Mai 2011 Etats-Unis: après une phase d’optimisme, le pessimisme est de retour entreprises montent aussi. Mais d’un autre côté, les salaires n’accélèrent pas. Et le niveau du taux d’utilisation des capacités de production reste malgré tout très faible, ce qui n’incitera pas les entreprises à augmenter leurs prix. L’optimisme, qui régnait en début d’année, est en train de er se dissiper. L’expansion du PIB au 1 trimestre a nettement déçu. L’environnement économique s’est substantiellement détérioré avec notamment le boom du prix de l’or noir et avec le rebond surprise de l’inflation. La conjoncture américaine est volatile, les phases d’optimisme et de pessimisme se succédant depuis le début de la crise financière. Devant ces forces contradictoires, les perspectives en matière d’inflation sont donc controversées et incertaines. Elles le sont d’autant plus que les perspectives en matière du prix du pétrole sont assez aléatoires. Durant les prochains mois, l’inflation continuera à être volatile. Cette volatilité pourrait être exacerbée par les tensions politiques dans les pays producteur de pétrole. En définitive, selon notre scénario de base, le taux d’inflation passera de 1,6% en 2010, à 3,1% en 2011 et à 2,2% en 2012. En ce qui concerne les perspectives à moyen terme, il y a des points positifs. L’épargne des ménages, qui avait grimpé au début de la récession (causant une chute de la consommation), s’est depuis lors stabilisée. La chute des crédits accordés aux ménages (moteur passé de l’économie) s’est aussi récemment enrayée. Enfin le redémarrage récent de l’emploi et cela 3 mois consécutifs suggère que la reprise de l’économie est devenue autonome: plus d’emplois signifiant plus de revenus pour les ménages et donc plus de consommation. Malheureusement les facteurs négatifs sont toujours présents. La confiance des ménages est encore toujours très déprimée. L’inflation a amputé le pouvoir d’achat des ménages avec des salaires qui baissent en termes réels. Par ailleurs la balance commerciale ne s’est pas véritablement rétablie, malgré la dépréciation du dollar. Enfin le marasme persiste dans le secteur de la construction de logements et la situation des finances publiques est désastreuse. La vague d’achats de biens intermédiaires de la part des entreprises, motivés par les anticipations de reprise de l’inflation, pourrait s’essouffler durant l’été. L’indice ISM pourrait alors descendre substantiellement. USA: Production industrielle (indice) 102 100 98 96 94 92 90 88 86 84 82 2007 2008 2009 2010 M OYENNE M OBILE 3 M OIS PRODUCTION INDUSTRIELLE 2011 Taux d’inflation 6 5 4 3 2 1 Si on prend du recul et qu’on fait abstraction de la forte volatilité des indicateurs économiques observée depuis le début de la crise financière, on constate que l’économie est sur le chemin d’une reprise en douceur. Cette tendance devrait persister à moyen terme. Entre-temps les phases d’optimisme et de pessimisme continueront à se succéder jusqu’à ce que les USA auront résolu leurs gros problèmes à savoir l’important déficit des Finances Publiques, un niveau de chômage à un niveau encore inquiétant (malgré la récente baisse), et la poursuite des saisies en masse d’immeubles. Cela ne devrait pas se produire avant 2013. En conséquence, le PIB progressera de 2,6% en 2011 et en 2012, ce qui est loin d’être brillant selon les normes américaines. L’inflation est réapparue, passant de 1,1% en novembre à 3,1% en avril. Faut-il s’en inquiéter? La réponse n’est pas facile, car l’analyse des différentes composantes de l’inflation donne une image contrastée. D’un côté, l’effervescence de la conjoncture mondiale est en partie à la base de l’envol du prix de l’or noir. Cet envol n’est cependant pas le seul responsable du retour de l’inflation. En effet les prix des produits alimentaires, le prix des produits en provenance de Chine et les prix payés par les Dexia 0 -1 -2 -3 98 99 00 01 02 03 04 05 06 TAUX D'INFLATION TAUX D'INFLATION SOUS-JACENTE 07 08 09 10 Sourc e: T homs on Datas tream Etats-Unis: prévisions de croissance du PIB par composants (croissance à un an) PIB Consommation privée Investissements des entreprises Construction résidentielle Exportations Importations Taux d’inflation Bal. opér. courantes (% PIB) Solde budgétaire (% PIB) Dette publique brute (en % du PIB) Taux d’épargne des ménages Perspcetives Economiques - Mai 2011 2010 2,9 1,7 5,7 -3,0 11,7 12,6 2011 2,6 2,9 6,0 -1,5 6,4 4,0 2012 2,6 2,4 4,5 2,7 5,6 3,9 1,6 -3,2 -10,6 90,4 