29 mars 2010 - Yan Duyvendak

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EMPREINTE
N'1
Adesso e Sempre présente le festival Hybrides2
du 27 mars au 2 avril 2010 à Montpellier
Réservation : 04
67 99 25 00
Retrouvez l’actu du festival sur http://hybrides.over-blog.com
Contact journal :
[email protected]
Z o o mS s u r
S e n s at i o n s d e spe c tat e u r s
Points de vue
1
P r o g r a m m at i o n
L’heure est grave.
Au j o u r d ’ h u i
19h Made
22h Let
in Paradise La Chapelle
the Sunshine In Ancien Lycée Mendès France
Demain
10h Emulation (master class) La Salle 3
13h Repas
Rencontre public/artistes Kawenga
up Galerie St Ravy
14h Empreinte (rédaction du journal d’Hybrides2) Kawenga
19h Made in Paradise La Chapelle
19h Let the Sunshine In Ancien Lycée Mendès France
22h Ethnographiques Rockstore
13h Making
à suivre
Direction de publication : Compagnie Adesso e Sempre - 42 rue Adam de Craponne 34000 Montpellier
Rédacteur en chef : Bruno Tackels
Secrétaire de rédaction : Lise Mullot
Comité de rédaction : Boris Bruguière, Rosa Huisman, Jean-Baptiste Lemouzy, Jo Papini, Christian
Ruby, Fanny Simons, Bruno Tackels
Graphiste : Christophe Caffier
Crédits photos : Marc Ginot
Ce journal est imprimé grâce à notre partenaire Arts Hélio
Depuis près de dix ans, les compagnies qui font vivre le spectacle vivant, dans nos
villes et nos campagnes, sont menacées, précarisées et décimées par centaines. Ensuite, ce fut le tour des structures et Institutions de tout rang, dont les subventions se
sont mises à fondre comme neige au soleil. L’ambitieux programme de l’art à l’école,
de la maternelle à l’université, impulsé par Jack Lang et Catherine Tasca, a été complètement laminé. C’est maintenant au tour des collectivités locales, dont la réforme en
cours va dramatiquement asphyxier le secteur culturel local. Sans oublier la sombre
« révision générale des politiques publiques », qui comme dans bien d’autres secteurs, prévoit de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. La
volonté libérale de démanteler notre politique culturelle, unique au monde, et enviée
par tant de pays, gagne jusqu’au Ministère de la Culture lui-même. Les différents services sont réorganisés sans cesse, démantelés, vidés de leur substance, sans boussole ni marge de manœuvre. Au point que nos responsables politiques, nos « représentants », ont sorti du chapeau un fantomatique « Conseil de la création artistique »,
pour compenser les faiblesses d’un Ministère qu’ils ont eux-mêmes suscitées !
Aujourd’hui, 29 mars 2010, est un jour de lutte décisif. A l’appel de très nombreux syndicats, une mobilisation sans précédent du monde culturel adresse aux responsables
politiques de ce pays un message clair et sans compromis :
-- Ne soumettez plus la culture aux lois du marché.
-- Regardez la « richesse » d’un secteur qui n’est pas une marchandise ou un produit
de communication.
-- Acceptez de regarder l’art pour ce qu’il est une pure dépense, qui nous grandit tous.
-- Enclenchez, par conséquent une loi d’orientation et de programmation pour l’art et
la culture, afin que nous puissions, tous ensemble, partout sur le territoire, assumer
et parfaire cette magnifique aventure de la démocratisation culturelle, en chemin,
mais inachevée.
-- Redonnez au Ministère ses lettres de noblesses, sa légitimité et de véritables
moyens d’action.
-- Souvenez-vous que dans toute crise, la culture a toujours permis le sauvetage de
tous.
-- Et n’oubliez jamais qu’un pays dans lequel les musées sont fermés, est un pays en
guerre, où l’on sort en gilet pare-balle, où le sang coule dans les caniveaux.
Bruno Tackels
Edito
Après un week-end de haute activité
Le Festival Hybrides2 a démarré ce week-end en beauté, humour et
profondeur. Un florilège de spectacles aux formes très variées, mais
qui mobilisent le public, jusqu’à en faire l’acteur principal, dans « Domini Públic », la performance du catalan Roger Bernart. A minuit sur
un parking désert de Saint Jean de Védas, devant le Chai du Terral, cinquante spectateurs, casques sur les oreilles, se sont embarqués dans
un grand voyage collectif, sous forme de jeu de rôles, basé sur des
questions qui appellent des réponses sous forme d’actions concrètes.
