Dossier d`accompagnement

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Dossier d’accompagnement
Contact Relations publiques :
Quentin Bonnell (enseignement secondaire et supérieur)
• Tél : 03 88 24 88 47 • [email protected]
Sandra Hummel (CE, associations et groupes d’amis, public germanophone)
• Tél : 03 88 24 88 03 • [email protected]
Site internet www.tns.fr • Réservations 03 88 24 88 24
Théâtre National de Strasbourg
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« La tragédie nous imprègne du fait que tout être est pénétré de
perte : être signifie fondamentalement être perdu. Entre être et ne
pas être : être perdu. »
Erwin Jans (Dramaturge du spectacle)
« Moi qui connais mon acte,
je ne peux pas me connaître. »
MCBTH
Théâtre National de Strasbourg
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CORÉALISATION du
TNS et de MUSICA
MCBTH
de Shakespeare
Mise en scène Guy Cassiers
RENDEZ-VOUS
AUTOUR DU
SPECTACLE
À STRASBOURG
DU THÉÂTRE À
L’ÉCRAN
• Jeudi 3 octobre
au Cinéma Star
20h
Macbeth (1948)
Réalisation
Orson Welles
110’
Tarif spécial 5,50 €
sur présentation de la
carte d’abonnement du
TNS
ou d’un billet pour
MCBTH
BORD DE PLATEAU
• à l’issue de la
représentation
Vendredi 4 octobre
Traduction de l’anglais Hugo Claus
Composition musicale Dominique Pauwels
Conception lumières Stefan Alleweireldt
Costumes Tim Van Steenbergen
Vidéo Frederik Jassogne (Hangaar)
Conducteur Filip Rathé
Avec l’Ensemble Spectra
Les comédiens
Katelijne Damen
Tom Dewispelaere
Kevin Janssens
Johan Van Assche
Vic de Wachter
les chanteuses
Fanny Alofs
Ekaterina Levental
Els Mondelaers
Francine Vis
et les musiciens
Jan Vercruysse (flûte)
Kris Deprey (clarinette)
Frank Van Eycken (percussions)
Pieter Jansen (violon)
Bram Bossier (alto)
Jan Sciffer (violoncelle)
Production déléguée Toneelhuis, LOD | Muziektheater
Coproduction VocaalLAB, Ensemble Spectra, Maison de la Culture d’Amiens
> Spectacle créé le 26 septembre 2013 au Toneelhuis, Anvers.
> Le texte utilisé est la traduction néerlandaise de Hugo Claus. Édition ITFB Amsterdam,
2003.
> Opérateur surtitrage Dirk de Hooghe, traduction Monique Nagielkopf
Ce spectacle conjointement proposé par le TNS et Musica est inspiré de la célèbre tragédie de Shakespeare, et
de son héros éponyme, Macbeth, grand guerrier que sa femme, Lady Macbeth, pousse au meurtre du roi
Duncan pour prendre sa place.
Jusqu’où est-on prêt à aller pour accéder au pouvoir ? Quelles traces les actes impriment-ils sur les
consciences ?
Le travail du metteur en scène flamand Guy Cassiers, qui s’allie pour ce projet au compositeur Dominique
Pauwels, se caractérise par la présence d’images et d’ambiances sonores, qui viennent révéler les fantasmes et
les obsessions des personnages. Dans ce projet, le mélange des arts est poussé à son extrême, avec le théâtre
et la vidéo, mais aussi la musique et le chant qui, selon Guy Cassiers « deviennent des acteurs partenaires. Ils
représentent le décalage perpétuel entre, d’une part, la réalité et l’hallucination, le monde rationnel et
contrôlable, et d’autre part, le monde dominé par les ténèbres de la violence ». Sur le plateau, cinq comédiens,
six musiciens et trois chanteuses évoluent dans cet univers fantasmé où surgissent des sorcières porteuses
d’une prophétie, où les personnages sont traversés par des désirs, des pulsions, des remords et d’étranges
visions.
En février 2011, Guy Cassiers avait présenté au TNS Onder de vulkaan (Sous le volcan), adapté du roman de
Malcolm Lowry.
Théâtre National de Strasbourg
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Sommaire
La pièce originale : Macbeth (1606).................................................. 7
> L’auteur : Shakespeare (1564-1616) ........................................... 7
> Le contexte de la pièce ............................................................... 8
> Résumé ..................................................................................... 12
MCBTH, l’adaptation ...................................................................... 15
> Résumé ..................................................................................... 15
> La parole dite est « hantée » par la parole chantée, entretien
avec Erwin Jans, dramaturge de Guy Cassiers ............................. 16
> Extraits ...................................................................................... 19
MCBTH, la représentation .............................................................. 27
> Les costumes ............................................................................. 27
> Un théâtre d’images ................................................................. 37
> La musique, une place centrale ................................................. 40
> Photographies du spectacle ...................................................... 41
L’équipe artistique .......................................................................... 44
Rencontre autour du spectacle ...................................................... 47
Dans le même temps ...................................................................... 48
Théâtre National de Strasbourg
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Théâtre National de Strasbourg
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La pièce originale : Macbeth (1606)
> L’auteur : Shakespeare (1564-1616)
W
illiam Shakespeare naît en 1564 à Stratford on Avon d’un père marchant de cuir, John
Shakespeare, notable de sa ville grâce à son mariage avec Mary Arden, issue d’une
famille riche. Second d’une famille de six enfants, il quitte Stratford à 18 ans et épouse
Anne Hathaway de qui il aura trois enfants. Pendant quelques années on perd la trace de
Shakespeare avant de le retrouver en 1592 à Londres comme comédien dans la troupe du Lord
Chamberlain dont il est sociétaire. Il se fait connaître et se place dans les bonnes grâces de la Cour,
avec la protection du Comte de Southampton.
Auteur de 10 drames historiques, de 13 tragédies et de 14 comédies, sans compter ses écrits en tant
que poètes, on distingue trois grandes périodes dans son œuvre :
- De 1589 à 1601 : le temps des drames historiques, qui pour la majorité traitent de la guerre
des Deux Roses où deux branches de la famille royale s’affrontent. Shakespeare ne suit pas
un ordre chronologique précis, et extrapole la réalité afin de dégager de ces drames un sens
civique, plutôt qu’une réelle trace de l’Histoire.
- De 1602 à 1609 : le temps des tragédies, dans laquelle s’insert Macbeth. Le dramaturge
s’attarde alors à dépeindre des monstres, à l’image de Sénèque pour le théâtre Antique,
développant à l’extrême les traits de caractère de ses personnages, comme la jalousie dans
Othello ou l’ambition dans Macbeth.
- De 1610 à 1614, « le temps de la misanthropie et de la sérénité », où Shakespeare décide de
se retirer de la scène théâtrale et de retourner vivre sur ses terres natales. Il écrit quelques
pièces, les dernières de sa vie, comme Le Conte d’Hiver, La Tempête ou encore La Nuit des
Rois.
Shakespeare écrit des comédies tout au long de sa carrière, et place un fond de comique dans
chacune de ses pièces. On sourit plus souvent qu’on ne rit et Shakespeare nous emmène aussi bien
dans des « aventures romanesques », que dans des fééries ou dans des comédies plus noires.
À la fin de sa vie, Shakespeare retourne à Stratford on Avon. Sur ses cinq dernières années, il a
quelques démêlés judiciaires quand à la possession de terrains. Il décède le 23 avril 1616 à l’âge de
52 ans. Ces deux filles n’ayant jamais eu d’enfant, Shakespeare n’a aucune descendance.
D’après L’Histoire du théâtre dessinée, André Degaine, Librairie A.-G. Nizet, Paris, 1992
Théâtre National de Strasbourg
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> Le contexte de la pièce
Le théâtre élisabéthain

Contexte politique
L
e théâtre Elisabéthain, qui s’étend approximativement de 1572 à 1642, doit principalement son
existence à la protection accordée par le Reine Elisabeth 1re et certains courtisans, aux
comédiens et dramaturges. Malgré une vive hostilité de la part des protestants et des puritains,
le goût de la Reine pour le théâtre prend le pas sur tous les mouvements allant à l’encontre de cet
art. Néanmoins, il était nécessaire que les troupes ambulantes soient sous la protection d’un grand
seigneur afin que les comédiens ne se fassent pas arrêter comme vagabonds.
Le mouvement puritain, plus que défavorable au théâtre, voit « en lui une école de débauche,
d’immoralité, de paresse1 ». Une des principales raisons avancées était que les jeunes hommes s’y
travestissaient en femme. Les théâtres, se situant dans les quartiers populaires, avoisinaient
souvent les bordels. Quand les ligues puritaines du Parlement, dirigées par Cromwell, prirent le
contrôle de la ville au début de la première révolution anglaise, une des premières décisions
politiques fut l’ordonnance de la fermeture des théâtres, en 1642.
Le théâtre élisabéthain s’enracine ainsi dans un contexte politique précis, celui de la monarchie
d’Élisabeth 1re (1558-1603), et du règne de ses successeurs : Jacques 1er et Charles 1er.

