxine
libre (FT4) et thyrostimuline (TSHus). Au terme de cette
première exploration, nous avons pu ainsi dégager deux
groupes de sujets ; ceux ayant des éléments en faveur d’une
étiologie non endocrinienne ou endocrinienne autre que le
déficit en GH et ceux ayant une insuffisance somatotrope
probable. Ces derniers ont bénéficié d’un test au glucagon/
propranolol. Ce test a été systématiquement sensibilisé par
les stéroïdes sexuels chez les enfants en âge péri-pubertaire
(âge chronologique ≥ 08 ans) : 1 cp /j de valerate d’œstradiol
(2 mg) pendant 3 jours avant la pratique du test chez les
filles et 100 mg d’enanthate de testostérone en IM 3 jours
avant le test chez les garçons.
Deux groupes de sujets comparables pour l’âge et le sexe
ont pu être sélectionnés :
- le groupe G1 composé de 101 enfants (51 garçons et
50 filles) présentant un retard constitutionnel et/ou familial
et servant de groupe témoin pour l’évaluation hormonale
des patients de l’étude ;
- le groupe GHD très suspect de déficit somatotrope constitué de 107 patients.
Ces deux groupes G1 et GHD ont bénéficié d’un 2e test de
stimulation pharmacologique de la GH : le test à l’insuline
pour répondre aux critères diagnostiques de GHD. Ce test
a aussi été sensibilisé par les stéroïdes sexuels chez les
enfants en péri-puberté. Les deux tests utilisés par l’évaluation de la fonction somatotrope sont les seuls utilisés
en Algérie.
Ainsi, le groupe G1 a servi de groupe témoin en comparaison avec le groupe GHD pour l’évaluation hormonale de la
fonction anté-hypophysaire.
Le choix des RSP constitutionnels et/ou familiaux comme
sujets témoins nous a paru judicieux étant donné que les
tests pharmacologiques de stimulation de la GH ne sont
pas, sur le plan éthique, envisageables chez l’enfant sain
et que pour attester d’une fonction somatotrope normale,
nous avons recours à ces testes dynamiques.
Par ailleurs, comme il a été proposé d’étudier l’IGF1 chez
les enfants GHD, il s’est avéré indispensable d’ajouter un
deuxième groupe d’enfants témoins sains de taille normale
pour comparer les dosages de l’IGF1 avec ceux du groupe
GHD. Ce groupe appelé G2 est constitué de 266 enfants
sains indemnes de toute affection pouvant retentir sur l’axe
GH-IGF1. Ils ont été regroupés par tranche d’âge et selon
leur stade pubertaire en se basant sur la classification de
Tanner [13].
2.2. Méthodologie
Il s’agit d’une étude analytique, comparative prospective et
longitudinale des 107 GHD dont le diagnostic a été établi sur
64 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - AVRIL 2009 - N°411
un faisceau d’arguments cliniques et paracliniques [7] :
1. les données anamnéstiques et cliniques caractéristiques
d’insuffisance somatotrope ;
2. les bilans radiologiques (AO) ;
3. les bilans biologiques non hormonaux d’orientation hématologique, glycémique et lipidique notamment les différentes
fractions du cholestérol. Ces derniers ont été refaits après
substitution hormonale thyroïdienne et/ ou surrénalienne si
ces déficits hormonaux existaient ;
4. le taux bas de l’IGF1 et la réponse négative aux deux
tests pharmacologiques de stimulation de la GH précédemment cités.
Une analyse minutieuse des données cliniques et paracliniques a été effectuée précisant :
- le déroulement de la période néonatale, les circonstances
du diagnostic, la sévérité du tableau clinique de déficit en
appréciant le degré du retard staturo-pondéral et en calculant
la vitesse de croissance annuelle. Celle-ci étant impossible
à réaliser chez tous les patients, il a fallu tenir compte de
la vitesse de croissance au cours du suivi avant la mise en
route du traitement substitutif hormonal ;
- les signes caractéristiques du déficit en GH tels le visage
poupin, l’adiposité abdominale, la chevelure fine, l’acromicrie, le micropénis avec ou sans cryptorchidie et l’existence
de malformations congénitales.
D’autres atteintes hypophysaires ont été recherchées :
les signes d’hypothyroïdie (bradycardie, constipation,
asthénie…), les signes d’insuffisance cortico-surrénlienne
(asthénie, hypotension artérielle…), les signes de déficit gonadiques telles la présence d’un micropénis, une
cryptorchidie chez les garçons pré-pubères et l’absence de caractères sexuels secondaires évalués à partir
de la classification de Tanner [13] chez les garçons dont
l’âge osseux est supérieur à 14 ans et les filles dont l’âge
osseux est supérieur à 12 ans. L’existence d’atteinte posthypophysaire par l’existence d’un syndrome polyuropolydipsique apprécié en fonction des chiffres des boissons
et diurèses théoriques pour l’âge [14].
