d’ailleurs aussi la référence privilégiée de Taslima Nasreen… En mars 2007, elle a été l’une
des principales protagonistes du «Secular Islam summit» qui s’est tenu en Floride.
L’étendard de la rébellion musulmane et féminine pro-société ouverte est également
levé au Canada par Irshad Manji, qui y a très tôt suivi ses parents – des Indiens venus
d’Ouganda. Journaliste puis universitaire (à Yale, aux États-Unis), elle s’est surtout, depuis le
11 Septembre, engagée dans une lutte sans merci contre la tradition islamique au moyen de
conférences, de débats télévisés, de documentaires (La Foi sans la peur), de son site Internet
débordé par les téléchargements et de livres, Musulmane, mais libre, résumé dans un viru-
lent article au titre éloquent: «Musulmans libres d’Occident, debout!» (Le Monde,
7 novembre 2004) tout en prônant l’avènement d’un islam si éclairé qu’il se concilierait
avec son choix homosexuel personnel. Dans un autre de ses combats, qui l’oppose au multi-
culturalisme institutionnel et idéologique de son pays d’adoption, elle a reçu le très concret
renfort d’Homa Armojand, une Iranienne réfugiée au Canada depuis 1990. C’est en effet
cette dernière qui a pris l’initiative de la contestation de la tentative conjointe des islamistes
locaux et du gouvernement de l’Ontario d’imposer à tous les musulmans vivant dans cette
province l’assujettissement à des tribunaux d’arbitrage islamique appliquant la charia…
En Europe, l’attention s’est avant tout focalisée sur l’action d’Ayaan Hirsi Ali, devenue
une icône médiatique de la guerre de conquête de la liberté individuelle de penser, s’ex-
primer et vivre sa vie comme on le veut pour les personnes nées sous l’islam, les femmes en
premier lieu. Somalienne, elle choisit littéralement la liberté en 1992, âgée de 23 ans, en
obtenant l’asile aux Pays-Bas afin d’échapper à un mariage forcé. Bientôt devenue citoyenne
néerlandaise, elle milite d’abord au parti social-démocrate PVDA avec lequel elle rompt en
raison de l’angélisme multiculturaliste qui y sert de ligne politique. Après le 11 Septembre,
elle publie des articles de plus en plus hostiles à l’islam et, sur la suggestion de Bolkenstein,
elle se rallie au parti libéral VVD dont elle devient parlementaire en 2003. Avec son ami Théo
Van Gogh, elle entreprend une campagne extrêmement active en faveur de la libération des
femmes musulmanes: à un court-métrage télévisé (Submission, Part 1) succède en 2004 le
livre qui la rend célèbre, Insoumise, qui s’en prend aussi bien à l’oppression coranique qu’à
la lâcheté ordinaire des politiciens corrompus par le «politiquement correct». Condamnée
à mort elle aussi par les islamistes et contrainte de vivre la vie d’une proscrite dans la clan-
destinité et sous protection policière (jusqu’au forfait des Pays-Bas…) ou privée, il lui
faudra abandonner la partie en Europe. Passé un temps d’exil aux États-Unis, elle revient en
Europe en octobre 2007 et, toujours traquée, doit solennellement demander asile et protec-
tion à l’Union européenne après avoir reçu le 8 février 2008 à Paris le prix Simone de
Beauvoir – qu’elle partage avec Taslima Nasreen.
Mais l’«arbre» Hirsi Ali ne doit pas cacher, un peu partout ailleurs en Europe, la (petite)
«forêt» grandissante d’autres musulmanes ou ex-musulmanes agissant en citoyennes de la
vraie société ouverte et également entrées en résistance active contre une tradition isla-
L’HEURE DES «MUSULMANES LIBRES »
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dossier
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