d' rs 20 10 1 - lu nd i 29 ma Em pr ei nt e N' EMPREINTE N'1 Adesso e Sempre présente le festival Hybrides2 du 27 mars au 2 avril 2010 à Montpellier Réservation : 04 67 99 25 00 Retrouvez l’actu du festival sur http://hybrides.over-blog.com Contact journal : [email protected] Z o o mS s u r S e n s at i o n s d e spe c tat e u r s Points de vue 1 P r o g r a m m at i o n L’heure est grave. Au j o u r d ’ h u i 19h Made 22h Let in Paradise La Chapelle the Sunshine In Ancien Lycée Mendès France Demain 10h Emulation (master class) La Salle 3 13h Repas Rencontre public/artistes Kawenga up Galerie St Ravy 14h Empreinte (rédaction du journal d’Hybrides2) Kawenga 19h Made in Paradise La Chapelle 19h Let the Sunshine In Ancien Lycée Mendès France 22h Ethnographiques Rockstore 13h Making à suivre Direction de publication : Compagnie Adesso e Sempre - 42 rue Adam de Craponne 34000 Montpellier Rédacteur en chef : Bruno Tackels Secrétaire de rédaction : Lise Mullot Comité de rédaction : Boris Bruguière, Rosa Huisman, Jean-Baptiste Lemouzy, Jo Papini, Christian Ruby, Fanny Simons, Bruno Tackels Graphiste : Christophe Caffier Crédits photos : Marc Ginot Ce journal est imprimé grâce à notre partenaire Arts Hélio Depuis près de dix ans, les compagnies qui font vivre le spectacle vivant, dans nos villes et nos campagnes, sont menacées, précarisées et décimées par centaines. Ensuite, ce fut le tour des structures et Institutions de tout rang, dont les subventions se sont mises à fondre comme neige au soleil. L’ambitieux programme de l’art à l’école, de la maternelle à l’université, impulsé par Jack Lang et Catherine Tasca, a été complètement laminé. C’est maintenant au tour des collectivités locales, dont la réforme en cours va dramatiquement asphyxier le secteur culturel local. Sans oublier la sombre « révision générale des politiques publiques », qui comme dans bien d’autres secteurs, prévoit de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. La volonté libérale de démanteler notre politique culturelle, unique au monde, et enviée par tant de pays, gagne jusqu’au Ministère de la Culture lui-même. Les différents services sont réorganisés sans cesse, démantelés, vidés de leur substance, sans boussole ni marge de manœuvre. Au point que nos responsables politiques, nos « représentants », ont sorti du chapeau un fantomatique « Conseil de la création artistique », pour compenser les faiblesses d’un Ministère qu’ils ont eux-mêmes suscitées ! Aujourd’hui, 29 mars 2010, est un jour de lutte décisif. A l’appel de très nombreux syndicats, une mobilisation sans précédent du monde culturel adresse aux responsables politiques de ce pays un message clair et sans compromis : -- Ne soumettez plus la culture aux lois du marché. -- Regardez la « richesse » d’un secteur qui n’est pas une marchandise ou un produit de communication. -- Acceptez de regarder l’art pour ce qu’il est une pure dépense, qui nous grandit tous. -- Enclenchez, par conséquent une loi d’orientation et de programmation pour l’art et la culture, afin que nous puissions, tous ensemble, partout sur le territoire, assumer et parfaire cette magnifique aventure de la démocratisation culturelle, en chemin, mais inachevée. -- Redonnez au Ministère ses lettres de noblesses, sa légitimité et de véritables moyens d’action. -- Souvenez-vous que dans toute crise, la culture a toujours permis le sauvetage de tous. -- Et n’oubliez jamais qu’un pays dans lequel les musées sont fermés, est un pays en guerre, où l’on sort en gilet pare-balle, où le sang coule dans les caniveaux. Bruno Tackels Edito Après un week-end de haute activité Le Festival Hybrides2 a démarré ce week-end en beauté, humour et profondeur. Un florilège de spectacles aux formes très variées, mais qui mobilisent le public, jusqu’à en faire l’acteur principal, dans « Domini Públic », la performance du catalan Roger Bernart. A minuit sur un