Anatomie comparée du « chiasma optique » chez les Vertébrés

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UNIVERSITE DE NANTES
FACULTE DE MEDECINE
MASTER I SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES
UNITE D’ENSEIGNEMENT OPTIONNEL
MEMOIRE REALISE dans le cadre du CERTIFICAT d’ANATOMIE,
d’IMAGERIE et de MORPHOGENESE
2004-2005
UNIVERSITE DE NANTES
Anatomie comparée du « chiasma optique » chez les
Vertébrés
Par
Salaud Céline
LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES
Président du jury :
Pr. J. LE BORGNE
Vice-Président :
Pr. J.M. ROGEZ
Enseignants :
•
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Laboratoire :
Pr. O. ARMSTRONG
Dr. O. BARON
Pr. C. BEAUVILLAIN
Dr F. CAILLON
Pr. P. COSTIOU
Pr. D. CROCHET
Dr J. DELECRIN
Dr. H. DESAL
Pr. B. DUPAS
Dr E. FRAMPAS
Dr A. HAMEL
Pr. Y. HELOURY
Dr M.D. LECLAIR
Pr. P.A. LEHUR
Pr. N. PASSUTI
Pr. R. ROBERT
Pr. D. RODAT
Dr VALETTE
S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique
0
UNIVERSITE DE NANTES
FACULTE DE MEDECINE
MASTER I SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES
UNITE D’ENSEIGNEMENT OPTIONNEL
MEMOIRE REALISE dans le cadre du CERTIFICAT d’ANATOMIE,
d’IMAGERIE et de MORPHOGENESE
2004-2005
UNIVERSITE DE NANTES
Anatomie comparée du « chiasma optique » chez les
Vertébrés
Par
Salaud Céline
LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES
Président du jury :
Pr. J. LE BORGNE
Vice-Président :
Pr. J.M. ROGEZ
Enseignants :
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Pr. O. ARMSTRONG
Dr. O. BARON
Pr. C. BEAUVILLAIN
Dr F. CAILLON
Pr. P. COSTIOU
Pr. D. CROCHET
Dr J. DELECRIN
Dr. H. DESAL
Pr. B. DUPAS
Dr E. FRAMPAS
Dr A. HAMEL
Pr. Y. HELOURY
Dr M.D. LECLAIR
Pr. P.A. LEHUR
Pr. N. PASSUTI
Pr. R. ROBERT
Pr. D. RODAT
Dr VALETTE
S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique
1
ANATOMIE COMPAREE DES VOIES OPTIQUES
Je tiens particulièrement à remercier :
Monsieur le Professeur R. ROBERT, pour nous avoir attribuer un sujet de mémoire
qui nous tient à cœur, mais également et surtout pour son soutien et ses conseils précieux,
Monsieur le Professeur G. PRADAL, pour les coupes histologiques et le temps qu’il
nous a accordé, mais aussi pour nous avoir fourni un poulet,
Monsieur le Professeur P. COSTIOU et l’école vétérinaire pour leur disponibilité,
leurs conseils et leur accueil et pour nous avoir fourni les animaux,
Messieurs S. LAGIER et Y. BLIN, personnel du laboratoire d’anatomie, pour nous
avoir suivi tout au long de l’année, pour leur disponibilité et leur soutien,
Madame A. HIVONNAIT, chirurgie expérimentale et animalerie, pour nous avoir
aidé,
Monsieur P. JOLIVEL, informaticien, pour son aide.
2
SOMMAIRE
I - Introduction
II - Rappels embryologiques
III - Elément de classification des vertébrés
1) Classification rudimentaire des Cordés
2) Apparition des Vertébrés au cours des âges géologiques
IV - Rappels anatomiques
1) Poissons
2) Amphibiens et Reptiles
3) Mammifères, Homme
A- Le nerf optique
B- Le chiasma optique
C- Le tractus optique
D- Le corps géniculé latéral
E- Les radiations optiques
F-Le centre cortical visuel
G- Le Chien
4) Oiseaux
V - Matériels et méthodes
1) Pièces anatomiques
2) Instruments
3) Dissections
A- Homme
B- Chien
C- Poule
D- Poisson
VI - Approche microscopiques du chiasma optique
A- Connexions des rétines avec les centres nerveux chez les Vertébrés
B- Systématisation du chiasma optique chez l’Homme
C- Approche histologique du chiasma optique chez le Poulet
D- Approche histologique du chiasma optique chez le Renard et le Lapin
E- Radioautographie du mésencéphale d’un Amphibien
VII - Discussion
A- La présence du « chiasma », ou entrecroisement chez les Vertébrés
B- Y’ a-t-il un échange fonctionnel des fibres rétiniennes chez tous les
Vertébrés
C- Voies visuelles accessoires
D- Cas extrême du Caméléon
E- Pourquoi un chiasma ?
F- L’œil et la vision chez les Mammifères
VIII – Conclusion
IX – Bibliographie
3
I - Introduction
Vue caudale d’un encéphale d’Homme, voies optiques
La dénomination de chiasma optique provient directement de sa forme. En effet, le chiasma
est comparé à la lettre grecque khi correspondant au X de l’alphabet grec et représente
l’entrecroisement « morphologique » des deux nerfs optiques.
Cependant, la réelle signification du chiasma n’est elle pas un échange fonctionnel des fibres
rétiniennes au sein de ce dernier ? Il ne viendrait pas à l’esprit de considérer comme chiasma
le croisement de l’artère utérine avec l’uretère et pourtant leur croisement est réel.
Cet échange, bien connu chez l’Homme, est il retrouvé chez les autres Vertébrés ?
Nous allons donc tenter de démontrer si l’on retrouve un chiasma morphologique ou un réel
échange fonctionnel des fibres et de savoir si cela est corrélé au mode de fovéation des
différents Vertébrés.
Notre étude comparative portera donc sur l’Homme, le Chien, le Poisson, la Poule et quelques
planches sur les Amphibiens et les Reptiles.
