Mes souvenirs à mes fils - 1,6 Mo

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Cahier des Archives du Calvados - N°37 - 2008
61, rue de Lion-sur-Mer - 14000 CAEN - 02 31 47 18 50
En première de couverture : extrait du manuscrit de Perinne (ADC)
En quatrième de couverture : extrait du manuscrit de Perinne. (ADC)
Recherches documentaires pour ce cahier : Delphine Maréchal. Avec l’aide précieuse de
Isabelle de Koninck, Elsa Kortchinsky-Loussot, Gilbert Lauvergne, Martine Le Roc’h
Morgère, Catherine Queguiner.
Photographies Archives : Pascal Sellin.
Mise en page et rédaction : Delphine Maréchal.
Numérisation : Didier Paillard.
Présentation générale
Monsieur Pierre Seydoux a mis à la disposition des Archives du Calvados un ensemble de
documents issus de la famille Perinne, originaire du Pays d’Auge, dont madame Nicole
Seydoux est une des héritières. Parmi les archives consultées, un manuscrit « Mes souvenirs à mes fils » a attiré notre attention. En effet, signé de la main d’un certain Jean-Baptiste
Magloire Perinne et daté de 1847, ce document présente, sous la forme d’une autobiographie, la vie de l’auteur -né en 1774 à Lisieux, et sa carrière administrative.
Ce manuscrit relié de 155 pages, nous a semblé d’une grande pertinence pour aborder la
vie d’un Normand des XVIIIème et XIXème siècles. En effet, la description du milieu professionnel et familial est abordée ici sous la forme d’un témoignage unique. L’auteur, par son
récit, rend indirectement compte d’une époque troublée car il a vécu la succession de régimes politiques différents, de Louis XVI à Louis-Philippe.
Ce document de première main retrace la carrière brillante de Perinne. Il est commis de la
Ferme générale de Lisieux en 1788, puis devient fondé de pouvoir du Receveur général du
Calvados à Caen dès 1800.
Cette longue carrière dans l’administration financière se poursuit hors de la Normandie à
partir de 1816 pour s’achever, après plusieurs postes dans des départements différents, à
Laon, où l’auteur s’établit définitivement en 1834 et décède en 1859.
Une carrière financière peut, à première vue, sembler austère et peu instructive. Or, l’auteur, par une narration agréable et un grand souci du détail, nous livre des informations
sur la société, la famille, la religion, les activités économiques et politiques et son ressenti
sur sa carrière poursuivie sous cinq régimes successifs.
Nous avons pris le parti de faire réfléchir les classes du secondaire, sur la période normande de J-B. Magloire PERINNE, allant de 1774 à 1816. A l’aide d’une sélection d’extraits du manuscrit, nous avons élaboré des petits questionnaires, qui, classés thématiquement, offrent un cadre de réflexion aux enseignants, agrémentés de documents d’archives,
dans le souci constant de relier les faits historiques nationaux à l’histoire locale. Un glossaire des termes utilisés par Perinne et par les professeurs dans le cadre de leur cours
d’Histoire complète l’ensemble.
Le récit de Jean-Baptiste Magloire Perinne, écrit à la fin des années 1840, est rédigé sous
forme chronologique.
L’auteur, sous son titre, “Souvenirs à mes fils Jules et Emile Perinne”, commence son récit
par « je suis né à Lisieux le 27 Octobre 1774 ». Il n’a pas l’intention de faire un récit année
après année mais de sélectionner des faits personnels et historiques en suivant l’évolution
chronologique de sa carrière.
3
Le découpage de l’auteur est alors le suivant :
“ 1 Directoire du district de Lisieux. Entré le 1er Octobre 1790
2 Recette du district de Pont-l’évêque. 31 Mars 1793
3 Lisieux. Subsistances militaires. 02 Octobre 1795.
4 Saint-Lô (Manche). Recette des Domaines nationaux. 15 Mai 1797.
5 Avranches. Recette particulière du District. 15 Novembre 1797.
6 Caen. Recette générale du Calvados. 1er Vendémiaire an IX. 22 Septembre 1800.
7 Caen. M. Pellapra, receveur général du Calvados. Février 1809.
8 Mission de Strasbourg (1821).
9 Laon. Du 1er Mai 1834 au 16 Juin 1844. “
La longueur des différentes parties est très diverse. Certaines ne regroupent que quelques
lignes, d’autres permettent un développement de plusieurs pages.
Nous n’avons pas suivi son découpage professionnel mais nous avons choisi de balayer l’ensemble de son récit en suivant une chronologie plus compréhensible pour des élèves. A l’intérieur de ces grandes périodes, des thèmes, en lien avec les programmes du secondaire,
regroupent divers passages de sa narration.
Nous remercions M. et Mme Seydoux pour leur aimable autorisation d’utiliser ce document
familial à des fins pédagogiques. Il s’agit de montrer à nos élèves que le travail de l’historien
utilise et nécessite des sources variées comme ce récit autobiographique.
Madame Delphine Maréchal, professeur au Service éducatif
des Archives du Calvados pour le secondaire.
4
SOMMAIRE
La France de Perinne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
Chronologies comparées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
La fin de l’Ancien Régime
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
La famille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
- son milieu social
- la transmission des valeurs morales et religieuses
Etre enfant en 1788 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
- enfance et éducation
- l’entrée dans la vie active
La monarchie et la vie politique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
- la naissance du Dauphin
- le passage de Louis XVI à Lisieux
- assemblée des Notables et Etats généraux
Justice et société . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
- l’exemple d’une exécution capitale
Les évènements à l’étranger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
- la fin de la guerre d’Amérique en 1783
Révolution et Terreur (1789-1793)
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
La première année de la Révolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
- l’exemple du Colonel de Belzunce
Les débuts professionnels de Perinne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
Sa vision de la politique nationale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
La Révolution et l’Europe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
La République conservatrice (1794-1799)
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
Le contexte général des dernières années du XVIIIème siècle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
La progression des élites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
Le Consulat et l’Empire (1799-1815)
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
L’évolution de la carrière de Perinne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
La religion et la loi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35
La situation de la Normandie sous l’Empire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
- Le passage de Napoléon à Caen (1811)
- L’occupation étrangère
Un nouveau régime apparaît … la Restauration : espoirs et désillusions . . . . . . . . . . . . 39
Conclusion : des souvenirs pourquoi faire ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
Glossaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
5
La France de PERINNE
Jean-Baptiste Magloire Perinne naît dans une France rurale à 80%. Seules quelques villes comme
Caen et Rouen dominent dans la province de Normandie, Lisieux dépasse juste les dix mille habitants.
Le royaume de France est peuplé de 29 millions de sujets. C’est un pays avec une population jeune.
La société repose sur trois ordres. La prière et le combat pour le roi sont considérés comme plus
prestigieux que le travail. Ainsi 98 % de la population travaillent pour moins de 2% de privilégiés
(clergé et noblesse).
La première génération des Lumières est morte : Voltaire et Rousseau en 1778, d’Alembert en 1783.
Condorcet prend le relais et affirme progressivement l’individualisation et la laïcisation de la société.
Comment dans ce contexte la monarchie absolue serait-elle immuable ? Louis XVI, arrière petit-fils
de Louis XIV, est marié à Marie-Antoinette depuis 1770 et fête ses 29 ans en 1783. Cette date est
importante car elle scelle la fin de la guerre en Amérique. Elle aurait coûté au royaume de France,
2 milliards de livres. Les 600 millions de livres de recette de l’année 1783 partent directement pour
le remboursement de la dette. Pour le peuple les temps sont difficiles. Les prix ont augmenté de plus
de 60% entre 1771 et 1789. La population est écrasée d’impôts et la banqueroute menace.
Pour un Normand du Pays d’Auge né en 1774, la ville de Rouen est bien lointaine, alors que dire
de Paris et de l’Amérique ! L’espace connu s’arrête à celui que l’on peut parcourir en une journée
de marche a-t-on coutume de dire, mais Magloire Perinne nous prouve qu’il n’est centré ni sur sa
province ni sur sa ville natale.
Voici quelques tableaux chronologiques pour se repérer dans l’histoire nationale et locale.
Extrait d’un parchemin royal qui porte en première phrase l’alliance entre le roi et l’Eglise : “Louis par la grâce de Dieu...”
(Archives du Calvados)
6
DATE
1783
ÉVÉNEMENT
NATIONAL
ÉVÉNEMENT
NORMAND
Traité de Versailles. Fin de la guerre
d’Amérique
22 février-25 mai : Assemblée des Notables
1787
8 Août : convocation des Etats généraux
Les représentants du Tiers demandent le vote par
tête et non par ordre
Publication du livre de l’Abbé Seyes :
Qu’est-ce que le Tiers - Etat ?
Les prix augmentent, débuts d’émeutes.
Janvier : Emeute à Caen lors de l’Epiphanie, les
« gâteaux des Rois » sont remplacés par des dons
de blé. La foule pille les boulangeries.
17 juin : Les représentants du Tiers se proclament Assemblée Nationale.
20 juin : Serment du Jeu de Paume.
14 juillet : Prise de la Bastille.
20 juillet : Début de la Grande Peur.
4 août : Abolition des privilèges.
26 août : Déclaration des Droits de
l’Homme et du Citoyen.
5-6 octobre : Marche sur Versailles. Le roi
est ramené à Paris.
2 novembre : Nationalisation des biens du
clergé.
Novembre - décembre : Création des assignats. Lois sur la création des départements.
Juillet : Le comte de Vassy est assailli dans son château de Falaise. Il renonce à ses droits féodaux. Le
climat se détériore. La « grande Peur » née dans la
Sarthe se propage entre Seine et Dives et atteint
Lisieux à la fin du mois.
La prise de la Bastille ne donne pas de grandes réactions sauf à Caen et Rouen.
19 juin : Abolition de la noblesse.
12 juillet : Vote de la Constitution civile du
clergé (CCC).
27 novembre : un serment est imposé au
clergé pour respecter la CCC.
Janvier -février : Elections de nouvelles municipalités.