En plus de l’exploration de l’axe GH-IGF1, la groupe GHD
a bénéficié d’une étude de :
- la fonction corticotrope par les dosages statiques de cortisol sanguin et d’ACTH. La réserve corticotrope est étudiée
grâce au test à l’hypoglycémie insulinique. L’atteinte corticotrope est attestée par un taux bas de cortisol plasmatique
ou une réponse basse au test à l’insuline associée à une
ACTH non élevée ;
- la fonction thyroïdienne grâce aux dosages de la
thyroxinémie (FT4) et de la TSHus. À défaut de TRH non
disponible en Algérie, la réserve thyréotrope n’a pas été
appréciée. Le déficit thyréotrope est attesté par un taux
bas de FT4 corrélé à une TSHus non élevée ;
- la fonction prolactinique par le dosage statique de la
prolactine. La réserve prolactinique n’a pas été étudiée
faute de TRH ;
- l’atteinte gonadique est recherchée chez les patients ayant
un âge osseux de type pubertaire grâce aux dosages bas
des stéroïdes sexuels et de leurs gonadotrophines hypophysaires (FSH, LH). La réserve gonadotrope n’a pu être
étudiée en raison de la non disponibilité du réactif LHRH
en Algérie. Les résultats ont été comparés aux valeurs de
référence de Roger [15] ;
BIOLOGIE HORMONALE
- l’atteinte post-hypophysaire est mise en évidence lorsqu’il
existe un syndrome polyuro-polydipsique [14] associé à une
densité urinaire inférieure à 1005. L’absence de son élévation
lors du test de restriction hydrique et après administration
d’analogue de l’hormone antidiurétique affirme le diabète
insipide. Une fois le diagnostic de GHD établi, une hormonothérapie substitutive par la GHr a été indiquée à raison
de 0,7 u/kg/semaine en sous cutané 7/7j. Ce traitement a
été associé en cas de déficits hypophysaires multiples à de
l’hydrocortisone = 5 à 10 mg/m2/j et/ou de la levothyroxine :
2,5 ng/kg/j par voie orale.
filles (p < 0,02). Faute de carnets de santé, correctement
tenus, les paramètres auxologiques à la naissance n’ont
pas été documentés en totalité (2/3 pour le poids, 1/3 pour
la taille). La taille moyenne et le poids moyen de patients
GHD nés à terme sont normaux pour l’âge gestationnel
sans différence significative (tableau II).
Tableau I – Répartition de l’ensemble des RSP (n = 693)
en fonction des étiologies observées au niveau
d’une consultation d’endocrinologie.
Étiologies
2.3. Étude statistique
Les résultats ont été analysés sur ordinateur comportant
un logiciel Epi Info version 6.4 après enregistrement des
données. Les méthodes utilisées sont :
- le calcul des moyennes arithmétiques (X ± SD). La
comparaison entre deux moyennes est basée sur le test
de student et l’écart réduit ;
- le calcul des pourcentages arithmétiques (p %). La
comparaison entre 2 pourcentages est basée sur le test
du chi 2 et l’écart réduit. Le taux de significativité est
p < 0,05.
2.4. Techniques et normes
Les dosages hormonaux ont été réalisés par deux
techniques radio-immunologiques (RIA) et immunoradiométriques (IRMA) sauf pour l’ACTH qui est dosée par
chimiluminescence.
3. Résultats
3.1. Fréquence relative des GHD
pour les autres étiologies en consultation
d’endocrinologie
Près de 3/4 des RSP (83,2 %) consultant en endocrinologie ne relèvent pas d’une étiologie endocrinienne. La
moitié (54,54 %) d’entre eux sont des RSP constitutionnels et familiaux associés ou non à un retard pubertaire.
20 % des RSP sont liés aux affections viscérales dominées par la malabsorption digestive dans 3/4 des cas.
La cause endocrinienne est présente dans 16,7 % des
cas. Le déficit en GH est présent 8 fois sur 10 (13,27 %)
dans une proportion relativement égale avec la pathologie
digestive (tableau I).
3.2. Caractéristiques cliniques des patients
GHD à la naissance dans les deux sexes
Une prédominance masculine classique est notée (sex
ratio G/F : 1,38). La majorité des patients (94,4 %) sont
nés à terme. Seulement 5,6 % sont nés prématurément
(VS 11,2 %, population algérienne DNS) Une dystocie
néonatale n’a été retrouvée que dans 15,9 % des cas
(vs 15,34 % population algérienne (DNS). Dans près de
la moitié des cas, la dystocie est liée à un accouchement
par le siège (n = 8/17 ; 47,1 %). La souffrance néonatale
n’a été constatée que dans 13,1 % des cas (vs 7,8 %
DNS) (tableau II).
Les événements périnataux (dystocie, souffrance) sont
retrouvés plus fréquemment chez les garçons que chez les
Nombre
%
- R constitutionnel
+ R pubertaire
- R familial
+ R pubertaire
194
22
157
5
28
3, 17
22, 65, 54
0,72
Affections digestives
Affections hématologiques
Affections neurologiques
Affections osseuses
Affections respiratoires
Affections rénales
Cardiopathie
Hépatique
99
16
7
7
4
4
3
1
14,28
2,30
1,01
1,01
0,57
0,57
0,43
0,14
20,34 %
Endocrines
GHD
Hypothyroïdie primaire
Hypoparathyroïdie
92
22
02
13,27
3,17
0,28
16,73 %
RCIU
21
3,03
Affections chromosomiques
(syndrome de Turner + trisomie 18)
14
2,02
Affections métaboliques
Diabète sucré
Maladie de Wilson
12
1
1,73
0,14
Syndrome polymalformatif
8
1,15
Corticothérapie
1
0,14
Autres étiologies (mucoviscidose,
mucopolysaccharidose….)