parking désert de Saint Jean de Védas, devant le Chai du Terral, cinquante spectateurs, casques sur les oreilles, se sont embarqués dans un grand voyage collectif, sous forme de jeu de rôles, basé sur des questions qui appellent des réponses sous forme d’actions concrètes. Derrière l’apparence du « jeu », chaque spectateur s’enfonce peu à peu dans un univers beaucoup plus intime, qui laisse forcément des traces. Dimanche midi, la performance a été reprise en plein soleil sur la Place de la Comédie. Au Chai du Terral, sept compagnies (Hors commerce, Yann Lheureux, Vertigo, Adesso e Sempre, La Maison Théâtre, Zépétra, A la Barak) ont rassemblé les participants de leurs ateliers amateurs pour une large performance en plein air. Dans le hall, Claire Engel présentait « Making up », une installation vidéo qui met en scène une femme violentée, qui se reconstruit par les images et les sons ; et Thierry Duval investissait le bar avec un dispositif intitulé « Belgrade », à partir d’un texte d’Angélica Lidell, qui met en scène deux journalistes dans la capitale serbe, le jour des funérailles de Milosevic. La compagnie Adesso e Sempre, entouré de différents artistes invités au Festival, reprenait quant à elle le travail engagé à la Chartreuse de Villeneuve lez Avignon, lors de la Sonde 03#10 flux et satellites. « CNN Montpellier » est une forme de « journal théâtral », qui s’empare des événements de l’actualité (ici le tremblement de terre en Haïti au mois de janvier 2010), pour en faire une sorte de « contre-information », mobilisant tous les moyens de la scène. Et enfin, durant tout le week-end, le performeur Oskar Gomez Mata investissait le Centre chorégraphique avec « Optimistic vs Pessimistic », un spectacle de « théâtre libre », qui lui aussi met le public à rude épreuve ! Mais on y prend beaucoup de plaisir. C’est un trait récurrent de la programmation : Hybrides met les spectateurs en scène et à l’honneur. Le journal EMPREINTE n’est pas en reste, puisque nous convions tous ceux qui le souhaitent à participer à la fabrication des numéros du journal. Dans ce premier numéro de la semaine, Omar Ghayatt et Yan Duyvendak prolongent le dialogue intense qu’ils tissent depuis deux ans entre leurs deux cultures, européenne et proche-orientale — un dialogue souvent conflictuel qui a donné forme à leur spectacle, « Made in Paradise », que nous verrons ce soir à la Chapelle. La compagnie italienne Motus, très attendue à Montpellier, revient avec deux spectacles nés de la figure incandescente d’Antigone. Nous y reviendrons dans un prochain numéro. Outre les sensations de spectateurs, nous publions une synthèse de la conférence que Christian Ruby a donné au Musée Fabre, à l’invitation du Fonds Régional d’Art Contemporain. Là encore, il est question de la position singulière de ceux qui observent les œuvres d’art. Un regard précieux sur l’histoire de l’art, qui montre que chaque époque fabrique un type de spectateur différent, qui exerce un regard particulier sur le monde. Bruno Tackels Z o o mS s u r 2 Interview de Yan Duyvendak et d'Omar Ghayatt Propos recueillis par Bruno Tackels Pouvez-vous décrire en quelques mots votre univers, en faire un portrait instantané ? YD : C'est la rencontre entre le Proche-Orient et l'Occident, et à partir de là entre Omar et moi. C'est un peu la ligne de force de la pièce. OG : L' important n'est pas d'être unique, il est possible d'être différent. Ce qui compte, c'est de se rencontrer et de survivre à cette rencontre. YD : Il dit cela parce que cela fait deux ans que nous travaillons sur ce spectacle et nous avons eu beaucoup de conflits qui ont été digérés dans la pièce. Des conflits entre vous ? YD : Oui. L'effort que nous avons fait l'un vers l'autre se sent dans la pièce et ça marche. Nous avons essayé de transgresser des limites, des frontières et ça, c'est beau. Vous avez transgressé votre identité, des