Chapitre 8 La mortalité et la fécondité 47
Chapitre 9
Deux causes de décès :
le cancer et le suicide
par Michel Beaupré et Danielle St-Laurent*
Faits saillants 48
Introduction 49
La mortalité par cancer 49
L’évolution des taux de mortalité
par âge et par sexe 50
L’analyse par génération 59
Tabagisme d’une génération à
l’autre et cancer du poumon 64
Conclusion 67
La mortalité par suicide 68
L’évolution des taux comparatifs
par sexe 68
L’évolution des taux de mortalité
par âge et par sexe 70
Le profil de mortalité selon l’âge 73
L’analyse par génération 75
Conclusion 78
Bibliographie 80
* Ministère de la Santé et des Services sociaux, Direction générale de la santé publique.
48 D’une génération à l’autre: évolution des conditions de vie
Faits saillants
Le cancer :
Avec 30 % des décès annuels, le cancer est aujourd’hui la deuxième cause
de mortalité en importance au Québec, derrière les maladies de l’appareil
circulatoire qui en regroupent 37 %, et l’importance relative du cancer dans
l’ensemble des décès continuera d’augmenter en raison du vieillissement
de la population, puisque l’incidence du cancer s’accroît avec l’âge.
À l’exception du cancer du poumon, le taux par âge de mortalité due à
tous les autres cancers montre très peu de changement d’une génération
à l’autre chez les hommes. Chez les femmes, ce taux baisse nettement
d’une génération à l’autre, en raison de la réduction de la mortalité par
cancer du sein, particulièrement chez les femmes plus jeunes.
Le taux de mortalité par cancer du poumon connaît une hausse marquée
et continue d’une génération à l’autre depuis le début du siècle chez les
hommes; chez les femmes, le même phénomène se produit, mais avec un
décalage d’une vingtaine d’années par rapport aux hommes. Par contre,
le taux comparatif de mortalité par cancer du poumon a commencé à
décliner depuis le début des années 90 chez les hommes.
Depuis le début du siècle, les profils et les niveaux de l’usage du tabac (en
particulier de la cigarette) ont eu une influence indéniable sur la morta-
lité par cancer du poumon d’une génération d’individus à l’autre. Les
hommes de la dernière génération à l’étude (1941-1945) sont ceux qui
profiteront le plus de la réduction du tabagisme amorcée dans les années
60. En effet, la proportion de la population adulte qui fume a baissé de
près de la moitié au Canada entre 1965 et le début des années 90, pas-
sant de 54 à 26 %. Ce facteur n’est pas étranger à la baisse du taux com-
paratif de mortalité par cancer du poumon amorcée chez les hommes
depuis le début des années 90.
Le suicide :
L’augmentation considérable de la mortalité masculine par suicide a ac-
cru l’écart qui existait entre les hommes et les femmes. Ainsi, en 1995, le
taux de mortalité est de 31,3 pour 100 000 personnes chez les hommes et
de 7,9 chez les femmes.
La croissance des taux de suicide chez les hommes dans les dernières
années a été davantage le fait des hommes de moins de 55 ans.
De façon générale, et peu importe la période, le taux de mortalité chez
les femmes s’accroît avec l’avancement en âge et cela, jusqu’à 45 ans.
Chez les hommes, les taux de mortalité sont élevés dans les groupes d’âge
de 15-19 ans à 50-54 ans et la hausse progressive des taux au fil des an-
nées observées touche également ces groupes.
Par ailleurs, l’augmentation de la propension au suicide a été remarqua-
ble chez les générations du baby-boom. De plus, la hausse du taux de
suicide se poursuit toujours chez les jeunes générations, bien qu’elle soit
moins forte.
Chapitre 9 Deux causes de décès : le cancer et le suicide 49
Chapitre 9
Deux causes de décès :
le cancer et le suicide
Introduction
La mortalité est un excellent indicateur de l’évolution des conditions de vie au
Québec. Depuis le début du siècle, le nombre annuel de décès a sans cesse aug-
menté, tout comme la population. Par contre, le taux comparatif de mortalité, qui
annule l’effet du vieillissement de la population et donne ainsi une meilleure me-
sure résumée du risque de décès, a diminué de 33 % depuis 1971 (Bibeau et
Laplante, 1997, p. 202). Cette apparente contradiction reflète l’effet de deux ten-
dances différentes, soit d’une part, l’augmentation et le vieillissement de la popula-
tion et d’autre part, la diminution du risque de décès liée à la hausse de l’espérance
de vie.
Depuis le début des années 30 jusqu’au milieu des années 50, l’espérance de
vie à la naissance a connu des gains appréciables surtout grâce aux victoires sur la
mortalité prématurée, particulièrement au cours de la première année de vie; de-
puis les années 50, la progression s’est poursuivie, mais plus lentement. Les gains
d’espérance de vie se sont également déplacés vers les âges moyens et avancés
grâce à de meilleures habitudes de vie et aux progrès médicaux.
Deux causes spécifiques de mortalité sont analysées ici : le cancer et le suicide.