Derrière l’apparence du « jeu », chaque spectateur s’enfonce peu à peu
dans un univers beaucoup plus intime, qui laisse forcément des traces.
Dimanche midi, la performance a été reprise en plein soleil sur la Place
de la Comédie.
Au Chai du Terral, sept compagnies (Hors commerce, Yann Lheureux,
Vertigo, Adesso e Sempre, La Maison Théâtre, Zépétra, A la Barak) ont
rassemblé les participants de leurs ateliers amateurs pour une large
performance en plein air. Dans le hall, Claire Engel présentait « Making
up », une installation vidéo qui met en scène une femme violentée, qui
se reconstruit par les images et les sons ; et Thierry Duval investissait
le bar avec un dispositif intitulé « Belgrade », à partir d’un texte d’Angélica Lidell, qui met en scène deux journalistes dans la capitale serbe,
le jour des funérailles de Milosevic.
La compagnie Adesso e Sempre, entouré de différents artistes invités
au Festival, reprenait quant à elle le travail engagé à la Chartreuse de
Villeneuve lez Avignon, lors de la Sonde 03#10 flux et satellites. « CNN
Montpellier » est une forme de « journal théâtral », qui s’empare des
événements de l’actualité (ici le tremblement de terre en Haïti au mois
de janvier 2010), pour en faire une sorte de « contre-information », mobilisant tous les moyens de la scène. Et enfin, durant tout le week-end,
le performeur Oskar Gomez Mata investissait le Centre chorégraphique
avec « Optimistic vs Pessimistic », un spectacle de « théâtre libre », qui
lui aussi met le public à rude épreuve ! Mais on y prend beaucoup de
plaisir.
C’est un trait récurrent de la programmation : Hybrides met les spectateurs en scène et à l’honneur. Le journal EMPREINTE n’est pas en
reste, puisque nous convions tous ceux qui le souhaitent à participer
à la fabrication des numéros du journal. Dans ce premier numéro de
la semaine, Omar Ghayatt et Yan Duyvendak prolongent le dialogue
intense qu’ils tissent depuis deux ans entre leurs deux cultures, européenne et proche-orientale — un dialogue souvent conflictuel qui a
donné forme à leur spectacle, « Made in Paradise », que nous verrons
ce soir à la Chapelle. La compagnie italienne Motus, très attendue à
Montpellier, revient avec deux spectacles nés de la figure incandescente d’Antigone. Nous y reviendrons dans un prochain numéro.
Outre les sensations de spectateurs, nous publions une synthèse de la
conférence que Christian Ruby a donné au Musée Fabre, à l’invitation
du Fonds Régional d’Art Contemporain. Là encore, il est question de la
position singulière de ceux qui observent les œuvres d’art. Un regard
précieux sur l’histoire de l’art, qui montre que chaque époque fabrique
un type de spectateur différent, qui exerce un regard particulier sur le
monde.
Bruno Tackels
Z o o mS s u r
2
Interview de Yan Duyvendak et d'Omar Ghayatt
Propos recueillis par Bruno Tackels
Pouvez-vous décrire en quelques mots votre univers, en faire un
portrait instantané ?
YD : C'est la rencontre entre le Proche-Orient et l'Occident, et à partir de
là entre Omar et moi. C'est un peu la ligne de force de la pièce.
OG : L' important n'est pas d'être unique, il est possible d'être différent.
Ce qui compte, c'est de se rencontrer et de survivre à cette rencontre.
YD : Il dit cela parce que cela fait deux ans que nous travaillons sur ce
spectacle et nous avons eu beaucoup de conflits qui ont été digérés
dans la pièce.
Des conflits entre vous ?
YD : Oui. L'effort que nous avons fait l'un vers l'autre se sent dans la
pièce et ça marche. Nous avons essayé de transgresser des limites, des
frontières et ça, c'est beau.
Vous avez transgressé votre identité, des préjugés. Quel type de
conflit entre vous, par exemple?
