Les coques Condyliennes du genou

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UNIVERSITE DE NANTES
FACULTE DE MEDECINE
MAITRISE EN SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES
M.S.B.M
MEMOIRE POUR LE CERTIFICAT D’ANATOMIE, D’IMAGERIE ET DE MORPHOGENESE
2003-2004
UNIVERSITE DE NANTES
Les coques Condyliennes du genou
Par
Edmond Blériot
LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES
Président du jury :
Pr. J. LE BORGNE
Vice-Président :
Pr. J.M. ROGEZ
Enseignants :
•
•
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Laboratoire :
Pr. O. ARMSTRONG
Dr. O. BARON
Pr. C. BEAUVILLAIN
Pr. P. COSTIOU
Pr. D. CROCHET
Pr. A. DE KERSAINT-GILLY
Dr. H. DESAL
Pr. B. DUPAS
Pr. Y. HELOURY
Pr. P.A. LEHUR
Pr. N. PASSUTI
Pr. R. ROBERT
Pr. D. RODAT
Dr VALETTE
S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique
UNIVERSITE DE NANTES
FACULTE DE MEDECINE
MAITRISE EN SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES
M.S.B.M
MEMOIRE POUR LE CERTIFICAT D’ANATOMIE, D’IMAGERIE ET DE MORPHOGENESE
2003-2004
UNIVERSITE DE NANTES
Les coques Condyliennes du genou
Par
Edmond Blériot
LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES
Président du jury :
Pr. J. LE BORGNE
Vice-Président :
Pr. J.M. ROGEZ
Enseignants :
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Laboratoire :
Pr. O. ARMSTRONG
Dr. O. BARON
Pr. C. BEAUVILLAIN
Pr. P. COSTIOU
Pr. D. CROCHET
Pr. A. DE KERSAINT-GILLY
Dr. H. DESAL
Pr. B. DUPAS
Pr. Y. HELOURY
Pr. P.A. LEHUR
Pr. N. PASSUTI
Pr. R. ROBERT
Pr. D. RODAT
Dr VALETTE
S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique
Sommaire :
A) Etude Anatomique
1) Les insertions capsulaires
2) Constitution des coques condyliennes postérieures
3) Vascularisation des coques condyliennes postérieures
4) Innervation des coques condyliennes postérieures
5) Rapports Anatomiques :
6) Mécanique articulaire du genou :
B) Etude clinico-chirurgicale
1) Examen clinique du genu recurvatum
2) Bilan radio-clinique
3) Etiologies, mécanismes physiopathologiques et complications
4) Méthodes thérapeutiques
Introduction
Le genou est une articulation portante, en charge, qui comprend une cavité articulaire
complexe mais avec trois articulations
•
•
une articulation fémoro-tibiale ( bicondylienne divisée en articulations
fémoro-ménisco-tibiale interne et externe)
une articulation fémoro-patellaire (en tenant compte de l’appareil
extenseur du genou et de la trochlée fémorale)
La cavité articulaire est délimitée par la synoviale (tout ce qui est extra-synoviale est extra
articulaire).La synoviale tapisse la face interne de la capsule.
Cette capsule :
•
•
•
•
joue un rôle de stabilité du genou (et cela seulement en extension)
ne joue donc aucun rôle de stabilité en flexion
empêche le genu recurvatum (qui peut être physiologique dans le cadre
d’une hyperlaxité ligamentaire constitutionnelle)
possède un renfort postérieur en arrière de chaque condyle fémoral : les
Coques Condyliennes Postérieures.
Nous aborderons notre travail de mémoire selon deux grands axes .D’abord une partie
anatomique afin de bien mettre en place les Coques Condyliennes Postérieures (insertions,
constitution ,vascularisation ,innervation ,rapports anatomiques) à laquelle succèdera une
partie clinico-chirurgicale centrée sur les atteintes des Coques Condyliennes Postérieures
(déformations osseuses, distension avec genu recurvatum retrouvé notamment chez les
individus poliomyélitiques )
A. Etude Anatomique
1) Les insertions capsulaires
Les Coques Condyliennes Postérieures constituent un renfort postérieur de la capsule .La
capsule est un manchon fibreux qui comprend des insertions
•
Fémorale : à environ un centimètre au dessus du cartilage de la fossette sustrochléenne, la ligne d’insertion descend progressivement vers l’arrière sur la
face latérale (cutanée) de chaque condyle fémorale en parcourant les rampes
capsulaires (décrites par Chevrier), puis remonte ensuite sur la face postérieure
des condyles (ou elle se confond alors avec l’insertion des muscles
Gastroçnémiens médial et latéral) pour redescendre et s’insérer sur les ligaments
croisés. Les Coques Condyliennes Postérieures s’étendent de la partie supérieure
des condyles fémoraux à la partie postérieure des condyles tibiaux, en adoptant
une structure en rideau ,constituées de fibres très solides.
