UE2 - Histoire du théâtre médiéval et élisabéthain Les œuvres comme des documents à étudier. Comment chaque forme dramatique permet de se poser une question par rapport au théâtre ? [Mystère Bouffe, Dario Fo] [Je suis sang, Jan Fabre, Avignon] [Cie Royal De Luxe, Nantes] Constructions de marionnettes géantes (fabriquées avec du bois et des métaux), elles défilent dans la rue durant 3 jours. Ces représentations sont destinées à une ville entière, au total des millions de personnes. La durée est de 3 à 7 jours. C’est une référence aux Mystères du Moyen-Âge qui durent plusieurs jours. → On retrouve des intermèdes → Des farces [Le gonze de Lopiphile, David Séchaud] Inspiré du Songe de Poliphile, on décrit les ruines comme de belles choses, c’est une forme de théâtre d’image qui mêle de l’écriture de plateau. [Lorenz Störer] Le metteur en scène s’inspire des gravures du Moyen-Âge, il est aussi scénographe. [Les Merveilles, Clédat et Petitpierre, Maillon notamment] Les créateurs sont costumiers et scénographes. Inspirés pas Les Blemmyes (sans tête), Les Sciapodes (gros pieds) et Les panotii (grosses oreilles) Le Moyen-Âge est victime de beaucoup d’idées reçues, les gens n’étaient pas sales, ils se lavaient etc… Le problème était plutôt l’hygiène publique, non pas l’hygiène personnelle, il y avait par exemple moins de problèmes dentaires car l’industrie du sucre n’existait pas. Parler de théâtre médiéval est problématique, il n’y a pas de traces de bâtiment théâtral au Moyen-Âge. Königson dit qu’aucun lieu n’a été dédié. [Marie Bouhaïk-Gironès et Véronique Dominguez] Le théâtre médiéval n’a pas d’éléments de rupture, il n’y a pas eu de transition claire entre le théâtre antique et le théâtre dit “médiéval”. On a au même moment du théâtre de tréteaux et du théâtre liturgique. Il n’y a pas de codification claire d’un genre littéraire. Les formes de représentations médiévales ne s’orientent pas autour d’un texte, il est difficile de retrouver des traces. C’est là où se construit la personnation. C’est la désincarnation des personnes dites acteurs assumant le rôle d’individus autre qu’eux mêmes. Dans le théâtre antique, le texte est plus présent. “Le théâtre n’est pas là pour communiquer, ni faire une démonstration. Il est intransitif. Il est là. Il s’impose par l’évidence et cette évidence n’est pas de l’ordre d’un message” Michel Vinaver Début du Moyen-Âge 476: attaques barbares En 410, Rome se fait piller, l’Empire se coupe en deux et une partie devient l’Empire Bizantin. Il n’y a pas de passage brutal entre Antiquité et Moyen-Âge et Moyen-Âge et Renaissance. On considère le Haut Moyen-Âge de 5e au 10e, un Moyen-Âge central du 11e au 13e, et le Moyen-Âge tardif du 14e au 15e siècle. Le théâtre se développe avec des intrigues légères: le mari qui trompe la femme et ce genre d’intrigues qui deviendront des pièces de Molière. I./ Une société hiérarchisée 1. Les trois ordres, ou l’imaginaire médiéval (Georgs Duby) La société médiéval est divisée en trois ordres: - Les Oratores (Clergé) - Bellatores (Nobles, chevaliers) - Laboratores (Serfs, paysans) D’après Gérard de Cambrai et Adalbéron de Laon Une part moindre de la population possède la terre (le clergé et les nobles) et la grande partie de la population produit les richesses (paysans). Les paysans produisent les richesses et les nobles protègent les paysans en retour. Les nobles ont besoin du clergé. La condition des paysans évoluent en fonction du rapport avec les paysans. Les Serfs dépendent d’un maître, il doivent travailler pour un seigneur dans ses terres. Les 90% restants sont des paysans libres. 