4
II - Rappels embryologiques
Ontogenèse du nerf optique :
Le prosencéphale donne, avant sa division en diencéphale et télencéphale, deux
bourgeons creux latéraux appelés vésicules optiques. Ils sont reliés au cerveau par un
prolongement, le pédicule optique, qui est le futur nerf optique. Le nerf optique n’est donc pas
un vrai nerf crânien ; il est assimilable à un deutoneurone tel le tractus spino-thalamique.
Le développement du système nerveux chez l’Homme
a. fin du 1er mois
b, c, d 2ème mois
e, f début du 3ème mois
g. début du 5ème mois
5
III - Eléments de classification des Vertébrés, phylogenèse:
1) Classification rudimentaire des Cordés
Les cordés
Embranchement
des tuniciers
Embranchement des
céphalocordès
Embranchement des
vertébrés
Sousembranchement
des agnathes
Sousembranchement
des
gnathostomes
Superclasse
des Poissons
*
Classe des
Chondrichtyens
(poissons
cartilagineux)
Classe des
Batraciens
ou *
amphibiens
Classe des
Reptiles
Classe des
Oiseaux
Superordre
des Glires
Classe des
Ostéichtyens
(poissons osseux)
Crossoptérygiens et
sarcoptérygiens
Coelacanthe
Classe des
Mammifères
Superordre des
Thériens
Ordre des
carnivores
Lagomorphes
Pinnipèdes
Rongeurs
Primates
(Homme)
Fissipèdes
(Chiens)
Insectivores
6
Quelques définitions :
- Les Cordés : caractérisés par la présence d’un système nerveux dorsal et d’un axe
squelettique. La corde est située entre le système nerveux et le tube digestif.
- Les Tuniciers : leur corde dorsale est à l’état embryonnaire (sauf les appendiculaires, leur
corde dorsale est à l’état adulte). Ils sont tous marins.
- Les Céphalocordés : leur corde dorsale est sur toute la longueur avec un système nerveux
axial dilaté à son extrémité en une vésicule unique.
- Les Vertébrés : ils se distinguent des céphalocordés par la présence d’un encéphale, d’une
colonne vertébrale moulée sur la corde et d’un pharynx soudés aux parois du corps.
- Les Agnathes : classe des cyclostomes, ce sont des vertébrés aquatiques caractérisés par
l’absence de mâchoire. La plupart des espèces de ce sous-embranchement sont à l’état de
fossile, il en existe peu de nos jours.
- Les Anamniotes * : regroupent la superclasse des Poissons et la classe des Batraciens. Ce
sont des animaux dépourvus d’amnios au cours de leur développement.
- Les Amniotes regroupent, quant à eux, la classe des Reptiles, des Oiseaux et des
Mammifères. Ce sont des animaux dont l’embryon se développe dans un amnios. Il est
intéressant de remarquer que ces différentes classes shuntent l’étape du développement
aquatique en la remplaçant par un développement dans la cavité amniotique à l’intérieur de
leur mère.
- Coelacanthe : poisson crossoptérygien, « vieux quadripède », ancêtre des Vertébrés
terrestres seule espèce n’ayant pas disparue.
NB : l’amnios est une mince membrane tapissant tout l’intérieur de la cavité où se trouve le
fœtus.
Remarque : Ce tableau, non exhaustif, regroupe les principaux éléments dont nous avons
besoin pour comprendre et se situer.
2) Apparition des Vertébrés au cours des âges géologiques
-Osteichthyes :
ostéichtyens, poissons
-Amphibia : amphibien
-Reptilia : reptile
-Aves : oiseaux
-Mammalia : mammifères
D’ après P. Grassé
7
Dans leur ensemble, les Vertébrés présentent un enchaînement continu de stades
morphologiques dont l’apparition chronologique correspond à celle des divers degrés de leurs
complications.
Tout part des Poissons. D’une de leurs branches, apparaîtront les Batraciens permettant le
passage intermédiaire de l’eau à l’air. A partir des Batraciens se développent les Reptiles,
premiers Vertébrés à sortir complètement de l’eau, possédant un stade d’organisation
structural « moyen » auquel sont parvenus les Vertébrés tétrapodes. Ils sont mieux adaptés à
la vie terrestre que les Amphibiens via leurs téguments cornés et leurs œufs amniotiques. Des
Reptiles, dérivent les Mammifères et les Oiseaux, les Oiseaux formant peut-être la Classe la
plus spécialisée des Vertébrés.
Poissons
Amphibiens
Théraupsidés
Mammifères
(Circulation sanguine de gauche)
Sauropsidés
Reptiles et Oiseaux
(Circulation sanguine de droite)
Système nerveux central des Vertébrés : On retrouve ces différents étages (prosencéphale
mésencéphale et rhombencéphale) chez tous les vertébrés, mais pour chaque Classe des
Vertébrés, Ordres et genres, la morphologie cérébrale est caractéristique. Ce développement
est directement lié à des facteurs d’ordre fonctionnel. En effet, l’encéphale se perfectionne ou
régresse en fonction des caractéristiques neurophysiologiques ou psychologiques de l’espèce.
De ce fait, on peut comprendre, par l’examen anatomique de l’encéphale, le comportement
psychique ou intellectuel de son possesseur.
Le développement du mésencéphale chez les Vertébrés : on y trouve à la partie dorsale le
tectum opticum, divisé généralement en deux moitiés symétriques plus ou moins globuleuses :
les lobes optiques. Cette disposition se retrouve chez les Vertébrés inférieurs, le tectum
opticum étant le lieu d’aboutissement des deux nerfs optiques.
Chez les Mammifères, le toit du mésencéphale est formé d’une lamelle, divisé par un sillon
crucial en quatre saillis (lame quadrijumelle). Les tubercules quadrijumeaux antérieurs (colli
culli supérieurs) représentent le tectum opticum.