Coque
condylienne
postéro-médiale
Surface
articulaire
condylienne
Haut
Rampe
capsulaire
Dedans
vue postéro-médiale d’un genou gauche
Haut
Dedans
vue postéro-latérale d’un genou gauche
Rampe capsulaire
Surface
articulaire
condylienne
Coque
condylienne
postéro-latérale
•
•
Tibiale : en avant des épines, la ligne d’insertion passe latéralement, en dessous
des cartilages avant de se rejoindre à la face postérieure
Patellaire : sur le pourtour cartilagineux rotulien
•
Méniscale : sur le mur méniscal du ménisque médial (donc à la face médiale),et
à la partie antéro-latérale de la corne antérieure du ménisque latéral.(car le
tendon poplité «détache» la capsule sur le reste de la longueur du mur méniscal)
•
Ligamentaire : sur les ligaments croisés ( postéro-interne et antéro-externe) , le
faisceau profond du ligament collatéral médial , le ligament poplité arqué,le
ligament poplité oblique (qui est en fait le tendon récurrent du muscle semimembraneux)
Coque
Condylienne
latérale
Tendon gastroçnémien
médial
Ligament
croisé
postérieur
Haut
Coque condylienne
Rampe capsulaire
médiale
Dedans
vue postérieure d’un genou gauche
Remarque : la capsule fait défaut entre la base de la patella et la fossette sus-trochléenne
.En effet il existe à ce niveau un hiatus par lequel s’engage un diverticule de la synoviale
formant ainsi le cul de sac sous quadricipital.
2) Constitution des coques condyliennes postérieures
Deux types de fibres constituent la capsule .Il y a des fibres circulaires, peu nombreuses, et
des fibres longitudinales réparties en deux couches : une couche fémoro-tibiale ( superficielle)
et une couche profonde ( avec des fibres fémoro-méniscales et des fibres ménisco-tibiales).
On distingue au sein de la capsule deux étages séparés par un plan méniscal .L’étage susméniscal est caractérisé par un épaississement en arrière de chaque condyle : les coques
condyliennes postérieures, constituées surtout de fibres verticales. Les coques condyliennes
postérieures sont intimement recouvertes par les insertions tendineuses des muscles
gastroçnémiens.
La coque condylienne postérieure interne est assez mince, et présente fréquemment un
hiatus dans lequel s’engage la bourse séreuse des muscles semi-membraneux et
gastroçnémien interne, cette bourse communiquant avec la synoviale.
La coque condylienne postérieure externe ,plus épaisse comporte parfois un sésamoïde
appelé fabella (petite fève).La fabella est aplatie sur la face antérieure qui est sa face de
glissement .Cette fabella n’a été retrouvée qu’une seule fois sur les quatre pièces disséquées
.La fabella est indiquée par les deux flèches ci dessous.
Haut
Dedans
Coque
Condylienne
latérale
vue postérieure d’un genou gauche
3) Vascularisation des coques condyliennes postérieures
Artérielle :
Elle dépend de l’artère fémorale superficielle .En effet, cette artère ne donne au niveau
de la cuisse qu’une seule branche (l’artère descendante du genou , à la face médiale,qui
semble vasculariser très partiellement la coque condylienne postérieure interne) avant de
franchir l’arcade du grand adducteur pour devenir artère poplitée .C’est elle qui
vascularise les coques condyliennes postérieures .L’artère poplitée est l’élément le plus
profond du creux poplité ,juste en arrière des coques condyliennes postérieures , elle
baigne dans une atmosphère graisseuse .De cette artère poplitée émergent :
•
•
•
Les artères des muscles gastroçnémiens
Les artères articulaires moyennes (émergeant et s’insérant entre les deux
condyles ;une dissection avait présenté une artère moyenne unique)
les quatres piliers du cercle peri-patellaire (les artères articulaires supérieures
, externe et interne, et leurs homologues inférieures) .Lors d’un travail de
dissection sur pièce injectée (de 40 cm3 de latex et 6 cm3 d’acide acétique ,ce
dernier jouant le rôle de catalyseur) on a pu remarquer que chaque coque
condylienne était vascularisée par un réseau anastomotique issue de la réunion
de deux arborisations vasculaires : l’une naissant de l’artère articulaire
supérieure,l’autre de l’homologue inférieure.