2. Serfs, esclaves: un modèle d’évolution de l’Antiquité au Moyen-Âge Les serfs n’étaient pas les esclaves de l’Antiquité, c’est une pratique moins dure, les serfs peuvent se marier et constituer une famille légale. Les seigneurs peuvent accorder la liberté. II./ Une société croyante 1. Qu’est-ce que la chrétienté médiévale? - - Croyance en la présence éternelle et constante de Dieu Fonctionnement à plein régime de la symbolique: → Distinction pouvoir spirituel / pouvoir temporel → Pape = Représentant du Royaume des Cieux Acte le plus fort, pour un croyant, est le risque d’excommunication Grandes crises culturelles du Moyen-Âge sont des crises religieuses → Grand Schisme d’occident (1378 - 1415), C’est une rupture entre deux courants. → Réforme luthérienne (1517) → Concile de Trente (1545 - 1563) 2. Comment croyait-on? - Le Père - figure d’autorité - Le Fils - Figure de souffrance, exemplarité de la condition humaine - Le Saint-Esprit - Figure de justice et de “miracle” Une figure supplémentaire - La Vierge Marie - Figure de justice, de rachat, de pardon 3. Les cathédrales, un espace spectaculaire Les cathédrales sont les monuments les plus décorés. En particulier, il y a un aspect qui a disparu, elles étaient peintes, donc chargées de couleur. On avait des tapisseries, des fresques, des sculptures. C’est un lieu fréquenté. La cathédrale devient un lieu de prêche et non seulement de messe. Il commente l’évangile, parle des Saints. Pour Jacques Le Goff, le Moyen-Âge est une époque de service culturel. A l’époque gothique les vitraux ornent les cathédrales, comme la Sainte-Chapelle à Paris, construite au 13e siècle. III./ Une société commerçante 1. L’essor des villes. Du 11e au 12e on observe un grand essor des villes mais l’essor du théâtre se fait à partir du 12e. Les bourgeois le sont par l’artisanat ou le commerce, ils ont fait leur richesse et obtiennent des franchises avec ou sans usage de la force. 2. La Foire, lieu de rencontre L’artisanat se développe en ville alors les lieux de rencontre pour la vente et l’échange se multiplient et se concentrent, ce sont les foires présentent dans toute l’Europe. Les plus fréquentées sont celles de Champagne vers Troyes, Bar-Sur-Aube, Bar-Le-Duc. Le théâtre sert donc de marketing. Les serfs sont des “itinérants” d’autant plus que la religion chrétienne apprenait aux fidèles que l’Homme est un voyageur sur terre. Cette idée n’a jamais été plus vraie qu’au Moyen-Âge. IV./ Une période de stabilisation politique 1. Une période de paix Cette période est culturellement stable, les villes sont en plein essor et les pouvoirs se concentrent vers Paris, alors la scène culturelle se développe à Arras, Angers, Rouen, Strasbourg, Toulouse, Dijon et aussi Paris, Ces villes connaîtront une activité très forte de cour, avec leurs auteurs attitrés. 2. L’Entrée du roi - Un modèle de spectaculaire [PDF] C’est durant le 15e siècle et la fin du 14e. On construit des cérémonies qui lient symboliquement le roi à dieu. L’Entrée royale se veut spectaculaire et annonce l’entrée du roi dans une ville. V./ Une société de l’incarnation 1. L’antagonisme médiéval Il y a trois modes de représentations qui mettent l’espace dans une position importante. Il y aurait le monde, le paradis en haut et l’enfer en bas, c’est la dualité du Bien et du Mal. A la fin du Moyen-Âge quand on trouve les amériques, on se demande s’ils sont créés par Dieu, s’ils sont réellement humains, s’ils viennent de l’atlantide etc… Les créatures se chevauchent dans l’univers médiéval, nécessaire dans l’imagination de créatures diaboliques. Il n’y a pas de distinction entre le réel et ce qui est créé par Dieu. On peut trouver des procès d’animaux, par exemple pour un cochon accusé de sorcellerie et de possession, il aurait dit des phrases sataniques dans une certaine langue. [Giotto, Saint-François chassant les dragons, 1290] [Giotto, Saint-François prêchant aux oiseaux] [Mort accidentelle de Philippe de France (procès du cochon)] Genres populaires au Moyen-äge - Sottie - Miracle - Moralité Le théâtre liturgique Liturgie: Ensemble réglé et ordre des cérémonies et des prières composant le culte public officiellement institué par une Église [La découverte du tombeau vide, par Fra Angelico, 1437 - 1446] [Scénographie du théâtre occidental, Anne Surgers, 2017] C’est l’église qui donne un sens nouveau au théâtre, on parle de “jeu scénique”, les premières liturgies théâtralisées datent de Pâques. On raconte le moment où l’on trouve le tombeau de Jésus vide. Les formes de théâtre liturgique ne sont pas pendant la messe, mais au début et à la fin du jour car il