De ce fait, chez les Vertébrés inférieurs, regroupant Poissons, Amphibiens, Reptiles et
Oiseaux, il n’existe aucune connexion entre la rétine et le prosencéphale. Toutes les fonctions
visuelles sont condensées dans le cerveau moyen. La suppression de tout le télencéphale ne
provoque donc aucun trouble visuel.
Chez les Mammifères, la télencéphalisation progressive dépossède le mésencéphale d’un
certain nombre de ses fonctions au profit du cortex. C’est ainsi que du point de vue visuel, le
cerveau moyen perd son rôle perceptif ; il n’est plus qu’un relais réflexe de la voie sensorielle.
8
IV - Rappels anatomiques
1) Poissons
Vue dorsale du système nerveux central
Cerveau
Chiasma optique
Cervelet
Tronc cérébral
Lobe optique
(toit optique)
D’ après P. Grassé
On peut remarquer la suprématie encore très marquée des centres médullaires sur les centres
nerveux supérieurs. Nous verrons également par la suite la taille très importante des yeux par
rapport à tout l’encéphale témoignant de l’importance de la vue chez le Poisson. Il semblerait
que les Poissons n’ont qu’une sensibilité primitive, leurs seules voies sensorielles ou
ascendantes très développées sont les faisceaux spino-bulbaires, spino-cérébelleux, spinotectaux (allant aux lobes optiques) et spino-thalamiques (allant aux couches optiques).
Le toit optique apparaît (selon Cate), comme le centre réflexe le plus compliqué et le plus
puissant de tout l’encéphale. Il interviendrait dans les mouvements de la queue et des
nageoires mais aussi dans les mouvements des yeux, dans l’équilibre et le tonus musculaire
Quelques dispositions du chiasma optique chez les poissons
D’ après P. Grassé
Il semblerait que le Poisson soit le seul à posséder plusieurs conformations du chiasma
optique.
9
2) Amphibiens et Reptiles
L’amphibien adulte, vue latérale du mésencéphale et du bulbe
Nerf optique
D’ après P. Grassé
Encéphale de Lézard, en vue dorsale (en haut à gauche), en vue ventrale (en haut à droite) et
en vue latérale gauche
Hémisphère
Chiasma
optique
Toit optique
D’ après P. Grassé
10
Voies visuelles de Lacerta vivipara, à gauche vue latérale, à droite vue dorsale
Toit optique
Chiasma
optique
D’ après P. Grassé
Les connexions directes entres la rétine et les lobes optiques montrent que ceux-ci constituent,
encore chez les Reptiles, des centres visuels terminaux où les impressions lumineuses
subissent une intégration.
Les nerfs optiques se divisent en deux fascicules s’entremêlant au niveau du chiasma.
3) Mammifères, Homme
L’ensemble des formations parcourues par l’influx nerveux provoqué par excitant spécifique,
dit lumineux, constitue les voies optiques. Elles s’étendent de la rétine aux centres corticaux
de la vision.
Trois neurones constituent les voies visuelles de la rétine au cortex occipital, le premier
neurone est intra-rétinien, le deuxième va de la rétine aux corps géniculés latéraux et arrive ici
aux centres optiques primaires : corps géniculés latéraux (CGL) et thalamus, où les voies
visuelles se séparent en une voie réflexe qui va aux colli culli supérieurs, et une voie
sensorielle, constituant le troisième neurone, qui va à l’écorce des 5ème et 6ème circonvolution
occipitales.
Le nerf optique, simple évagination du tube neural, n’a pas la structure d’un nerf périphérique.
Sa myélinisation s’effectue sur le mode propre au système nerveux central. Les trois tuniques
méningées se prolongent sur toute sa longueur.
A- Le nerf optique
Le nerf optique, naissant de la papille, est le résultat de la condensation des fibres nerveuses
intra-rétiniennes, environ 800000, issues des cellules ganglionnaires. Il traverse la cavité
orbitaire, franchit le canal optique, devient intra-crânien, et se termine au niveau du chiasma
optique.
Il comprend donc, par son trajet, trois portions : une portion intra-orbitaire où il est entouré de
tissu cellulo-adipeux, de vaisseaux et de nerfs ; une portion intra-canaliculaire où il s’engage
dans le canal optique avec l’artère ophtalmique ; une portion intra-cranniène courte à la face
inférieure du cerveau.
11
Nerf optique et cavité orbitaire: rapports musculo-nerveux
Avant
Droite
Glande lacrymale
M. droit
médial
M. oblique sup.
et nerf trochléaire
M. releveur de la
paupière sup. et
nerf frontal
Chiasma optique
M. droit latéral
D’ après le Netter
B- Le chiasma optique
Le chiasma optique (Chiasma Opticum), bandelette blanche quadrilatère est la réunion des
deux nerfs optiques.
De ses deux angles postérieurs, s’échappent les deux tractus optiques (bandelettes optiques).
Trois types morphologiques peuvent être décris :
- chiasma en antéposition, nerfs optiques courts (5%) ; schéma A
- chiasma en situation moyenne, condensé, régulier, position intermédiaire la plus
fréquente (91%)
- chiasma en rétroposition le chiasma est couché sur la tige pituitaire, nerfs optiques
longs (4%) ; schéma C
Principaux types morphologiques de chiasma optique (schématique)
D’après G. Paturet
A. Type à commissure chiasmatique
B. Type en X (chiasma condensé, sensiblement quadrilatère)
C. Type en H à branches curvilignes, avec angles chiasmatiques antérieur et postérieur aigus
12
Le chiasma est situé à la face inférieure du cerveau, en arrière du tubercule de la selle, il
repose sur le versant antérieur de la tente hypophysaire (diaphragme de la selle turcique).
Rapports du chiasma optique avec les vaisseaux artériels de la base et avec la tige pituitaire.
