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Résumé
La biosphère terrestre est l’un des éléments complexes du système climatique qui interagit
avec l’atmosphère via des échanges continus et multiples d’énergie, de chaleur, d’eau, de
dioxyde de carbone, …, et avec les océans via un apport d’eau douce, de matériaux solides et
de nutriments sur les marges continentales. Elle est donc un véritable acteur du système,
susceptible d’introduire d’éventuelles surprises dans l’évolution du climat, et ce d’autant plus
que l’Homme agit lui aussi sur le paysage, parfois indépendamment des fluctuations
climatiques. C’est la prise en compte de ces différentes interactions, dans un modèle de
circulation générale de l’atmosphère, suivie de la mise en évidence de rétroactions
importantes et leurs quantifications qui sous-tend l’intégralité des travaux résumés dans ce
manuscrit. L’ensemble de mon travail se structure autour de la notion de modèles, qu’il m’a
fallu développer ou importer.
J’ai passé plusieurs années à m’intéresser à deux périodes particulières du dernier cycle
glaciaire-interglaciaire : l’entrée dans la dernière glaciation et le moyen Holocène. J’ai
démontré, avec l’aide de mes collaborateurs européens et de mes étudiantes en stage et thèse,
que la dynamique naturelle de la végétation, aux grandes échelles de temps (i.e. l’évolution
des zones géographiques occupées par différents écosystèmes), jouait un rôle d’amplificateur
très important de la réponse de la circulation atmosphérique au forçage solaire imposé.
L’entrée dans la dernière glaciation aurait été difficile en l’absence des rétroactions entre
distribution des écosystèmes et climat.
Je me suis attardée sur l’Holocène moyen, dans le cadre du projet international PMIP
coordonné au laboratoire. Nous avons mis en évidence l’importance du fonctionnement
hydrologique des sols sur la sensibilité climatique en Europe. Si la plupart des modèles de
climat climatiques semblent être incapables de simuler une diminution du nombre de degrés
jours de croissance, alors que l’ensoleillement estival augmente, c’est vraisemblablement
parce qu’ils ne parviennent pas à simuler correctement la différence de recharge en eau des
sols, au cours de l’hiver, entre la période climatique Holocène et l’actuelle. Cette incapacité
semble être liée, en premier lieu, à la simplicité des modèles hydrologiques utilisés, qui ne
prennent en compte que la zone racinaire et non la profondeur totale de sol, et dont le
fonctionnement se rapproche davantage de celui d’un seau que de celui d’un sol poreux, avec
une capacité d’infiltration limitée et des possibilités de remontée d’eau par capillarité. Nous
avons également montré que la sensibilité simulée de la mousson africaine est
particulièrement sensible au choix de l’albédo prescrit sur le désert du Sahara par les
modélisateurs, et que ces différences de sensibilité rendaient difficiles la comparaison aux
données.
Mes centres d’intérêt ont évolué au cours de ces 3 dernières années, et je me consacre de plus
en plus à l’étude des surfaces fortement anthropisées, et plus particulièrement aux impacts,
sur la dynamique du climat, qu’ont eu les modifications du paysage induites par l’Homme, et
aux impacts que pourraient avoir, sur la trajectoire future du climat, les différents scénarios
possibles d’utilisation des sols par l’Homme. Ma stratégie à cet égard repose sur 1) le
développement d’une version d’ORCHIDEE qui prend en compte les diverses spécificités des
cultures, 2) l’assemblage de cartes d’évolution de la végétation dans le passé, et de scénarios
pour d’évolution des zones fortement anthropisées pour le futur, 3) la réalisation de divers
scénarios climatiques avec le modèle couplé de l’IPSL, 4) la participation à la construction
d’un modèle plus intégré qui nous permette de construire des scénarios d’évolution des
surfaces agricoles dans le futur.