OG : Tout dans la vie peut paraître conflictuel, mais en même temps la
différence crée la pluralité et donc la richesse. Même manger ensemble
peut être conflictuel.
YD : Omar n'aime pas la cuisine européenne, et moi je n'aime pas la cuisine égyptienne. Pour manger ensemble, c'est toujours un peu conflictuel. De plus, nous avons un interprète marocain qui n'aime pas non
plus la cuisine égyptienne.
Les problèmes de cuisine et les problèmes de conflits, c'est tout
l'art de la scène. La scène est un agon de signes.
YD : Oui. Nous avons donc utilisé ces conflits dans la pièce. On les met à
plat. Nous sommes sur scène avec les gens autour de nous, il n'y a pas
de distance, pas de différence. Nous sommes tous dans ce bateau : la
rencontre Proche-Orient et Occident. L'Islam contre la société post-chrétienne capitaliste. C’est cette rencontre-là qu’on essaie tangiblement de
mettre en place.
La différence entre la société égyptienne et la société française est
que chez vous, la religion prend une place dans la politique alors
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que chez nous, ces deux sphères sont totalement séparées.
YD : Oui, d'où ce conflit : nous croyons que nous ne croyons en rien et
eux croient qu’ils croient en quelque chose. Il y a ici des nuances qui sont
intéressantes à relever. Ce que ce travail m’a appris, c’est que je crois en
la distance. C’est une vraie croyance et donc quelque chose qui peut être
remis en question. La distance critique, c’est la croyance de l’Occident.
S’il n’y a pas la distance critique, on est mort.
Croit-on ?
YD : Oui, c’est notre croyance.
Et vous, Omar ?
OG : De mon côté, je nuance aussi. Ce sont les codes qui fondamentalement créent vraiment les différences. On peut utiliser l’image MAC/
PC. Ce sont deux systèmes différents. Nous écrivons de droite à gauche,
vous de gauche à droite et ça change tout dans la tête. Pourtant, au fond,
ce sont deux systèmes et deux écritures qui essaient de transmettre du
sens. La recherche fondamentale est la même.
Pour finir et sans déflorer le spectacle : comme dans beaucoup de
spectacles du festival, les spectateurs ont une place active, ils font
des choses. Dans la performance d’Oskar Gomez Mata, le spectateur travaille, on n’est vraiment pas passif, ce n’est pas une métaphore. Chez vous aussi, puisqu’on peut choisir dans une liste de
différents fragments. Prenons le premier : « Prada, Chanel, Dior, le
concept de la nouvelle Burqua ». Un mot là-dessus ?
YD : Ce fragment n’existe plus, on l’a éliminé. Beaucoup de fragments
changent car on réagit très fort à ce qui se produit entre Omar et moi,
mais aussi à l’actualité. On travaille avec les éléments d'un conflit continuel. Ce que je peux dire sur l’ensemble de la pièce, c’est que le public
peut choisir les fragments qu’il a envie de voir, qui sont de petites saynètes, nombreuses, de quinze minutes chacune. Nous avons cinq heures
de matière à proposer. La question de la rencontre entre l’Islam et l’Occident est trop vaste pour pouvoir en faire le tour. Nous ne pouvons parler
que de bribes, de fragments qui amorcent la possibilité d’une rencontre.
Un plat ou deux, mais pas la totalité de la cuisine.
ZOOM SUR Eli Commins
Propos recueillis par Bruno Tackels
Et si je vous demandais de faire un autoportrait ?
A l’origine, je suis un auteur de théâtre, dans le sens le plus linéaire du
terme, qui destine son travail à l’imprimé. Peu à peu je me suis intéressé à
d’autres formes de textualités, à des écritures non linéaires, notamment la
pratique de textes électroniques. Il y a quelques années, je me suis senti
dans une impasse en écrivant des pièces de facture classique. J'ai alors écrit
des textes qui sont aussi des programmes, c'est-à-dire des textes programmés, préparés pour leurs conditions d’apparition en scène. Par la force des
choses, je suis maintenant auteur et metteur en scène, pour employer la
nomenclature classique, mais j'ai l'impression que ces mots-là ne conviennent plus vraiment pour ce genre de formes — j’ai donc bien du mal à répondre à la question.