Arrière
Bas
Artère
articulaire
supéroexterne
Arborisation
inférieure
Arborisation
supérieure
vue postéro-latérale d’un genou gauche
Remarques : L’artère articulaire supérieure interne passe dans l’orifice du muscle grand
adducteur qui lui est dévoué ,canal qui est inférieur et médial par rapport à l’anneau du
troisième adducteur dans lequel passent les vaisseaux fémoraux superficiels avant de devenir
poplités.
L’artère poplitée adopte une conformation hélicoïdale (visible sur la
photographie de la page précédente) ,ce qui lui permet de s’adapter aux mouvements du
genou qu’elle accompagne ,comme un ressort.,tout en maintenant le flux vasculaire.
Emergence
des
vaisseaux
poplités
Haut
Arrière
Muscle
semitendineux
Artère
articulaire
supéromédiale
Muscle semimembraneux
Veineuse :
La veine poplitée résulte de la fusion des veines tibiales antérieure et postérieure .La
veine poplitée qui se retrouve en arrière de l’artère au niveau du creux poplité et en avant du
nerf sciatique, reçoit à ce niveau la veine petite saphène ,latéralement , en formant par sa
crosse le confluent veineux saphéno-poplité .De même que pour l’artère ,on relève
l’émergence de veines articulaires supérieures externes et internes et leurs homologues
inférieures ainsi que les veines articulaires moyennes.
Remarque : l’artère et la veine poplitée sont réunies dans une gaine conjonctivo-vasculaire,
appelée gaine des vaisseaux poplités.
Arrière
Haut
Confluent
sapheno-poplité
Veines
tibiales
Veines
tibiales
postérieure et
antérieure
Tronc veineux issue de la
réunion des veines articulaires
moyenne et supérieure externe
Veine
articulaire
postéroinférieure
vue postéro-latérale d’un genou droit
4) Innervation des coques condyliennes postérieures
• Le nerf fémoral donne deux filets à l’articulation :
le premier provient du nerf du muscle Vaste médial, alors que l’autre est issue du nerf
saphène (rameau articulaire).Il se détache à la partie inférieure du canal de Hunter, puis se
distribue à la face médiale de l’articulation.
La disposition des nerfs articulaires du genou suit celle des artères articulaires issues de
l’artère poplitée .A chaque artère articulaire correspond un nerf propre .Seules les artères
articulaires moyennes, ramifiées, sont entourées de plusieurs rameaux nerveux. ( d’après
Lazorthes).
• Le nerf sciatique fournit par l’intermédiaire du nerf de la courte portion du biceps un
filet grêle destiné à la face postéro-externe de l’articulation .Ce nerf suit l’artère
poplitée et partage sa distribution.
• Le nerf tibial postérieur donne trois rameaux articulaires :
un rameau chemine avec les artères articulaires moyennes (ou l’ artère si elle est unique)
et se distribue à la face postérieure de l’articulation ,notamment aux ligaments croisés et
au ligament poplité oblique.
les deux autres accompagnent les artères articulaires internes supérieures et inférieures, et
se distribuent à la portion antéro-interne de la capsule ainsi qu’au ligament collatéral
médial.
• Le nerf fibulaire commun donne un rameau important à l’articulation : il suit l’artère
articulaire supérieure externe puis se ramifie à la partie postéro-latérale de la capsule.
• La branche profonde du nerf obturateur fournit un petit filet qui, une fois franchit
l’anneau du troisième adducteur, se distribue à la partie postérieure de l’articulation.