n’est pas question de représentation durant la messe, mais d’une représentation réelle du Christ durant l'Eucharistie. Mais aux matines ou aux complies on peut avoir sa présence car il n’y a pas de présence réelle du Christ à ces moments. [Regularis Concordia, Saint Ethelwold, évêque de Winchester, entre 965 et 975] C’est la première liturgie qui nous parvient, on dirait un livret de mise en scène. On est ici dans la représentation d’un texte, on a la notion de mimésis, on imite pour donner l’illusion. On a un code symbolique renforcé par l’architecture et la disposition des objets. Les comédiens doivent faire “comme si”. Dans le bâtiment de l’église, l’axe est-ouest marque le passage du monde humain au monde divin (plus on va profond dans l’église plus on se rapproche de l'autel). Ce jeu se développe ensuite en dehors de l’église (sur la place) puis dans la ville elle-même, elle donne place aux mystères, aux martyres et aux miracles. Le spectaculaire, définition Du Moyen-Âge à la Renaissance, de l'imagination à l’illusion. [Véronique Dominguez, citation à reprendre] Elle révèle que ce n’est pas le texte mais l’image et le spectaculaire qui font triompher le spectacle car les conditions économiques et techniques sont adaptées à la production de grands spectacles (on améliore des principes connus de l’antiquité). Les autorités utilisent le spectacle pour les servir (comme le clergé avec le théâtre liturgique en soit). [CNRTL pour trouver de bonnes références] I./ Un spectacle: quelque chose que l’on va voir 1. Ce que l’on voit face à la violence et à la souffrance au spectacle Dès l’Antiquité tardive et le haut Moyen-Âge, il y a goût pour le spectacle, à l’époque de Shakespeare, aller au théâtre c’est côtoyer des combats de chiens ou de coqs. À différentes époques, on est habitués à voir de la violence comme spectacle (ce qui devient interdit notamment avec la renaissance). La souffrance physique devient populaire, à la renaissance c’est la souffrance morale (par les héros antiques). [Hugues de Saint Victor, 1096 - 1141] C’est une référence à la catharsis, on encadre un endroit où le public expulse des passions, afin d’avoir des rassemblements pacifiques plutôt que des rassemblement sauvages qui dérapent en des “actes condamnables, voire criminels”. 2. Le spectaculaire du rassemblement religieux Il y a une dimension rituelle et cérémonielle, la dimension scénique et gestuelle se développe au fil des siècles et il y a la dimension extraordinaire et miraculeuse (on ne va pas voir n’importe qui à l’église). Ces éléments impressionnent le spectateur. 3. L’acteur garant du spectaculaire [Elie Konigson] Pour lui le chaman amène à une expérience alors qu’un acteur porte un récit. L’acteur crée un espace intermédiaire entre l’ici et l’ailleurs à l’aide d’accessoires comme le tréteau. L’acteur en lui-même est spectaculaire. Le théâtre créerait donc la connivence avec le spectateur, la compréhension de signes et leur portée critique et le plaisir de voir quelque chose comme une performance. “Voir du théâtre est donc voir autrement ce qu’on voit hors du théâtre ce qu’on voit des autres et de soi” Biet et Triaut, Qu’est-ce que le théâtre? (p63) 4. Une fonction politique du théâtre L’acteur a un pouvoir édificateur (il maîtrise le discours), soit en justifiant le bien fondé du théâtre comme une nécessité pour délaisser les hommes, ce qui n’est pas illicite, il ne sont pas en état de péché tant qu’ils pratiquent avec modération; soit en l’interdisant, car le comédien était trop dangereux à pouvoir changer son discours (lors du Concile de Trente) A la même époque on a l’interdiction des représentations de Mystères par les Confrères de la Passion. [Lecercle, François et Clotilde Thouret, Littératures classiques, vol. 98, 2019] [Le cas Avignon, 2005 (sur Jan Fabre)] II./ L’image théâtrale au Moyen-Âge 1. Une civilisation friande d’images [Le théâtre français du Moyen-Âge, Charles Mazouer] Le peuple a besoin d’image, surtout pour les nouveaux convertis (idiotae) qui ne comprennent pas forcément le texte, ou le latin, ou la bible en général. Les images