Espace de la représentation
A
près une longue itinérance, la plupart des troupes se font construire des théâtres fixes
dans lesquelles elles s’installent. Souvent à ciel ouvert, ces théâtres en forme de « O de
bois2 », représentant un cercle, offrent un espace scénique important, ainsi qu’un grand
nombre de places.
Dans son livre L’Histoire du théâtre dessiné, André Degaine divise l’espace scénique en quatre
parties, expliquant l’utilité de chacune :
- On a tout d’abord l’avant-scène, « pour les duels et batailles, scènes champêtres,
monologues3… »
- La scène
- Le balcon, situé sous l’auvent, « qui figure aussi bien le rempart d’un château-fort que le
balcon de Juliette4 »
- L’arrière-scène, sorte de petite alcôve où se passent les adultères et les trépas.
Le théâtre élisabéthain possède donc sur une même scène différentes aires de jeux, permettant ainsi
de dissocier certaines scènes, en les mettant en avant. Ceci est également valable pour les
personnages. En effet, en apparaissant à tel ou tel endroit sur la scène cela pourrait traduire une
forme d’importance dans la hiérarchie sociale. La scène, mais également tout le théâtre, se
présenteraient alors comme une sorte de microcosme du monde.
1
André Degaine, Histoire du théâtre dessinée, éditions Nizet, Saint Genouph, 1992, p 110.
Ibid., p 111.
3
Ibid., p 112.
4
Ibid.
2
Théâtre National de Strasbourg
8

Scénographie et dramaturgie
C
et espace sphérique a des conséquences sur le jeu des acteurs : devant jouer pour
l’ensemble du public (qui se trouve de côté, devant, et derrière lui), le comédien se doit
d’être physiquement engagé dans la représentation et de travailler ainsi toute une partie
gestuelle. Le jeu apparaît alors comme quelque peu codifié.
On relève aussi de nombreuses adresses au public, avec l’importance des apartés : les prologues
inauguraux, les épilogues ou intermèdes « bouffons »
L’imaginaire s’impose comme un élément important du théâtre élisabéthain. Ce théâtre ne se
fixe pas pour objectif d’accéder à une représentation vraisemblable mais fait appel à
l’imagination du public (« Play with your fancies ») pour pallier le manque de moyens. L’accent
est mis sur la parole et la musique, ainsi que l’utilisation de la pantomime (mimer quelque chose
par le corps de l’acteur) et d’objets métonymiques.
Un grand dynamisme est présent dans ce théâtre, dû à l’importance des scènes de foule. La
recherche du spectaculaire passe par l’action physique et non par les décors. Fragmentation et
multiplicité des actions (favorisées par la polyvalence de l’espace), ainsi que les procédés de
mise en abîme sont des caractéristiques de ce théâtre. Une « scène » dans le théâtre
élisabéthain n’est pas définie en fonction des entrées et des sorties (comme c’est l’usage dans la
tragédie classique) mais selon des changements de lieux. Les personnages peuvent entrer et
sortir librement pendant une scène, ce qui confère l’aspect hétérogène de la dramaturgie
élisabéthaine. Différents genres (comique, tragique...) peuvent ainsi se côtoyer dans une même
scène. Par ailleurs, la juxtaposition des scènes et le mélange des temporalités peuvent faire
apparaître les différentes scènes comme autant de séquences cinématographiques.
Ainsi, l’action n’est pas soumise à « la causalité logique, règle d’or du théâtre classique pour la
succession des évènements, elle bafoue les exigences de l’unité en admettant des
fragmentations, des éléments étrangers qui ne sont pas toujours incorporés (bouffonneries,
obscénité au sein d’un climat tragique)5. » Au contraire des Français, les Anglais ne voient aucun
mal à ces mélanges de styles au sein même d’une pièce et l’encouragent. « Il supportent
difficilement l’horreur continue. Si une “scène” a été dure, cruelle, déchirante, la “scène”
suivante qui fera rire, apportera un allègement et rétablira l’équilibre6. » Ces mélanges passent
aussi par le langage, où aucune hiérarchie des mots n’est véritablement établie. « Le terme
noble ne s’offusquera point qu’un vocable populaire, voir une obscénité ou même un
blasphème, vienne se loger à côté de lui7. » Le théâtre élisabéthain est donc un assemblage de
différents éléments qui passent aussi bien par les « quiproquos, les calembours, les plaisanteries
grasses, les maux brutaux, les brusques revirements et les péripéties inattendus8. »
5
Encyclopédie Universalis, vol. 6, Paris, 1982.
Le Théâtre Elisabéthain, Office de publicité S. A. Éditeurs, Collection Lebêque et Nationale, Bruxelles, 1955.
7
Ibid.
8
Ibid.
6
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9

Architecture des théâtres élisabéthains
Théâtre Le Cygne, croquis d’époque
In Histoire du théâtre dessinée
Le Globe, théâtre de William
Shakespeare, vu de l’intérieur
In Histoire du théâtre dessinée
Théâtre National de Strasbourg
10
Le Globe, théâtre de William Shakespeare, vu de
l’intérieur
In Histoire du théâtre dessinée
Théâtre National de Strasbourg
11
> Résumé
Acte I
T
out commence dans « un lieu désert » où trois sorcières évoquent ensemble leur futur
rencontre avec le général Macbeth. Puis, apparaît le roi d’Ecosse Duncan, ainsi que ses deux
fils : Malcolm et Donalbain. Rejoint par différents nobles, ils apprennent leur victoire sur le roi
de Norvège grâce à leur valeureux vassaux Macbeth et Banquo, dont le courage fut sans faille. Sur le
chemin du retour, ces deux hommes tombent nez à nez avec ces trois sorcières, qui prédisent à
Macbeth le futur titre de seigneur de Cawdor, ainsi que son ascension sur le trône. Macbeth, restant
sans voix, semble tressaillir à cette annonce, tandis que Banquo, moins affecté par cette étrange
apparition, souhaite en savoir plus sur son propre destin. Ces créatures magiques lui affirment qu’il
ne sera pas roi lui-même, mais qu’en revanche, sa descendance le sera et qu’il sera à la fois plus et
moins que Macbeth. Alors que ce dernier retrouve la parole et souhaite obtenir des détails sur son
avenir, les sorcières disparaissent laissant Macbeth et Banquo face à leur questionnement, se
demandant alors s’ils ont été les victimes d’une hallucination. Deux hommes viennent alors à leur
rencontre, Ross et Angus, et ne font que confirmer à Macbeth les prédictions de ces trois femmes : il
est nommé, par le roi Duncan, seigneur de Cawdor. De retour à Forres, nos deux héros sont félicités
et remerciés par Duncan, qui profite de cette occasion pour nommer son fils Malcolm, Prince de
Cumberland, comme son successeur. Le roi donne alors rendez-vous à Macbeth à Inverness, dans le
château de ce dernier, afin de renforcer leurs liens. Au château, Lady Macbeth apprend le nouveau
titre de son mari par une lettre dans laquelle Macbeth lui raconte la prophétie des trois sorcières.
Aux vus de cette possible accession au trône, Lady Macbeth invoque les ténèbres pour lui donner la
force d’assassiner le roi et pousse alors son mari, revenu de Forres, à rester le plus neutre possible
pour ne rien laisser paraître de leur projet. Duncan, ses fils, ainsi que toute la suite royale arrivent
alors au château, sans se douter un seul instant de ce que préparent les deux époux.
Acte II
L
a nuit est tombée sur la demeure, tout le monde semble dormir, sauf Banquo et Macbeth qui
errent chacun de leur côté dans le château, avant de tomber l’un sur l’autre. Banquo lui parle
de ces trois sorcières, mais Macbeth qui ne veut pas éveiller les soupçons, détourne la
conversation et pousse son ami à aller se reposer. Seul, Macbeth délire et voit apparaître devant lui
un poignard, le plongeant dans ses pensées de ce crime qu’il prépare. Quelques heures plus tard,
alors que Lady Macbeth a drogué les gardes afin de les endormir, son mari tue le Roi Duncan. Suite
au meurtre, Macbeth, choqué, regarde ses mains, hagard, réalisant difficilement ce qu’il vient de
faire. Son épouse, qui lui reproche d’avoir gardé les armes du crime sur lui, se dépêche de maquiller
le meurtre en déposant, dans les mains des serviteurs, ce qui a servi à l’assassinat et en les tachant
du sang de la victime. Au petit matin, le château est en effervescence, la nouvelle de la mort du roi
s’est répandue. Tout accuse les gardes que Macbeth assassine pour venger le roi. Les fils de ce
dernier entrent et apprennent la tragédie. Alors que tout le monde choisit de se réunir pour
comprendre cet horrible massacre, Malcolm et Donalbain décident tous deux de partir, l’un pour
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l’Angleterre et l’autre pour l’Irlande, de peur d’être à leur tour victime d’un sort aussi funeste que
celui de leur père. Malheureusement cette fuite des deux Princes ne fait que porter les soupçons sur
eux, ils se voient accuser du meurtre de leur père. Macbeth est alors choisi comme Roi et se met en
route pour Scone afin d’être couronné.