Juin- juillet : Election de conseil de département et
de district.
20 juin : Fuite du roi.
3 septembre : La Constitution est achevée.
25 mai : L’Université de Caen condamne la CCC.
1788
1789
1790
12 août : Massacre du vicomte de Belzunce à Caen.
La peur d’un complot aristocratique se propage.
1791
janvier à juin : Troubles de subsistance.
1792
20 avril : Déclaration de guerre à l’Autriche.
10 août : Prise des Tuileries et chute de la
royauté.
21 septembre : An I de la République.
Première séance de la Convention.
Novembre : Début du procès du roi.
L’Assemblée vote l’autorisation du divorce.
7
Expéditions punitives contre des catholiques.
Massacre de prêtres qui n’ont pas prêté serment
(réfractaires).
21 janvier : Exécution de Louis XVI.
er
1793
1794
1 février : Première coalition de
pays européens contre la France.
Mars : Début de la révolte de Vendée.
13 juillet : Assassinat de Marat.
17 juillet : Abolition complète des
droits féodaux.
Fin août : Levée de volontaires en
masse, la France est assiégée.
4-5 septembre : La Terreur se met en
place.
5 octobre : An II de la République.
16 octobre : Exécution de MarieAntoinette.
4 décembre : Loi concernant la centralité
du gouvernement révolutionnaire.
Décembre : Toulon est repris par
Bonaparte.
4 février : Abolition de l’esclavage.
27 juillet : Robespierre exécuté, fin
de la Terreur.
Décembre : An III de la République
L’armée révolutionnaire rentre dans
les Provinces-Unies.
11-12 janvier : Menaces envoyées à
la Convention par le Conseil général
du Calvados.
30 mai : Les autorités du Calvados
envisagent de créer une force armée
départementale.
Début juillet : Charlotte Corday, originaire de l’Orne part pour Paris
dans l’intention d’assassiner Marat.
Elle s’arrête à Lisieux le 9 juillet.
Janvier -février : Envoi de détachements de l’armée révolutionnaire
dans les départements normands.
Mars : Les églises du Calvados sont
fermées.
Juin : Les Chouans se battent dans le
bocage.
Mars : Emeutes populaires à Caen.
1795
Janvier -février : Rétablissement de
la liberté des cultes privés.
Mai- juin : « Terreur Blanche ».
5 octobre : Insurrection royaliste
contre la Convention est un échec.
An IV de la République.
27 octobre : Début du Directoire.
1796
Grave crise économique et financière :
les assignats sont supprimés.
Avril : Campagne d’Italie par
Bonaparte.
Novembre : Proclamation royaliste
distribuée à Caen.
1797
Avril : Majorité royaliste aux élections.
17 octobre : Traité de paix de Campo
Formio.
Mars : Le Havre bombardé par les
navires anglais. Nourriture importée
très rare.
Juillet : Débarquement de
Bonaparte en Egypte.
Mars : 42 députés représentent la
Normandie.
Octobre : An VII de la République.
Première Exposition Nationale de
l’Industrie.
Mai à septembre : regain de la
Chouannerie.
Septembre : Le chef Chouan
(Mandat) est pris et fusillé à Caen.
19 Brumaire An VIII (9 Novembre) :
Coup d’état du général Bonaparte, le
Directoire est renversé.
18 Novembre : Le théâtre de Caen a
été fermé par la municipalité pour
avoir laissé chanter une chanson
contre le parti jacobiniste qui disait
« Vive Bonaparte » !
1798
1799
8
Mai à décembre : Combats entre
Chouans.
Vifs combats contre les Chouans
dans tout le département.
Création de la Banque de France.
La fonction de Préfet est instituée.
1800
5 janvier : Une proclamation donne la
liberté des cultes et une amnistie générale
aux départements de l’Ouest pour tout
ceux qui ont pris les armes contre la
République.
31 décembre : À Caen, des receveurs
sont placés aux anciennes portes de la
ville pour faire payer des marchandises
comme avant 1789.
1801
1802
Le Concordat signé par Bonaparte et
Pie VII renégocie les relations entre
l’Eglise catholique et le pape : la
Constitution civile du Clergé est abrogée. Ce régime dit « concordataire »
durera jusqu’en 1905.
7 juin : révolte à la Halle aux grains
(Caen). Le prix du blé et de l’orge a
augmenté de 10 Francs par sac.
Octobre : Le Préfet du Calvados,
Dugua, est envoyé « dans les îles contre
les Nègres commandés par T. Louverture
qui s’est déclaré leur souverain. »
Mai : Enseignement secondaire
organisé avec la création des lycées
chargés de former la future élite de
la nation.
Mise en place de la Légion d’honneur et rétablissement de l’esclavage.
Février : Les habitants du département doivent s’habituer aux nouvelles
mesures, le « pied », la « toise »,
la « perche » disparaissent.
An X. Paix d’Amiens avec le
Royaume-Uni.
Le Franc Germinal est créé.
1803
An XI. rupture de la paix avec le
Royaume-Uni.
14 juillet : La fête de la « Fédération
Nationale » a été pour la première
fois fêtée avec moins d’éclat.
6 février : Les conscrits de Caen de
l’An IX et X on été tirés au sort et
partent rejoindre le régiment basé à
Calais.
Octobre : Combats entre bateaux
français et anglais à Salenelles.
Promulgation du Code civil.
1804
1805
18 mai : Proclamation de l’Empire.
2 décembre : Bonaparte est sacré
empereur sous le nom de Napoléon 1er.
6 décembre : Le calendrier républicain est aboli dans le département.
Mars : Napoléon prend également
le titre de roi d’Italie.
Janvier : Un décret ordonne la levée
de 60 000 hommes sur les conscrits
de l’an XIV. La nouvelle est fort mal
reçue dans la population.
Juillet : Le maire ordonne le retour
aux anciens noms des rues de Caen
d’avant 1789 et fait abattre les « arbres
de la liberté ». Peu de contestations
chez les habitants.
1er octobre : le lycée de Caen ouvre
avec très peu d’élèves.
Octobre : Défaite de la flotte francoespagnole à Trafalgar.
2 décembre : Victoire française à
Austerlitz.
1806
Avril : Publication du Catéchisme
impérial.
Mai : Mise en place par les Anglais
d’un blocus allant de Brest à l’Elbe.
Des croix et calvaires sont réinstallés
aux carrefours comme avant 1789.
Ce rétablissement est vivement
contesté : des tensions apparaissent.
Octobre : Napoléon entre à Berlin.
Novembre : Napoléon décrète le
blocus continental.
15 mai : Grande exposition (Caen)
pour présenter les produits agricoles
et industriels du Calvados.
9
Février et Juin : Victoires napoléoniennes
à Eylau et à Friedland.
1807
1808
1809
Septembre : Création de la cour des
comptes.
Mars : Création de la noblesse impériale.
2 mai : Soulèvement de Madrid contre
la présence française.
Beaucoup de travaux dans les villes,
réverbères, plantations d’arbres, restaurations d’églises et destruction des murs de
la ville de Caen.
Juillet : Victoire
Wagram.
Ouverture de la Bibliothèque publique à
Caen. Levée d’hommes imposée (décret)
par tirage au sort. Vive contestation dans
la population.
3 décembre : grande fête à Caen pour
célébrer l’anniversaire du couronnement
de l’empereur.
napoléonienne
à
Décembre : le divorce de Napoléon et
Joséphine est prononcé.
Avril : Mariage de Napoléon et de
Marie-Louise.
1810
Juillet : Réunion de la Hollande à la
France.
1813
1814
1815
10 avril : le Préfet C-Ambroise Caffarelli
quitte la préfecture pour celle de Troyes. Il
est remplacé par Méchin.
4 décembre : Suite au décret impérial
toute la marchandise anglaise introduite
en France est brûlée. Les marchands normands ont tout perdu.
Etendue maximale du Grand Empire.
Mai - juin : Napoléon est en visite officielle dans le Calvados.
Septembre : Napoléon entre à Moscou.
Octobre - Décembre : Bataille de la
Berezina, Napoléon quitte l’armée en
retraite.
Mars : Révolte à la halle de Caen pour la
cherté des grains. Le pain manque.
Juin : Période de disette. Tailleurs réquisitionnés pour les habits des soldats.
Après la défaite de Leipzig, l’Empire
décline.
Emprisonnements de nombreuses personnes suspectées de complot contre le gouvernement.
26 janvier- 30 mars : Campagne de
France qui s’achève par la capitulation de
Paris occupée par les armées européennes
alliées contre Napoléon.
Avril : Napoléon abdique et doit s’exiler
à l’île d’Elbe. Le frère du roi Louis XVI
prend le pouvoir sous le nom de Louis
XVIII et « octroie » aux Français une
Charte constitutionnelle.
Le préfet Méchin est destitué et peu
regretté. Janvier : 300 conscrits partent
de Vire mais à Lisieux il n’en reste que 37 !
(désertions)
9 avril : La cocarde blanche est hissée.
Mai : Des prisonniers de guerre de toutes
les nations traversent le département pour
atteindre Cherbourg et rentrer chez eux.
Des Français reviennent aussi. Juin :
9000 Russes passent par Caen.
Mars -Juin : Période des Cent – Jours où
l’empereur revient en France et exerce un
pouvoir moins autoritaire. Louis XVIII doit
s’exiler. 18 juin : Défaite française à
Waterloo. 22 juin: Abdication définitive
de l’empereur. La France est occupée par
les armées alliées de la coalition.
8 juillet : Retour de Louis XVIII, c’est la
seconde Restauration.
Eté : Terreur Blanche.
Mars : À l’annonce des évènements parisiens, le drapeau tricolore est remis à
l’Hôtel de Ville. Avril : Affichage de proclamations royalistes à Caen. Combats
violents. Août : 2500 Prussiens se répartissent entre Caen et Lisieux. Octobre :
Départ progressifs des derniers soldats
étrangers. 1er décembre : Traité de paix
entre la France et les Alliés est affiché
partout dans les villes.