0
0
Malnutrition
1
0,14
Total
693
100
54 %
1,87 %
Tableau II – Caractéristiques cliniques
des patients GHD à la naissance dans les deux sexes.
Garçons
(n = 62 )
Filles
(n = 45)
59
3
42
3
Dystocie néonatale
Siège
14 (22,4)
7 (11,3)
3 (6,7)
1 (2,2)
Souffrance néonatale
12 (19,3)
2 (4,4)
50,3 ± 2,1
(48 – 56)
49,7 ± 1,1
(48 – 52)
Poids moyen à la naissance (extrêmes)
3,5 ± 0,7
(1,5 – 5)
3,2 ± 0,8
(2 – 5)
Anomalies de la ligne médiane
30 (48,4)
10 (22,2)
Micropénis
Micropénis + cryptorchidie uni ou bilatérale
21 (33,3)
15 (24,2)
Patients
Âge gestationnel
À terme
Prématurité
Taille moyenne à la naissance à terme
et documentée (n = 30)
X cm ± SD (extrêmes )
Ictère
Hypoglycémie
2
2
3 (4,8)
1 (2,2)
REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - AVRIL 2009 - N°411 //
65
Tableau III – Caractéristiques cliniques des GHD
à la première consultation dans les deux sexes.
Garçons
(n = 62)
Filles
(n = 45)
8,5 ± 4,3
(0,16 – 18)
6,9 ± 3,8
(0,83 – 16,58)
4,9 ± 3,5
(18 J – 14 ans)
3,1 ± 2,7
(18 J – 12 ans)
- 4,7 ± 1,8
(- 12,0)
- 4,7 ± 1,6
(- 9,4 ; 0,8)
- 4,9 ± 2,3
(- 11,9 – - 2,8)
- 4,9 ± 2,3
(- 11,9 – 2,9)
Taille cible parentale
XDS ± SD
(extrêmes)
-3,7 ± 2,3
(- 10,5 ; - 0,9)
-4,6 ± 2,6
(-13 – - 1,5)
Poids moyen
X DS ± SD
(extrêmes)
X SDS ± SD
(extrêmes)
- 2,6 ± 1,1
(- 5 – 0)
- 2,8 ± 1,2
(- 4,8 – - 3,9)
- 2,9 ± 0,8
(- 5 – - 0,5)
- 2,9 ± 1,1
(- 5,9 – - 0,3)
Morphotype
Typique
Atypique
55 (88,7)
7 (11,3)
40 (88,9)
5 (11,1)
Âge moyen
(X ans ± SD)
(extrêmes)
Délai moyen entre la constatation du RS
et la 1re consultation
X années ± SD
(extrêmes)
Taille moyenne
X DS ± SD
(extrêmes)
X SDS ± SD
(extrêmes)
Tableau IV – Résultats paracliniques osseux et hématologiques
des patients GHD au diagnostic dans les deux sexes.
Âge osseux
Garçons
Filles
Résultats
Âge osseux moyen
X années ± SD
(extrêmes)
4 ± 2,8
(0,25 – 11)
3,4 ± 2,3
(0,5 – 8)
3,8 ± 2,6
(0,25 – 11)
Retard de l’Âge osseux (AO / AC)
X mois ± SD
(extrêmes)
0,5 ± 0,2
(0,14 – 1,5)
0,5 ± 0,2
(0,13 – 0,9)
0,5 ± 0,2
(0,13 – 1,5)
23
28
15
10
4
3
1
21
10
4
9
2
2
-
44 (41,1)
38 (35,5)
19 (17,8)
19 (17,8)
6 (5,6)
5 (4,7)
1 (0,9)
FNS
Anémie
- Microcytaire
- Normochrome
- Hypochrome
- Normocytaire
- Hypochrome
- Normochrome
Tableau V – Résultats métaboliques glucido-lipidiques
des patients GHD au diagnostic dans les deux sexes,
comparaison avec une référence occidentale [17].
Valeurs
sériques
Valeurs
références occidentales
P
Glycémie
Xg ± SD
(extrêmes)
0,8 ± 0,1
(0,8 – 0,8)
0,7 – 1
DNS
Triglycérides
Xg ± SD
(extrêmes)
0,8 ± 0,3
(0,7 – 0,9)
0,5 – 1,5
DNS
Cholestérol total
Xg ± SD
(extrêmes)
1,7 ± 0,3
(1,6 – 1,7)
1,6 – 2,4
P < 0,05
HDL cholestérol
Xg ± SD
(extrêmes)
0,5 ± 0,2
(0,5 – 0,5)
≥ 0,5 M
≥ 0,6 F
DNS
LDL cholestérol
Xg ± SD
(extrêmes)
1,0 ± 0,3
(1,0 – 1,1)
< 1,6
DNS
Paramètres
3.3. Caractéristiques cliniques
des GHD à la première consultation
dans les deux sexes
L’âge moyen au moment du diagnostic de patients GHD
est tardif. Les garçons GHD consultent un peu plus tardivement par rapport aux filles ; cette différence est à la
limite de la significativité (p = 0,059). Le délai moyen entre
la constatation du retard statural et la première consulta±
tion est de 4,17 ans 3,29 ans. Ce délai moyen est significativement plus important chez les garçons que chez les
filles (p < 0,005) (tableau III).
