Succession d'États et de Gouvernements103
10 janvier 1920, date d'entrée en vigueur du Traité. La
simple signature du Traité n'imposait pas à l'Allemagne
l'obligation internationale de traiter les habitants des
territoires cédés comme des étrangers.
Cas de l'application de la Constitution de Weimar à
Dantzig (1931)
Cour d'appel de Dantzig
Danziger Juristische Monatsschrift, Vol. 10 (1931),
p.
124
Annual Digest, 1931-1932, p. 86
6. La Cour a jugé que la Constitution allemande de
1919 avait force de loi à Dantzig (devenu Gdansk), bien
qu'à cette époque Dantzig fût sur le point d'être séparé
de l'Allemagne pour constituer une ville libre, en vertu
du Traité de Paix de Versailles. On ne saurait soutenir,
a-t-elle ajouté, qu'en raison de la séparation imminente
de Dantzig d'avec la patrie, la Constitution allemande
n'avait qu'un effet provisoire dans le territoire de Dantzig.
Cette décision découle du principe de la continuité de
l'ordre juridique, selon lequel il existe une présomption
en faveur de la validité continue des dispositions légales
qui étaient préalablement en vigueur.
Cas d'application de la loi allemande à l'Alsace-Lorraine
(1924)
Reichsgericht d'Allemagne (Cour suprême du Reich alle-
mand)
Fontes Juris Gentium, A, II (1879-1929), n° 309
7.
La Cour a jugé que la loi applicable à un contrat
de transport de marchandises expédiées d'une ville
d'Alsace-Lorraine, conclu en octobre 1919, était le droit
commercial et monétaire allemand. Le fait qu'en vertu de
l'article 51 du Traité de Paix de Versailles, l'Alsace-
Lorraine ait été rattachée à la France à compter du
11 novembre 1918 (date de l'Armistice), était sans
influence sur les relations de droit privé établies avant
l'entrée en vigueur du Traité (10 janvier 1920) 3.
L.
et J. J. contre Chemins de jer de l'Etat polonais (1948)
Cour suprême de Pologne
Panstwo i Prawo, 3 (1948), n°« 9-10, p. 144
International Law Reports, 1957, p. 77
8. L'ancienne ville libre de Dantzig et la partie du ter-
ritoire allemand située en 1937 à l'est de la ligne Oder-
Neisse, qui a été placée sous administration polonaise
par la décision de la Conférence de Postdam en date du
2 août 1945, sont désignées dans la législation polonaise
par l'expression « Territoires recouvrés ». Un décret polo-
nais du 13 novembre 1945, mis en application le 27 no-
vembre 1945, disposait que l'ensemble des lois en vigueur
dans le ressort du Tribunal de district de Poznan devaient
s'appliquer aux Territoires recouvrés.
9. Une chambre spéciale de la Cour suprême de Pologne
a statué sur la question : « Quelles étaient les dispositions
de droit civil en vigueur dans les Territoires recouvrés,
et notamment, dans le ressort de la Cour d'appel de
Wroclaw, après l'annexion de ces territoires par l'Etat
polonais, mais avant l'entrée en vigueur du Décret du
13 novembre 1945 ? » Le Décret ne contenait aucune
disposition sur ce point.
3 Voir les décisions Chemins de Fer d'Alsace-Lorraine c. Lévy
& C° et Espagne c. Chemins de fer d'Alsace-Lorraine, paragraphes
136 et 137 ci-dessous, concernant l'effet de la cession de l'Alsace-
Lorraine le 11 novembre 1918 sur l'applicabilité et la non-appli-
cabilité de la Convention de Berne sur le transport international
de marchandises.
10.
La Cour suprême a jugé qu'après la capitulation,
l'Etat allemand avait perdu sa souveraineté et que les
Territoires recouvrés avaient été soumis à la souveraineté
et à l'autorité de l'Etat polonais, en vertu de l'accord
conclu entre les puissances victorieuses.
11.
Toute la population allemande desdits Territoires
devait être transférée, pour autant qu'elle n'avait pas
déjà quitté le pays de son propre gré. La Cour a déclaré
que l'Etat polonais, dans l'exercice de ses droits, avait
introduit immédiatement dans les Territoires recouvrés
sa propre administration publique et sa propre adminis-
tration judiciaire, et avait rapidement recolonisé la région,
en ne laissant sur place que la population autochtone
d'origine polonaise. La population allemande avait cessé,
en fait, de jouer le rôle de sujet de droit, ayant perdu
toute structure organique. Les Territoires recouvrés
avaient été réunis au reste de l'Etat polonais sur la base
d'une complète égalité. Toutes les dispositions légales
applicables à l'ensemble de l'Etat polonais avaient égale-
ment force obligatoire dans les Territoires recouvrés, tan-
dis que toutes les dispositions contraires à l'ordre juridique
reconnu par l'Etat polonais cessaient de s'appliquer. La
Cour suprême a déclaré que ce principe découle de la
notion même de souveraineté de l'Etat.
12.
Pour la partie de l'arrêt relative au régime juridique
applicable durant la période de transition antérieure au
27 novembre 1945, voir les paragraphes 185 et suivants
ci-après.
Cas de la nationalité des Allemands au-delà de la ligne
Oder-Neisse (1951)
Oberlandesgericht Celle (Cour d'appel), République fédé-
rale d'Allemagne
Neue Juristische Wochenschrijt (1952), p. 475
(81) Journal du droit international (Clunet) (1954),
p.
840
13.
La compétence d'un tribunal de première instance
de la République fédérale l'Allemagne pour connaître
d'une demande en divorce dépendait de la question de
savoir si le demandeur était de nationalité allemande.
Le défendeur avait soulevé l'exception d'incompétence en
arguant qu'en 1946 ou 1947, lorsqu'il résidait dans la
partie de la Haute-Silésie qui était demeurée allemande
après 1922, il avait demandé la nationalité polonaise et
l'avait obtenue après la procédure dite de vérification.
14.
La Cour d'appel a jugé qu'il n'y avait pas lieu d'exa-
miner si le demandeur avait acquis la nationalité polo-
naise durant son séjour en Haute-Silésie. La Cour serait
compétente même si le demandeur était un « Doppel-
staatler » (sujet mixte; personne ayant la double natio-
nalité).
Il fallait donc déterminer si le demandeur avait
perdu sa nationalité allemande d'origine. La Cour a
répondu à cette question par la négative, attendu que le
demandeur n'aurait pas perdu sa nationalité allemande
même s'il avait acquis la nationalité polonaise sur sa
demande.
15.
Conformément aux dispositions de la loi allemande
de 1913 sur la nationalité, un Allemand perd la nationa-
lité allemande du fait de l'acquisition d'une nationalité
étrangère qui lui est accordée sur sa demande, à condi-
tion qu'il n'ait ni son domicile ni sa résidence habituelle
en Allemagne (orig. : « tm Inland »). Cette condition
n'était pas remplie dans le cas d'espèce. Le territoire situé
à l'est de la ligne Oder-Neisse faisait toujours partie de
l'Allemagne, tant en droit constitutionnel qu'en droit
international. L'octroi de l'administration provisoire du