1811
1812
27 janvier : 60 navires anglais ont été vus
en face de l’embouchure de l’Orne et de
la Seine, la population craint un débarquement sur les côtes.
14 août : Fête de l’empereur. Procession,
Te Deum, illuminations.
Octobre : Les arrestations se multiplient :
les détenus sont envoyés à Paris et à Caen.
10
La fin de l’Ancien Régime
La famille
- Son milieu social :
« Je suis né à Lisieux (Calvados) le 27 Octobre 1774, de parents sans fortune, mais riches d’honneur
et de vertu : mon Père était laineux apprêteur de froc, espèce de molleton dont il existe de nombreuses fabriques dans le pays. »
Tout au long de son récit, Perinne n’hésite pas à faire référence à ses parents. Cependant, la description de son milieu social et le travail de son père, n’apparaissent qu’à de rares occasions.
- Que signifie pour l’auteur « sans fortune ». Que veut-il démontrer ?
- L’expression « riches d’honneur et de vertu » insiste sur quelle forme de richesses ?
- Dès la première phrase de son récit, quelle impression l’auteur veut-il donner ?
En évoquant le milieu professionnel de son père, il donne une indication sur ce type d’industries. En
effet le Calvados a connu un grand nombre de personnes employées dans l’industrie textile et la
confection. Son père n’est donc pas agriculteur comme la majorité des Français de l’époque.
Registre de baptême de la paroisse St Jacques de Lisieux, où est notifiée la naissance de J-Baptiste Magloire Perinne par le prêtre de la
paroisse.
11
«Mon père était, dans toute la force de l’expression, un parfait honnête homme ; aucun acte, ou
authentique ou privé, n’eût été capable d’inspirer plus de confiance que sa parole ; très souvent, en
sa qualité de syndic de la communauté des apprêteurs, il était choisi pour arbitre »
- Relevez les mots qui insistent sur les qualités que Perinne donne de son père.
- Chercher dans le glossaire à la fin de ce cahier la définition du mot « syndic ».
- Quelle est la place que son père occupait dans la ville de Lisieux de l’époque ?
- En comparant avec la citation « de parents sans fortune » est-ce vraiment le reflet de la réelle situation de son père ?
Ancienne carte postale de Lisieux, avant les destructions de la Seconde Guerre mondiale.
Les rues étroites et les maisons à pans de bois devaient être une réalité très concrète pour Perinne.
(Archives du Calvados)
Page ci-contre, Lisieux, carte postale (Archives du Calvados). Perinne évoque souvent un de ses logements au bord de la Touques.
ème
Au second plan, l’ église Saint-Désir construite au XVII
12
siècle.
-Transmissions de valeurs morales et religieuses :
« Dans mon enfance j’ai eu sous les yeux de bien bons exemples de religion, d’honneur et de travail ;
mon père et ma mère remplissaient avec une grande exactitude leurs devoirs religieux et nous habituèrent à l’accomplissement de ce même devoir par des actes d’une piété solide et exempte de tout
fanatisme, ce qui n’excluait pas de la famille tout plaisir permis et une gaieté douce et franche. »
- Que signifie « devoirs religieux » et « exempt de tout fanatisme » ?
« Chaque soir la famille était réunie, au sein de laquelle la domestique était appelée, faisait la
prière en commun, et avant de nous séparer, nous recevions un baiser de nos parents ; c’était pour
nous une bénédiction paternelle »
- La présence de la « domestique » donne encore un autre renseignement sur son milieu social.
Lequel ?
- Pourquoi insiste-t-il sur la pratique religieuse ? Pour vous aider, regardez le document page 6.
Quelle était la place de l’Église avant 1789 ?
Etre enfant en 1788
- L’enfance et l’éducation :
« Infans » en latin, signifie celui qui ne parle pas, dont la parole n’est pas prise en compte, car il
est considéré comme mineur aux yeux de la loi.
Les références de Magloire Perrine à son enfance ou à celle de ses enfants sont peu nombreuses
mais instructives sur la vision que l’auteur porte à cette période de la vie.
« Nous avons été beaucoup d’enfants : quatre seulement ont survécu »
- Que signifie pour l’auteur « beaucoup » ? Cette expression révèle quel sentiment par rapport à
l’enfance ?
- Quelles sont selon vous les causes de la mortalité infantile au XVIIIème siècle ?
13
«Avec l’âge des enfants arrivait le besoin d’instruction : ici les frères des Ecoles chrétiennes pour les
garçons ; là les sœurs de la Providence pour les filles. »
- L’école est-elle obligatoire à cette époque ? Est-elle gratuite ?
- Qui sont les enseignants dans les écoles ?
- Si Perinne peut aller à l’école cela nous donne un autre argument sur son milieu social. Expliquez.
- L’entrée dans la vie active
« L’existence de la nombreuse famille reposait sur le travail de nos bons parents : dès cinq heures
du matin, jusqu’à sept heures du soir, tout le monde était occupé ; à notre retour
[ de l’école ]
et après avoir satisfait au devoir des classes, nous avions à payer notre tribut à l’atelier en raison de
nos forces respectives : des encouragements nous étaient assurés et nous étions heureux lorsque
nous avions acquis la certitude que nos faibles soins avaient allégés ceux de nos bons parents ».
- « nombreuse famille » : énumérez les personnes qui la composent. N’oubliez pas de relire les
paragraphes précédents.
- Quelle est la journée d’un enfant selon l’auteur ? Qu’attend-on de lui ?
« Dans mon jeune âge j’étais d’une santé fort délicate. J’avais cinq ans lorsqu’une grave indisposition vint me priver de l’entier usage du pied droit. […] tous les médecins consultés ne purent éclairer mes parents qui, de père en fils, n’avaient connu dans la famille qu’une succession de belles santés qu’aucun vice héréditaire n’avait troublées. Toujours est-il qu’à cette époque on pensa qu’un travail mécanique ne pouvait me convenir et on me destina au travail de bureaux pour lequel des
années d’humanités m’auraient été bien nécessaires ; mais on n’y songea pas et puis on ne portait
point la prétention jusqu’à faire de moi un ministre d’Etat ».
- Quel facteur détermine son orientation professionnelle ?
- Comment comprenez-vous le mot « indisposition » ?
- « tous les médecins consultés » : était-ce courant à l’époque de pouvoir se payer plusieurs consultations ?
- Relevez la phrase qui montre que l’enfant n’a pas le choix de son avenir.
« En 1788, je quittai les bons frères qu’à Lisieux, nous appelions les frères Saint Yon, nom de leur
fondateur. Vers la fin de mai 1788, j’entrai dans les bureaux de la ferme générale. Un M. Collignon,
receveur principal, m’accueillit dans son bureau où j’étais chargé de l’expédition des congés. J’avais
à peine 14 ans. Mais M. Collignon était un bon ami de mon père et il lui avait promis de m’instruire
et de me protéger. […] je boitais légèrement car je n’ai été réellement fort estropié qu’à 16 ans, au
moment de la croissance, ma santé alors sans être robuste était passable.”
- Recherchez les mots « ferme » et « receveur » dans le glossaire.
- Comment l’auteur rentre-t-il dans la vie active ?
- Comment s’appelle ce procédé pour obtenir un travail ?
- Quel âge a-t-il alors ? Est-ce surprenant ?
- L’expression « Expédition des congés » signifie que Perinne vérifiait que toutes les marchandises et
autres taxes étaient payées avant d’être transportées : quel type de travail occupe-t-il en réalité ?
14
Extrait d’un plan de Lisieux de 1785. Le quartier ici reproduit (paroisse St-Jacques) est celui de Perinne.
(Archives du Calvados)
La monarchie et la vie politique
« En ces premières années de ma vie, des événements politiques agirent puissamment sur ma petite
intelligence, avant même que je fusse en âge d’apprécier les causes qui les avaient fait naître ; mais
je voyais tout le monde y prendre part, et mon père y prendre un grand intérêt, et cela me suffisait
pour y comprendre quelque chose ».
- Quels « événements politiques » vous attendez-vous à lire ? (regardez la chronologie)
- Expliquez la phrase en italique.
- Naissance du Dauphin
« A la naissance du Dauphin : j’avais 11 ans. […] il y eut un Te deum chanté à la cathédrale. Sur le
désir que j’exprimai à mes parents, ils me confièrent aux soins d’un officier de notre basilique qui me
plaça de manière à ne me laisser rien échapper de la cérémonie dont j’allais être le religieux témoin.
[…] Monseigneur Caritat de Condorcet, notre évêque, déploya toute la solennité pour le culte […]
orgue et chœurs, […] les quatorze cloches de la cathédrale remplissaient l’air de leurs imposantes
volées […] les nombreux dignitaires religieux […] la troupe des enfants de chœur […] tant de cierges qui illuminaient le sanctuaire […] tout cela m’impressionna si vivement que jamais depuis je n’ai
assisté à un Te deum sans donner des larmes… »
15
- Attendiez-vous la naissance du Dauphin (fils du roi) comme événement politique ? Pourquoi ?
- Cherchez le mot « Te Deum » dans le glossaire.
- En quoi, pour l’auteur, cet événement est exceptionnel et reste ainsi gravé dans sa mémoire cinquante ans après ?
- Le passage de Louis XVI à Lisieux
«Louis XVI se rendit à Cherbourg pour assister à l’ouverture du port ; son retour eut lieu par Lisieux :
la ville entière était ivre de bonheur ; tout le luxe d’une ville commerçante fut déployé au décor des
maisons devant lesquelles le cortège devait passer et à l’embellissement des arc de triomphe élevés
en l’honneur du roi : partout des draperies brodées, partout les bons Lexoviens en liesse. Des milliers de cocardes blanches et vertes avaient été distribuées aux habitants qui en avaient orné leurs
tentures et décoré leurs chapeaux. Ma bonne mère avait fait partie de la réunion des dames que
M. le Maire avait formée pour la confection des cocardes. »
- Quelle image le maire de Lisieux veut-il donner de sa ville lors de la venue de Louis XVI ?
- Cherchez « arc de triomphe » dans le glossaire.