Le retard statural est sévère chez les patients GHD qu’il
soit exprimé en déviations standards ou en score déviations standards et sans différence significative entre les
deux sexes (DNS). Ce retard est aussi sévère lorsqu’il
est analysé par rapport à la taille cible parentale comme
pour la taille, il existe un retard pondéral important. Ce
retard est cependant, moins sévère que le retard statural
(p < 10-6). Un nanisme est noté dans plus de 2/3 des cas
(78 %) sans différence significative entre les deux sexes
(p = 0,84). Le morphotype est typique quel que soit le sexe
et caractéristique du déficit en GH dans la majorité des
cas (88,8 %) (tableau II).
3.4. Résultats paracliniques
des patients GHD dans les deux sexes
à la première consultation
3.4.1. Bilan non hormonaux
Il existe un retard important de l’âge osseux chez tous les
patients GHD sans différence significative entre les deux
sexes (DNS) (tableau IV).
Une anémie est retrouvée dans un peu moins de la moitié
des cas (41,11 %) majoritairement microcytaires (86,36 %)
(tableau IV).
La glycémie moyenne est normale sans différence significative avec la valeur moyenne occidentale. Une glycémie
normale basse < à 0,65 g/l a été retrouvée dans 11,2 %
des cas.
Les valeurs moyennes de la fraction HDL du cholestérol
et des triglycérides sont aussi normales sans différence
significative avec les valeurs normales théoriques. Seule la
valeur moyenne du cholestérol total est significativement
abaissée par rapport aux valeurs normales théoriques
occidentales (tableau V).
3.4.2. Bilans hormonaux (tableau VI)
66 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - AVRIL 2009 - N°411
Le pic de GH moyen des patients GHD est bas aussi
bien pour le test au glucagon/propranolol que pour le test
à l’insuline avec une différence hautement significative
entre les pics moyens des GHD et des témoins (p < 10-6).
Dans le groupe G1, la réponse de la GH au test combiné
glucagon/propranolol est plus ample et plus importante
que lors du test simple à l’insuline.
Avant 4 ans, il existe un chevauchement des résultats entre
les IGF1 des enfants GHD (n = 5) et les IGF1 des enfants
témoins G2 du même âge. Après 4 ans, les taux d’IGF1
sont significativement abaissés pour les différentes tranches
d’âge des sujets GHD comparativement au groupe G2 et
ce quelque soit le stade pubertaire (tableau VII).
BIOLOGIE HORMONALE
Par ailleurs, les valeurs d’IGF1 retrouvées dans le groupe
témoin constitué d’enfants sains sont inférieurs significativement à celles des enfants sains occidentaux de taille
normale à l’exception de la tranche d’âge 8-10 ans ou les
valeurs de l’IGF1 ne sont pas différentes significativement
(tableau VIII).
Sur les 107 patients GHD, 62,61 % (n = 67) étaient en
eucortisolisme ; 20,56 % (n = 22) avaient une insuffisance
corticotrope de réserve et 16,82 % (n = 18) présentaient
un hypocorticolisme basal malgré l’altération de l’axe
corticotrope dans 2/3 des cas ; l’insuffisance corticotrope
était asymptomatique dans la majorité des cas (90 %) chez
les patients eucortisoliques. La valeur moyenne basale
de l’ACTH est normale dans le groupe GHD et significativement abaissée par rapport à celle du groupe G1
(p < 0,008). En revanche, les valeurs moyennes du cortisol plasmatique basal du groupe GHD et du groupe G1
ne sont pas différentes sur le plan statistique, il en est de
même pour Δ cortisol (tableau VI). Les valeurs moyennes
de l’ACTH et du cortisol plasmatique de base sont normales sans différence significative avec celles du groupe
témoin G1. En revanche, il existe une différence hautement significative entre le Δ cortisol des patients GHD et
celui du groupe G1 (p < 0,008) (tableau VI). Les valeurs
moyennes de l’ACTH plasmatique et du cortisol moyen
basal des patients GHD ayant une insuffisance corticotrope
patente sont significativement abaissées par rapport au
groupe G1 (tableau VI).
Un tiers des patients GHD (31,70 %) avaient une hypothyroïdie patente. Les autres patients (48,6 %) avaient
une fonction thyroïdienne normale à l’état statique. 7 fois
sur 10 les patients ayant une hypothyroïdie patente étaient
pauci-symptomatique et de diagnostic systématique au
moment de l’évaluation.
Les valeurs moyennes de la TSHus du groupe GHD hypothyroïdiens et euthyroïdiens sont normales sans différence
significative avec le groupe G1 (tableau VI). Il en est de
même pour la FT4 moyenne des patients euthyroïdiens.