Remarque :Cette innervation ,décrite dans peu d’ouvrages a été très peu retrouvée.
Nerf
sciatique
Nerf
fibulaire
commun
Nerf tibial
postérieur
Branche
surrale
Haut
Dehors
5) Rapports Anatomiques :
a)Pour la coque condylienne postérieure interne, on a comme rapports
• Antérieur : la synoviale (qui est accolée à la coque ,en arrière du condyle fémoral)
• Latéral : ligament collatéral médial (dont le faisceau profond adhère au mur méniscal
médial ;on considère comme médial ce qui se rapproche du pivot central du genou)
• Postérieurs (de dehors en dedans) :les muscles Sartorius ,Gracile et Semi-tendineux
(constituant la patte d’oie), le muscle Semi-membraneux puis,juste en arrière de la
coque,on retrouve l’insertion du muscle gastroçnémien médial (au cours des
dissections,on aura remarqué la consistance particulière de ce tendon,d’aspect presque
« cartilagineux »,il présente un caractère induré à la palpation) et ensuite ,en dedans,
d’avant en arrière, le paquet vasculo-nerveux du creux poplité : artère poplitée (au plus
profond ,en dedans), surcroisée par la veine homonyme, elle-même surcroisée par le
nerf tibial postérieur,le tout baignant dans une atmosphère largement adipeuse.
• Médial : les ligaments croisés (qui sont extra-synoviaux donc extra articulaire), le «
troisième croisé », et le paquet adipeux.
• Supérieur : tendon du muscle grand adducteur
Haut
Veine
grande
saphène
Arrière
Muscle semimembraneux
Corde du
muscle grand
adducteur
Tendon
gracile
Muscle
Sartorius
Insertion
capsulaire
muscle
gastroçnémien
médial
Avant
Dedans
Tendon
patellaire
Ligament croisé
postéro-interne
Coque
condylienne
postéro-latérale
Muscles de la patte
d’oie (Sartorius
,Gracile et Semitendineux
vue supérieure d’un genou gauche (pièce congelée)
b).Pour la coque condylienne postérieure externe ,on retrouve comme rapports
Antérieur : la synoviale et le tendon du muscle poplité qui repousse véritablement la capsule à
ce niveau et dessine à ce niveau le hiatus poplité.
Latéral : de dehors en dedans, on retrouve le biceps fémoral, le ligament collatéral latéral
Postérieur : de dehors en dedans, on retrouve le biceps fémoral, le nerf fibulaire commun, le
muscle gastroçnémien prenant son insertion sur la coque ,et le muscle plantaris quand il existe
Médial : les rapports sont identiques à ceux de la coque interne puisque médiaux.
Haut
Dehors
Ligament
croisé antéroexterne
Hiatus
poplité
vue antéro-supérieure d’un genou gauche (pièce congelée)
Dedans
Haut
Muscle
plantaris
Biceps
fémoral
Muscle
soléaire
vue postéro-latérale d’un genou droit
6) Mécanique articulaire du genou :
L’articulation du genou permet des mouvements de Flexion/Extension ainsi que des
mouvements de rotations interne et externe ,associés aux précédents ou isolés .Il n’existe
normalement pas de mouvements de latéralité ,ces derniers n’apparaissant qu’à l’état
pathologique (distension articulaire)
Les mouvements de Flexion/Extension se passent presque exclusivement à l’étage susméniscal de l’articulation .Le déplacement des surfaces articulaires l’une par rapport à l’ autre
s’ exécute grâce à un double mouvement de roulement et de glissement ;mais au cours du
mouvement ,l’axe de rotation bicondylien n’est pas fixe ,il se déplace en même temps que ce
produit le glissement .C’est ce glissement qui permet « d’adapter » les disproportions de
surfaces articulaires ,la surface articulaire condylienne étant environ deux fois plus grande que
le plateau articulaire tibial.
Au cours des mouvements de Flexion/Extension ,il se produit une légère rotation du tibia
par rapport au fémur appelée rotation combinée .Elle est interne lors de la flexion ,externe en
extension si on considère le tibia comme partie mobile.(c’est le contraire si le fémur est
mobile ,le tibia étant fixé).Ces mouvements de rotation s’expliquent par l’asymétrie entre les
deux condyles ,et s’exécutent autour d’un axe vertical passant entre les épines tibiales .Ces
mouvements de rotation sont impossibles une fois le genou verrouillé en extension.