3,1 -3,9 -10,6 98,1 2,2 -3,7 -7,9 102,1 5,8 5,5 5,4 1 Zone euro: une croissance économique plus vigoureuse au premier trimestre Indicateur du sentiment économique et croissance du PIB (à un an) 6 120 115 Selon une première estimation, le PIB de la zone euro a gagné, au cours du premier trimestre de cette année, 0,8% par rapport au quatrième trimestre de 2010. La consommation des ménages a contribué positivement à ce résultat, même si les ventes au détail et les ventes de voitures ne suggèrent aucune hausse spectaculaire des dépenses des ménages. Le secteur de la construction, qui avait été malmené fin 2010 en raison du rigoureux hiver, s’est redressé au cours des premiers mois de cette année et a tiré aussi le PIB vers le haut. Au cours de ces trois premiers mois de 2011, les exportations (en prix courants) et l’industrie ont enregistré des performances impressionnantes. La hausse de la production a entraîné une amélioration du taux d'occupation des capacités de production, qui, avec l’embellie sur le front des bénéfices, a encouragé les investissements des entreprises. Il se pourrait par ailleurs que cette éclaircie sur le front de la croissance du PIB soit en grande partie due à une reconstitution accélérée des stocks. Les indicateurs publiés jusqu’à présent confirment une poursuite de l’expansion économique au deuxième trimestre. Mais au cours des prochains mois, celle-ci sera plus lente, car l’augmentation de l’inflation et les assainissements budgétaires draconiens éroderont le pouvoir d'achat des consommateurs. En outre, l’appréciation de l’euro durant l’année écoulée survient à un très mauvais moment pour les exportateurs. D’après l’indicateur du sentiment économique, qui donne une idée précise de l’évolution du PIB, la conjoncture a été moins dynamique au cours du deuxième trimestre. En avril toujours, l’indice mesurant la confiance des entreprises industrielles s’est quant à lui tassé pour la première fois depuis mars 2009. Après le recul en avril, l’indice de la confiance des consommateurs s’est apprécié de manière inattendue en mai, suite à une expansion économique meilleure que er prévue au 1 trimestre. Cependant, cette hausse de la confiance ne durera pas longtemps, vu la crise grecque et les indicateurs moins favorables qui ont depuis lors été publiés. En outre, la situation du marché de travail est loin d’être brillante. Le taux de chômage s’est stabilisé en mars à 9,9%, ce qui demeure un niveau très élevé. En outre, les différences entre les pays de la zone euro demeurent énormes. En avril, les Pays-Bas affichait le taux de chômage le plus faible (4,2%), tandis qu’à l'autre extrémité se situait l’Espagne, avec un taux de 20,7%. Les cours des matières premières élevés continuent de peser sur l’inflation, qui a encore augmenté en avril pour le cinquième mois consécutif (à 2,84%, soit son niveau le plus élevé depuis octobre 2008). L’inflation sous-jacente, hors prix de l’énergie, de l’alimentation, de l’alcool et du tabac, ne s'élevait en avril qu’à 1,61%. Dexia 4 110 105 2 100 95 0 90 85 -2 80 75 -4 70 -6 65 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 PIB (CROISSANCE A UN AN) INDICATEUR DU SENTIM ENT ECONOM IQUE(R.H.SCALE) Sourc e: T homs on Datas tream Au cours des prochains mois, les cours des matières premières maintiendront l’inflation bien au-delà de la norme de 2% prônée par la BCE. Nous ne nous attendons cependant pas à un dérapage de l’inflation, car l’appréciation de l’euro, le chômage élevé, la faible croissance de la consommation des ménages et les hausses salariales modérées (qui sont facilitées par le gel, voire la baisse des salaires dans la fonction publique de plusieurs pays de la zone euro) sont autant de facteurs susceptibles de freiner la progression de l’inflation. Taux d’inflation 4.50 4.00 3.50 3.00 2.50 2.00 1.50 1.00 0.50 0 -0.50 -1.00 98 99 00 01 02 03 04 05 06 TAUX D'INFLATION TAUX D'INFLATION SOUS-JACENTE 07 08 09 10 Sourc e: T homs on Datas tream Zone euro: prévisions de croissance du PIB par composants (croissance à un an) PIB Consommation privée Investissements Exportations Importations 2010 1,7 0,8 -1,0 11,0 9,1 2011 1,9 1,1 3,0 7,3 6,6 2012 1,6 1,3 3,8 4,4 5,2 Taux d’inflation Bal. opér. courantes (% PIB) 1,6 -0,6 2,5 -0,2 2,1 0,2 Perspcetives Economiques - Mai 2011 2 Matières premières: un coup d’arrêt rude et brutal à la flambée des cours Les prix du pétrole n’ont pas échappé à la correction à la baisse des cours des matières premières observée début