RÉANIMATION
CARDIO-RESPIRATOIRE (CPR)
Définitions et indications
L’arrêt cardiaque
est défini par la cessation de l’activité mécanique efficace du cœur;
il se traduit par la disparition du pouls. Il s’agit donc d’un diagnostic clinique et non
électrocardiographique. L’arrêt cardiaque ne préjuge donc pas de l’activité électrique
associée qui peut être absente (asystolie), anarchique (fibrillation ventriculaire) ou
encore relativement bien préservée (dissociation électromécanique).
Fibrillation ventriculaire:
elle est généralement responsable de la mort subite du
patient coronarien. La fibrillation ventriculaire est l’activité électrique le plus
souvent rencontrée initialement en dehors de l’hôpital (même si au moment de
l’arrivée des secours, la fibrillation ventriculaire a parfois évolué vers l’asystolie).
C’est la forme d’arrêt cardiaque qui a le meilleur pronostic (25-33 % de sortie vivant
de l’hôpital).
Dissociation électromécanique
(DEM): elle est la forme la plus fréquente d’arrêt
cardiaque chez le malade grave. La DEM est plus fréquente à l’hôpital (en dehors des
infarctus aigus). Un exemple est présenté dans la figure 1.
Asystolie:
elle est généralement observée tardivement, à la suite des deux autres
formes d’arrêt cardiaque.
L’arrêt cardiaque est quasi immédiatement suivi d’arrêt respiratoire, le centre
respiratoire étant non perfusé.
L’arrêt respiratoire
, défini par l’arrêt de la ventilation efficace (bradypnée
extrême, «
gasping
», apnée), peut être dû à une cause respiratoire (patient
bronchiteux décompensé, obstruction des voies respiratoires par un corps
étranger…) ou neurologique (intoxication médicamenteuse…). L’arrêt respiratoire
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n’est pas immédiatement accompagné d’arrêt cardiaque – une bradycardie
traduisant l’hypoxie myocardique précède souvent l’arrêt cardiaque. En l’absence
d’arrêt cardiaque, la réanimation peut être limitée à l’ouverture des voies aériennes
et la ventilation.
368 Le manuel de réanimation, soins intensifs et médecine d’urgence
Quand commencer et terminer la réanimation?
Quand commencer
Il ne faut évidemment pas commencer une CPR chez le patient NTBR («
not to
be resuscitated
») ou DNR ( «
do not resuscitate
»): voir partie
Éthique
p. 4.
Il est essentiel de commencer la CPR le plus rapidement possible, étant donné
que chaque seconde compte.
Le succès de la CPR dépend d’une série d’éléments déterminant ce qu’on appelle
la « chaîne de survie » :
- accès rapide (que faire au milieu d’un bois?) ;
- CPR rapidement commencée ;
- défibrillation précoce ;
- CPR avancée rapidement commencée.
Si l’arrêt cardiaque a duré plus de 10 minutes avant l’institution de la
réanimation, il est généralement considéré que le patient est définitivement perdu
Fig. 1 – Exemple de dissociation électromécanique: l’activité électrique est remarquablement préservée
en l’absence de toute activité mécanique.
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Réanimation cardio-respiratoire (CPR) 369
sur le plan cérébral. Dans la plupart des cas, la durée de l’arrêt cardiaque n’est pas
connue (le malade a pu s’écrouler en gardant un faible débit cardiaque pendant un
certain temps), si bien qu’on accorde souvent bénéfice du doute. En cas de noyade,
l’hypothermie est protectrice, si bien qu’on se donne jusqu’à une heure.
Quand arrêter ?
La décision d’arrêt de la réanimation n’est pas facile car aucun critère objectif n’est
absolu. L’apparition d’une mydriase est de mauvais pronostic mais ne signifie pas
nécessairement la mort cérébrale définitive. Bien que la durée de la réanimation ne
soit pas à elle seule un facteur suffisant pour décider de son arrêt, les études ont
montré qu’une CPR de plus de 15 minutes est associée à une mortalité de 95 % et
une CPR de plus de 25 minutes à une mortalité quasi de 100 %.
La CPR doit toutefois être poursuivie plus longtemps dans les cas suivants:
- hypothermie;
- fibrillation ventriculaire récidivante;
- cause corrigible.
En dehors de ces trois situations, on peut donc arrêter une réanimation qui a
duré une trentaine de minutes.
Fig. 2 – Taux de survie à la sortie de l’hôpital en fonction du délai de défibrillation en cas de fibrillation
ventriculaire.