Et si moi je disais « créateur de dispositifs pour un certain nombre de
gens rassemblés », qu'en pensez-vous ?
Absolument, oui. Ça me plait bien.
On peut dire que vous produisez des dispositifs qui cherchent à faire
rentrer le réel et tout le bruit du monde sur la scène.
Dans « Breaking », effectivement, je pars de ce site Internet de plus en plus
connu qui s’appelle Twitter.
Les fameux cent quarante signes qu’on s’envoie dans le monde entier.
Il s'agit d'une contrainte formelle très forte, mais assez intéressante sur
le plan rythmique. J’utilise ces matières pour obtenir des sortes de récits
personnels, des histoires intimes, rédigées par des personnes qui sont en
train de vivre une situation donnée, en général hors du quotidien — mais
je pourrais également choisir un contexte plus banal. En l’occurrence,
pour l'édition d’Hybrides, la situation s'articule autour de trois pôles, trois
thèmes que l'on peut écouter ensemble et mêler : le tremblement de terre
en Haïti au mois de janvier 2010, le tremblement de terre au Chili et enfin
les astronautes de la station spatiale internationale. On peut effectivement
dire qu'il s'agit d'une intrusion du réel, mais finalement ces personnes-là
sont peut-être elles-mêmes en train de fictionner, et parfois moi-même j’interviens quelque peu dans cette matière première — je ne suis donc pas
Z o o mS s u r
> En tant qu’homme, j’ai perdu.
En tant que responsable politique,
j’ai engagé un processus qu’il a été
impossible de remettre en question.
Mais en tant qu’homme, ce fût un
naufrage politique.
> Michaël Gorbatchev
très sûr que l'on puisse garder ce terme de réel…
Est-ce qu’on ne pourrait pas revenir alors au bon vieux mot de « théâtre
documentaire » très en vogue dans les années 70, notamment avec Peter Weiss, et tous ces artistes qui cherchaient à se rapprocher le plus
possible du réel ?
Tout à fait, je revendique l’appellation de « théâtre documentaire » effectivement. Si le documentaire peut s’autoriser à aussi, j’espère, former, tisser
des sortes de petits réseaux, de récits, de petits romans personnels.
Selon vous, ces nouveaux outils techniques engendrent de nouvelles
écritures, donc des écrivains « inattendus » ?
Je hiérarchiserais plusieurs types d'écritures. Il y a les écrits dont je reste très
proche, et je demande naturellement à leurs auteurs s'ils souhaitent participer à l'expérience. Ils en deviennent finalement « co-auteurs ». Et puis, il y a
d’autres cas pour lesquels je colle plusieurs personnes du réel ensemble, et
il y a même d’autres cas où je m’autorise à écrire un peu librement.
Cette chose incroyable qu'est la fiction...
Ce qui est très intéressant, c'est de voir que ces auteurs se permettent beaucoup plus de choses que moi. Un des « personnages » écrit sur Twitter le 11
janvier 2010, donc à la veille du tremblement de terre en Haïti : « demain
sera pire, douce nuit à tous ». En tant qu’auteur, je ne me serais jamais autorisé un effet pareil.
Dans le dispositif que vous créez, les spectateurs jouent un rôle
très particulier — c'est d’ailleurs l'un des fils rouges du festival
Hybrides cette année.
Le public est invité à se déplacer dans l'espace, afin d'écouter différentes
sources géographiques : Haïti, le Chili et la station spatiale internationale,
qui est la métaphore de la Terre qui continue de tourner. En se déplaçant
dans le dispositif, le spectateur déclenche des pistes audio que je mélange
avec d'autres paroles en direct dans la performance. Par le déplacement de
leur corps, les spectateurs créent des montages et des correspondances,
des échos entre ces différentes vies. Quelqu’un qui est au Chili dit « est-ce
qu’on va à la plage » à sa copine, et quelqu’un en Haïti qui est à l’hôpital en
train d'y amener son frère... ce genre de choses-là et puis une situation qui
s’inverse ; donc oui, c’est une position de témoin, oui, tout à fait.