Les coques condyliennes postérieures constituent un renfort postérieur ,formant en quelque
sorte une gouttière pour chaque condyle ,dans lesquelles les condyles fémoraux coulissent
sans faire saillie en arrière .En considérant le fémur partie mobile, lors d’un mouvement
d’extension du genou, on a un mouvement de roulement d’arrière en avant permis par l’action
de l’appareil extenseur du genou .Parallèlement, on a un mouvement de glissement d’avant en
arrière :le condyle fémorale latéral est retenu en arrière par le ligament collatéral latéral alors
que le condyle fémoral médial est retenu par le ligament croisé postéro-interne .En fin
d’extension ,les coques condyliennes sont tendues ,et les condyles viennent s’y insérer pour se
caler alors que le genou s’est verrouillé. Le genou n’est stable qu’en extension.
B. Etude clinico-chirurgicale
1. Examen clinique du genu recurvatum
Le genu recurvatum est une déformation du genou dans laquelle cuisse et jambe forment un
angle obtus ouvert en avant .L’origine en est une déformation osseuse ou bien une laxité
ligamentaire .
L’examen clinique doît être bilatéral et symétrique
L’inspection recherche un genu recurvatum spontané ,une inégalité de longueur (vraie en cas
de séquelles d’épiphysiodèse ,fausse en cas de genu recurvatum),un avalement de la
tubérosité tibiale antérieure.
Un genu recurvatum asymétrique est considéré comme pathologique d’où l’importance de
l’examen compararatif .La recherche du genu recurvatum se fait sur un patient en decubitus
dorsal ,jambes tendues ,ses pieds reposant sur le ventre de l’examinateur .On recherche
ensuite une laxité ligamentaire ,des signes d’atteintes méniscales.
Etude de la marche : la question importante à se poser est : le patient utilise t-il son
recurvatum pendant la phase d’appui monopodal ? Cette notion est fondamentale dans la
prise en charge du genu recurvatum d’origine poliomyélitique .En effet , il faut savoir
respecter cette attitude seule garante du verrouillage du genou dans ce type d’atteinte .Lorsque
le recurvatum s’aggrave lors du passage du pas en appui monopodal ,on parle de « bascule en
recurvatum »
L’examen recherche une déformation frontale associée , éventuellement exagérée lors du
passage d’extension en hyperextension .
2. Bilan radio-clinique
Il comprend :
une goniométrie des deux membres inférieurs en appui bipodal
un grand cliché de profil, membre inférieur en hyperextension
un cliché de face en appui monopodal pour retrouver éventuellement une décoaption
fémorotibiale externe.
Un cliché à 30° de flexion pour calculer la hauteur patellaire
Ce bilan permet de quantifier le genu recurvatum (fig.A) et de calculer la part osseuse (tibiale
ou fémorale) et la part ligamentaire.
Le genu recurvatum tibial est analysé par la mesure de la pente tibiale, normalement orientée
en bas et en arrière (fig.B ;la droite perpendiculaire à l’axe anatomique tibial est tangente au
plateau tibial interne)
Le genu recurvatum fémoral est apprécié par la mesure de l’angle épiphysaire fémoral (fig.
C ;mesuré par l’angle formé par les droites perpendiculaires à la corticale fémorale antérieure
et à la tangente à la ligne de Blumenssat)
A
B
C
d’après EMC ,le genu recurvatum ,C.Bussière ,T Aït Si Selmi et P Neyet 2001
3. Etiologies, mécanismes physiopathologiques et complications
Le genu recurvatum peut être d’origine ligamentaire, osseuse, constitutionnelle ou congénitale
•
Le genu recurvatum ligamentaire :
Il en existe deux types : la distension progressive et la rupture traumatique dans le
cadre d’une entorse grave.
a)Distension capsuloligamentaire postérieure :
Elle peut survenir en cas d’hyperlaxité constitutionnelle ou s’associer à une attitude
osseuse tendant vers le recurvatum.