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370 Le manuel de réanimation, soins intensifs et médecine d’urgence
Illustration de l’importance de l’hypothermie : une fillette de 2 ans, retrouvée
dans de l’eau glacée (moins de 5 °C) après 66 min d’immersion en mydriase
bilatérale, avec une température rectale de 19 °C, a récupéré entièrement grâce à une
CPR efficace suivie de circulation extracorporelle.
NB:
il ne faut jamais transporter un patient en arrêt cardiaque vers l’hôpital, car
la réanimation d’une personne sur une civière en mouvement ou dans l’ambulance
serait trop difficile. La réanimation se fait entièrement sur place.
Manœuvres élémentaires de réanimation
chez l’adulte
Il convient avant tout de s’assurer de l’inconscience du patient par une stimulation
vigoureuse. En cas d’inconscience, il faut immédiatement appeler à l’aide. Toutefois,
en cas d’arrêt respiratoire (surtout chez l’enfant), on recommande de commencer la
réanimation avant d’appeler à l’aide, car les premières secondes peuvent compter.
A =
Airway :
assurer l’ouverture des voies aériennes
B =
Breathing:
assurer la respiration
C =
Circulation:
assurer la circulation du sang
Ouverture des voies aériennes
Le premier geste consiste à s’assurer que la langue n’est pas cause d’obstruction haute
chez le patient inconscient. La langue étant solidaire de la mâchoire inférieure, celle-
ci doit être avancée pour dégager la gorge: le fait d’attirer la tête en arrière peut déjà
suffire lorsque la musculature des joues n’est pas atrophique.
Les voies aériennes sont dégagées par le placement d’une main sur le front de la
victime pour l’attirer vers le bas et l’arrière par un mouvement rotatoire ( «
head
tilt
») et de l’autre main en-dessous de la mâchoire inférieure pour l’attirer vers le
haut par un mouvement vertical («
chin lift
») [fig. 3]. Une alternative (moins
efficace) consiste à placer cette deuxième main sous la nuque pour la soulever vers le
haut. Pour le droitier, il est plus facile d’effectuer ces manœuvres en se plaçant à la
droite de la victime.
Chez la victime qui pourrait avoir un traumatisme de la colonne cervicale, on
peut éviter le mouvement de rotation de la tête en recourant au «
jaw thrust
» : le
réanimateur place une main de chaque côté de la victime en laissant ses coudes sur le
sol, et soulève la mâchoire inférieure. Les pouces peuvent simultanément abaisser les
lèvres pour garder la bouche ouverte.
Une fois les voies aériennes dégagées, la présence ou l’absence de respiration doit
être déterminée en plaçant son oreille devant la bouche du patient. Cette position
permet à la fois d’entendre la respiration, d’en sentir le souffle et d’observer les
mouvements de la poitrine. Si le patient ne respire pas, la ventilation artificielle
s’impose.
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Réanimation cardio-respiratoire (CPR) 371
Ventilation artificielle
Aucun matériel n’est indispensable pour assurer une ventilation artificielle efficace.
On commence par enlever tout matériel qui pourrait représenter une obstruction au
passage d’air (dentier en particulier). Le pouce et l’index de la main placée sur le
front bouchent les narines, tandis que la mâchoire inférieure est toujours soulevée de
l’autre main. Après avoir rempli ses poumons d’air, le réanimateur place sa bouche
grande ouverte autour de celle du patient et insuffle l’air le plus hermétiquement
possible, pas trop vite (en 2 secondes), tout en visualisant les mouvements du thorax.
L’efficacité de la ventilation est confirmée par la sensation de résistance des poumons
de la victime ainsi que par la sensation auditive et tactile de l’air expiré.
Cette manœuvre est répétée 2 à 5 fois.
S’il n’est pas possible de pratiquer la ventilation artificielle par la méthode de
bouche-à-bouche (en cas de trismus ou de trauma facial, par exemple), la méthode
de bouche-à-nez est nécessaire. Il est toutefois souhaitable d’au moins entrouvrir la
bouche du patient pour faciliter l’expiration de l’air.
La complication principale de la ventilation artificielle est la distension aérique
de l’estomac. Il faut donc bien garder à l’œil les mouvements du thorax afin de ne
pas excéder les pressions nécessaires. La distension de l’estomac facilite la
régurgitation et réduit les volumes pulmonaires par suite de l’élévation du
diaphragme. Il ne faut jamais tenter d’évacuer l’air entré dans l’estomac en poussant
sur l’épigastre, ce qui faciliterait la régurgitation du contenu gastrique.
Fig. 3 – Manœuvres simples d’ouverture des voies aériennes.
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