préjugés. Quel type de conflit entre vous, par exemple? OG : Tout dans la vie peut paraître conflictuel, mais en même temps la différence crée la pluralité et donc la richesse. Même manger ensemble peut être conflictuel. YD : Omar n'aime pas la cuisine européenne, et moi je n'aime pas la cuisine égyptienne. Pour manger ensemble, c'est toujours un peu conflictuel. De plus, nous avons un interprète marocain qui n'aime pas non plus la cuisine égyptienne. Les problèmes de cuisine et les problèmes de conflits, c'est tout l'art de la scène. La scène est un agon de signes. YD : Oui. Nous avons donc utilisé ces conflits dans la pièce. On les met à plat. Nous sommes sur scène avec les gens autour de nous, il n'y a pas de distance, pas de différence. Nous sommes tous dans ce bateau : la rencontre Proche-Orient et Occident. L'Islam contre la société post-chrétienne capitaliste. C’est cette rencontre-là qu’on essaie tangiblement de mettre en place. La différence entre la société égyptienne et la société française est que chez vous, la religion prend une place dans la politique alors rs 20 10 1 - lu nd i 29 ma Em pr ei nt e N' 3 que chez nous, ces deux sphères sont totalement séparées. YD : Oui, d'où ce conflit : nous croyons que nous ne croyons en rien et eux croient qu’ils croient en quelque chose. Il y a ici des nuances qui sont intéressantes à relever. Ce que ce travail m’a appris, c’est que je crois en la distance. C’est une vraie croyance et donc quelque chose qui peut être remis en question. La distance critique, c’est la croyance de l’Occident. S’il n’y a pas la distance critique, on est mort. Croit-on ? YD : Oui, c’est notre croyance. Et vous, Omar ? OG : De mon côté, je nuance aussi. Ce sont les codes qui fondamentalement créent vraiment les différences. On peut utiliser l’image MAC/ PC. Ce sont deux systèmes différents. Nous écrivons de droite à gauche, vous de gauche à droite et ça change tout dans la tête. Pourtant, au fond, ce sont deux systèmes et deux écritures qui essaient de transmettre du sens. La recherche fondamentale est la même. Pour finir et sans déflorer le spectacle : comme dans beaucoup de spectacles du festival, les spectateurs ont une place active, ils font des choses. Dans la performance d’Oskar Gomez Mata, le spectateur travaille, on n’est vraiment pas passif, ce n’est pas une métaphore. Chez vous aussi, puisqu’on peut choisir dans une liste de différents fragments. Prenons le premier : « Prada, Chanel, Dior, le concept de la nouvelle Burqua ». Un mot là-dessus ? YD : Ce fragment n’existe plus, on l’a éliminé. Beaucoup de fragments changent car on réagit très fort à ce qui se produit entre Omar et moi, mais aussi à l’actualité. On travaille avec les éléments d'un conflit continuel. Ce que je peux dire sur l’ensemble de la pièce, c’est que le public peut choisir les fragments qu’il a envie de voir, qui sont de petites saynètes, nombreuses, de quinze minutes chacune. Nous avons cinq heures de matière à proposer. La question de la rencontre entre l’Islam et l’Occident est trop vaste pour pouvoir en faire le tour. Nous ne pouvons parler que de bribes, de fragments qui amorcent la possibilité d’une rencontre. Un plat ou deux, mais pas la totalité de la cuisine. ZOOM SUR Eli Commins Propos recueillis par Bruno Tackels Et si je vous demandais de faire un autoportrait ? A l’origine, je suis un auteur de théâtre, dans le sens le plus linéaire du terme, qui destine son travail à l’imprimé. Peu à peu je me suis intéressé à d’autres formes de textualités, à des écritures non linéaires, notamment la pratique de textes électroniques. Il y a quelques années, je me suis senti dans une impasse en écrivant des pièces de facture classique. J'ai alors écrit des textes qui sont aussi des programmes, c'est-à-dire des textes programmés, préparés pour leurs conditions d’apparition en scène. Par la force des choses, je suis maintenant auteur