En revanche, la FT4 moyenne des patients euthyroïdiens
est franchement abaissée avec une différence hautement
significativement par rapport au groupe G1 (p < 0,0004).
Concernant l’axe lactotrope, la valeur moyenne de prolactine basale des patients GHD est normale, il faut remarquer
cependant que le taux moyen de prolactine est statistiquement plus élevé que celui de G1 (tableau VI).
Les valeurs moyennes des gonadotrophines hypophysaires
et des stéroïdes sexuels (tableaux IX et X).
Le regroupement des déficits hypophysaires au diagnostic révèle que le déficit en GH est isolé dans la moitié des
cas n = 54/107 (50 %) et associé à d’autres déficits dans
l’autre. Moitié n = 53/107 (49 %). Le déficit triple GH, TSH,
ACTH est prédominant parmi les déficits hypophysaires
combinés (37,73 %). Les déficits doubles GH + TSH et
GH = ACTH sont en proportions égales sans différence
significative.
4. Discussion
Le GHD constitue un motif rare de consultation en endocrinologie. 107 patients colligés en 6 ans dont 15 diagnostiqués avant l’étude et perdus de vue. Concernant les
Tableau VI – Résultats hormonaux,
comparaison avec les témoins G1.
Paramètres
GHD (n = 107)
G1 (n = 101)
P
GH moyenne après glucagon
X mui/l ± SD
(extrêmes)
2,8 ± 3,2
(0,1 – 14)
47,6 ± 22,9
(19,0 – 10,1)
P < 10-6
GH moyenne après insuline
X mui/l ± SD
(extrêmes)
1,7 ± 2,3
(0,1 – 9,9)
32,1 ± 23,3
(16,4 – 192,5)
P < 10-6
16,9 ± 7,9
(6,6 – 49,3)
21,3 ± 9,1
(10 – 60)
P <0,008
19,7 ± 8,0
(10 – 46,7)
21,3 ± 9,1
(10 – 60)
DNS
15,8 ± 6,0
(10 – 28,2)
21,3 ± 9,1
(10 – 60)
P < 0,015
402,01 ± 172,9
(154 – 777,5)
377,6 ± 159,6
(119,7 – 684,2)
DNS
256,1 ± 63,1
(155,1 – 364,9)
377,6± 159,6
(119,7 – 684,2)
DNS
94,1 ± 47,7
(5,9 – 144,7)
377,6 ± 159,6
(119,7 – 684,2)
P < 0,01
359,7 ± 266,7
(58,9 – 1886)
382,6 ± 190,8
(118,8 – 1251,8)
DNS
140,1 ± 94,7
(155,1 – 364,9)
382,6 ± 190,8
(118,7 – 1251,8)
P < 0,008
2,5 ± 1,4
(0,1 ± 5,9)
2,3 ± 1
(0,3 – 4,6)
DNS
2,3 ± 1,1
(0,2 – 6,2)
2,3 ± 1
(0,3 – 4,6)
DNS
4,7 ± 2,4
(0,9 – 7,3)
14,3 ± 2,9
(10,6 – 23,8)
P < 0,004
13,9 ± 3,3
(8 – 22,4)
14,3 ± 2,9
(10,6 – 22,8)
DNS
256 ± 262,8
(0,3 – 1937,2)
196,2 ± 95
(60 – 500)
P < 0,03
ACTH moyenne
- Eucortisoloms (n = 67)
X mg/ml ± SD
(extrêmes)
- Hypocortisoliques (n = 22)
de réserve
Xpg/ml ± SD
(extrêmes)
-Hypocortisoliques (n=18)
Xpg/ml ± SD
(extrêmes)
Cortisol sanguin moyen
- Eucortisolique (n = 67)
X nmol/l ± SD
(extrêmes)
- Hypocortisolique
de réserve (n = 22)
X nmol/l ± SD
(extrêmes)
- Hypocortisolique (n = 18)
Xnmol/l ± SD
(extrêmes)
Δ1 cortisol après insuline
- Eucortisolique (n = 67)
X nmol/l ± SD
(extrêmes)
- Hypocortisoliques
de réserve
(n = 22)
X nmol/± SD
(extrêmes)
TSH moyenne hypothyroïdiens (n = 55)
X uU/ml ± SD
(extrêmes)
Euthyroïdiens (n = 52)
X uU/ml ± SD
(extrêmes)
FT4 moyenne
Hypothyroïdiens (n = 55)
X pmol/ml ± SD
(extrêmes)
Euthyroïdiens (n = 73)
Xpmol/ml ± SD
(extrêmes)
Prolactine moyenne
X mul/ml ± SD
(extrêmes)
1
Δ : différence entre pic maximum de cortisol après insuline et la valeur basale.
retards staturaux eux-mêmes, l’étiologie endocrinienne est
rare : 16,73 % dans cette étude, résultat proche des 10 %
reconnus habituellement [2, 8, 19, 20, 21]. Ces constatations incitent à penser prioritairement aux retards constitutionnels et familiaux qui à eux seuls regroupent plus de
la moitié des étiologies de RSP. Les affections digestives
doivent aussi être recherchées systématiquement devant
tout RSP. En effet, à elles seules, elles sont presque aussi
fréquentes que tous les déficits endocriniens réunis 14,28 %
vs 16,73 %. La malabsorption digestive est en réalité même
un peu plus fréquente que le déficit en GH dans cette étude
14,28 % vs 13,27 %. Cette proportion est expliquée par
REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - AVRIL 2009 - N°411 //
67
Tableau VII – Résultats de l’IGF1 des patients GHD :
comparaison avec les témoins G2.