(Imité de FAVORY)
Haut
Arrière
D’ après G. Paturet
On peut remarquer la proximité du chiasma avec l’hypophyse, expliquant le retentissement
des tumeurs de cette dernière sur les voies optiques (responsable d’hémianopsie bitemporale).
Ces rapports sont variables en fonction de la morphologie du chiasma.
C- Le tractus optique
Le tractus optique ou bandelette optique s’étend de l’angle postéro-latéral du chiasma aux
corps géniculés latéraux. Il est dirigé en arrière et en dehors, contourne le pédoncule cérébral
de telle sorte qu’elle offre dans son ensemble un aspect curviligne à concavité interne. Il est
en rapport en dedans avec la tige pituitaire, en dehors avec la terminaison de l’artère carotide
interne, en haut avec le plancher du troisième ventricule.
D- Le corps géniculé latéral
Il constitue le véritable centre primaire de la vision. Appartenant au métathalamus, il se
présente sous la forme d’une saillie ovalaire blanc grisâtre, situé contre la face latérale du
pédoncule cérébral.
13
Vue schématique sur une coupe transversale du lobe occipital (vue caudale):
Tractus optiques et corps géniculés latéraux ; trajet et rapports des radiations optiques
Avant
Gauche
D’après G. Paturet
E- Les radiations optiques
Les radiations optiques de Gratiolet : Elles s’étendent du corps géniculé latéral à l’écorce
grise du lobe occipital où se trouve le centre cortical de la vision. Elles se dirigent tout
d’abord vers l’avant et le dehors, décrivent un arc de cercle à convexité antérieure atteignant
le lobe temporal (cet arc est désigné sous le nom de détour d’Adolf Meyer). Ensuite elles
s’incurvent en arrière et en dedans contre le versant externe de la corne occipitale du
ventricule latéral. Au niveau de la partie moyenne de la corne occipitale, les radiations
optiques se divisent en deux faisceaux qui se placent au dessus et au dessous de la corne
occipitale du ventricule latéral. Ces deux faisceaux vont se terminer au niveau de la scissure
calcarine du cortex occipital.
14
F- Le centre cortical visuel
Autrement appelé aire visuelle, il est situé à la face interne du lobe occipital au-dessus et audessous de la scissure calcarine. On peut distinguer deux zones : l’aire visuelle proprement
dite et l’aire visuo-psychique.
Trajet schématique des voies optiques extra et intra cérébrales, représentées sur une vue
caudale du cerveau
Avant
Gauche
1 globe oculaire G.
2. Nerf optique G.
3. Chiasma optique
4. Tractus optique G.
5. Corne temporale du ventricule latéral
6. Corps géniculé latéral
7. Radiations optiques de Gratiolet
8. Radiations optiques (faisceau dorsal)
D’après A. Bouchet
G-Le chien
Chiasma optique
Bulbe olfactif
On peut remarquer l’importance des bulbes olfactifs,
témoignant de l’odorat très développé des chiens.
Vue antéro-inférieure
15
4) Oiseaux
Vues schématiques dorsale (à gauche), ventrale (à droite) et latérale du cerveau d’un Oiseau
Hémisphère
Chiasma optique
Lobe optique
Cervelet
Tronc cérébral
D’après P. Grassé
La masse du cerveau de l’Oiseau est bien supérieure à celle des Reptiles, cette augmentation
est le terme d’une évolution qui caractérise les Reptiles, ancêtres des Oiseaux.
Cette supériorité concerne toutes les parties du cerveau mais plus particulièrement les
hémisphères et le cervelet. Cependant les hémisphères restent une formation réduite et ne
présentent pas les circonvolutions caractérisant le cerveau de beaucoup de Mammifères.
Ce développement des hémisphères et du cervelet chasse les lobes optiques de leur position
primitive dorsale, et les pousse du côté ventral et en avant. Le développement important des
yeux, se touchant presque dans le plan sagittal, donne au cerveau cette disposition
particulière. Leurs yeux sont hautement organisés avec non rarement deux fovéas (une latérale
et une centrale). Les deux lobes optiques ont un développement proportionnel à l’importance
de l’organe visuel.
16
V - Matériels et méthode
1) Pièce anatomique
- 2 sujets formolés, deux femmes
- 1 chien formolé
- 1 dinde formolée
- 1 carpe formolée
- 1 renard frais
- 1 poisson frais (grondin rouge) et 1 sujet humain frais inexploitables
- 1 poule et 1 lapin frais.
2) Instruments
- une scie pour les prélèvements
- un billot pour maintenir les têtes des différentes pièces anatomiques
- pour les plans superficiels, un bistouri lame 23, des ciseaux, une pince et une rugine
pour enlever les adhérences
- une scie circulaire, un burin, une spatule pour accéder à la région intracrânienne
- des instruments de microchirurgie pour les pièces animales comme le Poisson et la
Poule
- un écarteur pour enlever la mandibule chez l’Homme pour la voie d’abord inférieur
- une fraiseuse pour rogner l’os et réaliser des volets osseux
- des lunettes de protection
3) Dissections
A- Homme
1. plan superficiel
Nous pratiquons une incision médiane de la protubérance occipitale externe à l’espace
intersourcillier. Puis nous réclinons les deux lambeaux de cuir chevelu, ensuite nous réalisons
une exérèse des muscles frontal et occipital reliés par l’aponévrose épicrânienne.
2. trépanation
Pour enlever la voûte crânienne, nous réalisons un trait de scie horizontal intéressant la
calvaria, mené des arcades sourcilières à la protubérance occipitale. Nous séparons la duremère de la calvaria en la décollant, puis nous l’incisons dans l’axe du sinus longitudinal
supérieur, nous coupons la faux du cerveau au niveau de ses deux insertions, la crista galli et
la tente du cervelet, pour ensuite récliner les deux parties sur les côtés.
3. ablation du cerveau
Le cerveau maintenant exposé, nous réalisons l’ablation de la partie supérieure de l’encéphale
située au dessus de l’axe horizontal des sourcils, à l’aide d’un couteau en incisant dans le sens
antéro-postérieur. La partie restante des différents lobes cérébraux est enlevée au fur et à
mesure pour respecter le chiasma et ses différents rapports.
