Dès 1850, Louis-Napoléon entre en conflit avec l’Assemblée, car se profile l’échéance
électorale de 1852 qui doit décider d’un nouveau président de la République, à laquelle,
d’après la Constitution, il ne peut se représenter.
Face à la division des royalistes partagés entre les partisans du jeune comte de Paris
âgé de 12 ans, petit-fils de Louis-Philippe, et ceux du comte de Chambord, petit-fils de
Charles X, Louis-Napoléon tente de faire réviser la Constitution pour permettre sa réélection.
L’Assemblée vote favorablement, mais la majorité des trois-quarts nécessaire, n’est pas
atteinte, et une proposition de rétablissement du suffrage universel échoue.
Sentant le climat favorable, mais la voie légale impossible, afin de conserver le
pouvoir, Louis-Napoléon, un an avant la fin de son mandat, passe à l’action. Le 2 décembre
1851, date anniversaire du couronnement de Napoléon I
er
et de la victoire d’Austerlitz, le
président organise un coup d'État
1
: il décrète la dissolution de l’Assemblée, le
rétablissement du suffrage universel et s'empare de tous les pouvoirs. Il prend le titre de
Prince-Président de la République française. Il fait arrêter les opposants les plus fermes
(Thiers) et les généraux les plus hostiles (Cavaignac) ; son demi-frère Morny
2
devient
ministre de l’Intérieur et le général Saint-Arnaud, ministre de la Guerre. L’armée, dont les
chefs sont majoritairement favorables au président, soutient le coup d’État et réprime les
manifestations populaires hostiles qui éclatent à Paris et en province. L’armée tire sur la foule
et environ 10 000 opposants sont condamnés et exilés en Algérie. Cette résistance
républicaine contribue à faire accepter le nouveau régime par les partis conservateurs.
Cependant, le coup d’État et la répression qui l’a suivi creusent entre le pouvoir bonapartiste
et les républicains réduits à l’impuissance, mais non soumis, un fossé qui ne sera jamais
comblé.
Pour assurer sa légitimité, Louis-Napoléon Bonaparte organise aussitôt un plébiscite
qui, par 7 145 000 oui contre 592 000 non, l’autorise à rester au pouvoir et à réformer la
Constitution (21 décembre 1851). Calquée sur celle du Consulat, la nouvelle Constitution
est promulguée le 14 janvier 1852. Elle prolonge de 10 ans le mandat de Louis-Napoléon qui
n’est responsable que devant la Nation consultée par plébiscites, auxquels les citoyens doivent
répondre par oui ou non, à des questions posées par le président, et dans des circonstances
décidées par lui.
Le président choisit les membres du gouvernement et concentre tous les pouvoirs. Il
nomme à vie les membres du Sénat gardien de la Constitution. Deux autres assemblées sont
maintenues : le Conseil d’État (formé de fonctionnaires) qui rédige les projets de loi et le
Corps législatif (composé d’élus d’arrondissements) qui ne peut qu’accepter ou refuser les
projets de loi qui lui sont soumis, mais ne peut en aucun cas les modifier.
La République abandonne ainsi le régime parlementaire dont l’usage avait commencé
à s’établir sous la monarchie de Louis XVIII et laisse place à une république autoritaire.
Pour marquer ce nouveau régime, une pièce est frappée à l’effigie du Prince-président,
tête nue, avec pour titulature : Louis-Napoléon Bonaparte sur l'avers, et sur le revers, une
couronne de lauriers avec 5 francs 1852 au centre et République française pour titulature
(décret du 3 janvier 1852).
1
Le coup d’État est préparé par Morny, le demi-frère de Louis-Napoléon, Persigny honnête compagnon
des temps difficiles, le préfet Maupas et le général de Saint-Arnaud, chef d’une armée qui ne demande qu’à en
finir avec la République.
2
Avant le coup d’État, le duc de Morny, libéral et mondain, est officier en Algérie, puis industriel. Il va
participer activement au gouvernement impérial : tout d’abord, en tant que ministre de l’Intérieur, puis comme
président du Corps législatif. Il pousse au développement bancaire et fait construire Deauville.