Avec 30 % des décès annuels, le cancer est aujourd’hui la deuxième cause de mor-
talité en importance au Québec, derrière les maladies de l’appareil circulatoire qui
en regroupent 37 %. Son importance relative est sans cesse croissante au Québec
depuis plus de 20 ans, alors que c’est l’inverse pour les maladies de l’appareil circu-
latoire. De plus, le cancer vient en tête comme cause de mortalité prématurée,
mesurée par les années potentielles de vie perdues, avec 30 % du total, alors que
les maladies de l’appareil circulatoire en regroupent 20 %.
Quant au suicide, même s’il ne représente que 2,7 % de l’ensemble des décès
annuels, il est la principale cause de décès chez les hommes de moins de 40 ans et
constitue une cause importante de mortalité prématurée, avec 10 % du nombre
total d’années potentielles de vie perdues dans l’ensemble de la population.
La mortalité par cancer
L’analyse transversale compare les caractéristiques des personnes de certains
groupes d’âge au cours d’une période de temps. Cependant, l’exposition à des
facteurs de risque est souvent différente d’une génération d’individus à l’autre, ce
50 D’une génération à l’autre: évolution des conditions de vie
qui est particulièrement vrai pour le cancer. L’analyse de cohortes se distingue en
ce sens qu’elle examine une même génération d’individus à différents âges, plutôt
que d’examiner différentes générations d’individus. Elle permet ainsi d’étudier l’ef-
fet de cohorte, soit l’effet des changements reliés à la génération de naissance plu-
tôt qu’à l’âge pour une année donnée.
La source de données, tant pour l’analyse transversale que pour l’analyse
intergénérationnelle, est le Registre national des décès au Canada. Les données de
mortalité des années 1950 à 1993 étaient disponibles au moment de la rédaction
de ce document. Depuis 1950, les critères de codification des causes de mortalité
sont relativement cohérents pour diagnostiquer les cancers. Les résultats ont été
obtenus grâce au logiciel d’exploitation de données ORIUS mis au point par le
Laboratoire de lutte contre la maladie de Santé Canada, puis attribués aux cohor-
tes de naissance ou «générations ».
Dans cette section, nous désignons par «génération 1 » le groupe de person-
nes nées entre 1896 et 1900, la «génération 2 » représente les personnes nées
entre 1911 et 1915, la «génération 3 » celles nées entre 1926 et 1930, et la «géné-
ration 4 », notre dernière cohorte, regroupe les personnes nées entre 1941 et 1945.
Ces «générations » ont été choisies parce que l’écart de temps entre chacune est
suffisamment grand pour que l’on y retrouve des comportements et des événe-
ments distinctifs.
L’analyse de cohortes se concentre sur les groupes d’âge 40-44 ans à
60-64 ans, pour les raisons suivantes. D’abord, le taux de mortalité par cancer avant
l’âge de 40 ans est très faible. Ensuite, la série de données utilisées (1950 à 1993)
rend impossible la comparaison de toutes les générations pour des groupes d’âge
supérieurs à 64 ans. Enfin, la mortalité prématurée est l’élément le plus intéressant
que ce type d’analyse permet d’étudier.
L’étude porte sur l’ensemble des cancers (Cim-9 140 à 208), le cancer du pou-
mon1, et les autres cancers, c’est-à-dire l’ensemble des cancers excluant celui du
poumon. La mortalité par cancer du poumon constitue le point central du chapitre
pour plusieurs raisons. D’abord, elle occupe le premier rang de la mortalité par
cancer au Québec : près de 40 % du total des décès par cancer chez les hommes et
20 % chez les femmes. De plus, la mortalité par cancer du poumon évolue selon
une tendance différente de celle de la mortalité due aux autres cancers. Enfin, des
facteurs de risque bien précis sont associés à une forte proportion des cas.
L’évolution des taux de mortalité par âge et sexe
Le taux spécifique de mortalité selon l’âge chez les hommes pour l’ensemble
des cancers a augmenté au Québec depuis les années 50, pour tous les groupes
d’âge supérieurs à 54 ans, et cette hausse s’est accentuée après l’âge de 75 ans
1. Dans le but d’alléger le texte, l’expression «cancer du poumon» regroupe les tumeurs malignes de la trachée, des
bronches et du poumon (Cim-9 162), de la plèvre (Cim-9 163), du médiastin (Cim-9 164.2, 164.3, 164.8, 164.9) et
de sièges autres ou non précisés de l’appareil respiratoire et des organes thoraciques (Cim-9 165).
Chapitre 9 Deux causes de décès : le cancer et le suicide 51
Figure 9.1
Taux de mortalité des hommes de 45 ans et plus selon l’âge, pour l’ensemble des
cancers, Québec, 1950-1993
Taux/100 000
Source : Base de données canadiennes sur la mortalité exploitées avec le système de traitement ORIUS développé
par Santé Canada.
Année
85+
80-84
75-79
70-74
65-69
60-64
55-59
50-54
45-49
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