4. l’orbite et son contenu
17
Pour accéder à la cavité orbitaire, nous retirons à l’aide d’un marteau et d’un burin la face
supérieure de la partie orbitaire de l’os frontal, allant de la crista galli à la petite aile du
sphénoïde.
Le sac graisseux péri-orbitaire est incisé, puis nous enlevons progressivement à l’aide d’une
pince la graisse pour mettre à nu le contenu de l’orbite.
5. le chiasma optique et ses rapports
Avant
Droite
Nerf frontal
Muscle releveur
de la paupière
supérieure
Globe oculaire
Nerfs ciliaires courts
Muscle droit latéral
Muscle oblique
supérieur
Artère cérébrale
antérieure
Nerf optique
Artère cérébrale
moyenne
Chiasma optique
Artère carotide
interne
18
6. le sinus caverneux
Nous incisons délicatement la dure-mère et le sinus caverneux et ôtons le sang contenu dans
ce dernier.
Haut
Avant
Chiasma optique
Artère carotide
interne
Nerf
oculomoteur
Nerf optique
Nerf trochléaire
Nerf
ophtalmique V1
Ganglion
trijéminal
Nerf maxillaire
V2
Nerf
mandibulaire V3
19
7. selle turcique
Nous coupons les deux tractus optiques, puis nous réclinons le chiasma pour visualiser ses
rapports inférieurs (artères et hypophyse).
Avant
Droite
Chiasma récliné
Hypophyse
Artère
ophtalmique
Artère carotide
interne
Tige pituitaire
Dos de la selle
turcique
Artère
communicante
postérieure
Artère cérébrale
antérieure
Artère sylvienne
Nerf oculomoteur
20
Sur cette première pièce nous avons pu effectuer quelques mesures ; l’épaisseur du chiasma
est de 3 mm, mesurant 7 mm dans le plan sagittal et 13 mm dans le plan frontal, le chiasma
étant sur cette pièce en situation moyenne, en position intermédiaire.
8. rapports inférieurs du chiasma optique
Pour la deuxième pièce humaine, nous réalisons une voie d’abord inférieure.
Tout d’abord, nous pratiquons, au niveau des deux fentes labiales, une incision remontant à
hauteur de l’articulation temporo-mandibulaire.
Nous coupons la capsule articulaire de cette articulation de façon à désolidariser le processus
condylaire de la mandibule de la fosse mandibulaire. A l’aide d’un écarteur, nous la luxons
puis nous la retirons en coupant préalablement les muscles de la mastication et du pharynx s’y
terminant.
Ensuite nous scions au-dessus du maxillaire pour l’enlever, puis retirons avec la pince kerison
l’os palatin, le vomer, les lames du processus ptérygoïde, la lame perpendiculaire de
l’ethmoïde et les cornets nasaux.
Nous accédons à l’orbite en réalisant les volets osseux nécessaires grâce au burin et au
marteau, nous individualisons les nerfs optiques et les globes oculaires en enlevant tous les
autres éléments de l’orbite.
Par la suite, nous pratiquons d’autres volets osseux au niveau de la base externe du crâne en
étant particulièrement précautionneux au niveau du sinus sphénoïdal pour ne pas endommager
l’hypophyse. Nous coupons à leur naissance les nerfs crâniens et mettons à nu l’encéphale et
le cervelet en coupant la dure-mère qui les protége (photos ci-après).
21
Bas
Droite
Pont du tronc
cérébral
Artère basilaire
Nerf
oculomoteur
Artère carotide
interne
Hypophyse
Tige pituitaire
Chiasma
Nerf optique
Tractus olfactif
22
9. cercle artériel du cerveau, polygone de Willis
Nous enlevons le cervelet en incisant les pédoncules cérébelleux supérieurs, moyens et
inférieurs, puis nous coupons la tente du cervelet.
Nous coupons la tige pituitaire et le tronc cérébral sous la naissance du nerf oculomoteur,
à la jonction du mésencéphale et du pont.
Bas
Droite
Artère cérébrale
postérieure
Nerf
oculomoteur
Artère
communicante
postérieure
Artère basilaire
Corps
mamillaire
Tige pituitaire
Chiasma
23
Artère
cérébrale
antérieur
e
Chiasma
Artère
communicante
antérieure
Nerf
optique
Gauche
Arrière
24
10. les voies optiques
Nous faisons une incisure dans le parenchyme cérébral le long du bord médial de la corne
occipitale du ventricule gauche de manière à conserver les radiations optiques, puis nous
enlevons progressivement le parenchyme cérébral des lobes temporal et occipital pour
mettre en évidence les radiations en trois dimensions.
A droite, nous pratiquons une incisure transversale de l’hémisphère droit à hauteur du
tractus optique et de l’artère optique profonde naissant de l’artère cérébrale moyenne et
allant jusqu’au genou des radiations optiques, ainsi nous visualisons les radiations
optiques en deux dimensions.
Globe oculaire
Nerf optique
Chiasma
Tractus
optique
Genou
Corps
géniculé
latéral
Radiations
optiques
gauches
Scissure
calcarine
Avant
Gauche
Cortex
occipital
visuel
25
B- Chien
1. plan superficiel
Nous incisons la peau pour mettre à nu le crâne, ensuite nous retirons les muscles
temporaux très épais chez le chien témoignant de la puissance de leur mâchoire, puis, avec
un burin et un marteau, nous accédons à l’encéphale.
2. système nerveux
Nous réalisons une exérèse des hémisphères cérébraux et du cervelet et libérons les nerfs
optiques de leur canal optique.
Thalamus
Chiasma
optique
Nerf
optique
Haut
Gauche
Par la suite, nous coupons les nerfs optiques pour les soulever et mettre en évidence leurs
rapports inférieurs qui, toutes dimensions gardées, sont similaires à l’Homme.