- C’est une des rares fois que l’auteur évoque l’activité de sa mère : quelle place celle-ci occupaitelle dans la société lexovienne ?
Plan du port de cherbourg. Etat des lieux avant travaux. Registre de la Généralité de Caen. 27 Août 1774.
(Archives du Calvados).
16
« Nous croyions fermement que Sa Majesté s’arrêterait là. Jamais, suivant nous, Louis XVI avait pu
voir une chose aussi merveilleuse. […] De Lisieux, le Roi se rendit à Honfleur, de Honfleur à Rouen
et de là à Paris. Sept ans après, le petit fils de Saint-Louis montait au Ciel ! ».
- Qui est le petit fils de Saint-Louis ?
- La remarque de l’auteur (phrase en italique) montre qu’en peu de temps, la même personne a été
adulée puis exécutée. Cette phrase traduit quel sentiment chez Perinne ?
- Pourquoi ne donne-t-il pas le nom exact de la personne, ni la date et la cause de sa mort ?
- L’assemblée des Notables et Etats généraux
« L’année 1787 vit l’assemblée des Notables. La Gazette que l’on communiquait à mon père, et qu’il
lisait en petit comité avec quelques parents, la Gazette, dis-je, entretenait le feu sacré. Elle donnait
lieu à des conversations empreintes de l’enthousiasme général parce que de cette assemblée des
Notables, répétait-on de toutes parts, devait résulter de l’accomplissement du vœu d’Henri IV, et que
les dimanches, chaque Français aurait sa poule au pot. Je voyais tout le monde content, tout le
monde heureux en ces moments d’espérance ; pourquoi donc ne l’aurais-je pas été ? »
- Cherchez le mot « assemblée des notables et gazette » dans le glossaire.
Extrait du “Journal des Etats
Généraux” daté de 1791
et qui retrace toutes
les dicussions et écrits officiels
depuis le 27 Avril 1789
(Archives du Calvados).
« En 1788 eut lieu l’assemblé des Etats généraux, toujours le même enthousiasme et de plus
belle espérance encore. J’espérais parce que tout
le monde espérait ; mais qu’espérai-je donc ?
Je n’en sais rien. »
Louis XVI convoque 2 réunions à Versailles, la
première au printemps 1787 et la seconde à l’automne 1788. La levée de nouveaux impôts, décidée à cette occasion, n’est pas suivie par le
Parlement qui demande la réunion des Etats généraux et provoque ainsi une réflexion sur la banqueroute de l’Etat et le rôle des Parlements régionaux. Ceci est considéré comme une des origines
de la Révolution française.
- Reprenez la chronologie : la convocation des
Etats généraux provoque quelles sortes d’espérances ?
- Comment la nouvelle a-t-elle été accueillie
(citez le texte) ?
- Comment l’auteur apprend-t-il ce genre de fait
politique ? Est-ce courant à l’époque de pouvoir
s’informer dans la presse ?
- Aidez-vous pour répondre de cet extrait d’un
Cahier de doléances à la page suivante.
17
Extrait d’une ordonnance de l’Intendant Orceau de
Fontette qui donne l’ordre de corvées.
(Archives du Calvados)
Extrait d’un cahier de doléances de 1789 du baillage de Falaise.
Articles I à IV (Archives du Calvados)
18
Justice et société
- l’exemple d’une exécution capitale
« Dans l’automne 1788, mon père m’emmena avec lui chez [un de] ses marchands à Rouen […]
pendant notre court séjour [une] chose fixa mon attention et le souvenir m’en est resté. Un malheureux homme qui avait été rompu vif et qui, sur la demande des élèves de l’Ecole de médecine, n’avait
point reçu les coups de poitrine ou coups de grâce, leur avait été abandonné comme sujet d’étude.
Il avait été amputé des quatre membres. Ce pauvre homme avait ses quatre moignons garnis de telle
sorte que l’on voyait chaque jour trottant sur la place du parvis, ramassant les aumônes que chacun
lui jetait dans une jatte. Il s’était habitué aux exercices usuels que réclamait sa triste position. Ce
torse vivant avait une forte voix et avait dû être un fort bel homme.”
- Quelle première impression avez-vous en lisant cette description ? Quelle est celle de l’auteur
(relevez les termes du texte)?
- Est-ce la situation de l’homme ou la justice d’avant 1789 qui est critiquée ?
- L’homme condamné que l’auteur a vu n’a pas été achevé : pour quelles raisons ?
- La peine de mort devient la même pour tous pendant la Révolution : était-ce considéré alors
comme un progrès ? Pourquoi ?
- La peine de mort est-elle abolie aujourd’hui en France ? Donnez la date.
La justice d’avant la Révolution était vivement
critiquée par le peuple : la sévérité des peines,
non proportionnelles aux délits, la lenteur des
procédures et l’incroyable complexité des juridictions font également l’objet de critiques de
la part des philosophes tels Montesquieu et
Voltaire.
La torture (on disait aussi « question ») régulièrement employée pour arracher des aveux,
l’impossibilité pour les plus pauvres de se
défendre et l’impunité des classes privilégiées
provoquent des sentiments de grandes injustices : même devant la mort les hommes ne sont
pas égaux, le noble est décapité, le plus pauvre
est rompu vif (membres brisés) ou pendu
jusqu’à ce que mort s’en suive.
Le riche a un minimum de souffrances, le
moins fortuné est torturé et on le laisse agoniser
avant d’être achevé. Ces exécutions étaient
publiques. Elles étaient considérées comme un
véritable spectacle.
Portrait de Montesquieu, gravure de la seconde moitié du
XVIIIème siècle par Augustin de Saint-Aubin.
(Archives du Calvados)
19
Voici une affiche du Parlement de Rouen (le Calvados actuel en dépendait). L’homme que Perinne a
vu après son supplice a sans doute fait l’objet d’une affiche comme celle-ci.
- Remarquez tout le déroulement du supplice.
- Quels sont les motifs d’accusation ?
Arrêt de la cour du Parlement de Rouen annonçant l’exécution de Catherine Tabary en 1761
(Archives du Calvados)
20
Les événements politiques étrangers
- la fin de la guerre d’Amérique en 1783
« Les joies furent grandes lors de la paix des Etats-Unis en 1783. Ce qui me frappa le plus en cette
occasion, ce fut de voir la milice bourgeoise sous les armes : les tambours et les fifres (joueurs de
flûtes) en grande tenue Louis XV, avec habit bleu galonné aux armes de la ville ; les maires et échevins décorés et les officiers [étaient] revêtus de leurs insignes ; enfin ce cortège accompagné d’hommes d’armes, était accompagné d’un Te deum, d’un feu d’artifice […] et d’une fête publique. On doit
penser qu’avec mes neuf ans, je dus prendre plaisir à tous ces détails qui, ce soir, sont fidèlement
conservés dans ma mémoire. »
- Retrouvez les mots soulignés dans le glossaire.
- Pourquoi le royaume de France permet-il de si grandes fêtes ?
Pourquoi la guerre en Amérique ?
Le 19 avril 1775, un détachement anglais tombe dans une embuscade à Lexington, au Massachusetts, en allant détruire
un dépôt d'armes clandestin. 200 soldats trouvent la mort dans l'échauffourée.
Ce fait d'armes marque le début de la guerre d'Indépendance qui conduira à la naissance des États-Unis d'Amérique.
L'insurrection et la déclaration d'indépendance ont un très grand retentissement dans la noblesse libérale d'Europe.
Contre l'avis du jeune roi Louis XVI, le marquis de La Fayette (19 ans) arme une frégate à ses frais et rejoint les Insurgés.
D'autres officiers se joignent au mouvement comme le commandant Pierre L'Enfant, qui jettera les plans de la future
capitale, le général Louis Duportail, mais aussi le Prussien Von Steuben, le Polonais Kosciusko ou l'Allemand de Kalb.
Leur expérience militaire sera précieuse aux insurgés.
L'écrivain et espion Beaumarchais organise des envois d'armes à destination des insurgés désireux de favoriser tout ce
qui pourrait affaiblir l'ennemie héréditaire de la France, l'Angleterre.
L'indépendance des Etats-Unis est officiellement reconnue à Versailles le 3 septembre 1783. Le 3 septembre 1783, un
traité signé à Versailles consacre l'indépendance des Treize Colonies anglaises d'Amérique du Nord.
Les jeunes États-Unis constituent à ce moment de leur histoire un ensemble composite de territoires presque vides et
de villes d'à peine quelques milliers d'habitants sans guère de voies de communication entre elles. Il faut une bonne
semaine de voyage entre Boston et New York.
Au total, on compte 3,3 millions de citoyens d'origine européenne, 700.000 esclaves d'origine africaine et quelques
milliers d'Indiens en voie de refoulement ou d'extermination.
Par le traité de Versailles, la France, rivale de l'Angleterre, prend sa revanche sur le traité de Paris qui lui avait enlevé
vingt ans plus tôt le Canada, la Louisiane et bien d'autres colonies.
Le jeune roi Louis XVI savoure le succès de l'insurrection américaine et de ses propres concitoyens.
Mais cette aide a coûté très cher et le roi de France commence à se demander comment il peut assainir ses finances.
A peine cinq ans plus tard, il est obligé de convoquer les Etats généraux pour étudier une réforme des impôts.
L'Indépendance américaine conduit indirectement à la Révolution française !
21
Révolution et Terreur : 1789-1793
La première année de la Révolution
- la mort du Colonel de Belzunce :
Les troubles révolutionnaires constituent sans doute une suite d’événements terribles et impressionnants pour un jeune homme comme Perinne. Il est dans la vie active depuis peu (juin 1788), commis
dans les bureaux de la ferme générale. Il n’a que 14 ans. Lorsqu’il écrit ce document vers 1845, des
faits très précis doivent lui revenir en mémoire ; mais il ne les décrit qu’en une dizaine de lignes.