Acte III
L
a prédiction des sorcières s’est donc réalisée, Macbeth est roi. Cependant il n’oublie pas ce que
les trois sorcières avaient dit à Banquo. Il décide de le faire assassiner ainsi que son fils Fléance
afin que rien de ce que ces femmes avaient annoncé ne se réalise. Lady Macbeth ne sait encore
rien des intentions de son mari. Elle lui reproche de ne pas assez profiter du statut qui leur est
maintenant offert et cherche à lui faire oublier les soucis que lui cause Banquo. Parallèlement, sur un
chemin emprunté par Fléance et son père, trois mercenaires les attendent afin de mettre fin à leur
jour. Alors que Banquo est assassiné, Fléance réussit à s’enfuir.
Afin d’imposer sa puissance, Macbeth a invité la noblesse d’Écosse à sa table. Jouant un double jeu, il
reproche au défunt Banquo de ne pas être présent à sa réception, alors que l’un des meurtriers qu’il
avait engagé vient lui apprendre la demi-réussite de la tâche qui leur était confiée. Au moment de
s’assoir pour passer à table, le spectre de Banquo apparaît à la place de Macbeth, que seul lui peut
voir. Terrifiant ce dernier et le plongeant dans un certain délire qui inquiète sa femme et ses
convives, les invités quittent le château. Le spectre parti, Macbeth s’interroge également sur
l’absence du seigneur Macduff, parti en Angleterre chercher le soutien de Malcolm, ainsi que du roi
Edouard, afin que l’héritier de Duncan accède au trône.
Dans la Lande, la déesse de la lune, Hécate, apparait aux trois sorcières et leur reproche d’avoir pris
en main le destin de Macbeth sans l’y avoir invité. Jouant de son pouvoir sur la lune, elle confrontera
Macbeth à différents évènements dont il ne sortira pas indemne, aveuglé par ses désirs de succès.
Acte IV
M
acbeth, soucieux de son avenir, décide de retourner voir les trois sorcières. Là, grâce à
leur magie, elles font apparaître devant lui trois têtes. La première, « une tête armée »,
lui explique qu’il doit craindre le seigneur Macduff. La deuxième, celle d’un « enfant
ensanglanté », lui affirme sa quasi-invincibilité, expliquant qu’ « aucun n’être né d’une femme » ne
pourra rien contre lui. Enfin la troisième, celle d’un « enfant couronné », l’informe qu’il ne sera
vaincu que si le grand bois de Birnam s’avance jusqu’à son château de Dunsinane. Mais Macbeth
veut en savoir plus et principalement sur la descendance de Banquo. Ses enfants seront-ils rois
comme elles l’avaient prédit ? Là, Macbeth a une « vision de huit rois, dont le dernier tient un miroir.
Le spectre de Banquo les suit ». Macbeth n’en croit pas ses yeux, et demande confirmation aux
sorcières qui, avant de s’évaporer, affirment que tout cela est vrai. Entre alors le seigneur Lennox,
venu apprendre au roi la fuite de Macduff pour l’Angleterre. Macbeth décide alors de se venger en
envoyant des meurtriers tuer la femme et les enfants de ce traître.
En Angleterre, Macduff essaye de convaincre Malcolm de reprendre la couronne à Macbeth.
Le fils de Duncan, suspicieux, affirme qu’il n’est pas digne d’être au pouvoir, craignant que Macduff
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ne soit envoyé par Macbeth afin de le faire revenir en Écosse pour pouvoir le tuer. Cependant,
Malcolm s’aperçoit de la sincérité de Macduff et décide de tout mettre en œuvre pour détrôner
Macbeth. De plus, Ross, un des seigneurs écossais, arrive au palais du roi Edouard, afin d’entretenir
Malcolm et Macduff de la situation catastrophique de l’Écosse, où chacun risque la mort à tout
moment. Egalement porteur d’un message funeste, il apprend à Macduff le massacre de sa famille
par les soldats de Macbeth, provoquant un désir de vengeance encore plus grand de la part de
Macduff.
Acte V
A
u château de Dunsinane, le médecin et la dame de compagnie de Lady Macbeth s’inquiète de
son état de santé. En effet, sujette à des crises de somnambulisme, Lady Macbeth erre dans
le château en parlant dans son sommeil. Fixée sur la nuit du régicide, elle cherche sans cesse
à enlever les taches de sang de ses mains et évoque l’agitation constante de son mari absent.
Alors que les nobles décident de donner l’assaut sur le château de Dunsinane, Macbeth, abandonné
par la plupart de sa cour, fustige ceux qui l’ont laissés tomber. Alors que les attaquants décident de
se dissimuler derrière des branches d’arbres de la forêt de Birnam afin de masquer leur nombre,
Macbeth apprend la mort de sa femme. Un messager lui rapporte que la forêt semble se rapprocher
d’eux. Se rappelant de la prédiction des trois sorcières, Macbeth comprend que son heure est peutêtre proche et décide de combattre malgré tout. L’assaut lancé, Macbeth cherche à connaître son
ennemi, mais sait que tout homme né d’une femme ne le vaincra pas. Le jeune Siward, le fils du
comte de Northumberland, général des forces anglaises, se retrouvent face à Macbeth et est alors
tué. Malcolm apparait alors face à Macbeth. Ce dernier pensant ne devoir craindre rien ni personne,
apprend que son adversaire est né par césarienne. Macbeth comprenant qu’il a été dupé par les
sorcières et leur magie, renonce à combattre, puis son orgueil prenant le dessus, il décide d’affronter
malgré tout le jeune Malcolm, qui d’un coup d’épée, réussit à le tuer.
Le vieux Siward attristé par la mort de son fils, se console en pensant qu’il a combattu Macbeth et
qu’il est ainsi mort en héros. Macduff amène à son nouveau roi, Malcolm, la tête de Macbeth, qui
décide que tous les complices de ce traître seront pourchassés.
Pauline Rade
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MCBTH, l’adaptation
> Résumé
Trois sorcières prédisent que Macbeth deviendra roi.
Sa femme décide de faire acte de diligence.
Macbeth tue le vieux roi.
Macbeth tue son meilleur ami.
Macbeth tue presque tout le monde.
Sa femme devient folle. Elle meurt dans ses bras.
Macbeth continue à se battre avec l’énergie du
désespoir.
Il est vaincu et tué.
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> La parole dite est « hantée » par la parole chantée, entretien
avec Erwin Jans, dramaturge de Guy Cassiers
Si Guy Cassiers change son fusil d’épaule après une série d’adaptation de romans et s’attaque
soudain à des classiques comme Macbeth et Hamlet, c’est qu’il y a du changement dans l’air. Nous
avons consulté le dramaturge Erwin Jans, qui a assuré bon nombre d’adaptations de romans aux
côtés de Guy Cassiers. Si quelqu’un est au fait de ce revirement, ce doit être Erwin Jans.
G
uy Cassiers choisit pour les deux premiers classiques théâtraux de la saison Hamlet et
Macbeth. Voici un choix surprenant pour un metteur en scène qui jusqu’à présent s’est quasi
exclusivement consacré à l’adaptation scénique de romans. Erwin Jans, quel est le rapport
selon vous ?
Erwin Jans : En matière de contenu, on peut de toute évidence tracer une ligne entre Triptiek van de
macht (Triptyque du pouvoir), De man zonder eigenschappen (L’Homme sans qualités), Duister hart
(Cœur ténébreux) et Bloed & Rozen (Sang et Roses) d’une part, et les pièces de Shakespeare, de
l’autre. Hamlet et Macbeth font partie de l’analyse que Cassiers mène autour du pouvoir, de la figure
du potentat et de ses rapports à la réalité. Tant Hamlet que Macbeth commettent un régicide –
Macbeth dès le début du drame, Hamlet à la fin seulement. Mais dans les deux cas, l’existence du
protagoniste est déterminée par l’accomplissement de cet acte. Pour les deux projets, Cassiers fait
appel à des collaborateurs de confiance : il réalise MCBTH avec le compositeur Dominique Pauwels et
Hamlet vs Hamlet avec l’auteur Tom Lanoye. En ce sens, il y a plus de continuité qu’à première vue.
Sauf que dans MCBTH, la collaboration avec le compositeur Dominique Pauwels dépasse celle de
Bloed & Rozen : la musique et le chant, interprétés en direct, font partie intégrante de l’action
dramatique du spectacle. La musique (six musiciens) et le chant (trois chanteuses) ont pour fonction
de représenter les évolutions intérieures de Macbeth.
Q
uelle lecture Cassiers et Pauwels font-ils de Macbeth ?