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Nerf optique
Chiasma optique
Tige
pituitaire et
hypophyse
Artère carotide
interne
Pour isoler le tronc cérébral, nous coupons ses différentes attaches, comme la tige pituitaire et
les nerfs crâniens.
Haut
Gauche
Nerf optique
Chiasma optique
Tractus optique
Artère cérébrale
postérieure
Tige pituitaire
Artère basilaire
27
C- Poule
1. plan superficiel
Nous incisons la peau et la décollons du crâne, puis nous accédons à l’encéphale
progressivement en rognant l’os avec la pince kerison (travail long et délicat car l’os
est très spongieux et fragile).
2. système nerveux
Nous retirons les différentes structures entourant l’encéphale et les nerfs optiques de
manière à n’obtenir que le système nerveux central et les deux yeux.
Haut
Gauche
Encéphale
Tractus
optique
Chiasma
optique
Globe
oculaire
Vue antérieure
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Vue inférieure
Avant
Gauche
Chiasma optique
Lobe optique
Tronc cérébral
Vue latérale gauche
Haut
Arrière
Cervelet
Lobe optique
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D- Poisson
Nous retirons la peau et la chair avec une pince, le cartilage est ensuite enlevé délicatement,
pour respecter le système nerveux, à l’aide de la pince kerison. Nous remarquons
l’indépendance complète des deux nerfs optiques au niveau du chiasma.
Avant
Vue caudale
Gauche
Globe oculaire
et nerf optique
Chiasma
optique
Lobe optique
Tronc cérébral
Vue latérale droite
Haut
Avant
Lobe optique
Nerfs optiques
indépendants
l’un de l’autre
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VI - Approche microscopique du chiasma optique
A - Connexions des rétines avec les centres nerveux chez les Vertébrés
A. Poissons
B. Batraciens, Sauropsidés
(Reptiles et Oiseaux)
C à E. Mammifères
C. Rongeurs
D. Carnassiers
E. Primates
r. rétine ;
lod ,log : lobe optique
droit,gauche ;
ch : chiasma ;
cgld,cglg : corps géniculés
latéraux droit et gauche ;
ro : radiations optiques ;
fc, fd : faisceau croisé et
direct du nerf optique
D’ après P. Grassé
Le chiasma des nerfs optiques et les connexions de la rétine avec les centres cérébraux dans
la série des Vertébrés
- Les poissons : les yeux sont latéraux, l’entrecroisement est complet, chaque nerf optique se
termine en totalité dans le lobe optique opposé, les nerfs optiques sont indépendants l’un de
l’autre, l’un passant au dessus de l’autre. C’est un simple croisement sans échange de fibre.
Chaque hémisphère ne recevra que l’image d’un oeil et un seul en totalité.
- Batraciens et sauropsidés : l’œil est latéral ou semi-latéral, l’entrecroisement est
morphologique mais se fait par fascicules avec donc une tendance au regroupement
fonctionnel des fibres visuelles. Il semblerait que certains Batraciens aient une voie
ipsilatérale mineure.
-Mammifères : entrecroisement non fasciculaire, d’après Grassé, c’est seulement chez ces
derniers qu’il y a un faisceau direct appelé « faisceau mammalien du nerf optique » qui croît
en proportion du rapprochement des axes optiques c'est-à-dire de la frontalisation orbitaire.
-Rongeurs : œil latéral ou semi latéral, un petit faisceau direct se termine dans le
corps géniculé latéral homolatéral ; de ce dernier partent les radiations optiques qui se
terminent dans l’écorce visuelle.
-Carnassiers : la disposition est la même, le contingent homolatéral est plus
volumineux du fait de la position moins latérale de l’œil
-Primates : les deux yeux sont frontalisés, les deux axes optiques sont parallèles dans
la vision à distance, les deux champs visuels monoculaires se recouvrent dans une étendue qui
équivaut aux deux tiers du champs total binoculaire. Le faisceau direct atteint son maximum
de développement.
31
B - Systématisation du chiasma optique chez l’Homme (vue caudale)
D’ après A. Bouchet
Nous pouvons remarquer que les fibres optiques subissent une véritables décussation, par
entrecroisement partiel :
Le faisceau maculaire (provenant de la macula où se trouve la fovéa, point épicritique de la
rétine) a une double destinée, un contingent direct suivant les fibres temporales et un
contingent croisé suivant les fibres nasales.
Le faisceau temporal (constituant 1/3 des fibres du nerf optique) est direct, il longe le bord
latéral du chiasma, ses fibres décrivent des boucles à concavité externe dont certaines
atteignent presque la ligne médiane.
Alors que le faisceau nasal (2/3 des fibres) est croisé, il se divise en deux fascicules : l’un
provenant du quadrant supéro-interne de la rétine, l’autre du quadrant inféro-interne.
Par cette disposition des fibres rétiniennes, nous pouvons comprendre les symptômes
entraînés par une lésion du chiasma : par exemple une atteinte de la portion médiane du
chiasma (tumeur de l’hypophyse par exemple) détruisant le faisceau nasal, provoquera une
hémianopsie bitemporale.
C - Approche histologique du chiasma optique chez le Poulet
Prélèvement
Vue macroscopique des lobes optiques et
du chiasma après imprégnation
Nous réalisons des coupes frontales centrées sur le chiasma optique du poulet.
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Coupe frontale du chiasma optique sans aucun grossissement
Haut
Dehors
Chiasma
morphologique
Fibres
rétiniennes
Nerf
optique
Vue microscopique du chiasma optique du poulet (objectif *4)
Haut
Dehors
Nous observons l’entrecroisement des fibres rétiniennes mais le plan de coupe ne permet pas
de définir s’il existe des fibres restant strictement homolatérales.
Nous pouvons remarquer que l’entrecroisement des fibres rétiniennes se fait par fascicules (le
poulet appartenant aux Sauropsidés ; explications ci-dessus).