et metteur en scène, pour employer la nomenclature classique, mais j'ai l'impression que ces mots-là ne conviennent plus vraiment pour ce genre de formes — j’ai donc bien du mal à répondre à la question. Et si moi je disais « créateur de dispositifs pour un certain nombre de gens rassemblés », qu'en pensez-vous ? Absolument, oui. Ça me plait bien. On peut dire que vous produisez des dispositifs qui cherchent à faire rentrer le réel et tout le bruit du monde sur la scène. Dans « Breaking », effectivement, je pars de ce site Internet de plus en plus connu qui s’appelle Twitter. Les fameux cent quarante signes qu’on s’envoie dans le monde entier. Il s'agit d'une contrainte formelle très forte, mais assez intéressante sur le plan rythmique. J’utilise ces matières pour obtenir des sortes de récits personnels, des histoires intimes, rédigées par des personnes qui sont en train de vivre une situation donnée, en général hors du quotidien — mais je pourrais également choisir un contexte plus banal. En l’occurrence, pour l'édition d’Hybrides, la situation s'articule autour de trois pôles, trois thèmes que l'on peut écouter ensemble et mêler : le tremblement de terre en Haïti au mois de janvier 2010, le tremblement de terre au Chili et enfin les astronautes de la station spatiale internationale. On peut effectivement dire qu'il s'agit d'une intrusion du réel, mais finalement ces personnes-là sont peut-être elles-mêmes en train de fictionner, et parfois moi-même j’interviens quelque peu dans cette matière première — je ne suis donc pas Z o o mS s u r > En tant qu’homme, j’ai perdu. En tant que responsable politique, j’ai engagé un processus qu’il a été impossible de remettre en question. Mais en tant qu’homme, ce fût un naufrage politique. > Michaël Gorbatchev très sûr que l'on puisse garder ce terme de réel… Est-ce qu’on ne pourrait pas revenir alors au bon vieux mot de « théâtre documentaire » très en vogue dans les années 70, notamment avec Peter Weiss, et tous ces artistes qui cherchaient à se rapprocher le plus possible du réel ? Tout à fait, je revendique l’appellation de « théâtre documentaire » effectivement. Si le documentaire peut s’autoriser à aussi, j’espère, former, tisser des sortes de petits réseaux, de récits, de petits romans personnels. Selon vous, ces nouveaux outils techniques engendrent de nouvelles écritures, donc des écrivains « inattendus » ? Je hiérarchiserais plusieurs types d'écritures. Il y a les écrits dont je reste très proche, et je demande naturellement à leurs auteurs s'ils souhaitent participer à l'expérience. Ils en deviennent finalement « co-auteurs ». Et puis, il y a d’autres cas pour lesquels je colle plusieurs personnes du réel ensemble, et il y a même d’autres cas où je m’autorise à écrire un peu librement. Cette chose incroyable qu'est la fiction... Ce qui est très intéressant, c'est de voir que ces auteurs se permettent beaucoup plus de choses que moi. Un des « personnages » écrit sur Twitter le 11 janvier 2010, donc à la veille du tremblement de terre en Haïti : « demain sera pire, douce nuit à tous ». En tant qu’auteur, je ne me serais jamais autorisé un effet pareil. Dans le dispositif que vous créez, les spectateurs jouent un rôle très particulier — c'est d’ailleurs l'un des fils rouges du festival Hybrides cette année. Le public est invité à se déplacer dans l'espace, afin d'écouter différentes sources géographiques : Haïti, le Chili et la station spatiale internationale, qui est la métaphore de la Terre qui continue de tourner. En se déplaçant dans le dispositif, le spectateur déclenche des pistes audio que je mélange avec d'autres paroles en direct dans la performance. Par le déplacement de leur corps, les spectateurs créent des montages et des correspondances, des échos entre ces différentes vies. Quelqu’un qui est au Chili dit « est-ce qu’on va à la plage » à sa copine, et quelqu’un en Haïti