Patch cardiaque et embryon. Toujours l’embryon. Janvier 2015 Pr Roger GIL Directeur de l’Espace de Réflexion Ethique Poitou-Charentes L’INSERM (Institut National de la Santé et de la recherche médicale), relayé par la presse grand public, a publié ce 16 janvier, un communiqué annonçant une première mondiale : il s’agissait en l’occurrence d’une greffe de cellules embryonnaires différenciées en tissu cardiaque incorporé dans un patch constitué d’un gel de fibrine, appliqué avec quelques points de suture au niveau de la région nécrosée du cœur, celle donc qui avait été le siège d’un infarctus. Le communiqué de l’INSERM a l’intérêt de renseigner précisément sur les conditions de mise en oeuvre de cet acte chirurgical. La grande presse a essentiellement retenu l’espoir que pouvait susciter une telle thérapeutique. Certes mais le communiqué de l’INSERM fournit d’autres précisions qui doivent aussi être connues des citoyens. Le premier point est qu’il s’agit de ce que l’on appelle un essai clinique de phase 1. Certes un tel essai peut permettre de constater les effets positifs d’une telle intervention mais tel n’est pas le but réel d’in essai de phase 1 dont l’objectif scientifique est de déterminer si une telle procédure est acceptable en termes de faisabilité et de sécurité pour le malade. Quand il s’agit de médicaments, les essais de phase 1 sont réalisés chez des sujets sains volontaires. Une telle procédure ne serait pas acceptable en cas d’intervention chirurgicale, ce qui explique que ce sont nécessairement des sujets déjà malades qui sont recrutés. Par ailleurs, un tel essai ne peut concerner qu’un nombre limité de personnes, ici 5. Enfin cette greffe de cellules embryonnaires s’est faite à l’occasion d’une thérapeutique classique qui a été faite en même temps, c’est-à-dire un pontage coronarien. La personne opérée a 68 ans, elle est atteinte d’une grave insuffisance cardiaque. Elle a été opérée le 21 octobre 2014 et elle se porte bien dix semaines après l’opération. Mais bien du chemin reste à faire: quand cinq patients auront ainsi été opérés, il faudra alors déclencher un nouvel essai clinique, au niveau international pour compare l’évolution de la fonction contractile du cœur chez des sujets traités tous par pontage mais en comparant l’évolution de ceux qui on en plus la greffe d’un patch par rapport au sujet qui n’auront pas de patch. Restent bien d’autres questions : Les cellules utilisées dans cet essai français proviennent d’embryons destinés initialement à une fécondation in vitro, donc des embryons surnuméraires donnés à la recherche avec l’accord des parents. Une telle étude ne serait-elle pas envisageable avec des cellules souches adultes reprogrammée ou des cellules souches de sang de cordon ombilical ? Il faut dire que cette même équipe avait coordonné voici plus de dix ans, une étude européenne multicentrique utilisant des cellules souches de muscle squelettique, et il n’y avait eu aucun effet sur la fonction contractile du cœur. Le Pr Menasché, co-directeur de l’équipe de recherche, explique aussi qu’il n’espère pas une recolonisation des cellules cardiaques du malade par celles du donneur et le bénéfice espéré d’une telle opération pourrait provenir des substances sécrétées par les cellules embryonnaires. De telles hypothèses avaient été déjà soulevées lors des éphémères greffes de cellules embryonnaires dans le cerveau de malades parkinsoniens au cours de la dernière décennie du siècle dernier. Ainsi la médecine réparatrice surfe toujours sur des vagues d’espérance. Malgré le risque de cancer toujours présent quand des cellules qui demeurent pluripotentes contaminent les cellules différenciées. Et on voit bien, dans ce domaine comme dans d’autres, que les préoccupations ©Roger GIL, Patch cardiaque et embryon. Toujours l’embryon ; www.espace-ethique-poitoucharentes.org technoscientifiques priment sur les enjeux éthiques et que l’embryon devient un outil biotechnologique orienté vers une médecine réparatrice. Mais l’embryon est-il la bonne réponse éthique, technique, scientifique, économique, aux maladies générant une destruction de tissus ? N’ya-t-il vraiment pas d’autres solutions ? Est-on menacé par un acharnement thérapeutique embryonnaire ? Il faudrait pouvoir débattre de manière apaisée de ces questions. ©Roger GIL, Patch cardiaque et embryon. Toujours l’embryon ; www.espace-ethique-poitoucharentes.org