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Sensations autour
d'« emulation »
Master-class conduite
par Julien Cassier
« Rouler, plier, tordre… »
Nous sommes lundi matin 10h, à
la salle 3. Julien Cassier (Circassien, cie GdRA) anime une master-class autour de l'acrobatie et
des « équilibres ». Tu le regardes,
il a l'air doux. Il est souriant, un
peu massif, à la façon d'une armoire cévenole. Attention, « les
critiques sur le physique n'ont
pas lieu d'être » 1 . Ce matin la
France n'est plus la même. Comment ce gars peut-il faire des
acrobaties? Il doit « pousser, tirer,
porter, plier. » Première figure, et
me voilà scotché au sol devant
le phénomène. Il roule au sol,
rebondit sans effort, ni essouf 1 « Le PDG de Radio France, Jean-Luc Hees, a présenté, dans une déclaration au Point.fr, les « excuses
du groupe » public au ministre de l'Immigration Eric
Besson, à la suite d'une chronique que lui a consacré l'humoriste Stéphane Guillon, ce lundi matin sur
France Inter ».
flement. Il semble avoir avalé son
trampoline, l'artiste. Est-ce que
c'est dangereux à pratiquer ou
à recevoir ? Est-ce que l'art fait
mal? Est-ce qu'on va « prendre
des coups » ? Une affaire de divertissement, « pour rire », c'est
du léger ? Catégorie poids plume,
à peine échauffé te voilà jeté au
sol. « Tordre, étirer, vriller, pousser... » Faire grimper le reste
de ton propre corps au dessus,
nuque écrasée. Avec ou sans les
mains, à la recherche d'un équilibre sur le sommet du crâne, tu
ressembles à pas grand chose.
Le poids de ton corps compresse
les poumons. « Écraser, souffler,
rougir, couler... » Qu'est-ce qui t'a
pris de venir ici un lundi matin, toi,
citoyen, spectateur-acteur ? Tu
sues, en baves, le corps plie, les
poignets et le dos endoloris. Tu
voulais vérifier, ajuster l'assemblage des pièces : ton corps de la
quarantaine, à demi-souple, tête,
désirs de vie ? Rapidement, tout
en fusion, tu ôtes des épaisseurs,
décalqué de sueur, ton corps sur
le tapis noir des danseurs. Primate, face à face avec toi-même,
la proximité de l'os et de la chair,
ré-expérimentant ta colonne vertébrée. Je pense à Besson qui se
plaint d’une caricature. Je pense
aux charters pour l'Afrique. Mon
corps tendu, une plaque de tôle
monumentale de Serra 2 : chacune de ses œuvres répondant
à un protocole de 1967, une
liste écrite de verbes : rouler,
plier, tordre… « Une relation avec
l'œuvre, qui devienne une expérience sensible et concrète vécue
par le public. Face à elle, le spectateur-acteur reçoit une initiation
à une forme esthétique en mouvement. Il s'agit d'un travail sur
l'identité physique et émotionnelle... »
Boris Bruguière
2 Richard Serra, connu pour ses sculptures en
acier, exposition au Grand Palais de Paris en 2008.
Se n s at i o n s d e spe c tat e u r s
Sensations autour de « Domini Públic »
ouvreuse
En tant qu'ouvreuse de la pièce, j'ai pu assister au spectacle d'un tout autre
point de vue que le public. Assise sur un escabeau, les spectateurs étaient
tournés et exécutaient les gestes face à moi. J'ai eu la sensation, surtout la
deuxième fois que je l'ai vu, d'être la voix du casque, celle qui leur posait les
questions, qui les guidait.
Le spectacle était d'autant plus drôle et touchant que je pouvais savoir au fur
et à mesure du déroulement de « Domini Públic », l'identité de chaque spectateur en fonction de ces réponses en me mettant en position de voyeur. Je
savais, qui gagnait plus de 1000 euros, qui était né à Montpellier, qui était propriétaire de sa maison, qui était artiste...
Je pouvais également voir ceux qui hésitaient à répondre et qui, voyant que
personne ne bougeait, se mettaient en retrait.
Lorsque le jeu de la révolte entre policiers, prisonniers, et personnes de la
Croix-Rouge a débuté, l'image était d'autant plus forte que je voyais distinctement les trois groupes, les trois clans. Peu à peu, le spectacle m'est apparu
sous forme de différents petits tableaux traduisant la révolte. Les prisonniers, mains derrière la tête, allaient être fusillés par certains policiers, alors
que d'autres protestaient ou se cachaient les yeux, puis les morts étendus
sur le sol étaient accompagnés par ceux de la Croix-Rouge, genoux à terre.