qui est à l’hôpital en train d'y amener son frère... ce genre de choses-là et puis une situation qui s’inverse ; donc oui, c’est une position de témoin, oui, tout à fait. 4 Pessi- ssimistic » est « Optimistic vs Pe renant et noun spectacle surp ligne des specvateur, dans la l Hybrides. Une va tacles du festi coulisses place entrée par les tateur en pod'emblée le spec Les comédiens, sition d'acteur. calé, dressent dé par un humour sur la société un constat virulent ant au speccontemporaine. Qu constamment t tateur, celui-ci es mentalement it so sollicité, que ce t. Joie, colère, ou physiquemen s'entremêlent incompréhension ce. On nous piè tout au long de la er, de forlev us no demande de d'occuper tout mer des rangées, u des comél'espace, au milie ts qui contian diens et des figur , malgré tout. nuent le spectacle e générale, les Dans cette cohu mal à trouver spectateurs ont du rendre le fil mp leur place et à co de la salle rt so On de l'histoire. t de frustration, avec un sentimen ccent espagnol dû peut être à l'a musique omnie qui, ajouté à un mpréhension co la nd présente, re age! difficile. C'est domm zy Jean-Baptiste Lemou Rosa Huisman 5 Se n s at i o n s d e spe c tat e u r s rs 20 10 1 - lu nd i 29 ma Em pr ei nt e N' « Optimistic vs mistic » son réveil anmar qui provoque « Making Up » ésente, dans goissé. puissants à la pr Nous assistons im Claire Engel nous ins n ressive d’une blanc so destruction prog un intérieur clos et mi 20 t tion de son ndan femme : destruc tallation vidéo. Pe s rsé ve ule de son idenbo n es rps, destructio co nutes, nous somm s peut-elle pas us qui passon tité. Comment ne par les images. No t en la désillusion voir, comm être habitée par dans la rue sans la ns vo l’a us de ce qu’elle a e no devant les images ne pas imaginer qu us no e qu pleine de joie, e e, ut é, une petite fill ét croisée, sans do er pleine d’espoir, e ou son alt une adolescente la connaissons, ell a attendu du devant ce qu’elle ego ? éo vid s ce comment avoir quen prince charmant, Les thèmes des sé ou t en r cet échec ? lèt me mp su co courage d’as le se croisent, se vi-elle partir ? La t le choc : Partira-t-elle ? Peut s’opposent, créan nt me te otiv essentiel. immédia porte est un leitm sage heureux et r ou am d’ lle s’éclate la ages Porte contre laque visage meurtri, im rd ga re , laquelle est ur re nt mo sa tasse de thé, co et images de dé re porte à travers apeuré. Le projetée Paula, heureux et regard es ag im e le retour du mêmes laquelle elle devin tour incessant des ma se essaie de franPaula mari, porte qu’elle nous martèle : s ; up co les ir. r en ue chir sans y parv quillant pour masq dans la rue, L’acte essentiel n’est jamais monPaula marchant n bonnet, son tré, l’homme est présent mais dissimulée par so tes, pleine sans estompé, en contre-jour. Ce sont écharpe, ses lunet e injustifiée, ses mains que l’on voit surtout. nt doute d’une ho r lant dans des La vraie tragédie est portée pa mais surtout circu s plu lui ne és r cit pa it les publi Paula, celle qui fin lieux où la foule, et sa mise e ud lit so sa t là. en re êt rappell té ; Paula et son L’image finale se passe de comau ban de la socié uvo e, paradoxalevérité, de mentaires bien qu désir de cacher la ale rm no plus sereine, la femme ment, elle soit la loir paraître une et ula Pa plus colorée. s ; nt la fa plus esthétique, aux yeux de ses en upe ne Jo Papini i qu ies son refus des am son et ula Pa ; re nd vent compre par le cauchesommeil détruit Sensations autour d'« emulation » Master-class conduite par Julien Cassier « Rouler, plier, tordre… » Nous sommes lundi matin 10h, à la salle 3. Julien Cassier (Circassien, cie GdRA) anime une master-class autour de l'acrobatie et des « équilibres ». Tu le regardes, il a l'air doux. Il est souriant, un peu massif, à la façon d'une armoire cévenole. Attention, « les critiques sur le physique n'ont pas lieu d'être » 1 . Ce