L’atteinte :
des coques condyliennes postérieures
du point d’angle postéro-interne (PAPI constitué du muscle semimembraneux qui en est l’élément le plus important, de la coque
condylienne postéro-médiale, de la corne postérieure du ménisque
interne, du ligament collatéral médial et du gastroçnémien médial ;le
PAPI contrôle le valgus surtout en position proche de l’extension.)
du point d’angle postéro-externe (PAPE constitué du tendon poplité
qui en est la structure dominante, de la coque condylienne postéroexterne ,du ligament poplité arqué ,du ligament fabellofibulaire,renfort du précédent ,du gastroçnémien latéral et de la corne
postérieure du ménisque externe)
peut entraîner un genu recurvatum ligamentaire de près de 25°.Au-delà, le ligament croisé
postérieur se rompt .On décrit alors deux cas de figures :
Le genu recurvatum direct qui correspond à l’atteinte bilatérale des
compartiments postérieurs (interne et externe) : atteinte majeure avec
baillement postérieur.
Atteinte d’un seul compartiment imposant un mécanisme tibial rotationnel.
b) genu recurvatum ligamentaire traumatique
L’examen clinique permet de distinguer :1) une rupture isolée du ligament croisé
postérieur ou associée à des lésions 2) postéro-externe ou 3) postéro-interne.
Dans le premier cas, on retrouve : un tiroir postérieur (subluxation du tibia sous le fémur) à
90° de flexion, exagéré par rapport au côté sain ;ce tiroir n’est pas exagéré en rotation externe
et est diminué en rotation interne ,un avalement de la tubérosité tibiale antérieure à 90° de
flexion ,un test de Trillat-Lachman de type arrêt dur retardé (un arrêt mou signant une
distension).
Dans le second cas, on retrouve un tiroir postérieur exagéré en rotation externe et parfois le
ligament collatéral latéral n’est pas palpable.
Dans le troisième cas, un tiroir postérieur est exagéré en rotation interne.
Il peut être intéressant de citer ici :
La pentade postérieure :association d’une rupture bicroisée et de lésions
capsulaires postérieures (PAPI et PAPE) lors de traumatismes appuyés en
hyperextension où sont associées des lésions ligamentaires et une fracture
tassement tibiale à l’origine d’un recurvatum mixte.
La pentade externe : une rupture bicroisée , avec lésion du PAPE (notamment du
muscle poplité) constituent cette pentade
•
genu recurvatum d’origine osseuse :
Il faut différencier les recurvatum fémoraux et tibiaux, leur part extra-articulaire et
articulaire
Part extra-articulaire : il s’agit souvent d’atteinte du cartilage de croissance ou métaphyse de
l’enfant ,créant une épiphysiodèse antérieure à l’origine d’un défaut de la pente tibiale ;le
diagnostic doit être évoqué lorsque l’on retrouve une atrophie de la tubérosité tibiale
antérieure ,une saillie anormale asymétrique du condyle fémoral ,ou une translation tibiale
postérieure .Plusieurs étiologies peuvent être alors évoquées :
décollement épiphysaire fracture (stade 3 et 4 de la classification de Salter et
Harris .Il y a alors épiphysiodèse ,c'est-à-dire arrêt de la croissance ,à l’origine
d’une inégalité de longueur des membres .En effet ,la croissance du membre
inférieur dépend pour une très grande part des plaques conjugales à proximité
du genou).
Atteinte iatrogène (chirurgicale ou radique)
Infectieuse
Séquelles d’Osgood-Schlatter (apophysite tibiale antérieure caractérisée par
une ostéochondrose de la tubérosité tibiale antérieure, souvent bilatérale se
traduisant par une tuméfaction douloureuse et sur les radiographies par une
fragmentation du noyau d’ossification .Elle touche les garçons de 10 à 15ans)
Maladie d’Ehlers-Danlos
Leur part articulaire : fémorale ou tibiale (fracture articulaire avec tassement des plateaux
tibiaux)
•
Le genu recurvatum constitutionnel :
Retrouvé chez 40% des individus ,il est inférieur à 15°.Il s’explique par une hyperlaxité
ligamentaire constitutionnelle .Physiologiquement ,le compartiment fémorotibial externe est
plus mobile que l’interne .Le baîllement externe existant en flexion chez l’individu normal
apparaît aussi en extension chez le sujet hyperlaxe .Par ailleurs , la distension des formations
postérieures ne permet plus le verrouillage du genou en extension (0°), mais en recurvatum
.Au final, on obtient une hyper-rotation tibiale externe avec translation postérieure du plateau
tibial latéral.
