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INTENTIONS.
Rester ou partir.
S‘établir, poussé par un désir de sécurité, de durabilité.
Ou la nécessité sauvage de changer, de s’exposer au danger,
d’aller à la rencontre de l’imprévu.
En bref, apprivoiser la mort, ou bien la braver.
Notre foyer met en scène des projets de vie familiers de nombreux ménages : un voyage,
une maison. Je les vois s’entreprendre autour de moi. La semaine on travaille, et le temps
qu’on a de libre, on le passe à les organiser. Parfois, ces projets viennent fédérer un couple
désuni, redonner un sens à une histoire d’amour.
Dans Notre foyer, ces projets sont portés à leur extrême : ils sont colossaux, couteux, ils
frôlent l’impossible. Et surtout : ils n’ont pas de fin – une vie ne suffirait pas à les achever. Ils
donnent un sens, une direction : ils sont existentiels. Ils deviennent presque une œuvre, à la
hauteur de la richesse inépuisable qui habite leurs créateurs.
Dans le mot foyer, on peut entendre le lieu de la maison, mais aussi l’entité créée par deux
personnes qui s’aiment. Il faut également l’entendre comme la flamme intérieure, la force
infinie que l’être humain est prêt à déployer dans un objectif précis.
Le rapport à l’autre, le rapport amoureux est au centre de Notre foyer. Ici l’amour n’a pas la
vertu absolue et éternelle qu’on lui prête dans la mythologie quotidienne (on pense au
mariage). On s’aime pour quelque chose : parce qu’on partage le même désir, parce qu’on
reconnait en l’autre son propre désir.
Cette maison, ce voyage, auraient-ils un sens entrepris seuls ? Dans Notre foyer, l’autre est
nécessaire comme témoin de l’œuvre entreprise.
La pièce s’intéresse à la force du désir, à la puissance de l’homme à se projeter dans quelque
chose qui n’existe pas encore.
Face à ces grandes constructions imaginaires, pas d’onirisme. Les tableaux qui se
succèderont seront minutieux, pragmatiques, sérieux presque. Pour les deux femmes, tout
ca n’est pas une rêverie, et même si l’épreuve est titanesque, elles s’y prennent avec
méthode.