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D - Approche histologique du chiasma optique chez le Renard et le Lapin
L’intérêt de rajouter le Lapin à notre étude histologique est que, chez les Mammifères aux
yeux très latéraux, la proportion des fibres rétiniennes homolatérales est faible contrairement
au cas extrême des Hommes.
Imprégnation du
chiasma du Renard
Prélèvement du
chiasma de Lapin
Imprégnation du
chiasma du Lapin
Coupes frontales de chiasmas sans aucun grossissement :
Chiasma de Renard
Chiasma de Lapin
Cependant les coupes transversales des chiasmas du Lapin et du Renard sont difficilement
interprétables contrairement au Poulet, les fibres rétiniennes étant beaucoup moins visibles.
Cela provient peut être du mode d’entrecroisement des nerfs optiques au sein du chiasma.
En effet l’entrecroisement par fascicules chez les Oiseaux facilite peut être leur mise en
évidence en coupe frontale, alors que l’entrecroisement par fibres isolées chez ces
Mammifères rend plus délicate leur visualisation sur ces coupes.
34
E - Radioautographie du mésencéphale d’un Amphibien
Haut
Droite
Toit optique
(marqué)
Tractus
optique
marginal
latéral
(marqué)
Tractus optique
marginal médial
(marqué)
Commissure
postérieure
Tractus
optique basal
(marqué)
Cette radio-autographie montre la répartition des voies visuelles.
On remarque que le marquage (à la proline 14C) s’étend sur l’ensemble des couches tectales
controlatérales à l’œil injecté (œil droit). Cela témoigne donc de l’entrecroisement complet
hérérolatéral sans échange des fibres rétiniennes d’un œil à l’autre. C’est l’exemple type d’un
chiasma purement morphologique.
35
VII - Discussion
A - La présence du « chiasma », ou entrecroisement chez les vertébrés :
Chez tous les vertébrés; les deux nerfs optiques s’entrecroisent à la base du cerveau, on
pourrait donc penser qu’ils ont tous un « chiasma ».
Les différences sont en fait liées au besoin ou non de corticalisation de l’image en tant que
vécu conscient et donc de l’existence ou non des projections corticales. On peut penser que
chez les êtres moins évolués, la corticalisation est faible, voire inexistante. De ce fait, les
projections visuelles se font plus sur le tectum mésencéphalique que sur le métathalamus qui
n’est en fait qu’un filtre précortical. Considérant la vision comme un organe des sens de
sauvetage et non pas d’analyse dans ces espèces, le simple arc réflexe peut suffire à faire
éviter les obstacles par exemple, ce qui n’impose pas un développement sophistiqué de
l’intégration ; en revanche dès que la fonction visuelle devient utile à la survie « active » et
notamment pour la quête de la nourriture, il faut alors repérer la proie, évaluer sa distance, la
distinguer des autres plants environnementaux, et estimer sa trajectoire. Cela suppose une
intégration progressivement tridimensionnelle et donc une fovéation progressivement
binoculaire et donc l’existence d’un chiasma fonctionnel vrai.
Chez tous les vertébrés (inférieurs), Poisson, Amphibiens, Oiseaux, Reptiles, les tractus
optiques se dirigent directement vers le lobe optique, situé aux confins du métathalamus et du
tectum mésencéphalique. Chaque tractus optique se termine en totalité dans le lobe optique
opposé. Cependant d’après Cajal, chez certains oiseaux, il y aurait une ébauche de connexion
du lobe optique avec l’écorce cérébrale. Or il n’est pas décrit chez eux de chiasma
fonctionnel. A l’image du caméléon, il n’est pas impensable que les oiseaux ne fonctionnent
que sur un mode de fovéation alternée, autrement dit œil par œil.
Ce n’est que à partir d’un certain degré d’évolution, chez les Mammifères, que les fibres
optiques se dirigent en majeure partie vers les corps géniculés latéraux appartenant au
diencéphale et donc au métathalamus. C’est le filtre visuel qui ne laissera passer les
informations importantes qu’avec parcimonie ; la plupart du temps, le tectum voisin mais
aussi les systèmes de la motricité automatique prennent le relais sans perturber la fonction
majeure du télencéphale orientée vers la pensée.
B - Y’ a-t-il un échange fonctionnel des fibres rétiniennes chez tous les
Vertébrés ?
Chez les vertébrés inférieurs, Oiseaux compris, l’entrecroisement des fibres rétiniennes est
total au niveau du chiasma ; on peut dire que leur lobe optique droit regarde avec l’œil gauche
et réciproquement. Les deux yeux sont indépendants l’un de l’autre, toutes les fibres de
chaque nerf optique vont dans le lobe optique opposé. De plus, il semblerait qu’il n’y ait pas
de connexion au niveau des deux lobes optiques (la question se posait de par la convergence
des lobes optiques dans leur partie postérieure). Ils possèdent donc une fovéation alternée,
c’est à dire que l’intégration corticale des images ne provient que d’un seul œil.
L’indépendance des réactions pupillaires (réflexe photomoteur) des yeux droit et gauche
semble confirmer cette théorie.
C’est seulement chez les mammifères qu’apparaît un contingent direct au niveau des fibres
optiques : « le faisceau mammalien du nerf optique ».
Ce faisceau direct croît en proportion du rapprochement des axes optiques ; l’importance du
contingent direct parait généralement liée à la disposition des yeux. Les Mammifères
possèdent donc, au sein de cet entrecroisement un échange fonctionnel des fibres rétiniennes.
36
Il faut noter que, plus les yeux sont disposés latéralement, moins le contingent direct est
important et parallèlement moins la vision binoculaire est développée.