mai. Le recul des cours du pétrole s’expliquent par les prises de bénéfices dans le chef des spéculateurs ainsi que par l’évolution des stocks de pétrole et de la consommation d'essence aux États-Unis. Les vacances d’été sont imminentes Outre-Atlantique et, avec elles, l’augmentation saisonnière de la demande en essence. Toutefois, les prix très élevés de l’essence entraînent une baisse de sa demande (par rapport à l’année précédente). De plus, il n’y a pas pénurie en pétrole brut, comme le montrent les stocks de pétrole américains. Du reste, si une pénurie physique en pétrole devait survenir, l’OPEP pourrait sans aucun problème la compenser au moyen de ses capacités tampons. La prochaine réunion de l’OPEP aura lieu le 8 juin. Une solution à la crise libyenne ou un ralentissement marqué de la croissance économique dans les principaux pays industrialisés pourrait rapidement pousser les prix du pétrole à la baisse au cours des prochains mois. En outre, la chute de l’activité économique au Japon tempèrera à court terme la croissance mondiale de la demande de brut, ce qui modèrera les cours. Mais même si les cours du pétrole se repliaient dans le courant de cette année, leur tendance à la hausse à long terme demeurerait intacte. Les champs pétrolifères actuels, aisément exploitables, s’épuisent; l’exploration et l’exploitation de nouveaux champs (par exemple dans les fonds abyssaux) sont nettement plus difficiles et onéreuses. Les pays de l’OPEP, qui ont grandement besoin de leurs pétrodollars pour assurer le financement de projets susceptibles « d’acheter » la paix sociale, ne voient pas d’un bon œil une baisse soutenue des cours du pétrole. En raison de la catastrophe nucléaire de Fukushima et des problèmes dans d’autres centrales nucléaires, le Japon devra, à l’avenir, réduire l’apport du nucléaire dans son approvisionnement énergétique et devra donc davantage faire appel à d’autres sources d'énergie, comme le pétrole, le gaz naturel et le charbon - ce qui aura bien évidemment des répercussions sur les cours de ces ressources. Taux à court terme Lors de sa réunion de fin avril, la Fed n’a guère changé de ton, conservant un discours très relaxe. Elle a annoncé qu’elle maintiendra son taux directeur à un niveau exceptionnellement bas pour une période prolongée. Elle minimise la remontée de l’inflation. Elle est par contre préoccupée par le niveau très élevé du chômage, ce qui l’incite à reporter une hausse du taux directeur le plus loin possible dans le temps. Les risques d’inflation sont cependant loin d’être négligeables. C’est pourquoi un durcissement du taux directeur en 2012 est largement attendu par les analystes et par les marchés. Avant de relever le taux des Fed funds, elle durcira graduellement de ton de son discours. Elle mettra aussi fin à son programme d’achat massif d’obligations, ce qui réduira la stimulation de l’économie. Elle commencera à drainer les énormes excédents de liquidités qu’elle a fait circuler. Après avoir relevé son taux directeur de 25 pb pour le porter à 1,25% début avril, la BCE a laissé ce taux inchangé lors de sa réunion de début mai et a suggéré qu’elle n’y touchera pas en juin. Elle n’a donc pas réagi à la poursuite de la remontée de l’inflation qui a atteint 2,8% en avril. Contrairement à certaines attentes, elle ne s’est pas donc lancée dans un cycle de resserrement au rythme d’un relèvement des taux par mois. Elle laisse cependant la porte largement ouverte pour plusieurs relèvements ultérieurs. A l’horizon d’un an, d’autres relèvements interviendront, car la relance de l’inflation n’est pas terminée vu l’impact différé du bond du prix du pétrole, observé depuis novembre. Toutefois la BCE agira probablement en douceur. Il est loin d’être certain que la conjoncture économique restera bien orientée après l’envol du prix de l’or noir et la montée de l’euro observée durant les 12 derniers mois. Le marasme dans les pays périphériques inquiète aussi. Ces éléments tempèrent l’agressivité de la BCE. Libor en dollars et Euribor à 3 mois La demande en pétrole des pays émergents d’Asie (Inde et Chine) continuera d’exploser, notamment en raison de la croissance exponentielle de leur parc automobile. En outre, les matières premières demeureront intéressantes pour les spéculateurs, en raison des taux d'intérêt très faibles. Elles peuvent aussi servir de protection contre un affaiblissement du billet vert et une montée de l'inflation. Enfin, les évolutions sociopolitiques dans les pays