•
Le genu recurvatum congénital
Souvent bilatéral et symétrique, il n’est parfois que le témoin d’une hyperlaxité à la
naissance, régressant au fil des années avec des appareils correcteurs maintenant une légère
flexion .Il faut avant tout éliminer toute atteinte grave du système neuromusculaire, les
chondrodystrophies.
•
Le genu recurvatum mixte
Il s’agit d’une déformation associant une distension capsuloligamentaire postérieure et un
recurvatum osseux.
L’atteinte poliomyélitique en est la cause la plus classique .La paralysie initiale du quadriceps
est à l’origine d’une attitude en recurvatum à la marche, indispensable au verrouillage du
genou, ce qui tend à accroître les pressions appliquées à la partie antérieure des plateaux
tibiaux par l’excès de déroulement des condyles fémoraux .Il s’ensuit une atteinte du cartilage
métaphysaire tibiale, donc une diminution de la pente tibiale, et donc un recurvatum osseux
.Parallèlement, la distension capsulo-ligamentaire postérieure s’aggrave ,d’où l’augmentation
de genu recurvatum .On remarquera sur le document suivant l’atrophie majeure et bilatérale
de la musculature des deux membres pelviens ,alors que les membres pectoraux ont l’air à
priori normaux .On remarquera également
d’après EMC ,le membre inférieur paralytique ,P Lebarbier ,1998
•
Complications
Quelques cas peuvent évoluer vers une pathologie rotulienne source de douleurs, de
subluxation ,d’instabilité patellaire.
4.
Méthodes thérapeutiques
•
Méthode conservatrice : en cas de genu recurvatum constitutionnel ,la
réeducation visera au renforcement des muscles fléchisseurs du genou sans
renforcement quadricipital .Le port de talonnettes ou de talons hauts présente un
intérêt non négligeable.
•
Gestes ligamentaires : ces gestes tendent à lutter contre la distension
capsuloligamentaire postérieure ou à retendre le plan ligamentaire afin d’éviter le
recurvatum
Réfection du point d’angle postéro-externe.
Deux techniques sont proposées.
Plastie externe : il est possible de retendre le complexe ligament collatéral
latéral / tendon poplité en détachant une pastille osseuse condylienne (siège
de leur insertion conjointe) et de la réinsérer en haut et en avant. (fig 5)
Plastie en Y, à l’aide d’un greffon os- tendon quadricipital –os .La branche
commune du greffon est fixée dans le condyle fémoral latéral .Une branche
du Y passe dans le tunnel tibial (et reconstituer le tendon poplité), l’autre
passant dans la fibula (renforcement du ligament collatéral latéral ; fig.6)
Capsulorraphie postérieure interne et externe
Indications : genu recurvatum ligamentaire à l’exclusion des genu recurvatum
osseux.
Cette chirurgie est réalisée par double voie rétroligamentaire .Il s’agit de retendre les
coques condyliennes à leurs insertions fémorales .Il existe plusieurs techniques .Les deux
principales sont les suivantes :
La première vise à désinsérer la capsule à l’os pour la réinsérer une
fois retendue à un niveau plus proximal ; le moyen de fixation peut
être un tunnel transosseux ou un agrafage.(Fig A et C)
La seconde est une retension par suture de la capsule sur elle-même
par la technique dite « de la boîte de sardines ». (Fig B)
Cette seconde technique consiste en une remise en tension des coques condyliennes
postérieures sans toucher à leur continuité, et en modifiant le moins possible leur point
d’insertion osseuse .Il fait appel aux processus de consolidation osseuse et non à ceux de
cicatrisation ligamentaire.