On dit souvent de Macbeth que c’est une histoire d’ambition et de déchéance. La pièce
peut être lue comme le dernier et peut-être le plus original des drames de Shakespeare
sur le thème du prince ambitieux, qui finit par être détruit. C’est un thème qui puise ses
racines dans la préoccupation que portaient le Moyen Âge et la Renaissance à la tragédie
de la chute d’hommes puissants et fortunés. Mais ce paradigme de l’ambition durement châtiée
n’est pas le cadre d’interprétation le plus congruent pour ce dont Macbeth parle. La profonde
mutation spirituelle que subit Macbeth, comparé aux autres vilains de Shakespeare, fait que la pièce
dépasse cette thématique : « Bolingbroke and Claudius feel their guilt, but Macbeth is shown as
creating his own hell9 », écrit un chercheur. L’idée que Macbeth crée son propre univers (négatif)
ouvre bien des perspectives. Cette création ne porte pas que sur ses actes – ses meurtres – mais
aussi, et peut-être surtout, sur ses pensées. Harold Bloom disait à juste titre de la pièce qu’elle était
9
« Si Bolingbroke et Claudius éprouvent de la culpabilité, Macbeth est présenté comme celui qui crée son propre
enfer. »
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« a tragedy of the imagination10. » C’est par son imagination – ses pressentiments de ce qui va se
passer et ses considérations sur ce qui s’est passé – que Macbeth aboutit dans un monde qui n’est
plus à décrire en termes de bien et de mal, pas plus qu’il ne peut l’être en termes de réalité et
d’irréalité. Le questionnement de Hamlet, « être ou ne pas être », est tout aussi valable pour
Macbeth. À l’instar d’Agamemnon dans Atropa, de Kurtz dans Cœur ténébreux et de Gilles de Rais
dans Bloed & Rozen, Macbeth atterrit dans les limbes de la morale et entre ensuite dans les ténèbres
d’une violence incontrôlée et incontrôlable.
C
omment Cassiers et Pauwels manient-ils l’opposition entre le bien et le mal, la lumière et les
ténèbres ? Pourquoi ces deux créateurs sont-ils tellement fascinés par la face obscure de l’être
humain ?
Le schéma ordre-chaos-rétablissement de l’ordre est à la base de toutes les œuvres de Shakespeare,
tant ses comédies que ses tragédies ou que ce qu’on appelle les pièces historiques ou drames
royaux. Shakespeare se fait l’avocat de l’ordre, de l’autorité et de la morale, semble-t-il à première
vue. Pourtant, il consacre la plus grande partie de ses drames à la description du chaos, de la
déchéance morale, du mal, du crime… Ce serait méconnaître son génie éthique que d’affirmer qu’il
ne nous montre que ce qu’il ne faut pas faire, en nous donnant le bon exemple… en négatif. Les
textes de Shakespeare sont bien plus que la démonstration de la façon dont le bien et l’ordre
l’emportent finalement sur le mal et le chaos. La plupart de ses protagonistes tragiques – Hamlet,
Othello, Macbeth, King Lear… – vivent dans une absence d’ordre, et contribuent même à le troubler.
Leur existence se déroule dans la zone entre être et non être. Le philosophe William Desmond le
formule comme suit : Le tragique expose l’esprit à l’expérience radicale de la perdition. En d’autres
mots, la tragédie nous imprègne du fait que tout être est pénétré de perte : être signifie
fondamentalement être perdu. Entre être et ne pas être : être perdu. Macbeth est sans doute la plus
sombre étude de Shakespeare de la transgression de l’être en non-être et en être perdu.
L’expérience de la guerre est une expression de cet être perdu, de cette errance entre être et nonêtre. La guerre constitue aussi dans les spectacles de Cassiers l’univers dans lequel la ligne de
démarcation entre la vérité et le mensonge, le bien et le mal, la réalité et l’illusion est mise en jeu.
Comment faut-il s’imaginer l’opposition entre le bien et le mal, l’être et le non-être sur scène ?
Paradoxalement, cet univers de la guerre est étroitement lié à l’intériorisation qui marque toujours
les spectacles de Cassiers et dans laquelle l’emploi de la technologie visuelle joue un rôle important.
L’agrandissement du visage des acteurs et le dédoublement virtuel de leur présence physique créent
un monde dans lequel le statut de la réalité extérieure est questionné et où l’accent est mis sur la
projection. De même que les voyelles ont été effacées du nom – de Macbeth à MCBTH –, le drame
est ramené à sa quintessence : Macbeth, Lady Macbeth, le roi Duncan, Banquo, Macduff et les
sorcières.
10
« Une tragédie de l’imagination »
Théâtre National de Strasbourg
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E
t quel rôle joue la musique dans ce processus ?
L’évolution de Macbeth – son désir croissant de meurtre, l’intériorisation de son combat
moral, son isolement, son emprise toujours plus ténue sur la réalité, l’enfer de son
imaginaire – est traduite dans l’usage du chant et de la musique. Selon Dominique, le
spectacle doit commencer comme une pièce de théâtre. Mais à mesure que Macbeth
acquiert plus de pouvoir et commet plus de crimes, le média du théâtre s’effrite et permet à un autre
de s’introduire : l’opéra (chant et musique). Macbeth se perd tellement dans sa lutte pour le pouvoir
que le monde autour de lui s’estompe. L’opéra symbolise cet estompement. La musique et le chant
deviennent des acteurs partenaires. Ils représentent le décalage perpétuel entre, d’une part, la
réalité et l’hallucination, le monde rationnel et contrôlable, et d’autre part, le monde dominé par les
ténèbres de la violence (intérieure et extérieure). La parole dite est hantée, comme phagocytée par
la parole chantée. La musique et le chant mettent à nu une dimension que la parole dissimule et
refoule.
Entretien réalisé par An-Marie Lambrechts
www.toneelhuis.be
Théâtre National de Strasbourg
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> Extraits
Acte I, scène III
MCBTH (adaptation)
Macbeth, W. Shakespeare,
traduction d’Yves Bonnefoy, Editions Folio Classique,
2011, p. 24-28 et 82-87.
Surtitrages de la version scénique,
traduction de la version néerlandaise de Hugo Claus par
Monique Nagielkopf.
Une lande.
Tonnerre. Entrent les trois sorcières.
Première sorcière :
Où as-tu été, ma sœur ?
Première sorcière :
Où as-tu été, ma sœur ?
Deuxième sorcière :
Tuer des porcs.
Deuxième sorcière :
J'ai égorgé des porcs.
Troisième sorcière :
Et toi, ma sœur ?
Première sorcière :
Chez une femme de matelot
Qui avait des marrons plein son giron
Et qui mastiquait, mastiquait… « Tu m’en
donnes »,
Que je lui dis ! Mais ce gros cul de matrone
Me rétorque : « Au diable, sorcière ! » Son mari
Est maître d’équipage sur le Tigre et il est parti
Pour Alep. Mais tout rat sans queue que je sois,
Moi, j’y serai vite, dans mon tamis,
Et je vais lui en faire, en faire, en faire je te dis !
Deuxième sorcière :
Que je te donne ce vent.
Alors je te souffle sur le vent.
Première sorcière :
Tu es gentille.
Première sorcière :
Tu es gentille, mon enfant.
Troisième sorcière :
Et de moi en voici un autre !
Troisième sorcière :
Une tempête je te promets.
Première sorcière :
J’ai le contrôle de tous les autres !
Qui lui souffleront tous les ports
Et le chasseront de tous bords
Qu’on peut trouver sur les cartes.
Oui, je vais vous le retourner
Comme du foin bien séché.
Le sommeil de jour ni de nuit
Ne va fermer ses persiennes.
Il va vivre comme un maudit
Première sorcière :
Le bien est mal et le mal est bien.
Trois vents se déchaîneront
Dans tous les ports se rueront
Dans son châlit flétri comme foin
Tout sommeil fuira le marin
Les yeux ouverts nuit et jour
Miséricorde il implorera
Se racornira, s'étiolera
Sept semaines de sept jours.
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Neuf fois neuf saumâtres semaines.
Il jeûnera, pâlira,
Il se recroquevillera…
Sur son rafiot je n’ai prise
Mais qu’il danse au moins dans ma bise…
Regarde ce que j’ai là.
Sa nef des tempêtes essuiera
mais ne sombrera pas.
Le bien est mal et le mal est bien.
Deuxième sorcière :
Montre, montre !
Première sorcière :
C’est le pouce d’un pilote,
Naufragé, mort, en vue du port.
Tambours.
Troisième sorcière :
Un tambour ! Un tambour !
Macbeth arrive !
Elles dansent une ronde, tournant de plus en plus
vite.
Toutes ensemble :
C’est ainsi, la main dans la main,
Que vont par mers et chemins,
Là, là, là,
Les trois sœurs qui font le destin.
Trois tours pour toi, trois pour moi,
Et trois autres, qui font neuf fois.
Silence ! Le charme opère !
Entrent Macbeth et Banquo
Macbeth :
Pire temps, plus beau jour je n’ai jamais vus.
Banquo :
Sommes-nous loin de Forres ?... Oh, qu’est-ce
là ?
Qui sont ces créatures si flétries,
Si insensées en leur accoutrement
Qu’elles ne semblent pas de cette terre
Que pourtant elles foulent… Êtes-vous en vie ?
L’homme a-t-il même droit de poser des
questions
À des êtres de votre sorte ? Vous paraissez me
comprendre,
Portez vos doigts gercés à vos lèvres sèches.
Vous pourriez être des femmes,
N’étaient ces barbes pour me dissuader de le
croire.