matin la France n'est plus la même. Comment ce gars peut-il faire des acrobaties? Il doit « pousser, tirer, porter, plier. » Première figure, et me voilà scotché au sol devant le phénomène. Il roule au sol, rebondit sans effort, ni essouf 1 « Le PDG de Radio France, Jean-Luc Hees, a présenté, dans une déclaration au Point.fr, les « excuses du groupe » public au ministre de l'Immigration Eric Besson, à la suite d'une chronique que lui a consacré l'humoriste Stéphane Guillon, ce lundi matin sur France Inter ». flement. Il semble avoir avalé son trampoline, l'artiste. Est-ce que c'est dangereux à pratiquer ou à recevoir ? Est-ce que l'art fait mal? Est-ce qu'on va « prendre des coups » ? Une affaire de divertissement, « pour rire », c'est du léger ? Catégorie poids plume, à peine échauffé te voilà jeté au sol. « Tordre, étirer, vriller, pousser... » Faire grimper le reste de ton propre corps au dessus, nuque écrasée. Avec ou sans les mains, à la recherche d'un équilibre sur le sommet du crâne, tu ressembles à pas grand chose. Le poids de ton corps compresse les poumons. « Écraser, souffler, rougir, couler... » Qu'est-ce qui t'a pris de venir ici un lundi matin, toi, citoyen, spectateur-acteur ? Tu sues, en baves, le corps plie, les poignets et le dos endoloris. Tu voulais vérifier, ajuster l'assemblage des pièces : ton corps de la quarantaine, à demi-souple, tête, désirs de vie ? Rapidement, tout en fusion, tu ôtes des épaisseurs, décalqué de sueur, ton corps sur le tapis noir des danseurs. Primate, face à face avec toi-même, la proximité de l'os et de la chair, ré-expérimentant ta colonne vertébrée. Je pense à Besson qui se plaint d’une caricature. Je pense aux charters pour l'Afrique. Mon corps tendu, une plaque de tôle monumentale de Serra 2 : chacune de ses œuvres répondant à un protocole de 1967, une liste écrite de verbes : rouler, plier, tordre… « Une relation avec l'œuvre, qui devienne une expérience sensible et concrète vécue par le public. Face à elle, le spectateur-acteur reçoit une initiation à une forme esthétique en mouvement. Il s'agit d'un travail sur l'identité physique et émotionnelle... » Boris Bruguière 2 Richard Serra, connu pour ses sculptures en acier, exposition au Grand Palais de Paris en 2008. Se n s at i o n s d e spe c tat e u r s Sensations autour de « Domini Públic » ouvreuse En tant qu'ouvreuse de la pièce, j'ai pu assister au spectacle d'un tout autre point de vue que le public. Assise sur un escabeau, les spectateurs étaient tournés et exécutaient les gestes face à moi. J'ai eu la sensation, surtout la deuxième fois que je l'ai vu, d'être la voix du casque, celle qui leur posait les questions, qui les guidait. Le spectacle était d'autant plus drôle et touchant que je pouvais savoir au fur et à mesure du déroulement de « Domini Públic », l'identité de chaque spectateur en fonction de ces réponses en me mettant en position de voyeur. Je savais, qui gagnait plus de 1000 euros, qui était né à Montpellier, qui était propriétaire de sa maison, qui était artiste... Je pouvais également voir ceux qui hésitaient à répondre et qui, voyant que personne ne bougeait, se mettaient en retrait. Lorsque le jeu de la révolte entre policiers, prisonniers, et personnes de la Croix-Rouge a débuté, l'image était d'autant plus forte que je voyais distinctement les trois groupes, les trois clans. Peu à peu, le spectacle m'est apparu sous forme de différents petits tableaux traduisant la révolte. Les prisonniers, mains derrière la tête, allaient être fusillés par certains policiers, alors que d'autres protestaient ou se cachaient les yeux, puis les morts étendus sur le sol étaient accompagnés par ceux de la Croix-Rouge, genoux à terre. La première fois que j'ai vu le spectacle, de nuit, sous la seule lumière d'un lampadaire, j'ai oublié l'espace d'un instant qu'on était au théâtre et que cette scène n'était due qu'aux