Patients GHD
moyenne ± SD ng/ml
(extrêmes)
Médiane (nombre)
Témoins G2
moyenne ± SD ng/ml
(extrêmes)
médiane (nombre)
P
30,1 ± 12,5
(21,3 – 39)
(2)
42 ± 20,8
14,4 – 95,6
40,4 (73)
-
31,9 ± 21,5
-
25 (3)
76,4 ± 20,9
(15,4 – 137,9)
77,6 (50)
Stade I
(4 – 8 ans)
35,4 ± 19,7
(15,7 – 80)
28,2 (22)
127,2 ± 27,9
(89,4 – 195,9)
120,4 ( 27 )
Stade I
(8 – 10 ans)
23,9 ± 14,8
(12 – 61,6)
19 (9)
144 ± 31,5
(102,7 – 244,7)
133,89 (30)
Stade I
> 10 ans
37 ± 37,2
(15 – 226,6
22 (49)
165,9 ±29,9
(125,9 – 264,4)
157 (37)
Stade II
81,7 ± 58,8
(17,5 – 183,5)
78,3 (10)
200,7 ± 50,8
(110,4 – 299,8)
197,5 (29)
Stade III
53,01
(1)
244,8 ± 58,6
(118,620 – 310,260)
259,140 (19)
Stade IV
(0)
338,9 ± 90,1
(178,8 – 571,3)
346,5 (15)
Stade V
59,5 ± 48,8
(14,23 – 151,9)
31,03 (11)
319,4 ± 100,9
(202,5 – 496)
302,1 (15)
Stade
pubertaire/
Âge
Stade I
(0 – 2 ans)
Stade I
( 2 – 4 ans)
< 4.10-4
< 10-6
< 10-6
< 10-6
-
-
< 10-6
Tableau VIII – Résultats de l’IGF1 du groupe G2, Comparaison
avec une référence internationale [16].
Stade
pubertaire/
Âge
Enfants algériens de
taille normale (G2)
(moyenne ng/ml (nb)
Enfants occidentaux
de taille normale
(moyenne ng/ml (nb))
P
42 ± 20,8
(n = 73)
104,5 ± 44,1
(n = 20)
< 0,025
Tanner I
(2 – 4 ans)
76,4 ± 20,9
(n = 50)
213,3 ± 152,8
(n = 24)
< 0,026
Tanner I
(4 – 8 ans)
127,2 ± 27,9
( n = 27 )
260,7 ± 135,8
(n = 35)
< 0,005
Tanner I
( 8 – 10 ans)
144 ± 31,5
(n = 30 )
130,5 ± 136,6
(n = 26)
DNS
Tanner II
(12 – 14 ans)
200,8 ± 50,8
( n = 37 )
488,3 ± 361,3
(n = 64)
< 0,03
Tanner > II
296,4 ± 85,9
(n = 49)
490 ± 140
(n = 28)
< 0,002
Tanner I
(< 2 ans)
Tableau IX – Résultats de la fonction gonadique des patients
GHD de sexe masculin en âge pubertaire, comparaison avec
une référence internationale Roger [15].
GHD
N = 20
Valeurs normales (P1)
P
Testostérone moyenne
X nmol/l ± SDS
(extrêmes)
0,1 ± 0,1
(0,1 – 0,2)
0,3
(< 0,2 – 0,5)
<10-3
FSH moyenne
X uUI/ml ± SDS
(extrêmes)
0,8 ± 0,3
(0,2 – 1)
0,9
(0,3 – 2,2)
DNS
LH Moyenne
XuUI/ml ± SDS
(extrêmes)
0,4 ± 0,3
(0,1 – 0,8)
0,7
(0,3 – 1,6)
DNS
Stade pubertaire I
68 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - AVRIL 2009 - N°411
l’incidence élevée de la maladie cœliaque au Maghreb et
dans les pays méditerranéens en général [22, 23].
L’analyse des données cliniques des patients GHD montre
qu’il existe une prédominance masculine, classiquement
rapportée par tous les auteurs. Les résultats du déroulement
de la grossesse et de la période néonatale sont en accord
avec la littérature. Le déficit en GH même sévère se révèle
rarement à la naissance. La taille et le poids sont généralement normaux, pour l’âge gestationnel et la naissance
a lieu en général à terme [24, 25]. En ce qui concerne la
plus grande fréquence de la dystocie, de la présentation
par le siège et de la souffrance néonatale chez les garçons [26, 27, 24, 25], elle reste incompréhensible.
Par ailleurs, il est aussi important de remarquer que dans
plus de la moitié des cas, des signes cliniques en faveur du
déficit en GH et de son caractère congénital étaient présents
à la période néonatale. Malheureusement, ces anomalies
n’ont été relevées que rétrospectivement par l’anamnèse
et l’examen clinique lors de la première consultation : anomalies de la ligne médiane 1/3 des cas, micropénis isolé
ou associé à une cryptochidie 58 % des garçons, ictère
néonatal 3,73 % des cas, hypoglycémie 3,73 % des cas.