Théâtre National de Strasbourg
Banquo :
Quelles sont ces créatures ?
Si hagardes de corps et d'habits.
Vivent-elles sur cette terre ?
Et pourtant elles sont là.
Vivez-vous ici ?
Pouvons-nous vous interroger ?
Elles semblent comprendre, portent
l'index gercé à leurs lèvres minces.
20
Macbeth :
Parlez, si vous en êtes capables ! Qui êtes-vous ?
Première sorcière :
Salut, Macbeth ! Salut à toi, sire de Glamis !
Macbeth :
Parlez si vous le pouvez ! Qui êtes-vous ?
Première sorcière :
Salut, Macbeth ! Salut, Sire de Glamis !
Deuxième sorcière :
Salut, Macbeth ! Salut à toi, sire de Cawdor !
Deuxième sorcière :
Salut, Macbeth ! Salut, Sire de Cawdor !
Troisième sorcière :
Tous nos saluts, Macbeth, qui seras roi !
Troisième sorcière :
Salut, Macbeth, qui sera roi !
Banquo :
Messire, pourquoi tressaillez-vous, et semblezvous craindre
Ce qui sonne si plaisamment ? Au nom du vrai,
Êtes-vous des visions comme on crée le songe
Ou la réalité de votre apparence ? Mon
compagnon,
Vous l’avez salué de son titre de maintenant,
Puis de la prédiction d’une autre noblesse,
Puis d’une espérance royale ; et il en est
bouleversé,
Mais à moi vous n’avez rien dit. Si vous pouvez
Scruter ainsi les semences du temps,
Et dire quel gain va croître et quel autre non,
Parlez-moi donc, à moi qui ne mendie
Nullement vos faveurs ni ne redoute vos haines.
Banquo :
Qu'as-tu, mon ami ?
Tu tressailles.
Tu sembles craindre ce qui sonne pourtant
plaisamment.
Êtes-vous une vision ou réellement
ce que vous semblez être ?
Vous saluez gracieusement mon
compagnon, lui prédisez des titres,
un espoir royal, il en est ébahi.
Mais à moi, vous ne dites rien ?
Si vous êtes capables de lire
dans les semences du temps
de dire quel grain germera ou non,
parlez-moi donc aussi.
Je n'implore pas plus vos faveurs
que je ne crains votre haine.
Première sorcière :
Salut !
Deuxième sorcière :
Salut !
Troisième sorcière :
Salut !
Première sorcière
Moindre que Macbeth, mais plus grand !
Première sorcière :
Salut, Banquo !
Qui est moins que Macbeth
mais plus.
Deuxième sorcière
Moins fortuné que lui, mais tellement plus !
Deuxième sorcière :
Pas aussi heureux,
mais bien plus heureux.
Troisième sorcière :
Qui procréeras des rois, toi qui ne l’es pas !
Troisième sorcière :
Tu engendreras des rois
mais ne seras pas roi toi-même.
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Première sorcière :
Banquo et Macbeth, salut, salut !
Première sorcière :
C'est pourquoi,
salut Macbeth et Banquo !
Le brouillard s’épaissit.
Macbeth :
Restez, bouches obscures, dites-m’en plus !
Puisque mon père Sinel est mort je suis Glamis,
je le sais,
Mais Cawdor ? Le baron de Cawdor est vivant,
C’est un gentilhomme prospère Et être roi,
Je ne puis en rêver de façon moins vaine
Que me croire Cawdor. Dites, d’où tenez-vous
Cette étrange prescience ? Dites pourquoi
Vous nous avez arrêtés de ces saluts
prophétiques
Sur cette lande lugubre ? Parlez, je vous
l’ordonne !
Macbeth :
Mais encore ? Sire de Glamis, je le
suis devenu à la mort de mon père.
Mais Sire de Cawdor ? Le Sire de
Cawdor est vivant et bien portant.
Et Roi, c'est aussi peu crédible
que Sire de Cawdor.
Pourquoi nous arrêter sur la lande
et nous donner cet étrange oracle ?
Parlez, je vous l'ordonne !
Les sorcières disparaissent
Acte III, scène 4
MCBTH (adaptation)
La grande salle du palais.
Un banquet est servi. Entre Macbeth, Lady
Macbeth, Ross, Lennox, des seigneurs et leurs
suites.
Macbeth :
Macbeth :
Vous savez votre rang, chacun. Prenez donc Noble Macduff, une fois pour
place !
Toutes, soyez le bienvenu.
Soyez les bienvenus !
Mon cœur vous en assure une fois pour toute.
Les seigneurs :
Sire, merci à vous !
Macduff :
Merci, Majesté.
Macbeth :
Macbeth :
Notre désir, en ce qui nous concerne,
Nous irons et viendrons,
C’est d’être parmi vous l’hôte le plus simple.
En hôte prévenant.
Notre hôtesse, pour commencer, reste sur son Notre hôtesse vous souhaitera
trône,
La bienvenue en temps voulu.
Mais au moment le plus convenable
Nous lui demanderons ses mots d’accueil.
Lady Macbeth :
Sire, dites-les tout de suite à nos amis :
Qui sont les bienvenus, mon cœur en témoigne.
Théâtre National de Strasbourg
Lady Macbeth :
Faites-le pour moi, sire : qu'il est
Bienvenu, mon cœur le dit.
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Le premier meurtrier paraît à la porte.
Macbeth :
Vois, ils te remercient du fond du leur…
Le même nombre de part et d’autre ? Pour ma
part,
Je vais donc me mettre au milieu.
Allons, que l’allégresse ait ses coudées franches !
Tout à l’heure,
Nous boirons à la ronde.
Macbeth :
Vois, il te remercie de ton salut
Du fond du sien.
Que la joie règne, monsieur.
Les coupes de boisson vont venir.
Il va à la porte.
Il y a du sang sur ta face…
Le Premier meurtrier :
C’est donc celui de Banquo.
Macbeth :
Bien mieux sur ta figure que dans son corps !
L’as-tu bien expédié ?
Le Meurtrier :
Par le fond de la gorge, monseigneur.
Je lui ai rendu ce service.
Macbeth :
Tu es le prince des égorgeurs !
Mais c’en est un aussi, celui qui a eu Fléance.
Si c’est toi, tu es sans égal.
Le Meurtrier :
Grand roi ! Fléance s’est échappé.
Macbeth :
Alors, reviens, ma fièvre ! Sans ce revers
J’aurais été à toute épreuve. Marbre sans faille,
Rocher ! Aussi libre que l’air, sans plus de limite !
Me voici empiégé, encagé, aux fers,
Tourmenté par la peur, nargué par le doute.
Banquo au moins, c’est tout à fait sûr ?
Le Meurtrier :
Oui, monseigneur ; sûr comme la fosse
Où il git, la tête percée de vingt blessures
Dont la moindre est mortelle.
Macbeth :
(A part.) Le voici mort, le serpent ! L’autre, le
ver,
Celui qui s’est enfui, son venin va croître,
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Mais pour l’instant il n’a pas de crocs.
(Haut.) Va-t’en. Nous nous reparlerons demain.
Sort le meurtrier.
Lady Macbeth :
Mon royal maître,
Vous ne saluez pas vos hôtes, le verre en main ?
Le festin semble vendu, bien trop cher vendu
Quand on n’y redit pas sans cesse, et tant qu’il
dure,
Qu’on l’offre de grand cœur. Car pour rien que
manger,
Mieux vaut rester chez soir. Ailleurs,
Ce sont les politesses qui font la sauce,
Sinon la fête est bien maigre.
Lady Macbeth :
Sire, vous êtes loin
D'être un hôte enjoué.
Quel morne festin, si l'on ne répète
pas qu'on l'offre de grand cœur.
Que votre hôte est le bienvenu.
Quand on mange hors de chez soi,
La joyeuseté doit relever la viande.
Macbeth :
Que tu sais gentiment me le rappeler !
Eh bien, bon appétit, bonne digestion,
Et, certes, bonne santé !
Macbeth :
Oui, ma douce attentionnée.
Monsieur,
Bon appétit et bonne digestion.
Lennox :
Que Votre Grandeur veuille bien prendre sa
place.
Le spectre de Banquo entre, et s’assied à la place Le spectre de Banquo entre, et s’assied à la place
de Macbeth.
de Macbeth.
Macbeth :
Nous verrions rassemblés sous notre toit, ce soir,
Tous ceux qui sont l’honneur de notre pays
Si Banquo, notre noble Banquo, était présent.
Mais plutôt l’accuser de désobligeance
Qu’avoir à déplorer quelque malheur !
Ross :
Qu’il soit absent, messire, cela ternit
Certainement sa promesse. Plairait-il
A votre Majesté de nous faire l’honneur
De sa royale présence.
Toute la noblesse est réunie, seul
Notre bon ami Banquo est absent.
Je préfère l'accuser de négligence
Que de craindre un accident.
Macduff :
Sire, son absence ternit sa promesse.
Macbeth :
La table est pleine.
Lennox :
Voici la place qui vous attend, sire.
Macbeth :
Où ?