théâtrales font partie de la nécessité populaire, on retrouvait sur les échafauds des mystères Paradis et Enfer, deux pôles de la destinée humaine qui étaient aux deux extrémités de la scène. L’image est un plaisir, on s’y investit et on y investit de l’argent. On entend l’image au sens large, on reconnaît une image par des gestes de convention. On utilise les allégories, les personnages peuvent être “passion” ou “foi”, surtout dans les Moralités et les Sotties. “L’allégorie est sans doute un trait caractéristique de la mentalité médiévale; mais qu’elle ait eu tant de succès sur les tréteaux prouve une fois encore le besoin d’images théâtrales: tout est théâtralisé, transformé en personnages, en action, en gestes de théâtre - tout est donné à voir jusqu’aux vices et aux vertus morales, jusqu’aux entités les plus abstraites” 2. L’image: une nécessité pour un spectacle Il faut créer un spectacle dans un lieu public et ouvert. C’est aller à l’encontre d’un lieu où l’on se déplace, puisqu’on y crée un attroupement et que l’on s’y arrête. On crée de l’exceptionnel dans le quotidien. 3. Des images conventionnelles au Moyen-Âge On distingue l’expression et l’attitude: l’expression est la manifestation extérieure d’une tonalité affective ou une réaction personnelle (les larmes et le rire) que l’on ne maîtrise pas mais qui indique notre sentiment face à une action. L’attitude relève des dispositions conscientes, on parle de l’attitude d’un fou, d’un maître, de l’homme joyeux, de l’homme coupable. Les signes varient en fonction du registre, le signe “1” montre la prophétie, le “2” la sainteté, le “3” montre le plus souvent la trinité (donc dieu, jésus et le saint-esprit). Le signe “3” en comédie peut vouloir dire la trinité ou la volonté de crever les yeux à son interlocuteur, c’est une blague sur la religion. Poser la main sur son menton est le signe de la douleur. [Voir PDF] Le 13e siècle est le siècle d’or des jongleurs, qui transmettent de manière orale. Il va peu à peu devenir un théâtre profane, il s’identifie au texte et ne parle plus à la 3e personne. On peut étudier les occurrences du verbe "voir” dans les chansons de geste: On dit souvent “Voyez comme” ceci ou cela. On invite les spectateurs à imaginer la scène en regardant les mimiques et gestes du jongleur. 4. Métaphysique de l’image (Jean-Claud Schmitt) Toutes les images ont leur raison d’être, elles remplissent des fonctions religieuses, politiques ou idéologiques. On espérait transformer les spectateurs dans leur chair et dans leur âme. La notion d’imago s’inscrit dans un contexte culturel différent du nôtre. La première fois que l’Homme est nommé dans la bible on parle “d'image" (j’ai fait les Hommes à mon image, voir la Genèse (1, 26)). On pose la question de l’image, elle s’inscrit dans le drame de l’histoire de l’humanité. L’image est une notion salvatrice: utiliser les images pour se rapprocher de dieu. Cette histoire est un projet d’une restitution pleine de la ressemblance perdue. Il faut retrouver les traces des ressemblances à dieu. L’Homme incarne le changement alors que Dieu est l’être immuable. Il faut ressembler à Dieu, sans se tromper et penser qu’on le deviendra. Quelle mimesis ? représentation ≠ présentification L’image médiévale s’impose comme une apparition, entre dans le visible, devient sensible. Elle s’incarne dans le paradigme de la culture chrétienne, l’incarnation du Christ. Il s’agit d’assurer pleinement la présence corporelle de ces personnes célestes parmi les hommes. [Voir PDF Théâtre urbain] Théâtre urbain (miracles, jeu): - Répertoire religieux: Le jeu de Saint-Nicolas de Jean Bodel: il peut y avoir des scènes de taverne même dans ce répertoire. Le Miracle de Théophile de Rutebeuf: Il fait un pacte avec le diable, il se repent et est sauvé par l’intercession de la Vierge. Les personnages font de mauvais choix mais les figures divines les sauvent. - Répertoire profane et comique: Le jeu de la Feuillée, d’Adam de la Halle. Le théâtre sort des églises, notamment avec les jongleurs (qui sont des exécutants polyvalents). Ils récitent et font rire sur un tréteau. Les