Ces signes ont été totalement méconnus puisqu’il a fallu
attendre l’évidence d’un retard statural (83,2 % des motifs
de consultation dans notre série) pour que les patients
soient dirigés vers la consultation d’endocrinologie. Ce
retard au diagnostic traduit ainsi une méconnaissance de
la pathologie par beaucoup de praticiens amenés à suivre
l’enfant à cet âge.
L’analyse des données anthropométriques à la première
consultation révèle que le retard statural est sévère et
le morphotype est caractéristique dans les deux sexes
témoignant d’une part de la profondeur du déficit en GH
mais aussi du retard au diagnostic. Le retard statural est
sévère comparé aux références françaises pour l’âge [12].
En Algérie, il n’existe pas encore de courbes de référence
nationale et les résultats de l’étude peuvent être quelques
peu faussés.
Lorsque le diagnostic de GHD est suspecté, des éléments
paracliniques indirects doivent le faire évoquer. Il existe un
retard important de la maturation osseuse bien objectivé
dans l’étude témoignant du rôle important de la GH sur la
croissance osseuse. La glycémie est le plus souvent dans
les valeurs normales basses (11,2 % dans l’étude). Des
hypoglycémies peuvent se voir et sont en général précoces
en rapport avec une forme congénitale et sévère ou des
déficits hypophysaires multiples [28, 29].
Sur le plan hématologique, une anémie microcytaire peut
être retrouvée (8 fois sur 10 dans l’étude) témoignant du
rôle du contrôle hormonal dans l’hémoglobinogenèse [30].
En effet, l’hématopoïèse est régulée par des interleukines
qui régulent en synergie avec les facteurs de croissance la
prolifération et la différenciation des progéniteurs érythroblastiques.
L’analyse des autres paramètres plasmatiques tels que
le ionogramme sanguin, le bilan hépatique ainsi que le
bilan rénal et protidique n’a pas montré de perturbations.
Lorsque ces anomalies sont notées, elles doivent orienter
vers le déficit d’autres stimulines hypophysaires. Il faut
rechercher une hypothyroïdie et/ou une insuffisance surrénalienne associées au déficit somatotrope.
BIOLOGIE HORMONALE
Certaines auteurs ont rapporté des conséquences néfastes
du déficit en hormone de croissance sur les métabolismes
osseux, glucidiques, protidiques et lipidiques [8, 9]. Il a
été démontré que les patients adultes souffrant de GHD
sévères présentaient une intolérance glucidique avec un
hyperinsulinisme, une composition corporelle anormale
avec une augmentation de la masse grasse en particulier du tissu adipeux viscéral et des anomalies du profil
lipidique caractérisé par une augmentation du cholestérol total, du LDL cholestérol, de l’apoprotéine B, une
élévation inconstante des triglycérides, une diminution
du HDL cholestérol, une augmentation du rapport LDL/
HDL athérogène et une hypertension artérielle avec des
complications cardiovasculaires. Le traitement par GH
corrige la plupart de ces anomalies. Les données concernant les adolescents GHD sont superprobables à ceux
des adultes. Chez l’enfant, le profil lipidique n’a été étudié
que par quelques auteurs [31, 32] et les perturbations ne
sont pas aussi franches que chez l’adulte. Dans cette
étude, les valeurs moyennes du HDL et LDL cholestérol
ne sont pas différentes significativement des valeurs de
référence occidentales. Cependant, le cholestérol total
était significativement abaissé chez les patients GHD.
Ces résultats ont été retrouvés aussi dans la population
algérienne normale [33]. Cette différence serait liée au
mode d’alimentation différent dans les pays développés.
Il n’en demeure pas moins que le risque athérogène existe
et augmente avec l’âge. La surveillance au long cours de
ces patients s’avère ainsi nécessaire.
Les tests pharmacologiques de stimulation de la GH sont
la pierre angulaire dans le diagnostic de GHD et cela
malgré les problèmes liés à leur interprétation, leur faible
spécificité et sensibilité et leur différence de capacité stimulatrice [34, 35]. Ces problèmes ne se sont pas posés
dans cette étude. Dans la majorité des cas, le diagnostic
a été facile du fait du caractère sévère du déficit en GH
qui a caractérisé les patients. De plus, l’imprégnation
systématique par les stéroïdes sexuels des patients en
péripuberté a permis d’éviter la possibilité de faux négatifs. Cette méthode appelée «priming» ne fait cependant
pas le consensus [33, 34, 35]. L’insuffisance des tests de
stimulation a permis le développement d’autres explorations complémentaires notamment l’IGF1 et l’IGFBP3.
Ces derniers paramètres ont contribué à renforcer le
diagnostic positif de GHD, notamment dans les déficits
congénitaux. Cependant, il existe une faible sensibilité
chez les très jeunes patients et un chevauchement des
résultats peut se voir avec les sujets sains de même âge
et les retards constitutionnels [36], ces constatations ont
été vérifiées dans cette étude.