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Lady Macbeth :
Ici, Altesse. Tu sursautes,
pourquoi ? Es-tu un homme ?
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Lennox :
Ici, mon cher seigneur.
Qu’est-ce donc qui émeut Votre Majesté ?
Macbeth :
Quel est celui de vous qui a fait cela ?
Tous :
Qui a fait quoi, monseigneur ?
Macbeth :
Tu ne pourras prétendre que c’est moi !
N’agite pas, comme pour m’accuser,
Tes mèches trempées de sang.
Macbeth :
Ce n'est pas moi ! Toi, n'agite pas
Tes mèches maculées de sang !
Lady Macbeth se lève.
Ross :
Messieurs, debout ! Sa majesté se sent mal.
Macduff :
Son Altesse se sent mal.
Lady Macbeth :
Restez en place, nobles amis ! Mon seigneur est
souvent comme cela.
Et depuis sa jeunesse. Rassurez-vous, je vous
prie.
L’accès ne dure pas. Le temps d’une pensée,
Et il sera rétabli. Si vous l’observez trop,
Vous allez l’irriter et prolonger sa souffrance.
Mangez, ne le regardez pas. – Est-tu un
homme ?
Lady Macbeth :
Cher ami, mon époux est
Souvent ainsi, depuis sa jeunesse.
Restez assis, la crise passe vite.
Il sera bientôt rétabli.
Ne l'observez pas, sinon il se sent
Vexé et son état s'exacerbe.
Mangez, ne le regardez pas.
Es-tu un homme !
Macbeth :
Macbeth :
Oui, - et un homme brave,
Oui, un homme brave qui ose
Pour oser regarder ce qui pourrait terrifier le Regarder ce qui terrifierait le diable.
diable.
Lady Macbeth :
Sornettes que cela !
Ce n’est que ce que peint votre frayeur,
C’est comme ce poignard dessiné dans l’air
Qui vous mena vers Duncan, m’avez-vous dit.
Ah, ces tressaillements, ces bouffées d’angoisse
Qui singent la vraie peur, conviendraient mieux
À l’écoute des fables que les femmes
Se transmettent l’hiver, au coin du feu !
Honte sur vous !
Car pourquoi ces grimaces ? Tout compte fait,
Vous ne contemplez qu’une chaise !
Lady Macbeth :
Quelles sornettes ! C'est l'image
De ton angoisse, et rien d'autre.
Comme le poignard volant dont tu
Disais qu'il te mènerait à Duncan.
Ces simagrées conviennent aux
Propos de femmes au coin du feu.
La honte ! Pourquoi ces grimaces ?
Macbeth :
Macbeth :
De grâce, regarde, regarde, là ! (Au spectre.) Regarde, là. Tu vois ?
Quoi, que dis-tu ?
Regarde donc. Là.
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Mais pourquoi m’en soucier ? Si tu branles du
chef,
Tu peux parler, n’est-ce pas ?... Si charniers et
tombes
Recrachent maintenant ceux que l’on enterre,
Autant bâtir nos tombeaux dans le gésier des
vautours.
Qu'est-ce que tu dis ? Si tu branles
Du chef, tu peux aussi parler.
Si la tombe nous recrache,
Où faut-il nous enterrer ?
Dans le gésier d'un vautour ?
Lady Macbeth :
Quoi, la folie t'émascule ?
Sort le spectre.
Sort le spectre.
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MCBTH, la représentation
> Les costumes
D
ans ce spectacle, le metteur en scène Guy Cassiers a fait appel au styliste Tim Van
Steenbergen pour la conception des costumes. Connu des podiums depuis sa
première collection en 2001, ce jeune couturier flamand crée aussi bien pour le
monde de la mode que pour l’univers du spectacle vivant.
L’histoire de Macbeth étant une sorte de lutte constante pour le pouvoir, où de nombreux
combats ont lieu, Tim Van Steenbergen s’est inspiré des échiquiers, sur lesquelles le blanc et
le noir s’affrontent.
Le costumier conçoit alors ces costumes autour du blanc et du noir, en mélangeant éléments
contemporains et élisabéthains. Pour les hommes, il s’inspire des tenues portées par les
escrimeurs. En revanche pour le personnage féminin, il travaille à partir des robes portées
par les femmes du XVIIe siècle qu’il modernise. Afin de marquer le rang social des
personnages sont greffés sur les costumes différents éléments symbolisant la monarchie, la
royauté.
Pauline Rade
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> Un théâtre d’images
« Ce que montre l’image, la parole n’a plus à l’exprimer.
L’émotion qu’offre la musique, l’acteur peut se passer de la traduire.
Ce qu’il évoque par les mots, la projection vidéo n’a plus à le représenter.
Je ne me considère pas comme un metteur en scène de textes.
Je monte des éléments visuels et auditifs.
J’essaie de donner aux spectateurs un maximum d’informations sensorielles.
Reste ensuite à chacun de traiter ces éléments, paroles, images, sons,
projections, corps, jusqu’à en obtenir un tout, cohérent ou non, mais qui
n’appartiendrait qu’à soi. »
Guy Cassiers
L
a vidéo fait partie intégrante des spectacles de Guy Cassiers. De plus en plus présente sur la
scène contemporaine, cela fait bien longtemps qu’elle a été introduite. « Les premières
expériences formelles cherchant à ouvrir les horizons du théâtre en y intégrant d’autres formes
d’arts datent du début du XXe siècle avec les travaux de Piscator. Aspirant à mettre l’esthétique au
service de son engagement politique, Piscator (1893-1966) intègre sur scène divers documents
(coupures de journaux, films…) qui sont montés et projetés, multipliant l’espace et le temps théâtral
et précisant le contexte de son écriture. En effet, il s’agissait pour le metteur en scène allemand,
d’inscrire sa pratique théâtrale dans l’actualité politique de la première guerre mondiale, d’obliger le
spectateur à penser et se penser pris dans un contexte politique et social. Cette création d’une forme
nouvelle pour répondre à l’exigence d’un propos, se poursuit en Russie avec Meyerhold (1874-1940)
et son élève Eisenstein (1898-1948) qui développent cette esthétique du montage et mettent leur art
au service de la révolution russe d’octobre 1917.
Tout au long du XXe siècle, les pratiques théâtrales occidentales s’ouvrent à de nouvelles formes et
de nouvelles expérimentations. Tant l’art du comédien que la mise en scène ou la scénographie sont
questionnés, mis en cause : suppression des rideaux et de la rampe, de la coupure scène/salle avec
Appia (1862-1928), disparition du comédien au profit de la sur-marionnette avec Craig (1872-1966),
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théâtre rituel et curatif avec Artaud (1896-1948) et bien sûr la théorie du théâtre épique et de la
distanciation avec Brecht (1898-1956). Chaque élément constitutif d’une pièce est pensé en soi, qu’il
s’agisse de la musique, du jeu d’acteur, des costumes ou encore de la scénographie et la suprématie
du texte en tant qu’élément central d’un spectacle disparaît.
Le milieu du XXe, influencé par les pratiques américaines et les mouvements de libérations et
de contestation, met le corps au centre de toutes les pratiques. Recherche du choc, de l’insolite, d’un
rapport immédiat et participatif au public, la performance se déploie. Enfin, des auteurs modernes et
contemporains tels que Nathalie Sarraute ou Samuel Beckett font peu à peu disparaître de leurs
pièces dialogues, actions et personnages. La danse n’est pas en reste. Les propositions de Maurice
Béjart (1927-2007) participent d’une réflexion nouvelle sur le corps dansant et notamment les corps
masculins, les portés s’inversent et la théâtralité fait désormais pair avec la danse dans les travaux de
Pina Bausch (1940-2009).
L’intégration des écrans au théâtre se banalise rapidement tandis que la mise en scène ellemême est plus largement influencée par les pratiques cinématographiques. Bien plus que le
successeur de la toile peinte en guise de décor, l’écran s’intègre pleinement aux pièces. Il permet à la
fois des projections d’images et de vidéos et propose un, voire plusieurs, espace(s) scénique(s)
supplémentaire(s). Même le champ artistique de la marionnette s’empare de cette nouvelle
technologie avec les propositions du Théâtre du Sous-marin Jaune ou de Grégoire Callies.
Cette nouvelle combinaison des arts entre eux, aujourd’hui pérenne dans la création
contemporaine, constitue une « ouverture sur le monde » pour reprendre l’expression de Béatrice
Picon-Vallin, directrice du Laboratoire de recherche sur les arts du spectacle au CNRS. Mais cela
suscite aussi de nombreuses réactions au sein même du champ artistique mais aussi chez les
spectateurs : « Est-ce encore du théâtre ? » C’est donc l’enjeu de la définition même du théâtre, et
donc des autres arts, qui est mis en question par la création. Mais existe-t-il des définitions fixes,
immuables en matière d’art ? Que ce soit le théâtre, le cinéma ou la danse, ces pratiques n’ont-elles
pas évoluées, quitte à transgresser leurs fondements même ? Adorno, philosophe allemand, relève
qu’il n’existe pas de « discipline de territoires établis une fois pour toutes » en art et « que l’origine
de ces territoires n’est pas naturelle mais bien historique11. » Guy Cassiers ne déroge pas à la règle
avec MCBTH, mettant son travail au service d’une intention esthétique.