Voici en intégralité son paragraphe concernant les années 1789-1790 :
« La Révolution éclata : les commis des Fermes et de la Régie furent impitoyablement chassés aux
cris de « A bas les rats de cave ». Je n’étais qu’une petite et bien innocente souris qu’on n’aperçut
pas et qu’on oublia. C’était vers fin 1789. Le canon de la Bastille avait grondé et la France entière
s’était levée pour recevoir la cocarde tricolore. Beaucoup de cocardes étaient montées sur un bouton recouvert d’un satin blanc sur lequel étaient écrits ces mots : « La Nation, la Loi, le Roi. » Je
me réfugiai dans le comptoir de l’un de nos marchands de frocs dont je tenais les écritures. J’étais
dans son magasin à la foire de Guibray, en août 1790, lorsqu’on nous annonça le massacre, à Caen,
de M. de Belzunce, colonel du régiment de Bourbon. »
- Que reproche-t-on à votre avis aux employés de la ferme et de la régie ?
- En vous aidant de la chronologie, repérez les événements dont Perinne ne parle pas. Quel est celui
qui l’a le plus marqué ? Pourquoi ? « Je me réfugiai » écrit-il, il se sentait donc en danger : comment évite-t-il d’être pris par les révolutionnaires ? (La Foire de Guibray se trouve à 30 km au Sud de
Caen). Ces quelques lignes sur le début de la Révolution sont très rapides. Comment pouvez-vous l’expliquer ?
La mort du Vicomte de Belzunce a
été présentée par les Révolutionnaires
comme une volonté uniforme de
vouloir renverser les symboles
monarchiques. Dès 1790 un livre
publie les faits de l’année 1789 et
retrace la vérite. En voici un extrait.
La mort du malheureux vicomte est
la suite tragique d’une plaisanterie
qui a mal tourné avec une femme du
peuple.
Ni révolution, ni haine du représentant du roi, mais sa mort sera symbolique et il sera en fait une des rares
victimes officielles en 1789 à Caen.
22
Deux assignats. (Collection particulière) - Copyright.
Les débuts professionnels de Perinne
« J’entrai dans un des bureaux du district de Lisieux le 1er octobre 1790, et je fus attaché au Bureau
des contributions dont était chef un neveu de ma mère. »
- Reportez-vous à la partie sur l'Ancien régime et la façon dont il avait obtenu son premier emploi.
- En vous reportant à la toute première phrase de son récit (voir première partie), comment comprenez
vous maintenant la formule « je suis né de parents sans fortune » ?
« Le montant de mes appointements était, chaque mois, remis à ma mère ».
- Pourquoi ne perçoit-il pas son salaire lui-même ?
« Je me rappelle encore avec bonheur le premier assignat que je reçus pour mon traitement. C’était
un assignat de 300 livres en papier rose, au milieu duquel se trouvait le portrait de Louis XVI gravé
au trait. »
- Chercher la définition du mot souligné dans le glossaire.
- Quels sont les changements financiers ?
- Regardez attentivement la reproduction des deux assignats ci-dessus. Remarquez les deux dates et
décrivez avec soin les différentes gravures. Ces documents d’époque correpondent-ils à la description
de Perinne ? Tentez d’expliquer pourquoi.
23
Carte réalisée suite à la création du département du Calvados en 1790. (Archives du Calvados)
Remarquez les 2 échelles
24
Sa vision de la politique internationale
« Vers la fin de 1792, ou dans le premiers jours de 1793, deux représentants du peuple arrivèrent
dans le Calvados : un des deux exerça ses fonctions dans le district de Lisieux et de Pont-l’évêque.
Il demanda un employé pour remplir près de lui les fonctions de secrétaire adjoint et je lui fus désigné. Je restai environ trois mois attaché à sa mission. »
- Regardez la chronologie des événements nationaux et normands en 1792 et 1793 : sous quel régime
politique la France se trouve-t-elle ?
- Grâce au vocabulaire utilisé par l’auteur (en italique) donnez les réformes qui ont été faites en moins
de quatre ans.
« Aimant le plaisir et la bonne chère, il (l'un des représentants du peuple) n’était nullement
méchant. Il n’en prenait l’air que lorsque les agents des Comités de Salut Public, venaient le visiter
lors de leur passage par Lisieux. En leur présence il parlait haut […] il m’a laissé rendre quelques services à plusieurs personnes inoffensives qui étaient suspectées d’avoir été en cachette à la messe ou
d’avoir parlé au Roi et d’autres peccadilles qui lui faisaient hausser les épaules. Sa mission fut très
douce et le Calvados, à ma connaissance, n’eut pas à gémir sur des actes de leur fait. »
-
Quelle était à votre avis la mission du représentant du peuple ?
Quels sont les motifs d’arrestations possibles ? Qu’en pensez-vous ?
Peut-on deviner les convictions politiques de Perinne ?
La dernière phrase de Perinne est à prendre avec plus de nuances, pourquoi ?
« Ce temps de 1793, si fatal et si rempli d’horreur pour tant de familles, s’écoulait pour moi dans
la société de jeunes gens et de jeunes personnes de mon âge tous disposés au plaisir. […] nous ne
lisions point les journaux ; les fêtes civiques, les beaux hymnes qui s’y chantaient et l’étourdissement
des circonstances chassaient de nos réunions toute idée contraire à nos jeux. [… ] Nous ne songions après le travail, qu’au plaisir qui nous attendait dans nos innocentes réunions »
- A quels événements l’auteur peut-il faire référence dans sa première phrase ?
- Sachant qu’il est né en 1774, l’auteur a 19 ans en 1793. Etes-vous surpris par ses sentiments qu’il
retrace ? Pourquoi ?
Regardez la chronologie du début du livret côté “événements normands”. Perinne ne fait aucune allusion ni commentaire sur un personnage né en Normandie qui s’est rendu célèbre en assassinant un
homme politique de l’époque. Avez-vous deviné ? Si non, tournez la page...
25
Ces deux cartes postales font référence
à Charlotte Corday. (Archives du Calvados)
Son portrait et l’auberge où elle serait passée à
Lisieux en 1793.
26
La Révolution et l’Europe
« Mon frère aîné partit pour l’armée (1792) et à son retour où il avait été dangereusement blessé
(fin 1793) il vint passer à Pont-l’Evêque quelques mois avec moi. Là il eut l’occasion de mériter
l’estime de tous les habitants ».
- Reprenez dans la chronologie les références à la politique internationale. Dans quelle situation se
trouve la France par rapport à ses voisins européens ?
- Peut-on deviner si son frère aîné s’était porté volontaire pour partir à la guerre ou s’il avait été
enrôlé de force ?
« Dans un de mes voyages au Havre [ Perinne y passe des vacances et y fréquente les salles de spectacle] j’y rencontrai un jeune officier de marine que j’avais connu chez ses parents à Pont- l’Evêque ;
il était embarqué sur une frégate dont il me fit visiter toutes les parties. Il me présenta à son capitaine qui voulait me donner la place d’agent comptable récemment vacante à son bord. Elle prenait
la mer deux jours après […] cet emploi et la nouveauté de la position me convenaient mais je voulais avoir le consentement de mes parents. Je refusai donc et laissai là la Marine. La frégate partit et
trois jours après elle fut prise par les Anglais ! Les journaux qui voyaient partout des conspirations,
prétendirent qu’elle était vendue à l’ennemi avant son départ du Havre. »
-
Pourquoi l’auteur veut-il une approbation paternelle ?
Quel était l’état d’esprit des Révolutionnaires en 1793 ?
Quels sont les ennemis de la Révolution (dans le pays et à l’extérieur) ?
Quelle semble être la position de l’auteur dans sa dernière phrase ?
“Journal des
Amis”publié pendant la
Révolution. Remarquez le
sous-titre.
Retouvez la date exacte
et l’auteur.
Pouvez-vous deviner
quels sont ses lecteurs ?
27
Frégate anglaise de la fin du XVIII ème siècle. Aquarelle A. Roux
Cité par F. Dutour in “Carnet de voyage Brest-Pondichéry-Londres”, 1803-1804, p. 22,
Cahiers des Archives du Calvados n° 19, 2001.
28
Fait divers retrouvé dans
un journal
révolutionnaire
de 1792.
(Archives du Calvados)
Ennemi de l’intérieur ou
de l’extérieur ?
Article trouvé dans un journal
royaliste
de 1792.
(Archives du Calvados)
Ennemi de l’extérieur
ou de l’intérieur ?
29
La République conservatrice (1794-1799)
Le contexte général de la fin du XVIIIème siècle
« Vers le mois d’août 1795, […] mon emploi à la recette du district se trouva supprimé. Je quittai
Pont-l’Evêque avec quelque regret et je me rendis à Lisieux […] où je fus placé de suite au magasin
des vivres ».
On comprend au fil de son récit que c’est encore par relation et avec l’accord de son père que Perinne
obtient cet emploi. Il est normal qu’il revienne dans sa ville natale. Il fait sur cette période peu de
remarques mais celle-ci a attiré notre attention :
« J’étais resté vingt mois auprès de mes parents et de ma société intime d’enfance ; il fallait rompre
à nouveau [en effet un ami de son père est nommé receveur des recettes à Saint-Lô et il a besoin
d’un employé, Perinne sera donc du voyage]. Les temps avaient été durs, car dans ce temps, le grain
était rare et cher. J’avais droit à la ration de vivres et je la recevais en nature ; le munitionnaire avait
reçu l’ordre de mon chef de me la doubler. […]
Je quittai Lisieux le 12 mai 1797, lors de mon départ, les grains étaient plus abondants à la halle. »
- Remarquez dans la chronologie les événements des années 1795-97. Quelle est la situation économique de la France. Pourquoi ?
Extrait de la “Une” d’un journal de l’An IV : remarquez la concordance entre les 2 calendriers. (Archives du Calvados)
30
L'auteur part donc pour St-Lô en mai 1797. Perinne ne semble pas avoir gardé de cete période professionnelle de grands souvenirs :
« le travail qui n’était confié dans les bureaux, était, je peux bien le dire, au-dessous de mon intelligence ; c’était des opérations manuelles qu’un simple surnuméraire eut aussi bien conduites que
moi, à qui il fallait des chiffres et des situations comptables à remuer. »
- Qu'espérait donc Perinne en quittant Lisieux ? Pourquoi semble-t-il toujours amer des décennies après ?