La première fois que j'ai vu le spectacle, de nuit, sous la seule lumière d'un
lampadaire, j'ai oublié l'espace d'un instant qu'on était au théâtre et que
cette scène n'était due qu'aux réponses des différentes questions posées aux
spectateurs. J'avais ainsi une vue d'ensemble, que le spectateur n'avait pas.
Joué la nuit, sur un parking, j'ai eu l'impression que le public répondait plus
facilement aux questions, tandis que, sur la Comédie au milieu de passants,
il faisait plus attention à son image et suivait beaucoup plus le groupe. L'ambiance nocturne de la veille, sur le parking du Chai du Terral, rendait la scène
de la révolte beaucoup plus forte qu'en plein jour.
Mais grâce à ces deux représentations, je me suis rendu compte que le spectacle a beau être joué plusieurs fois, les différents lieux, temps et spectateurs
le différencieront toujours de la fois précédente.
Fanny Simons
6
Sensations autour de « Domini Públic »
Une action dominicale…
Roger Bernat nous présente une sorte de grand jeu de rôle : les spectateurs occupent l’espace de jeu, Place de la Comédie et, casque sur
la tête, répondent aux injonctions, données par une voix féminine. Les
seuls éléments placés dans l’espace sont deux panneaux « droite »,
« gauche », et un accessoiriste avec sa malle. Voici une proposition a
priori alléchante, qui nous met en appétit. Que va-t-on nous demander ?
Sommes-nous mis dans la position d’acteurs ?
Je me suis posé quelques questions sur ce spectacle : l’histoire de l’évasion des prisonniers est-elle pré-écrite ou s’écrit-elle au moment où
les déplacements des spectateurs-acteurs sollicitent l’imaginaire de la
voix ? Comment sont choisies toutes les questions posées ? La voix estelle actrice ou spectatrice ? Les accessoires — masques, couvertures —
jouent-ils vraiment ?
Le point fort, subjectivement, me paraît être les figures que dessinent
dans l’espace les participants. De là découle que celui qui apprécie le
plus le spectacle n’est peut-être pas le spectateur qui est entré dans le
processus mais le spectateur accidentel et — encore mieux — celui qui
est au balcon du théâtre et a une vue aérienne du spectacle.
Mais, personnellement, j’ai été un peu déçue, restant sur ma faim : les
questions les plus troublantes sont posées rapidement, à la fin, lorsque
nous regardons tous l’écran, sans mise en danger.
L’acteur est celui qui agit, qui prend une part active. Il m’a semblé que
les déplacements et les gestes, restaient extérieurs à nous, et qu'on ne
nous demandait jamais une véritable implication. Je n'ai pas ressenti
une vraie relation aux autres — excepté le couple qui se dit adieu.
J’aurais aimé que l’expérience aille plus loin.
Jo Papini
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Em pr ei nt e N'
Politiques du spectateur
L’actuel consensus autour de l’idée d’un spectateur et d’un public
formatés par les médias et la société du spectacle, rendus « bêtes »
par fait d’inculture ou de brouillage des repères culturels, serait simplement indifférent si l’on ne voyait poindre en lui la combinaison de
deux présupposés plus directement politiques : d’une part, l’idée nostalgique d’un spectateur cultivé qui aurait existé jadis ; d’autre part,
l’idée selon laquelle il conviendrait de réserver aux experts en art le
soin de décider de ce qui est bien ou mal pour les uns ou les autres.
Les conclusions de mes travaux portant sur le spectateur et le
contemporain ne me portent pas du tout à entrer dans le jeu de ce
consensus. Les perspectives doivent même être très largement déplacées. Commençons donc par rappeler qu’il n’existe ni spectateur
ni public en soi. On ne naît pas spectateur, on le devient. Il y faut un
art certain de l’élaboration de soi en corrélation avec une proposition
artistique. Le spectateur est toujours en formation de soi, et la cor7
Points de vue
rélation œuvre/spectateur est toujours réactivée de manière critique.
Alors, qu’entendons-nous au juste par spectateur ?