réponses des différentes questions posées aux spectateurs. J'avais ainsi une vue d'ensemble, que le spectateur n'avait pas. Joué la nuit, sur un parking, j'ai eu l'impression que le public répondait plus facilement aux questions, tandis que, sur la Comédie au milieu de passants, il faisait plus attention à son image et suivait beaucoup plus le groupe. L'ambiance nocturne de la veille, sur le parking du Chai du Terral, rendait la scène de la révolte beaucoup plus forte qu'en plein jour. Mais grâce à ces deux représentations, je me suis rendu compte que le spectacle a beau être joué plusieurs fois, les différents lieux, temps et spectateurs le différencieront toujours de la fois précédente. Fanny Simons 6 Sensations autour de « Domini Públic » Une action dominicale… Roger Bernat nous présente une sorte de grand jeu de rôle : les spectateurs occupent l’espace de jeu, Place de la Comédie et, casque sur la tête, répondent aux injonctions, données par une voix féminine. Les seuls éléments placés dans l’espace sont deux panneaux « droite », « gauche », et un accessoiriste avec sa malle. Voici une proposition a priori alléchante, qui nous met en appétit. Que va-t-on nous demander ? Sommes-nous mis dans la position d’acteurs ? Je me suis posé quelques questions sur ce spectacle : l’histoire de l’évasion des prisonniers est-elle pré-écrite ou s’écrit-elle au moment où les déplacements des spectateurs-acteurs sollicitent l’imaginaire de la voix ? Comment sont choisies toutes les questions posées ? La voix estelle actrice ou spectatrice ? Les accessoires — masques, couvertures — jouent-ils vraiment ? Le point fort, subjectivement, me paraît être les figures que dessinent dans l’espace les participants. De là découle que celui qui apprécie le plus le spectacle n’est peut-être pas le spectateur qui est entré dans le processus mais le spectateur accidentel et — encore mieux — celui qui est au balcon du théâtre et a une vue aérienne du spectacle. Mais, personnellement, j’ai été un peu déçue, restant sur ma faim : les questions les plus troublantes sont posées rapidement, à la fin, lorsque nous regardons tous l’écran, sans mise en danger. L’acteur est celui qui agit, qui prend une part active. Il m’a semblé que les déplacements et les gestes, restaient extérieurs à nous, et qu'on ne nous demandait jamais une véritable implication. Je n'ai pas ressenti une vraie relation aux autres — excepté le couple qui se dit adieu. J’aurais aimé que l’expérience aille plus loin. Jo Papini rs 20 10 1 - lu nd i 29 ma Em pr ei nt e N' Politiques du spectateur L’actuel consensus autour de l’idée d’un spectateur et d’un public formatés par les médias et la société du spectacle, rendus « bêtes » par fait d’inculture ou de brouillage des repères culturels, serait simplement indifférent si l’on ne voyait poindre en lui la combinaison de deux présupposés plus directement politiques : d’une part, l’idée nostalgique d’un spectateur cultivé qui aurait existé jadis ; d’autre part, l’idée selon laquelle il conviendrait de réserver aux experts en art le soin de décider de ce qui est bien ou mal pour les uns ou les autres. Les conclusions de mes travaux portant sur le spectateur et le contemporain ne me portent pas du tout à entrer dans le jeu de ce consensus. Les perspectives doivent même être très largement déplacées. Commençons donc par rappeler qu’il n’existe ni spectateur ni public en soi. On ne naît pas spectateur, on le devient. Il y faut un art certain de l’élaboration de soi en corrélation avec une proposition artistique. Le spectateur est toujours en formation de soi, et la cor7 Points de vue rélation œuvre/spectateur est toujours réactivée de manière critique. Alors, qu’entendons-nous au juste par spectateur ? Dans un premier temps, « spectateur » renvoie à une construction historique. Il se fabrique à partir de l’ajustement esthétique opéré au cours de la conjonction