This article appeared in a journal published by Elsevier. The attached copy is furnished to the author for internal non-commercial research and education use, including for instruction at the authors institution and sharing with colleagues. Other uses, including reproduction and distribution, or selling or licensing copies, or posting to personal, institutional or third party websites are prohibited. In most cases authors are permitted to post their version of the article (e.g. in Word or Tex form) to their personal website or institutional repository. Authors requiring further information regarding Elsevier’s archiving and manuscript policies are encouraged to visit: http://www.elsevier.com/copyright Author's personal copy Le Praticien en anesthésie réanimation (2011) 15, 223—224 ÉDITORIAL Productivité et sécurité en anesthésie Productivity and safety in anesthesia Regrouper les sites opératoires vise à réduire les coûts et à améliorer la qualité et la sécurité des soins, un niveau minimum d’activité étant censé le garantir, mais augmente de la charge de travail des personnels [1,2]. L’augmentation de productivité engendrée expose à la pression de production définie comme la « priorité donnée à la production plutôt qu’à la sécurité, de façon explicite ou implicite, se traduisant pour les professionnels par des pressions et des incitatifs pour atteindre des objectifs de production de soin » [3]. L’activité d’anesthésie a augmenté de 120 % entre 1980 et 1996 [4], puis de 14,7 % entre 2000 et 2007 (base SAE du ministère de la Santé). Parallèlement, les effectifs n’ont progressé que de 9,2 % pour les médecins (Conseil national de l’ordre des médecins), 29,1 % pour les infirmier(e)s anesthésistes (IADE) [5]. Le nombre d’actes réalisé par (ou sous la responsabilité de) chaque médecin augmente donc de 5 % sur la période. L’évolution qualitative de l’activité contribue à la pression de production : développement considérable de l’analgésie péridurale obstétricale (essentiellement nocturne) ; proportion notable de patients de classe ASA 3 et 4 [4] ; dispersion des sites d’anesthésie et de surveillance postinterventionnelle en augmentation entre 2004 et 2009 respectivement de 13,8 % et 12,8 % (base SAE). Sur la même période, en France, la sécurité des patients pris en charge dans les services de chirurgie stagne. Pour 10 000 journées d’hospitalisation, l’ensemble des événements indésirables graves (EIG) passe de 8,4 à 9,2. [6]. En l’absence de lien formel entre augmentation de productivité et sécurité des patients, des arguments indirects obligent à la vigilance. L’augmentation de la durée quotidienne du travail aboutit à des dépassements d’horaires, compensés (repos ou salaire) dans 76 % des cas. Le rythme de travail est conditionné par des demandes nécessitant une réponse immédiate pour 60 % des médecins et pour 64 % des infirmières [7]. Le niveau de stress des anesthésistes est corrélé au sentiment de perte de maîtrise sur le travail : gestion du temps, planification, risques [8]. Au bloc opératoire, charge de travail et tâches multiples, influencent la performance de l’équipe et impactent la sécurité du patient [9]. Sur simulateur, les anesthésistes interrompus ne détectent pas l’absence de contrôle ultime prétransfusionnel par l’infirmière s’ils traitent simultanément la cause de l’interruption [10]. La charge de travail altère la communication, retardant la détection des événements indésirables, entre une et quatre fois par intervention, plus fréquemment dans les établissements de grande taille [10—13]. La pression de production peut être modulée par des éléments extérieurs à l’équipe [14] : programmation adaptée à la charge de travail en fonction de l’effectif et des compétences ; équipements disponibles, fiables, automatisés 1279-7960/$ — see front matter © 2011 Publié par Elsevier Masson SAS. doi:10.1016/j.pratan.2011.08.001 Author's personal copy 224 et ergonomiques ; organisation du travail prenant en compte la répartition des responsabilités, l’expérience individuelle et collective, la fatigue. L’impact de la fatigue sur la performance, négligé par les médecins et les IADE, est moindre dans des équipes habituées à travailler ensemble, mais justifie le repos de sécurité [15—17]. La pression de production favorise une migration de pratiques [18]. Réaliser dans le temps imparti des tâches sans ressources supplémentaires conduit à transgresser règles de bonne pratique, protocoles et procédures. Les pratiques déviantes tendent à devenir la référence, rendant l’accident plus probable. Un ensemble de mesures permettrait de réduire la pression de production et ses effets sur la sécurité des patients. Modéliser la programmation opératoire permet d’échelonner le début des premières interventions, de concevoir des blocs opératoires d’une taille optimale comprise entre dix et 12 salles, de prévoir un anesthésiste mobile de secours quelle que soit la configuration retenue [19]. Un respect mutuel entre soignants et gestionnaires et la définition d’objectifs de production de soins et de sécurité est nécessaire pour trouver des solutions, adaptées à chaque contexte : reconnaissance et valorisation des efforts entrepris par les individus, pérennisation d’équipes soudées, mise en place d’une organisation capable d’apprentissage et d’adaptation à de nouvelles contraintes. S’organiser en conséquence suppose que les facteurs humains soient pris en compte par les organisations et leurs décideurs comme une source d’amélioration de la sécurité. Déclaration d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Ministère de la santé et des solidarités. L’évaluation de la sécurité, de la qualité et de la continuité des soins chirurgicaux dans les petits hôpitaux publics en France. Rapport à l’attention de Monsieur Xavier Bertrand, ministre de la Santé et des Solidarités. 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