La seule référence politique sur sa période st-loise se situe dans cette phrase :
« …Je rencontrais d’autres amis qui comme moi parcouraient la ville pour prendre part à la joie
publique : c’était le jour où l’on fêtait le traité de paix de Campoformio. »
- Reprenez la chronologie. Qui a signé ce traité de paix ? Sous quel régime politique la France se
trouve-t-elle ?
- Pourquoi le traité de paix est-il tant fêté ?
Bandeau de la Gazette des départements
de l’Ouest.
An VIII. (Archives du Calvados)
La promotion enfin espérée ne tarde pas puisque en cette fin d’année 1797 Perinne trouve à Avranches
un poste plus en rapport avec ses compétences.
« Peu de jours après mon arrivée, le receveur du District eut la complaisance de donner, exprès pour
moi, une fête de famille à laquelle furent appelés tous les fonctionnaires avec lesquels mon emploi
devait me mettre en rapport. La société était divisée : beaucoup de familles d'ancienne noblesse se
voyaient en petits comités ; les Chouans y avaient aussi quelques ramifications. La Chouannerie se
faisait encore apercevoir dans le pays. Elle y donnait çà et là quelques alertes.
Quelques combats, dans lesquels elle succombait toujours, annonçaient bien sa présence, mais elle
expirait. Les fonctionnaires et les patriotes avaient sans doute la majorité mais ils n'en abusaient pas.
Leurs rapports avec des personnes d'une opinion contraire étaient bienveillants. On se rencontrait,
on se parlait, on se rendait des services mutuels. C'est que l'autorité était dans les mains de personnes éclairées qui avaient le bon esprit de respecter ce qui était respectable et ne se servaient de leur
pouvoir que pour être utiles à tous."
- Que signifie "les familles d'ancienne noblesse" ? Quelle était leur situation depuis la Révolution ?
- Faites une recherche sur les Chouans : qui étaient-ils ? Où ont-ils été les plus actifs ?
Qu'espéraient-ils ?
- Regardez la chronologie normande : quand la chouannerie finit-elle exactement ?
- La société depuis la Révolution est divisée en plusieurs courants : reprenez ceux décrits par l'auteur.
- Quel avis porte-t-il sur la gestion du département ?
- Relisez la phrase en italique : le cas normand est-il révélateur de ce qui se passe sous la République
conservatrice ? Pourquoi ?
31
« Je retournais à Avranches (en effet il était revenu chez ses parents à Lisieux pour leur faire part de
son projet de mariage) lorsqu'un courrier venait d'y annoncer le retour du Général Bonaparte (seule
fois que son nom est prononcé) qui, à son retour d'Egypte, venait de débarquer à Fréjus. Je partageais
l'ivresse générale et chez le précepteur où j'étais descendu, il me fallut recevoir les accolades de tous
ceux qui s'y présentaient et boire avec eux à la santé du sauveur de la France. C'était un vrai délire
car depuis que le vainqueur de l'Italie avait quitté le théâtre de ses triomphes, nos armées en Italie
ne cessaient d'éprouver des revers." (...) Je partis vers la fin de septembre 1800, dernier jour de
l'An VIII républicain. (car il est appelé par le Receveur général du Calvados pour rejoindre ses bureaux
à Caen)
- Quel événement politique majeur évoque-t-il de façon indirecte ? Reprenez la chronologie.
- Remarquez l'état d'esprit dans lequel se passe la succession d'un régime politique à l'autre.
Qu'espéraient donc les Français de cette époque ?
Extrait d’un journal normand où apparaît un discours officiel de Bonaparte :
remarquez la tonalité du discours reproduit. 14 juillet 1799.
(Archives du Calvados)
32
-
La progression des élites
Pour conclure ces années de sa vie, l'auteur évoque un personnage, un certain Frémond. Il lui voue
sur plusieurs pages un mépris et une attitude très hostile pour ne pas dire haineuse ; il parle également d' un commissaire qu'il a connu en 1795 .
« Un sieur Frémond ami du receveur général et aussi parent par sa femme, fut nommé en remplacement de M. Bourbonnet à la recette d'Avranches. Ce Frémond, ancien constitutionnel, ancien
administrateur du district, l'un des plus acharnés révolutionnaires s'était dans le temps fait remarquer par un cynisme dégoûtant et ce ne fut pas sans un certain dégoût qu'on le vit prendre possession d'une place honorable."
- Cherchez dans le glossaire la définition du mot souligné.
- Quels sentiments l'auteur éprouve-t-il par rapport à ce genre de personnage ? Expliquez pourquoi ?
"Le commissaire alors du Directoire exécutif pour le département de la Manche, et depuis préfet
des Ardennes pendant l'Empire et la Restauration, se joignit à nous. "
- En parlant du commissaire, il évoque la carrière de celui-ci sous trois régimes successifs ? Que
remarquez-vous ?
- Quelle conclusion pouvait vous donner sur les élites administratives de cette période ?
Affiche de la toute fin du Directoire destinée aux
forces de police.
(Archives du Calvados)
Les “personnes susceptibles d’une surveillance particulière” sont classées sous des
signes alphabétiques.
- Qui peut on classer sous les signes L et O ?
- Que peut on conclure sur les motifs possibles d’arrestation ?
33
Le Consulat et l'Empire
L’évolution de la carrière de Perinne
Le receveur général du Calvados attend donc Jean - Baptiste Magloire Perinne dans ses bureaux de
Caen car il lui a été recommandé. Le receveur, un certain Dumont a également obtenu sa place par
clientélisme. Mais le propre prédécesseur de Dumont (M. Crespin) lui a demandé en contrepartie de
cette place prestigieuse d'accepter son petit frère comme receveur dans la ville de Falaise. Celui-ci
manifestement plus intéressé "par le jeu et les femmes" selon Perinne laisse les comptes dans un état
lamentable et il se sent intouchable. Constatant les négligences, Perinne en rend compte à Dumont
qui fait évidemment la sourde oreille. Après de nombreuses péripéties que l'auteur décrit avec minutie Dumont cède devant la visite d'inspection d'un conseiller d'Etat en mission extraordinaire dans le
Calvados et le subordonné de Falaise donne sa démission mais l'affaire remonte jusqu'à Paris1. Perinne
doit rendre des comptes devant le conseiller d'Etat qui revérifie le travail du lexovien pendant "au
moins trois heures" :
« Il me dit : “J'aurai beaucoup de plaisir à mettre cette situation sous les yeux du Premier Consul.
Votre place doit être au Ministère des Finances où vous pourrez fournir une belle carrière et mille
autres choses aimables.” Mais l'amitié qu'il portait (encore) à Dumont et la réticence de sa femme le
font céder" je perdis l'occasion si belle d'un avancement assuré ».
Cependant, il profite de cet incident pour écrire un mémoire dont le but était de "débarrasser la perception de cet honteux agiotage (spéculation) dont elle était l'objet " et l'envoie à Paris.
Le ministre lui répond, voici sa lettre :
" Paris, le 23 Pluviôse an IX, de la République Française, Une et indivisible.
Le Ministre des Finances, au Citoyen Magloire Perinne employé
à la Recette générale du Calvados
J'ai reçu, Citoyen, avec votre lettre du 10 de ce mois, le mémoire contenant le résultat de vos observations sur les moyens d'améliorer le régime de la perception des contributions directes.
J'applaudis aux vues qui ont dicté ce travail. J'e lai lu avec intérêt et je vous remercie de l'attention que vous avez eue de me le communiquer.
Je vous salue. Signé : Gaudin
- Remarquez les tournures de phrases, quels sont les héritages de la Révolution dans la formulation ?
Apprenant l'intérêt du travail de Perinne, le nouveau préfet du Calvados, Caffarelli, demande une
copie à Magloire et s'en sert dans ses rapports. L'histoire a retenu que l'organisation des perceptions
était due à un certain Caffarelli... nouvelle désillusion pour Perinne qui dans son récit essaie de rétablir la vérité.
1 Dès le départ du fonctionnaire négligent, Dumont nomme à sa place son propre petit frère, avant de perdre sa place
en 1809...
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La religion et la loi
« Les prêtres et les religieuses étaient sous la main de vampires qui les volaient avec une audace
incroyable. L’ouverture de mon cabinet qui leur fut recommandé par l’Evêché, mit fin aux dilapidations dont ces ecclésiastiques étaient les malheureuses victimes ».
- Reprenez la chronologie. Relevez toutes les références au thème religieux en France et en
Normandie. Que remarquez-vous ?
- Perinne emploie le mot « vampires » qui a une signification très forte, à qui fait-il allusion ?
« On savait à Caen, dans le temps de leur prospérité que M. Dumont avait divorcé […] et qu’il avait
épousé Melle David, juive aussi divorcée. La loi était pour eux et à cette époque, la société ne se séparait pas des gens en dissidence avec l’indivisibilité du mariage. »
- Regardez dans la chronologie côté « événement national » : à quelle date le divorce est autorisé et
quel personnage célèbre en a profité ?
- Sachant que l’interdiction de divorcer est reprise par le nouveau gouvernement en 1816, quelle
semble être la position de l’auteur sur ce thème ?
Lettre officielle du sous-préfet de l’arrondissement de Bayeux au préfet du Calvados
datée du 18 ventôse An XI (Archives du Calvados)
- Qu’est-il demandé de la part du gouvernement pour les fonctionnaires sous le Consulat ?
- Que se passe-t-il alors pour les ecclésiastiques ?
35
Lettre manuscrite de JeanBaptiste Carré prêtre de la
paroisse du Gast, datée de 1801.
(Archives du Calvados)
- Quel accord a-t-il été passé
en 1801 au niveau national ?
- A votre avis, cette lettre est
adressée à l’évêque ou au
préfet du Calvados ?
- Pourquoi ce prêtre écrit “qu’il sera fidèle au gouvernement français (...) et n’entretiendrai ni
directement ni indirectement aucune liaison ni correspondance avec les ennemis de l’Etat”.