Par ailleurs, le dramaturge Erwin Jans précise que « la technologie visuelle, les projections,
sont elles aussi des représentations, en quelque sorte, de ce qui se passe dans la tête de Macbeth.
On pourrait dire, somme toute, que toute la mise en scène, toute l’image scénique, est une
représentation de l’imagination de Macbeth. Et dans ce contexte, [poursuit-il], nous avons réduit
fortement la distribution. Nous jouons Macbeth avec cinq acteurs : Macbeth, Lady Macbeth, Duncan,
Banquo et Macduff. C’est un groupe très restreint, auquel se joignent évidemment les trois
chanteuses et les six musiciens présents sur la scène. Mais cette restriction, a pour but de souligner
la nouvelle interaction entre la musique et le jeu. Voilà le grand défi que présente ce nouveau
Macbeth : une histoire réduite à l’essentiel, mais une quête d’une nouvelle interaction entre d’une
part la musique et le jeu, et d’autre part la technologie visuelle12 »
11
12
Texte d’Anaïs Cayla.
Propos de Erwin Jans, extrait vidéo.
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Captation des répétitions MCBTH
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> La musique, une place centrale
M
CBTH est la tentative par Guy Cassiers et Dominique Pauwels de créer une nouvelle
forme de théâtre musical. Le spectacle commence sur un mode dramatique, puis, à
mesure que Macbeth perd la raison, glisse progressivement vers la forme opératique. La
musique finit par imposer son propre rythme à la pièce.
Pour le compositeur Dominique Pauwels « les trois sorcières sont les éléments les plus importants de
Macbeth. Dans MCBTH, Elles reprennent peu à peu à leur compte et chante tous les rôles. Ce faisant,
elles amènent Macbeth dans un nouveau média, celui de l’opéra. Ainsi, j’espère montrer la folie de
Macbeth, qui quitte son monde familier – celui du théâtre – pour basculer dans celui de l’opéra qu’il
ne maîtrise pas13. »
Pour le dramaturge Erwin Jans, « l’idée est d’arriver à ce que les acteurs et les chanteurs
interagissent plus intimement. Macbeth, comme on l’a dit souvent, est une tragédie de l’imagination.
Macbeth succombe à l’attrait des vaticinations des sorcières. Leurs paroles font s’emballer son
imagination. Il se met à agir en fonction de leurs prédictions, ce qui le mènera finalement à la ruine.
Cette imagination, nous allons essayer de la rendre par le biais de la musique. La musique est donc ce
qui se passe dans la tête de Macbeth. Les sorcières sont trois chanteuses. La musique est interprétée
en direct par six musiciens. Mais les trois chanteuses expriment ce qui se passe dans la tête de
Macbeth14. »
La musique semble ouvrir une sorte de troisième voix dans la représentation. En effet, c’est par elle
que le metteur en scène cherche à faire comprendre ce qui se trame dans la tête de Macbeth.
13
14
Propos de Dominique Pauwels, extrait vidéo
Propos de Erwin Jans, extrait vidéo
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> Photographies du spectacle
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L’équipe artistique
Guy Cassiers
(1960) appartient au cénacle des plus grands créateurs européens de théâtre.
Son langage théâtral singulier, qui fait s’unir la technologie visuelle à la passion pour la littérature, est
apprécié tant dans son propre pays qu’à l’étranger.
Les dernières années, de 2006 à 2008, Guy Cassiers s’est concentré, dans son Triptiek van de macht
(Triptyque du pouvoir) (Mefisto for ever, Wolfskers et Atropa. De wraak van de vrede (Atropa. La
vengeance de la paix), sur les relations complexes entre l’art, la politique et le pouvoir. Il a continué
sur ce thème dans un nouveau triptyque autour de De man zonder eigenschappen (L’Homme sans
qualités), le grand roman de Robert Musil (2010-2012). Outre le visuel, la musique joue un rôle
toujours plus important dans les spectacles de Cassiers, comme le prouvent sans conteste les deux
créations d’opéras qu’il a montées en 2009 : House of the Sleeping Beauties (Les belles endormies)
(musique Kris Defoort) et Adam in Ballingschap (Adam en exil) (musique Rob Zuidam). Entre-temps, il
a mis en scène le cycle complet de L’Anneau du Nibelung de Wagner à Berlin et à Milan (2010-2013).
L’intérêt croissant de Guy Cassiers pour l’histoire politique européenne ressort également de projets
comme Bloed & rozen. Het lied van Jeanne en Gilles (Sang & roses. Le chant de Jeanne et Gilles –
2011), qui traite du pouvoir et des manipulations de l’Église, et Duister hart (Coeur ténébreux d’après
Heart of Darkness de Joseph Conrad – 2011) qui se situe dans le passé colonial. Avec des productions
telles que SWCHWRM, Guy Cassiers ose donner une touche plus légère à ses oeuvres, que l’on
retrouve aussi dans Middenin de nacht (Au beau milieu de la nuit), une production d’ensemble de la
Toneelhuis en janvier 2012. En 2013, Guy Cassiers crée avec Katelijne Damen Orlando d’après
Virginia Woolf, qui est d’emblée sélectionné pour le Nederlands Theaterfestival 2013. En 2013-2014,
MCBTH et Hamlet vs Hamlet sont à au programme.
Dominique Pauwels
est un compositeur aux mille facettes. On fait appel à son talent
pour le théâtre musical et la danse, le cinéma, le marketing, la publicité, et la télévision. Il a signé la
musique de la plupart des productions de Woestijnvis (Het Eiland (2004), Man Bijt Hond, De
Pappenheimers, De Parelvissers (2006), De Ronde (2011), etc.). Avec la chorégraphe Karine Ponties et
l’artiste d’installations Lawrence Malstaf il a réalisé la création multidisciplinaire Boreas (2008). À
Gand, dans le cadre de la maison de production musicale LOD|muziektheater, où il est artiste en
résidence depuis 2008, il oeuvre à son propre style de théâtre musical et compose une musique
souvent assaisonnée d’électronique, ou fait usage d’installations avec de petits haut-parleurs. Parmi
ses oeuvres récentes, on peut citer Judaspassie avec B’Rock (2009) et Ghost Road – Road 66 (2012).
Avec An De Donder, il crée Twee oude vrouwtjes (2009) et Autopsie van een gebroken hart (2010).
Pour Needcompany, il a composé la musique de No Comment (2003, Jan Lauwers), et en 2000, il
travaille avec Jan Lauwers et le Frankfurter Ballet au spectacle DeadDogsDon tDance/
DjamesDjoyceDeaD, à la demande de William Forsythe. Avec Inne Goris, il a monté le spectacle de
plein air MUUR (2010), une installation musicale dans un conteneur Droomtijd (2011), le spectacle
familial Vader, Moeder, Ik en Wij (2011). Toujours avec Inne Goris, et avec Kurt d’Haeseleer, il conçoit
l’installation vidéo théâtrale Hoog Gras (2012). Avec Eric De Volder, il crée Frans Woyzeck (2010) au
NTGent, la version de théâtre musical aux accents d’opéra-bouffe de Woyzeck.
Théâtre National de Strasbourg
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Pour la Toneelhuis et LOD, il a composé la comédie musicale Adams appels (2009) d’Olympique
Dramatique, et Onegin (2006), Wolfskers et Bloed & rozen. Het lied van Jeanne en Gilles (2011) de
Guy Cassiers. Cette musique a été chantée en direct par le Collegium Vocale Gent dans la Cour
d’Honneur du Palais des Papes au Festival d’Avignon en 2011. Il prépare actuellement avec Guy
Cassiers le spectacle de théâtre musical MCBTH (2013).
Tim Van Steenbergen
(1977) a terminé ses études de mode à l’Académie Royales des
Beaux-Arts d’Anvers avec la mention « grande distinction ». Après avoir été l’assistant d’Olivier
Theyskens il lance sa première propre collection à Paris en 2002. À ce jour, la marque Tim Van
Steenbergen se vend dans de nombreuses boutiques triées sur le volet dans le monde entier.
Son style combine la pureté raffinée, l’élégance féminine et le confort. Son installation Stills a été
sélectionnée pour la Biennale de Venise en 2003. En 2009, il reçoit le Elle Style Award du Meilleur
Designer belge.
En 2004, Tim Van Steenbergen se lance dans le monde du théâtre en créant les costumes de l’opéra
Hanjo, dans une mise en scène d’Anne Teresa De Keersmaeker. En 2006, c’est le tour des costumes
pour Un soir d’un jour pour Rosas/De Munt et il travailla avec Guy Cassiers à Hersenschimmen (2006)
du Ro theater. Il a également signé les costumes de Triptiek van de macht (Tryptique du pouvoir,
2006-2008), House of the sleeping beauties (2009) et Bloed & rozen. Het lied van Jeanne en Gilles
(Sang & roses. Le chant de Jeanne et Gilles, 2011). De 2010 à 2013, il a aussi dessiné les costumes du
cycle opératique en quatre volets L’Anneau du Nibelung au Teatro alla Scala à Milan et au Staatsoper
de Berlin. En 2013-2014, il crée les costumes des productions de la Toneelhuis MCBTH et Hamlet vs
Hamlet.