fêtes sont aussi importantes dans le théâtre médiéval. Notamment la fête des fous de Noël début janvier, comme les saturnales (où on échangeait les rôles, les maîtres sont esclaves, les esclaves sont maîtres, les tribunaux et écoles en vacances, le travail s’arrêtait et les exécutions étaient interdites). Lors de la fête des fous, un enfant pouvait prendre la place du prêtre, qui chantait des chansons obscènes, ils buvaient etc… La fête fut prohibée, l’église autorisa l’usage de la violence pour hérésie envers les membres du clergé par les partisans de cette fête. Les fêtes des Fous donnent naissance à la Sotties. Les formes religieuses: Miracle, martyre, moralité, mystère Les formes profanes: sotties, farces - - - Miracle: 14, affaires humaines secourues par la vierge, on utilise un moyen français. Il se joue dans une salle fermée, selon le principe de la scène simultanée (l'hôpital dans Tous ses Oiseaux, mais ici on a jusqu'au 10 scènes simultanées). Les martyres: cérémonies théâtrales qui s’inspirent de la vie des saints, des martyres. Entre 1300 et 1400 vers. Moralité: Le terme apparaît au 15e mais il semble y en avoir dès le . La pièce à la présence exclusive des abstractions personnifiées (allégories) pour servir de façon exemplaire l’opposition entre le bien et le mal. Par exemple Bien avisé Mal avisé. L’un est sous la conduite par la foi, l’autre par la désespérance, le vice etc.. Désespérance lui passe une corde avec laquelle il se pend. Sottie: 15e siècle, ce sont des pièces où les personnages sont des sots au langage élaboré et au propos axé sur la folie. Farce: Un spectacle de la vie quotidienne qu’elle met en scène dans une volonté mimétique Le mystère: un genre théâtral apparu au XVe siècle. Il illustre la scène de l’ancien et du nouveau testament. Il se compose d’une succession de tableaux animés et dialogues écrits pour un public large. Le mystère se déroule devant la ville entière, sur des échafauds sur la place publique. Il dure plusieurs jours (durant les fêtes religieuses). Jusqu’à 60000 vers, le plus souvent 30000. Il met en scène des grands événements religieux, il faut au moins 500 acteurs, sans compter les figurants. Ils sont interdits en 1548 après la représentation de sexe, de mort, d’aldultère et de violence en général. En Bretagne, les mystères perdurent jusqu’au 18e siècle. Massacre à Paris Christopher Marlowe (1564 - 1593), il meurt poignardé l’année de la publication de Massacre à Paris. Le texte conservé ne correspond pas entièrement à l’écriture de Marlowe. Il faudrait comparer cette œuvre avec une autre de Marlowe (voir Le juif de malte). Le traducteur a préféré conserver le rythme plutôt que le sens exact de l'œuvre, mais le texte est déjà distribué pour une troupe comme un livret de mise en scène. On peut faire un parallèle avec Hamlet, ce n’est pas au début une œuvre reconnue, les metteurs en scènes ont du mal à garder le sens de l'œuvre, certains comme Brook et Matthias Langhoff ont changé l’ordre des scènes. On se pose des questions sur le degré de folie d’Hamlet (Ostermeier). On peut reprocher à Hamlet de la simplicité narrative. Mais il faut peut-être les juger selon les règles baroques, les règles de l'excès et de la violence gratuite, ce qui diverge avec les règles classiques. Baroque vient du portuguais barrocco (perle d’une forme irrégulière) désigne quelque chose d’isolite, de mal fait. On l’associe au bizarre, à l’irégulier, c’est un style qui diverge de la norme. Il intervient lors d’une periode entre deux moments d’équilibre sur le plan politique (réforme et contre-réforme donc goût monumental) et sur le plan culturel avec une irruption de l’extravagance entre deux accomplissements harmonieux. À cette époque, la connaissance géographique évolue grandement. [Voir PDF] Baroque: Goût du monumental, volonté d'impressionner, importance du théâtre, expression des richesses, importance du décoratif, goût du singulier et de l’insolite, oxymores, paradoxes et contradictions. Plaisir du fantôme, la mort est une figure vivante. On "paraît" être. L’invention du microscope montre que la vie est présente