Dans ses conditions, l’image d’un point lumineux situé à gauche de la ligne médiane se
formera sur la partie droite des deux rétines, c'est-à-dire sur la partie temporale de la rétine
droite (faisceau direct) et sur la partie nasale de la rétine gauche (faisceau croisé). Les deux
images iront donc se fusionner dans un seul centre récepteur (corps géniculé latéral droit :
première superposition) et seront vues en vision binoculaire et simple. De plus, il existe une
deuxième superposition entre les deux hémi-cortex visuels droit et gauche grâce aux
radiations du corps calleux.
C - Les voies visuelles accessoires (depuis les travaux de Gudden, 1881)
Un ou souvent deux petits contingents de fibres myélinisées fines quittent les tractus optiques
avant leurs terminaisons habituelles (CGL, TQA, thalamus), pour se diriger vers
l’hypothalamus et/ou la formation réticulée. Il semblerait qu’ils pourraient assurer les
relations fonctionnelles entre la rétine et ces deux structures. Ces connections sont retrouvées
chez tous les vertébrés, des Batraciens à l’Homme. Leur rôle est mal défini.
D - Cas extrême du caméléon
Le Caméléon représente un cas extrême de ce qui se passe chez les Vertébrés inférieurs. En
effet, il possède deux champs visuels tout à fait indépendants. La forme piriforme de ses yeux
est spécifique et entraîne un rétrécissement du champ visuel par la petitesse de la cornée et la
faible étendue de la rétine. Il est infiniment probable que c’est une réduction du champ visuel
qui oblige l’œil du Caméléon aux perpétuels mouvements de recherche œil par oeil. De plus,
c’est peut-être l’extrême mobilité de ses yeux qui a rendu la convergence binoculaire inutile.
L’oculocéphalogyrie est remplacée chez lui par une symbiose fonctionnelle optico-linguale. Il
aurait été intéressant d’étudier cet animal, travail ultérieur à proposer.
E - Pourquoi un chiasma ?
« La célèbre théorie de Cajal sur la nécessité d’un chiasma repose sur la méconnaissance des
phénomènes visuels » dixit Grassé.
En effet, il pensait que chez les vertébrés inférieurs, l’image du champ visuel enregistré par
les centres optiques supérieurs présentait une solution de continuité grâce à l’entrecroisement
des nerfs optiques mettant en rapport le lobe optique droit avec la rétine gauche et
réciproquement. Le chiasma, selon Cajal, permettait aux deux champs visuels indépendants
d’apparaître continus.
Cependant, on peut objecter que s’il n’y a pas de communication interhémisphérique via le
corps calleux, et si chaque lobe optique ne reçoit les images que d’un seul œil, cette fonction
n’est pas remplie tant au niveau d’intégration primaire qu’est le lobe optique, qu’au niveau
cortical à plus forte raison. La nécessité d’un chiasma, fut-il uniquement morphologique ne
trouve pas plus d’explication que la décussation cortico-spinale entre autres. On peut admettre
que ces voies sensorielles pourraient se plier à l’exigence motrice mais là encore les voies
simples, directes constituées de façon homolatérale par les fibres des nerfs oculogyres forment
au niveau du tronc cérébral un « chiasma » que l’on nomme le tractus longitudinal médial très
directif dans son organisation.
En fait tout part de l’image. Ensuite elle sera analysée différemment soit sous forme
d’obstacle ou de sujet non intéressant. Dès lors, une simple réponse réflexe est suffisante. Soit
l’image revêt un intérêt particulier et les voies réflexes, dont doivent se contenter de
nombreuses espèces, deviennent insuffisantes et doivent être complétées par une ouverture du
37
filtre thalamique vers le cortex. Ce dernier n’enregistrera à terme qu’une image partie de deux
caméras parallèles. C’est un des prodiges de l’hominisation. Le fait d’avoir un vrai chiasma
permet d’intégrer par les deux yeux une seule et même image et d’occulter les images
parasites (arête nasale).
F - L’œil et la vision chez les mammifères
L’orientation des globes oculaires est liée à leur mode de vie.
En effet, les proies potentielles ont un champ visuel très large de par leurs yeux latéraux, de ce
fait on comprend qu’ils aient une faible vision binoculaire.
Par contre, les prédateurs ont des yeux plutôt frontaux, avec une vision binoculaire
importante.
VIII - Conclusion
Par cette étude, nous avons montré que l’entrecroisement des deux nerfs optiques est bien
présent chez les différents Vertébrés ; on pourrait ainsi en déduire qu’ils possèdent tous un
« chiasma » si la définition de chiasma se limitait à l’entrecroisement morphologique des
deux nerfs optiques.
Cependant, cette dénomination n’est-elle pas abusive si on considère le chiasma comme un
échange fonctionnel des fibres rétiniennes ?
Par cette nouvelle définition, on peut penser que seuls les Mammifères possèdent réellement
un chiasma car ce sont les seuls à avoir au sein de ce dernier un échange fonctionnel de leurs
fibres leur apportant une fovéation binoculaire.
Les Vertébrés inférieurs, possédant une fovéation alternée, n’auraient donc qu’un
entrecroisement morphologique des deux nerfs optiques.
Peut être faudrait-il reconsidérer la terminologie de « chiasma » en se souciant de l’anatomie
fonctionnelle et faire par cette terminologie une différence entre entrecroisement
morphologique et échange fonctionnel des fibres rétiniennes ?
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IX - Bibliographie
1 G. Paturet : Traité d’anatomie humaine, Système nerveux, Tome IV
2 A. Bouchet et J. Cuilleret : Le système nerveux central, face, tête et organes des sens
3 F. H. Netter : Atlas d’anatomie humaine
4 P. Grassé : Traité de zoologie
5 P. Grassé : Anatomie comparée des Vertébrés
6 P. Grassé : Agnates et Poissons
7 P. Grassé : Reptiles, caractères généraux et anatomie
8 P. Grassé : Oiseaux
9 P. Grassé : Amphibiens
10 J. Poirier, I. Poirier, J. Baudet : Embryologie humaine
11 P. Laget : Elément de neuroanatomie fonctionnelle
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