Technique : elle comporte un double abord postérolatéral médial et latéral de 5 à 6 cm de
long, centré sur la partie haute des condyles fémoraux .Une dissection capsulaire isole la
partie haute des coques .Une baguette d’insertion osseuse de chacune des coques est découpée
à la scie oscillante fine ou à l’ostéotome ,et ce sur toute la longueur d’insertion de la coque
au-dessus des condyles .Ces deux baguettes sont de forme parallélépipédique, de section
carrée dont la longueur (9 à 14mm) dépend de l’importance du genu recurvatum .Les deux
baguettes sont mobilisées et totalement séparées de leur logette de prélèvement .Elles restent
solidaires des coques (dont elles portent l’insertion haute).Il est alors facile de les faire pivoter
de 90° autour de leur grand axe (« ouverture en boîte de sardines ») , ce qui provoque un
raccourcissement des coques équivalent à la taille du carré de résection de la baguette .Chaque
baguette est réenclavée dans sa logette :la stabilité spontanée est complétée par une agrafe ou
une vis.
Suites : pendant les cinq premières semaines suivant la chirurgie, une genouillère interdisant
l’extension au-delà de -20° sera portée par le patient
Remarque : La capsulorraphie de même que la réfection du PAPE doivent être
absolument associées à un geste osseux afin de protéger les gestes ligamentaires.
•
Méthodes chirurgicales osseuses.
Ostéotomie fémorale correctrice basse de soustraction (postérieure)
Ostéotomie tibiale haute :
Technique : elle répond au besoin de correction d’une pente tibiale inversée .L’incision
cutanée est antéro-interne ,le long du bord médial du tendon patellaire .Après décollement
sous-cutané et repérage du tendon ,on prélève une baguette tibiale verticale de 6 à 8 cm de
long en emportant de l’os cortico-spongieux afin de relever la tubérosité tibiale antérieure (et
soulager ainsi la tension postérieure).Les broches-guides sont positionnées sous contrôle
ampli ,et orientées en haut et en arrière ,à 4 cm de l’interligne antérieure et 6mm de
l’interligne postérieure ce qui permet de conserver la charnière postérieure .L’ostéotomie est
réalisée au dessus de l’articulation tibio-fibulaire supérieure .L’ouverture de cette ostéotomie
est réalisé à l’aide de l’empilement de lames (de Lambotte) introduites successivement dans
l’os ,l’une sur l’autre jusqu’à obtention du degré de correction souhaité(1mm d’ostéotomie
d’ouverture entraîne une correction de 2°) .Le foyer d’ostéotomie est ensuite greffé à l’aide de
greffon osseux iliaques cortico-spongieux .Deux agrafes de Blount sont ensuite disposées à
cheval sur la ligne d’ostéotomie .Il faut ensuite remonter la baguette osseuse de la hauteur de
l’ouverture tibiale (pour ne pas entraîner de variation de la hauteur patellaire) ,et la fixer par
deux vis
Suites : Attelle de posture à 5° de flessum et appui contre-indiqué pendant deux mois
.Réeducation progressive
Désépiphysiodèse : résection du pont d’épiphysiodèse (remplacé par un
corps inerte), à condition que le pont soit de taille modeste.(0 à 30%)
Conclusions:
La prise en charge d’un patient présentant un Genu Recurvatum nécessite une
analyse radioclinique complète afin d’en déterminer la part osseuse
,ligamentaire ou mixte ,son étiologie ,son évolutivité ,l’utilité lors de la marche
et le retentissement sur le membre inférieur .L’attitude thérapeutique devra tenir
compte de l’âge du patient ,et ,chez l’enfant ,ne pas altérer le potentiel de
croissance .La part capsulo-ligamentaire reste très difficile à traiter isolément ,il
faut véritablement y associer des gestes osseux
BIBLIOGRAPHIE :
G.PATURET ,Traité d’anatomie humaine ,Tome II :membres supérieur et inférieur
Encyclopédie Médico-Chirurgicale ,membre inférieur paralytique ,P.Lebarbier ,1998
Encyclopédie Médico Chirurgicale ,Genu recurvatum par C.BUSSIERE ,T AÏT SI SELMI
,P.NEYET.2001
Encyclopédie Médico Chirurgicale ,le genou ligamentaire par C.BUSSIERE ,T AÏT SI
SELMI ,P.NEYET.2003
Remerciements :
Je tiens à remercier :
-Les professeurs pour nous avoir enseignés l’anatomie
-Nos chers laborantins pour leur assistance technique et pratique.
Le Pr Letenneur
-Enfin ,le Pr Rogez pour ses conseils et sa disponibilité.
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