à une échelle bien plus petite que ce que l’on pensait. Le calcul infinitésimal est démontré. On est dans une démonstration de la mort (tableau de nature morte avec des crânes), on montre des tombeaux et des enterrements, la mort est donnée à voir. On multiplie le théâtre dans le théâtre afin de convoquer la métathéâtralité. Le baroque a instauré un art total ou une unité des arts. Il est défendu que tout est singulier dans l’univers, c’est le principe des indiscernables, car dieu ne créerait pas deux choses similaires. [L’extase de Sainte Thérèse, de Gian Lorenzo Bernini, commentée par Gilles Deleuze] Gilles Deleuze utilise une métaphore du plis. Le mouvement des plis (comme sur un drapeau) est ce qui intéresse ici. Un costume baroque sera rempli de plis. Le corps se perd sous le tissu, il est indépendant des vêtements. Les contours deviennent imprécis. On le retrouve dans L’Extase de Sainte Thérèse. C’est la transgression des arts qui est exprimée, les plis se prolongent en dehors du cadre, la structure se dépasse dans l’architecture. Alors les plis sont un motif esthétique et permettent de montrer la dynamique du baroque, sans que l’on puisse le situer précisément (comme pour les corps). Mettre en scène la mort [La mort au théâtre: l’exemple du roi se meurt de Ionesco, J.Claude] Voir la définition de la tragédie selon Aristote. Selon lui, la mort n’est pas obligatoire, mais il faut faire ressentir de la peur. Dans le mythe de Prométhée, il ne meurt jamais et se fait dévorer le foie chaque jour. On trouve aussi des morts symboliques comme dans le Misanthrope. Dans Dom Juan, il meurt physiquement sur scène. C’est au tournant du 16e que la tragédie devient cruelle au sens premier, le sang s’écoule et annonce la mort. On affirme que plus les tragédies sont cruelles, plus elles sont excellentes. Dans Bérénice de Racine il n’y a pas de morts. Au 18e la mort revient, Atrée se venge et donne les enfants de Thyeste à manger à Thyeste lui-même. La mort pose problème car les acteurs ne peuvent la jouer, ils ne peuvent pas jouer la mort au moment où elle se part, on ne peut pas vérifier l’authenticité du jeu de l’acteur car on ne sait pas comment il mourrait. Alors comment rendre crédible sans rompre la mimesis? [Jean de Virey, Le martyres des Macchabées, 1596] Les 7 personnages de l'œuvre sont des martyres, ils restent tous silencieux face à leurs souffrances. Ce genre d'œuvres ne peut pas être joué au 18e. Dans Le songe d’une nuit d’été de Shakespeare on voit l’hypertrophie de la déclaration funeste, comment tenir aussi longtemps alors qu’il meurt, sa propre mort est commentée, ce qui rend la scène drôle. La poison au 19e permet d’avoir une mort lente avec des points de suspension. - 16e: mort sanglante, théâtre de la cruauté. 17e: Le théâtre de la dignité, ou la mort dissimulée. Ne pas confondre sanglant et funeste, on ne tue pas sur scène mais on montre la mort, elle est en scène mais pas physiquement. On peut s’empoisonner en scène et mourir en coulisse ou inversement. - 18e: Le théâtre de la mort évincé. La mort est un projet et non une action, il y a la mort romantique et la fascination du public pour les “faits divers” et les figures du criminel. Le boulevard du crime se crée à Paris, où les théâtre mettent en scène des faits-divers réels. On dit la mort mais on ne meurt pas sur scène. - 19e: Le théâtre du spectaculaire, ou la mort triomphante. La mort est diverse, les genres dramatiques se dissoudent et on a beaucoup de tentatives de représentation. - 20e: Le théâtre de la dispersion, ou la mort diverse. Dans Huis clos de Sartre ou En attendant Godot ou Juste la fin du monde. On ne voit jamais la mort. On observe désormais beaucoup de mutilations sur scène, et des jeux entre le visible et l’invisible, on veut montrer la mort et le fantôme sans montrer le corps ensanglanté. [Massacre à Paris, Patrice Chéreau, 1972] La disparition des corps dans l’eau permet de mobiliser l’imagination du spectateur, c’est un élément en partie baroque, la couleur change, on voit des reflets, les ondes font des plis. Il fait croire à la mort mais elle n’est