arabes producteurs de pétrole influenceront aussi les cours de l’or noir. Aussi longtemps que la production pétrolière en Arabie saoudite ne sera pas mise en péril, nous ne pensons pas que les cours du pétrole atteindront des niveaux record. Dans le cas contraire, les conséquences sur les cours du brut seraient imprévisibles. Dexia 1.60 1.40 1.20 1.00 0.80 0.60 0.40 0.20 J J A S O N D J F M A EURIBOR A 3 M OIS LIBOR EN $ A 3 M OIS Perspcetives Economiques - Mai 2011 M J J A S O N D J F M A M J 3 Taux à long terme Aux Etats-Unis, le taux des IRS à 10 ans a une fois de plus changé de direction: après avoir grimpé de 2,48% le 11 novembre à 3,67% le 11 avril, il est en effet retombé à 3,19% le 25 mai suite à l’expansion décevante du PIB au 1er trimestre, au ton toujours très accommodant de la Fed et au plongeon du prix du baril. Il est loin d’être certain que cette baisse des taux soit durable, car l’évolution des prix pétroliers est assez imprévisible (comme l’est d’ailleurs la situation politique dans des pays producteurs de pétrole). Depuis l’été 2010, les achats massifs d’obligations par la Fed ont modifié l’équilibre du marché obligataire, le taux à 10 ans chutant d’abord lourdement puis se redressant. On peut toutefois se demander si ce taux n’est pas en train de retrouver un nouvel équilibre, car, depuis mi-janvier, il fluctue entre 3,2% et 3,8%. Il a ainsi renoué avec le niveau qu’il occupait avant que la Fed suggère en juin 2010 qu’elle pourrait acheter massivement des obligations du Trésor. En ce qui concerne l’avenir, dans un premier temps, le taux des IRS pourrait fluctuer entre 2,8% et 4%. Dans un second temps, ces taux pourraient monter à nouveau alors que l’économie continue à sortir en douceur de son trou et que la Fed mettra fin à sa politique de crédit gratuit aux banques. Les agences de rating commencent aussi à s’inquiéter de l’ampleur de la dette publique américaine. Cette hausse sera cependant limitée, car la conjoncture à moyen terme sera loin d’être enthousiasmante. Dans la zone euro, l’élan haussier, qui avait porté le taux des IRS à 10 ans de 2,33% le 31 août 2010 à 3,78% le 11 avril, s’est essoufflé. Ce taux est même revenu à 3,38% le 25 mai. En effet la BCE a adopté un ton quelque peu moins agressif lors de sa réunion de début mai. De plus la chute surprise des prix pétroliers écarte les scénarios de dérapage de l’inflation. Cette baisse du taux des IRS a été moins ample qu’aux USA, car alors que l’expansion du PIB a été décevante aux USA, elle a surpris positivement en Europe. Notons que le niveau du taux des IRS à 10 ans correspond assez bien à un scénario de croissance du PIB à une allure peu brillante. Ce taux incorpore déjà largement le durcissement cette année du taux directeur de la BCE. Toutefois une légère hausse à l’horizon d’un an est possible avec la poursuite du durcissement de la politique monétaire. Cette hausse sera limitée, car la conjoncture européenne ne sera guère enthousiasmante en 2012 avec la poursuite des programmes de réduction des déficits budgétaires. L’évolution difficile à prévoir des prix pétroliers pourrait perturber ces prévisions. Zone euro: spread par rapport au «Bunds allemands» (obligation d’état à 10 ans) en points de base 1600 Notons que la forte volatilité des taux, observée depuis le début de la crise financière, persistera encore pendant un certain temps au gré des vagues de pessimisme et d’optimisme qui vont encore se succéder. 1400 1200 1000 800 600 Taux des IRS à 10 ans aux USA et dans la zone euro 400 6.00 200 5.50 0 5.00 -200 2007 2008 GRECE/ALLEM AGNE IRLANDE/ALLEM AGNE PORTUGAL/ALLEM AGNE 4.50 2009 2010 2011 Sourc e: T homs on Datas tream 4.00 3.50 3.00 2.50 2.00 2005 2006 2007 2008 ZONE EURO: TAUX A 10 ANS (IRS) ETATS-UNIS: TAUX A 10 ANS (IRS) 2009 2010 Sourc e: T homs on Datas tream Dexia Perspcetives Economiques - Mai 2011 4 Achevé de rédiger le 25 mai 2011. Rédaction: Jacques De Pover, Stefan Farkas. Editeur responsable: Frank Lierman – Spaanse Kroonlaan, 27 – 3000 Leuven. Directeur de la Publication: Alain Clot – Directeur de la publication – 1 passerelle des Reflets – La Défense 2 – TSA 92002 – 92919 LA DEFENSE Cedex La reproduction d’éléments de cette publication est autorisée avec mention de la source. Les informations qui y figurent sont données à titre purement documentaire et ne peuvent engager notre responsabilité. Sources des données: Thomson Reuters Datastream – Bloomberg Eurostat Dexia Perspcetives Economiques - Mai 2011 5