Commentez cette phrase.
- Il était “vicaire en 1790 de la commune de Beaumont département de Seine et Marne”.
Pourquoi donne-t-il cette date comme repère ?
La situation de la Normandie sous l'Empire
« Cause-t-on encore des Bourbons ? » demande Napoléon à des représentants locaux lors de son voyage
dans l’Ouest. La réponse n’est que flatterie : « Sire, il y a longtemps que votre gloire et vos bienfaits les ont
fait oublier …». Napoléon est trop fin politique pour prendre cette réponse au premier degré. Dès 1809 le
sort de la guerre en Europe se joue davantage dans les ports que sur les champs de bataille. L’arme du blocus se retourne contre la France entraînant une crise financière qui se transforme, par suite d’une mauvaise
récolte, en une crise économique générale.
La crise économique touche davantage la province que Paris, et la Normandie est à l’origine de mouvements
séditieux. L’augmentation du prix de l’hectolitre de froment atteint 50% entre août 1811 et mars 1812. Le
grain devient introuvable sur les marchés et le 12 mars 1812, des émeutes éclatent aux halles de Caen. Un
des manifestants, travailleur aux abattoirs aurait même crié « passez-moi le préfet, que je l’écorche comme
un vieux cheval ». Des soldats nouvellement recrutés se sont joints à la foule et des pillages sont constatés,
mais les violences sont réprimées dès le lendemain.
La misère s’accroît par les difficultés de l’industrie textile. Un des premiers pourvoyeurs d’emploi de la région
laisse, par la crise économique, de nombreuses personnes sans ressources.
Le commissaire de police de Caen, en traversant le département d’Ouest en Est, fait halte à Lisieux. Il note
sur son journal personnel, « on ne rencontre que des figures livides et des corps défaillants ; on voit partout
des malheureux assis au bord des chemins, attendant les effets de la pitié des voyageurs. »
Les émeutes à Caen ne feront pas tâche d’huile. Mais l’autorité a été bafouée et surtout la propriété menacée.
Il faut un exemple. Le général Durosnel est envoyé sur la capitale bas-normande. Le 14 mars, 8 condamnations
à mort sont prononcées. Six hommes et deux femmes. Celles-ci sont exécutées le 15, elles étaient dentellières.
Les troupes de Durosnel repartent le 17 mars, l’agitation est retombée. La récolte de 1812 est bonne et celle
de 1813 est excellente. Mais si la crise frumentaire est oubliée, l’emploi industriel reste précaire et les classes populaires continuent de souffrir.
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- Le passage de Napoléon à Caen
« Le prestige de l’empereur est définitivement atteint dans toutes les couches sociales » écrit l’historien J. Tulard. Perinne ne dit mot des difficultés économiques que traverse sa province mais il est
plus prolixe sur les fêtes qui accompagnent l’arrivée de l’empereur dans la capitale bas-normande.
Manifestement le prestige impérial n’est pas éteint pour tout le monde :
« Lors du passage de Napoléon à Caen en 1811, on forma le projet de commencer la fête que lui
donna la ville par une imitation du chœur célèbre d’Iphigénie dans lequel j’eus à chanter les principaux solos. Ce fut un bien beau jour pour moi. La veille […] le ministre de l’Intérieur assistait à notre
répétition ainsi que le ministre de la Marine et autres personnages de la Cour de l’empereur. […]
J’avais à Caen comme on le voit des rapports de société très agréables, non que je n’aie jamais cherché à sortir de la position modeste où le sort m’avait placé. »
- Que signifient pour Perinne ces festivités ?
- A quelle classe sociale appartient-il
selon lui ? Est-ce votre avis ? Relisez
pour vous aider dans la présentation
générale quelle fonction il occupe dès
1800.
« Mon frère aîné s’était rendu à Caen
pour voir les fêtes et m’accompagnait
à cette réception. Nous partîmes pour
être témoin de son entrée [de l’empereur] qui eut lieu le 22 mai 1811 à 10
heures du soir. Le 25 mai la fête de
l’Hôtel de ville eut lieu […]devant
leurs Majestés et toute la Cour, en présence de plus de 3 000 personnes je
chantai avec une assurance parfaite(...)je fus bien heureux de mon
succès et j’en reçus force compliments.»
- Que représente la venue de l’empereur pour une ville comme Caen?
- Que peut espérer la haute société
caennaise d’un tel déplacement ? Le
peuple participe-t-il aux réjouissances ?
Les affiches impériales demandent la multiplication des fêtes commémoratives. (Archives du Calvados)
Celle-ci, datée de 1812, propose de fêter la date symbolique de deux événements importants de l’Empire;
Retrouvez-les indiqués dans le titre de l’affiche et dans la chronologie.
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- Cette demande de l’évêque de Bayeux ne vous rappelle-t-il pas un événement qui avait marqué
Perinne dans son enfance ?
- Il se passait alors sous quel régime ? Trouvez quelques points communs entre la monarchie absolue et l’Empire ?
- L’occupation étrangère
« Dans mon rapport au ministre des Finances sur l’occupation du Calvados par les Alliés, du 15 août
au 15 octobre 1815, en face desquels je me trouvai seul à la Recette générale, je dus lui rendre
compte des difficultés de ma position à la tête des bureaux pendant leur séjour à Caen ».
- Quelle est la situation en France à cette époque (aidez-vous de la chronologie) ?
- Pourquoi se retrouve-t-il « seul à la recette générale » ?
« Dans la masse des fonds sauvés par moi au péril de mes jours se trouvaient 360 000 francs appartenant au département. Le Conseil général du département s’assembla quelques temps après et deux
de ses membres [un des deux est originaire de Lisieux] me firent l’honneur de me remercier, au nom
du Conseil, de mes loyaux services en m’assurant que dans son rapport au Ministère il avait demandé
pour moi la Croix d’honneur et une recette de finances.”
- Manifestement l’auteur semble avoir fait preuve d’héroïsme. Que craignait-il ? Que demande-t-il en
récompense ? Expliquez.
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Un nouveau régime apparaît…
L’auteur s’étend encore un peu sur cette période douloureuse de sa vie en insistant sur le fait que ses
collaborateurs ont fui devant l’arrivée prussienne et sont réapparus dès que « l’arrière-garde prussienne avait franchi les faubourgs » en octobre 1815.
« En novembre 1815, le Receveur général du Calvados me donna avis qu’il devait y avoir de nombreuses mutations dans les recettes générales que la sienne était vivement sollicitée par plusieurs
émigrés et que probablement il serait
obligé dans ce cas de quitter le
Calvados. »
- Regardez dans la chronologie côté
« événement national » : à quel
changement de régime assiste-t-on ?
Que signifie « Restauration » ?
- Regardez dans la chronologie côté
« événement normand » : comment
se manifeste ce changement ?
L’auteur nous donne aussi quelques
indications sur les effets du changement de régime pour sa carrière et
celle de ses collègues des finances :
« Monsieur Pellapra [son receveur
général en 1815] qui depuis 1820
époque de sa démission de ses fonctions de receveur et a pris le masque
et la livrée de la Restauration était
alors un des partisans les plus actifs
de l’Empire, car il devait sa fortune de
receveur général aux faveurs que
Napoléon avait accordées ou reçues
en des moments heureux pour sa
famille. »
Le 9 Juillet 1815 cette affiche est apposée sur les murs de l’Hôtel de ville
de Caen (Archives du Calvados)
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« L’on vit [fin 1815] des agents des ultra royalistes se mettre à la tête de la camarilla hurlant des vive
le Roi à briser les tympans d’un sourd de naissance se mêler à toutes les danses de la canaille payée
par la contre-révolution et donner le branle à toutes les démonstrations des énergumènes qui voulaient la destitution de tous les fonctionnaires dont ils réclamaient les places ! ».
- Perinne par cet exemple concret nous montre l’évolution des carrières sous différents régimes. Que
signifie la « contre révolution » ? Que pouvez-vous donc en conclure sur la société de cette époque ?
« Lorsque je renouvelai une demande d’une recette en 1833, la demande du Conseil (de 1815 pour
une récompense suite à son attitude face aux Alliés) fut retirée des cartons par le Ministère. […] Le
1er février 1836, je fus nommé Chevalier de la Légion d’honneur par S.M. Louis-Philippe. »
- Perinne obtient une consécration suprême. Pourquoi n’est-il décoré qu’en 1836 ?
Le maire de la commune d’Argences ( située à l’Est de Caen) écrit au préfet pour obtenir l’autorisation d’un prélèvement
financier exceptionnel dans la budget communal lors d’ une fête le jour de la Saint-Louis en 1818.
(Archives du Calvados)
- Quelle est la formulation utilisée pour écrire au préfet ?
- Quelle est la symbolique de la fête du jour de la saint Louis ?
- En quoi peut-on dire que cette lettre prouve que l’on est vraiment sous le régime de la
Restauration ?
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Médaille d’officier de la Légion d’honneur.
Source : www. potiron-sodarec.fr
Un siècle après sa venue dans le Calvados,
la visite impériale fait encore l’objet de commémoration et de recherches
historiques.
(Archives du Calvados)
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Reconnaîtrez-vous ces figures allégoriques retrouvées
sur du courrier et des documents officiels ?
Voici les dates des documents où se retrouvent
ces symboles gravés, dans l’ordre chronologique :
-1792
-An XI
-1812
-1815
Faites correspondre la date et l’allégorie
de chaque régime
42
EN GUISE DE CONCLUSION : des souvenirs pour quoi faire ?
L’histoire locale vue par un simple citoyen, et l’histoire nationale vue par
un Normand : dans tout récit, même s’il se veut le plus objectif possible, il y a
des contradictions, des interprétations personnelles ou collectives, des lieux
communs. Perinne a écrit plusieurs décennies après les faits ; pour le lecteur il
est important de ne pas enjoliver le rôle de la mémoire, de ne pas négliger celui
de la relecture des événements après réflexions, discussions, maturité.