pas réellement présente sur scène. [Margot, Laurent Berthome, 2014] La pièce est actualisée (les dates prononcées sont celles actuelles), les spectateurs sont convoqués sur scène, le spectateur devient personnage pour la première partie de l'œuvre, ils sont témoins et membre de la famille qui s’entre-tue, comme s’ils faisaient partis des atrides. Les morts sont représentés par des chaussures jetées sur la plateau, c’est une référence à la shoah. Dans l’imaginaire collectif, des vêtements seuls représentent la mort. La deuxième partie est plus baroque, avec notamment plus de sang. Il y a une volonté de faire troupe, c’est plus esthétisant, on retrouve le spectateur en frontalitée. [Massacre à Paris, Guillaume Delaveau] Il utilise des éléments de cabaret pour réduire la cruauté, les acteurs meurent plusieurs fois car ils jouent plusieurs rôles. Le réalisme à la violence est sapé, il sollicite l’absurdité comme dans une comédie burlesque. Les acteurs renaissent et s’habillent à la vue de tous. Les cloches marquent le début et la fin du massacre. Des éléments contemporains sont présents sur scène. [Wolfgang Mitterer et Ludovic Lagarde, Massacre (Opéra), 2008] La partition est composée de cris d’humains et d’animaux, de bruits stridents. C’est un mélange entre l’opéra et le cinéma, sur les écrans on voit des acteurs ainsi que des images de guerre. Les interprètes chantent sur une petite zone de la scène, ils sont filmés et projetés sur les écrans. Pour Mitterer, la pièce fait écho à la situation Irakienne. [Christian Esnay] Chaque jour de la semaine la représentation change, la distribution, la musique, les effets, les costumes etc… On a aussi la participation des habitants comme foule, on peut aussi changer les points de vue à la Brecht, en redécouvrant le texte comme événement renouvelé, pour être dans l'instantanéité, et jamais dans la répétition. [Christian Boltanski, Personnes] C’était un des plus grands plasticiens français, il symbolise la mort par les vêtements. [Jean-François Sivadier, La mort de Danton] Les personnages guillotinés sont arrosés avec une poudre blanche, donnant l’illusion du plâtre, ils deviennent des statues de pierre, ils entrent dans le domaine historique, c’est une image de la statue. [Roman Opalka] Durant toute sa vie, il écrit des nombres et les peint sur des toiles. À chaque toile la couleur devient 1% plus blanche, jusqu’à ce qu’il peigne blanc sur blanc. Il se prend en photo à chaque fin de séance. [Jerk, Gisèle Vienne] Voir PDF, la très grande violence est lue par le public dans la fiche de salle mais n’est pas représentée sur scène, elle utilise des marionnettes à gaine. présence violence comique temporalité/action mouvements rapport au théâtre la place de la religion l’illusion et la duplicité la relation au public I./ Violence et comique: Dans Massacre à Paris de Christopher Marlowe, on peut se rendre compte que la violence et en particulier la mort peuvent parfois être tourné en élément comique, créant un contraste avec l’Histoire et avec d’autres parties de l'œuvre. Par exemple, lors de la scène 9 deux hommes entrent avec le corps de l’amiral, ils doivent s’en débarrasser. Le texte présente une scène assez triviale où les deux hommes cherchent à trouver comment s’occuper du corps, il est question de le mettre dans un fossé, de le brûler ou de le jeter dans la Seine; ces trois propositions sont refusées car elles pourraient compromettre la santé des autres. Il est alors décidé de le pendre à un arbre. Ici le comique peut se trouver dans la multitude d'idées pour se débarrasser du corps, et de la réflexion nécessaire. On pourrait penser que leur priorité serait de jeter le corps quelque part, sans se préoccuper de où ni de comment. L’attention qu’ils ont à l’égard de la manière dont le corps est manipulé ajoute quelque chose de malsain à la scène. Dans la pièce, on retrouve de nombreux morts comme lors de la scène 5 où la vieille reine meurt. Ici, il n’est pas question de comment se débarrasser du cadavre, c’est même une chose qui se passe très vite, dans la traduction de Pascal Colin on peut lire “ Venez