entre l’appareillage figuratif que déploie le point de vue du sujet dans l’œuvre d’art classique, la prépondérance du modèle optique, et la construction de la pulsion scopique, de la pulsion d’entrer au contact de l’œuvre (écouter, voir) qui est le plai- > L’œuvre contemporaine engendre des situations dans lesquelles les spectateurs entrent en liaison et doivent apprendre à concevoir d’autres modes d’existence. Plus précisément, ce qui fait œuvre, c’est la manière dont un geste artistique pousse les spectateurs à œuvrer entre eux. sir esthétique même. Le sujet spectateur est ainsi mis en exercice par la présence d’une œuvre qui s’adresse à lui, quoiqu’il ne puisse s’en rendre propriétaire (esthétiquement), l’utiliser à sa guise. Il doit en revanche s’activer à apprécier, s’exercer, exercer sa force de juger dans l’horizon d’un commun, qui vise la totalité des spectateurs. Ce moment a été transformé durant et par la modernité. Effectivement, le spectateur moderne, sous le coup de l’art moderne qui décentre par deux fois l’esthétique (des œuvres sans point perspectiviste focal et liées à l’idée de masse) en assénant un rude coup à l’art classique, offre au spectateur un autre espace d’exercice. En frappant l’œuvre d’impuissance à imiter, en les désobjectivant, l’art moderne déplace la délectation esthétique. Cependant, l’art contemporain révèle qu’à beaucoup d’égards l’art classique et moderne a joué le rôle d’une discrète mise au pas morale et politique du sujet ou des masses. L’œuvre contemporaine engendre des situations dans lesquelles les spectateurs entrent en liaison et doivent apprendre à concevoir d’autres modes d’existence. Plus précisément, ce qui fait œuvre, c’est la manière dont un geste artistique pousse les spectateurs à œuvrer entre eux. L’œuvre n’a plus à être prise pour prétexte aux fins de parler d’elle, mais elle fait parler et on parle maintenant, fût-ce dans le bégaiement, mais toujours dans l’interférence et le différend. Dans un second temps, il convient de constater que nous sommes, chacun, toutes ces constructions à la fois, mis en contact avec des œuvres différentes et parfois inédites comme celles du spectacle « vivant » ou des musiques dites « actuelles ». Dans un troisième temps, il convient de raisonner un peu. Refusons de faire de l’idéal classique du spectateur un modèle pour les pratiques contemporaines. Comme fait historique de comparaison, il permet uniquement de mieux observer ce qui se passe de nos jours, tout en nous interdisant de faire l’impasse sur ses contradictions internes. Simultanément, il importe de constater non moins que la puissance des médias ne s’exerce pas mécaniquement. Enfin, il est essentiel de s’interdire toute culpabilisation du spectateur ou du public contemporain. Ainsi, il devient possible de tenter de faire sourdre du spectateur contemporain les dynamiques politiques qui permettraient sa propre transformation. Nous avons souligné la possibilité de travailler sur une théorie de la trajectoire du spectateur et du public. Paradoxalement, la perspective du spectateur classique revient en ce point. Mais comme double contrepoint : relativement aux discours actuels sur le spectateur, pour mieux révéler leur impasse (la nostalgie), et aux attitudes actuelles, pour mieux indiquer leur potentiel actif. Christian Ruby Christian Ruby, Docteur en philosophie, enseignant (Paris). Derniers ouvrages publiés : Tout n’est pas perdu, Culture, Arts, Politique, Bruxelles, PAC Editions, 2010 ; L’interruption, Jacques Rancière et la politique, Paris, La Fabrique, 2009 ; Devenir contemporain ? La couleur du temps au prisme de l’art, Paris, Editions Le Félin, 2007 ; L’âge du public et du spectateur, Essai sur les dispositions esthétiques et politiques du public moderne, Bruxelles. > Pourquoi donc les pauvres ne mettent-ils pas des gants pour mendier ? Ils feraient fortune. > Charles Baudelaire 8