Dans un premier temps, « spectateur » renvoie à une construction
historique. Il se fabrique à partir de l’ajustement esthétique opéré au
cours de la conjonction entre l’appareillage figuratif que déploie le
point de vue du sujet dans l’œuvre d’art classique, la prépondérance
du modèle optique, et la construction de la pulsion scopique, de la
pulsion d’entrer au contact de l’œuvre (écouter, voir) qui est le plai-
> L’œuvre contemporaine engendre des situations dans lesquelles les spectateurs entrent en
liaison et doivent apprendre à concevoir d’autres
modes d’existence. Plus précisément, ce qui fait
œuvre, c’est la manière dont un geste artistique
pousse les spectateurs à œuvrer entre eux.
sir esthétique même. Le sujet spectateur est ainsi mis en exercice par
la présence d’une œuvre qui s’adresse à lui, quoiqu’il ne puisse s’en
rendre propriétaire (esthétiquement), l’utiliser à sa guise. Il doit en revanche s’activer à apprécier, s’exercer, exercer sa force de juger dans
l’horizon d’un commun, qui vise la totalité des spectateurs.
Ce moment a été transformé durant et par la modernité. Effectivement, le spectateur moderne, sous le coup de l’art moderne qui
décentre par deux fois l’esthétique (des œuvres sans point perspectiviste focal et liées à l’idée de masse) en assénant un rude coup à l’art
classique, offre au spectateur un autre espace d’exercice. En frappant
l’œuvre d’impuissance à imiter, en les désobjectivant, l’art moderne
déplace la délectation esthétique.
Cependant, l’art contemporain révèle qu’à beaucoup d’égards l’art
classique et moderne a joué le rôle d’une discrète mise au pas morale
et politique du sujet ou des masses. L’œuvre contemporaine engendre
des situations dans lesquelles les spectateurs entrent en liaison et
doivent apprendre à concevoir d’autres modes d’existence. Plus précisément, ce qui fait œuvre, c’est la manière dont un geste artistique
pousse les spectateurs à œuvrer entre eux. L’œuvre n’a plus à être
prise pour prétexte aux fins de parler d’elle, mais elle fait parler et on
parle maintenant, fût-ce dans le bégaiement, mais toujours dans l’interférence et le différend.
Dans un second temps, il convient de constater que nous sommes,
chacun, toutes ces constructions à la fois, mis en contact avec des
œuvres différentes et parfois inédites comme celles du spectacle « vivant » ou des musiques dites « actuelles ».
Dans un troisième temps, il convient de raisonner un peu. Refusons
de faire de l’idéal classique du spectateur un modèle pour les pratiques contemporaines. Comme fait historique de comparaison, il permet uniquement de mieux observer ce qui se passe de nos jours, tout
en nous interdisant de faire l’impasse sur ses contradictions internes.
Simultanément, il importe de constater non moins que la puissance
des médias ne s’exerce pas mécaniquement. Enfin, il est essentiel de
s’interdire toute culpabilisation du spectateur ou du public contemporain.
Ainsi, il devient possible de tenter de faire sourdre du spectateur
contemporain les dynamiques politiques qui permettraient sa propre
transformation. Nous avons souligné la possibilité de travailler sur une
théorie de la trajectoire du spectateur et du public. Paradoxalement, la
perspective du spectateur classique revient en ce point. Mais comme
double contrepoint : relativement aux discours actuels sur le spectateur, pour mieux révéler leur impasse (la nostalgie), et aux attitudes
actuelles, pour mieux indiquer leur potentiel actif.
Christian Ruby
Christian Ruby, Docteur en philosophie, enseignant (Paris). Derniers ouvrages publiés :
Tout n’est pas perdu, Culture, Arts, Politique, Bruxelles, PAC Editions, 2010 ; L’interruption,
Jacques Rancière et la politique, Paris, La Fabrique, 2009 ; Devenir contemporain ? La couleur du temps au prisme de l’art, Paris, Editions Le Félin, 2007 ; L’âge du public et du spectateur, Essai sur les dispositions esthétiques et politiques du public moderne, Bruxelles.
> Pourquoi donc les
pauvres ne mettent-ils pas
des gants pour mendier ? Ils
feraient fortune.
> Charles Baudelaire
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