messeigneurs, emmenons son corps, et sachons l’honorer avec solennité.” Plus tard, le corps du roi Charles, Catherine de Médicis n’opère même pas de pause entre le moment où elle réalise que son fils est mort et celui où elle dit qu’il faut tout de suite rappeler Henri d’Anjou, alors en Pologne, elle dit ensuite “Venez et enlevons son corps de là.” L’effet comique est alors convoqué par le manque de considération des personnages pour les morts (alors que ceux concernés sont des proches). On retrouve aussi le champ lexical du feu, avec de grandes références au brasier et aux feux de l’enfer. Dans le champ lexical de la maladie et de la pourriture, on a la reine mère désignée comme une tâche dans l'œil de la France, on coupe la tête et les mains, on s’essuie sur les corps. On retrouve aussi de nombreuses injures et insultes et des détails sordides. Aussi, le champ lexical du corps est très présent, montrant la volonté de démembrement, l’agression physique et psychique est très présente. On retrouve aussi beaucoup d’ordres de donner la mort. Des scènes se font écho (la mort de la vieille reine empoisonnée et une autre à la fin de l’oeuvre; l’assassinat de Cologny et un autre). Le côté farcesque des bourreaux est mis en avance, comme dans le reste de l'œuvre le comique est convoqué par la violence sur les corps. Le plus gros moment comique vient quand le soldat prévient Guise que sa femme se donne à quelqu’un d’autre, la femme est alors décrite comme un territoire à conquérir, à tel point que la réplique ressemble à un conseil politique. Certains personnages jouent la bienséance avant de tuer (page 77), un personnage dit “bienvenue monsieur” puis tue. Les personnages sont enjoués à l’idée de tuer quelqu’un “quand est-ce qu’il arrive, qu’on puisse l’assassiner ?”. Les morts sont rapides mais annoncées (“Je meurs”). C’est typique du baroque et ça revient dans le théâtre romantique, avec des morts bien plus longues, c’est pourquoi le poison est préféré à cette époque. Les acteurs devaient jouer plusieurs rôles, alors la métathéâtralité convoquée par les morts qui doivent se relever pour prendre un autre rôle amène du comique. II./ Temporalité (au vus des actions, des mouvements et de l’enchaînement des séquences) On ressent une urgence dans le mouvement avec les nombreux impératifs. III./ Rapport au théâtre Les entrées et sorties des personnages sont exécutées avec une certaine rapidité proche du vaudeville. IV./ La place de la religion Scène de mariage, dialogue entre Catherine et Charles, les soucis de religions sont évoqués. Les évocations du pape (page 24 par exemple) se font nombreuses, sa figure est diabolisée. On parle des monastères et des prieurés comme des armées, les religieux sont acteurs de la guerre. Lors d’une discussion entre Catherine, Guise et Anjou, on se rend compte du côté religieux de Charles, qui dit avoir “un coeur sensible” et décrit le plan d’”inhumain”. Il s’est engagé à protéger alors il ne peut pas faire ça, les protestants ne sont pas hérétiques pour lui, ce sont de nobles personnes qui se sont fait corrompre. Il est plus attentif à la notion de pardon prônée par la religion. Les saints sont évoqués et utilisés comme provocation envers les protestants. Le catholicisme serait corrompu et serait devenu un prétexte, le pape serait soumis. V./ Duplicité Les personnages donnent une illusion, ils possèdent deux façades, on s’en rend compte surtout avec les apartés (“que je noierais dans le sang et la terreur”). On retrouve par exemple des oxymores, page 107 on lit “pour [que ton épée] puisse joyeusement trancher du catholique”, ou page 93 avec “cette douce vision [du cadavre] est un sédatif pour mon âme”. Les personnages et leur place au centre du pouvoir est très instable. VI./ Relation au public Trois critères du théâtre situé. Dans l'œuvre de François de Chantelouve en 1574, Coligny est présenté comme un traître. C’est une falsification historique manifeste, visant à désigner à l’exécration du spectateur le Mal, l’adversaire absolu. Le monologue de Mercure-Gabriel assure que le spectateur a choisi le Bien contre le Mal.