Il est aussi important de constater qu’en comparant les
résultats de l’IGF1 chez les sujets témoins de l’étude par
rapport à une série occidentale [16], les valeurs d’IGF1
des témoins sont intermédiaires entre les valeurs des
enfants normaux et ceux ayant un retard constitutionnel.
Ces résultats témoignent des différences ethniques entre
les deux populations mais aussi du statut nutritionnel de
l’enfant algérien encore insuffisant puisque l’IGF1 dépend
étroitement de la nutrition. Aussi, il est nécessaire dans
notre contexte, d’intégrer absolument ce résultat à l’ensemble des données cliniques et paracliniques et plutôt
Tableau X – Résultats de la fonction gonadique
des patients GHD de sexe féminin en âge pubertaire,
comparaison avec une référence internationale Roger [15].
GHD
N=9
Valeurs normales
P1
P
E2 moyen
X pg/ml ± SDS
(extrêmes)
13,6 ± 5,3
(5 – 20)
15
(< 5 – 25)
DNS
FSH moyenne
X uUI/ml ± SDS
(extrêmes)
0,2 ± 0,1
(0,1 – 0,3)
1,6
(0,4 – 3,4)
DNS
LH moyenne
X uUI/ml ± SDS
(extrêmes)
0,5 ± 0,2
(0,1 – 0,8)
0,9
(0,3 – 2)
DNS
Stade pubertaire I
Tableau XI – Regroupement des déficits hypophysaires au
diagnostic des patients GHD dans les deux sexes.
Déficit hypophysaire
Nb (%)
Déficit en GH isolé
54 ( 50 )
Déficit en GH associé à d’autres déficits hypophysaires
- TSH + ACTH
- ACTH
- TSHus
- Atteinte post hypophysaire (DI)
53 (49)
20 (18,6)
15 (14)
14 (13,1)
04 (3,7)
que l’IGF1 envisager l’IGFBP3 (non encore disponible)
dans le cadre de l’exploration du RSP en Algérie. En
effet, ce paramètre est plus discriminatif avant 5 ans, et
ne dépend pas de l’alimentation [37, 38].
L’insuffisance somatotrope peut être isolée ou associée
à d’autres insuffisances hypophysaires. La fréquence du
déficit isolé est comprise entre 49 et 85 % des cas [27].
Dans cette étude, les deux formes existent en proportions
égales. La proportion importante du déficit hypophysaire
multiple s’explique par le retard au diagnostic et la particularité étiologique de la série qui se distingue par des
formes congénitales essentiellement malformatives de
la région hypothalomo-hypophysaire et génétique. Les
déficits pluri hormonaux sont pauci symptomatiques et de
découverte systématique lors de l’exploration des patients
en accord avec les données de la littérature [39, 40].
Aussi, l’exploration biologique hormonale hypophysaire
complète doit être envisagée systématiquement devant
tout GHD diagnostique afin de ne pas méconnaître une
autre insuffisance hypophysaire associée pouvant compromettre le pronostic vital.
L’absence de différence significative entre les valeurs
moyennes de TSH des 3 groupes de patients GHD
hypothyroïdiens, euthyroïdiens et témoins soulignent la
nécessité de ne pas prendre en compte la TSH comme
seul critère diagnostique de l’hypothyroïdie centrale. Ceci
est encore plus important à considérer pour l’ACTH dont
les résultats comparatifs entre les 3 groupes de patients
GHD et les témoins sont contradictoires. Ces résultats
sont liés à la méthode de dosage et aux modalités de
prélèvements. Un point à préciser est celui qui a trait au
dosage de la prolactine et des stéroïdes sexuels. Les
résultats constatés soulignent la nécessité de tests dynamiques pour l’évaluation réelle des axes prolactiniques et
gonadotropes. En effet, les fluctuations de ces hormones
rendent difficiles l’interprétation des dosages statiques.
REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - AVRIL 2009 - N°411 //
69
5. Conclusion
Le déficit en GH représente une cause minoritaire parmi
les autres étiologies de petite taille et tout médecin devrait
savoir éliminer un certain nombre de pathologies avant de
l’évoquer. Malgré un tableau clinique très évocateur, le diagnostic de GHD était tardif, ce long retard s’explique par la
méconnaissance de la pathologie et par l’absence flagrante
du suivi anthropométrique de l’enfant algérien. Lorsque le
déficit en GH est évoqué, il doit être posé sur un faisceau
d’arguments auxologiques, cliniques et paracliniques. Le
diagnostic de certitude repose sur l’absence de réponse
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70 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - AVRIL 2009 - N°411
de la GH à deux tests de stimulation pharmacologiques.
D’autres éléments paracliniques complémentaires renforcent le diagnostic de GHD. Parmi eux, le dosage de
l’IGF1 doit être soigneusement interprété et intégré à un
faisceau d’arguments cliniques et paracliniques. L’introduction de l’IGFBP3 plus intéressant dans notre contexte
devrait être envisagée.
La découverte d’un déficit en GH impose la pratique systématique d’un bilan hypophysaire complet à la recherche
d’autres déficits hypophysaires, cela est d’autant plus
important que l’étiologie est évocatrice.
Conflit d’intérêt : aucun.
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