LOD théâtre musicale
est une maison de production d’opéras contemporains et de
théâtre musical qui depuis plus de 20 ans se porte garant d’un travail artistique novateur. LOD
détermine des trajets artistiques avec une équipe d’artistes (les compositeurs Kris Defoort, Dick van
der Harst, Jan Kuijken, Dominique Pauwels, Daan Janssens et Thomas Smetryns, la metteuse en
scène Inne Goris, l’acteur/auteur/metteur en scène Josse De Pauw, l’artiste plasticien Patrick
Corillon, le metteur en scène Fabrice Murgia et le philosophe/auteur Pieter De Buysser). Ensemble,
ils développent un large éventail de projets dans lesquels beaucoup de genres artistiques différents
se côtoient.
Les compositeurs de LOD sont appréciés pour leur approche contemporaine du théâtre musical. Leur
travail est extrêmement hybride et difficile à catégoriser, mais toujours le résultat d’une recherche
artistique poussée. Avec des productions telles que The Woman Who Walked into Doors, Yerma, Au
fond du bois, La maison des petites musiques cachées, L’Ame des termites, Les belles endormies, Mur,
The Brodsky Concerts, Les pendus, Middle East et plus récemment Ghost Road et An Old Monk, LOD a
récolté de nombreux succès, tant en Belgique qu’à l’étranger.
LOD accorde une importance particulière à la coopération avec des artistes wallons. En témoignent
De Duivel Beduveld, Les Aveugles (mars 2012 - avec Patrick Corillon) et Middle East (avec Philippe
Blasband).
LOD bénéficie de nombreux partenariats en Belgique et à l’étranger, dont deSingel (Anvers), La
Monnaie/De Munt (Bruxelles), het Concertgebouw (Bruges), de Vlaamse Opera (Gand), Rotterdamse
Schouwburg (Rotterdam, NL), Le Maillon (Strasbourg, FR), Le Manège Mons, Théâtre national
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Bruxelles, Opéra de Lille, Festival d’Aix-en-Provence, Grand Théâtre de Luxembourg (LU),
Kunstfestspiele Herrenhausen (Hannover) et L’Hippodrome (Douai).
SPECTRA a vu le jour en 1993. Huit musiciens inspirés constituent le noyau dur de l’ensemble.
Au cours de leurs vingt années de travail collectif, ils ont élaboré une sonorité unique ainsi qu’une
cohérence musicale remarquable. L’ensemble défend avec passion les compositeurs flamands
contemporains sur la scène internationale. Filip Rathé est le directeur artistique et le chef d’orchestre
de l’ensemble.
SPECTRA crée de multiples oeuvres de commande en dialogue permanent avec des oeuvres de
référence, et ce, dans le cadre d’un large éventail de modes de présentation, comme des concerts,
des happenings, des spectacles de théâtre musical, et des événements multimédias. Tant les artistes
créateurs, les organisateurs, que le public apprécient beaucoup leurs programmes non dogmatiques
et leurs interprétations particulières. Voilà qui a donné lieu à des collaborations avec, entre autres,
Luca Francesconi, Lucien Goethals et Nicolaus A. Huber.
SPECTRA se produit en Europe et en Amérique du Sud, ainsi qu’à des festivals comme Ars Musica (B),
Transit (B), Festival Musica Nova (Brésil), November Music Festival (NL/B/D), Musica Sacra (NL),
OEROL Festival (NL), Huddersfield Contemporary Music Festival (GB), le Traiettorie Festival (IT), la
Biennale de Venise (IT) et les World Music Days 2010 à Sydney (AU).
VOCAALLAB – beyond the voice réalise depuis 2002 des spectacles grand public,
à la croisée de la musique et du théâtre. Réunissant des chanteurs du monde entier, l’ensemble
réalise des (co)productions innovantes qui donnent lieu à des combinaisons d’expressions artistiques
tout à fait étonnantes. Les spectacles sont le fruit d’un travail collectif de performeurs
pluridisciplinaires qui n’ont pas peur d’aller au-delà de leur voix : beyond the voice.
VOCAALLAB travaille avec des institutions et des artistes de disciplines les plus divergentes. Le
collectif fait souvent office d’initiateur de projets et de développeur de nouveaux concepts de
théâtre musical. La qualité, l’expertise et la méthode de travail en phase, dite « LAB », lui ont valu au
cours des dernières années d’innombrables demandes de partenariat, tant en Belgique qu’à
l’étranger : Holland Festival, Oerol, De Nederlandse Opera, LOD (Gand), Teatro Real Madrid,
Ruhrtriennale, Europäisches Zentrum der Künste Dresden, November Music (Den Bosch),
Donaueschinger Musiktage, Gaudeamus (Utrecht), MaerzMusik (Berlin), Operadagen Rotterdam,
Muziektheater Transparant (Anvers) et Project Platforma Moskou, etc.. L’opéra Colourful Penis de
Maria de Alvear présenté au Dresdner Tage für Zeitgenössische Musik a valu à VOCAALLAB des
critiques élogieuses, entre autres, de la part de la revue Opernwelt.
Parmi les sommets de VOCAALLAB, on peut citer Machinations de Georges Aperghis lors des
Operadagen Rotterdam et du Theaterfestival Boulevard, et Autland de Sergej Newski dans le cadre
de la Ruhrtriennale. En juin 2010, VOCAALLAB a chanté dans le nouvel opéra d’Alexander Raskatov, A
Dog’s Heart, au Nederlandse Opera. Lors du Holland Festival 2011, VOCAALLAB a interprété aux
côtés d’Asko|Schönberg l’opéra de chambre The Cricket Recovers de Richard Ayres, dans une mise en
scène de Pierre Audi. À l’automne 2011, VOCAALLAB a monté avec la compagnie de danse ISH la
production transversale MonteverdISH – a hiphop breakdance opera. Dans les années à venir,
VOCAALLAB a prévu des coproductions avec ISH, Muziektheater Hollands Diep, Paradiso Melkweg
Productiehuis, Slagwerk Den Haag et Club Guy & Roni.
Théâtre National de Strasbourg
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Rencontre autour du spectacle
BORD DE PLATEAU
A l’issue de la représentation le vendredi 04 octobre
DU THÉÂTRE À L’ÉCRAN
PROJECTION
MACBETH
De Orson Welles
Avec Orson Welles, Jeanette Nolan, Dan O’Herlihy, Edgar Barrier…
Etats-Unis, 1948, 1h13
« Macbeth reprend la mise en scène de la pièce
montée par Welles avec sa compagnie du Mercury
Theater. Il met son spectateur face à des effets
grandiloquents et fantastiques, dans un décor de
château moyenâgeux en carton-pâte sur un
plateau de studio. Orson Welles lui-même joue des
yeux écarquillés et des profondeurs de champ pour
donner aux scènes de folie un expressionnisme
muet qui semble une réponse à Ivan le
Terrible d’Eisenstein. Ainsi ces décors rugueux,
sauvages et expressionnistes ainsi que ces effets
cinématographiques grandioses (plongée, contre
plongée et profondeur de champs) évitent au film
de tomber dans l’académisme des lectures
habituelles de Shakespeare, à l’époque notamment
celles de Laurence Olivier. Les scènes de folie,
grâce à l’interprétation de Jeanette Nolan (Lady
Macbeth) – dont la scène de la main – sont
particulièrement réussies ainsi que la scène finale
de la forêt en marche... »

Jeudi 03 octobre à 20h au Cinéma Star
Tarif spécial : 5,50 € sur présentation de la carte d’abonnement du TNS ou d’un billet MCBTH
Théâtre National de Strasbourg
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Dans le même temps
ACCUEIL
Des Arbres à Abattre
Bord de plateau à l’issue de la
représentation
•Mardi 15 octobre
D’après Thomas Bernhard
Mise en scène de Claude Duparfait et Célie Pauthe
Dates du jeudi 03 au samedi 19 octobre 2013
Horaire du mardi au samedi à 20h ; dimanche 6 et 13 octobre à 16h
Relâche les lundis
Salle Gignoux
Conversations de la Librairie
Kleber,
avec Claude Duparfait et Hélène
Schwaller
•Samedi 12 octobre à 11h30
Séance spéciale audio description
•Jeudi 17 octobre
Hannibal
De Christian Dietrich Grabbe
Mise en scène Bernard Sobel
Dates du jeudi 10 au samedi 19 octobre
Horaire du mardi au samedi à 20h ; dimanche 13 à 16
Relâche lundi 14 octobre
Salle Koltès
Théâtre National de Strasbourg
COPRODUCTION
Théâtre en pensées
Rencontre avec Bernard Sobel, animée
par Emmanuel Behague (UdS)
•Lundi 14 octobre à 20h au TNS
Séances spéciales
•Surtitrage français vendredi 11 octobre
•Surtitrage allemand samedi 12 octobre
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