Mais l’essentiel est ailleurs : qu’ont retenu les descendants
de Magloire de leur aïeul et vous, citoyens du XXIème siècle, quels passages de
son témoignage historique et littéraire resteront dans vos souvenirs ?
Les programmes d’histoire et d’éducation civique n’ont pas pour but de
permettre la seule mémorisation de repères historiques, économiques et culturels. Comprendre l’évolution des différents régimes politiques développe des
réflexions plus larges sur la citoyenneté, la participation à la vie politique, et la
compréhension de textes littéraires, en français comme en langue étrangère.
D’aucuns auraient tendance à concevoir l’histoire à travers des documents
très classiques, textes de lois, déclarations politiques. Le récit
de Magloire Perinne est une source novatrice pour des classes du secondaire.
Ni personnage de premier plan, ni illustre inconnu, cet homme a simplement
traversé un siècle chargé en rebondissements politiques et en drames économiques et sociaux.
A la fin de sa vie, il éprouve le besoin de raconter son histoire à ses descendants, sa progression professionnelle, ses joies et ses difficultés. Mais par sa
carrière et ses responsabilités, il est un observateur de tout premier ordre des
décennies traversées.
Son discours a-t-il valeur d’objectivité et de vérité historique ?
À l’historien -et à l’élève-, de démêler sa version des faits et de la confronter, de l’analyser, de la mettre en perspective.
Delphine Maréchal.
43
GLOSSAIRE
Aides : impôts indirects royaux, portant principalement sur les boissons (mais aussi sur les huiles et
savons, les papiers, les cartes à jouer…). Leur montant est variable et très inégal selon les généralités.
Arc de triomphe : Un arc de triomphe est un ouvrage d'art célébrant une victoire ou une série de victoires, dont l’origine se situe sous la Rome antique. Il était dédié à un général victorieux ou à un empereur, et généralement placé à l'entrée de la ville. La royauté française a repris cette tradition, concrétisée par Napoléon 1er qui a donné l’ordre, en 1806 d’en construire un, à Paris.
Assemblée des Notables : C’est un groupe de personnes dont les membres (nobles, conseillers à la
Cour, évêques) sont désignés et révoqués par le roi. Ils sont consultés par le monarque sur des questions concernant le royaume. Leur rythme de réunion est au bon vouloir du prince : de 1626 à 1786
il n’y en eu aucune.
Assignat : Papier-monnaie émis en 1791 dont la valeur réelle baisse considérablement. A l’origine
c’est un titre d’emprunt en papier émis en 1789 grâce à la vente des biens nationaux.
Biens nationaux : Richesses (argent ou immeubles) confisquées à la royauté, au clergé et aux nobles
lors de la Révolution française. Ces biens, en étant mis aux enchères aux particuliers permettront selon
les Révolutionnaires de remplir les caisses de l’Etat, qui sont vides.
Chouans : Membres d’un soulèvement contre-révolutionnaire (chouannerie) qui a embrasé les campagnes d'une douzaine de départements de l'Ouest de la France de 1793 à 1800.
Comité de Salut public : Organe de gouvernement révolutionnaire mis en place par la Convention
nationale le 17 Germinal An I (6 avril 1793), qui a été le gouvernement de la France (sauf en matière
fiscale) jusqu’au 9 Thermidor An II (27 juillet 1794).
Constitutionnel : Partisan (laïc ou religieux) de la Constitution dès 1790.
Directoire : C’est le régime politique chargé du pouvoir exécutif en France dès le 4 Brumaire an IV
(26 octobre 1795) jusqu’au 18 Brumaire An VIII (9 novembre 1799).
Echevin : Pendant la période médiévale c’est un magistrat chargé de la justice et de la police. A partir du XVIe siècle une partie de leur pouvoir passe au bailli et dans beaucoup de province ils ne sont
plus que des conseillers municipaux.
Election : C’est une circonscription financière à l’intérieur de la généralité. L’intendant trouve commode de s’y faire représenter par un subdélégué. L’élection n’en devient pas pour autant une division
administrative.
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Emigrés : Personnes qui n'acceptent pas la Révolution et qui fuient à l'étranger dès l'été 1789.
Etats généraux : C’est la réunion des trois ordres du royaume (noblesse, clergé, tiers-état) décidée par
le roi de France.
Fédéralisme : Doctrine politique, qui, sous la Révolution, visait à la décentralisation des pouvoirs. Le
Calvados était en, 1793 une zone d’insurrection et un foyer fédéraliste.
Ferme : Institution de l’Ancien Régime organisée réellement en 1726. Elle est chargée d’assurer la
perception des principaux impôts indirects (gabelle, aides, douanes). La Ferme générale est réformée
par Necker (ministre des Finances) en 1780 et prend le nom de régie.
Gabelle : Impôt royal de consommation généralisé sur le sel dès la fin du Moyen Age.
Gravure sur lettre officielle
de 1818.
(Archives du Calvados)
Gazette : C’est le plus ancien des journaux de France connus. Créé sur demande de Louis XIII en
1630, composé de 4 puis 8 feuilles, il est d’abord confié au Père Joseph, éminence grise de Richelieu,
qui le transmet à son tour à Théophraste Renaudot, philanthrope, journaliste et médecin du roi. C’est
un hebdomadaire qui a pour rôle d’informer le lecteur sur les nouvelles de la Cour, et de la politique
diplomatique et étrangère du roi. En 1762, il change de titre pour celui de Gazette de France, avec
pour sous-titre Organe officiel du Gouvernement royal et devient bihebdomadaire.
Généralité : C’est une circonscription financière administrée par un intendant. Le terme apparaît
pour la première fois au XVIe siècle et dès 1542 la France compte seize généralités appelées aussi
« recettes générales ». Il existe 34 généralités ou intendances en 1789.
Intendant : C’est le représentant direct du roi dans la province. Ses pouvoirs sont énormes. Assimilés
à des tyrans, et appuyés par de fortes relations familiales et financières, ils ont été les premières victimes de la Révolution française.
Jacobins : Dès le 13e siècle, religieux qui appartiennent à l’ordre des dominicains. Dès 1790 nom
donné aux membres d’une société politique révolutionnaire qui se réunissaient dans l’ancien couvent
des Jacobins. Après la Révolution française le nom reste pour désigner des Républicains intransigeants,
partisans d’un Etat centralisé (on dit aussi jacobinistes ). Ces deux derniers termes sont alors utilisés
par les royalistes ou les partisans de Napoléon.
Milice : Troupes spéciales levées parmi les habitants pour un danger exceptionnel.
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Noblesse de robe : Rassemble tous les nobles qui occupaient des fonctions de gouvernement et de justice, principalement dans la justice et les finances. Ces personnes devaient, notamment dans le cas des
juristes, avoir fait des études universitaires et donc revêtir la robe ou toge des gradués de l'université. Ils
furent surnommés robins, puis hommes de robe, et le groupe noble qu'ils formaient "noblesse de robe".
Paroisse : C’est l’unité religieuse et civile de base dans tout le royaume. L’ensemble des habitants d’une
paroisse est généralement désigné sous le nom de « communauté ».
Receveur : personne chargée de la collecte des impôts. Les receveurs prennent leurs ordres de l’intendant.
Régie : système de perception des impôts indirects développé à partir de la fin de l’Ancien Régime, en
particulier par Necker en 1780. Les produits des impôts, perçus par les « fermiers généraux » et leurs
employés, reviennent intégralement à l’Etat, qui désormais leur reverse des émoluments déterminés à
l’avance, sous la forme d’un pourcentage du montant perçu. Cela a pour but de rendre une part des
impôts à l’Etat, qui avait disparu dans les poches des « fermiers ». Ceux-ci sont d’ailleurs haïs par la
population.
Subdélégué : Vu l’immensité de la charge de l’intendant, celui-ci se fait représenter dans les principales
villes de sa généralité ou dans chaque élection. Le subdélégué est un relais entre l’intendant et les administrés. Il sert aussi d’informateur à l’intendant, par ses rapports et ses enquêtes sur la situation morale et
matérielle des habitants.
Syndic : Les habitants de la paroisse sont représentés en justice et devant l’administration par un homme
appelé « syndic ». Dans les communautés rurales le syndic tient lieu de maire.
Taille : Impôt direct qui devient permanent à la fin du Moyen Age. Il n’est pas payé par les nobles.
A l'origine, le terme désigne une baguette de bois fendue, permettant de conserver la trace de valeurs
chiffrées. C'est un système de comptabilité accessible aux personnes ne sachant pas lire et écrire. Son
montant est fixé arbitrairement en fonction des besoins seigneuriaux et des capacités de la population.
Dans les années 1780, cet impôt ne représente que moins d’un quart des ressources du royaume qui se
finance surtout à l’aide d’emprunts et d’impôts indirects.
Te Deum : Titre abrégé de l'expression latine Te Deum laudamus (« Dieu, nous te louons »). C’est un
hymne de la tradition chrétienne dont l’origine est fortement discutée. Chez les catholiques sous l’Ancien
Régime, le Te Deum est chanté lors d’une messe, à la fin de l'année civile, en remerciement d'une faveur
particulière comme l'élection d'un pape, un couronnement, une naissance royale, une victoire militaire,
un traité de paix.
Terreur : Régime dictatorial instauré par le Comité de Salut public, entre septembre 1793 et juillet 1794,
dont le but est l’élimination physique des ennemis de la Révolution ou supposés tels. On évoque aussi
la « Terreur blanche » qui désigne les violences commises par les royalistes (le Blanc étant la couleur
des Bourbons) contre les partisans de la Révolution (1795).
Tiers-état : L’ordre le plus nombreux en représentants mais le moins puissant lors de la convocation des
Etats généraux sous l’Ancien Régime. La dernière convocation date d’avril 1789.
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Solutions de la page 42 :
De gauche à droite et de bas en haut :
-1815 ; 1792 ; An XI ; 1812.
DIRECTION DES ARCHIVES DU CALVADOS
61, RUE DE LION-SUR-MER
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Mise en page et impression : imprimerie du Conseil général du Calvados
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