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direct sur les prix, elles emploient des moyens indirects (§2.2). La crise les a
conduites à passer de la stabilité des prix à la stabilité financière (§2.3).
2.1) ancrage réel
a- stabilité des prix
Il est tentant pour un gouvernement d'utiliser le pouvoir monétaire de la BC pour
financer les dépenses publiques (BC "keynésiennes" d'après-guerre). Le résultat a
été la
grande inflation
des années 1970 (inflation à deux chiffres) que la liberté
d'émission (d'après 1976) privait de toute espèce de force de rappel. La pratique et
la critique théorique (Phelps, Friedman, Lucas, Sargent) ont mis en place un nouveau
cadre : les BC contemporaines (à partir des années 1980) ont été conçues pour la
stabilité des prix.
L'ancre nominale (convertibilité à taux fixe) ayant disparu est remplacée par une
"ancre réelle" : la BC doit conserver le pouvoir d'achat de la monnaie. Si un pain vaut
1, la valeur réelle de 1 en termes de pain est 1. Si le prix du pain augmente à
1,10, la valeur de 1 diminue à 1/1,10= 0,91. Bien sûr, on ne se base pas sur un
bien particulier mais sur l'ensemble des biens et services présents sur le marché.
Conserver le pouvoir d'achat de la monnaie signifie : maintenir stable le prix moyen
de ces biens et services ("niveau général des prix" NGP). Certains prix augmentent,
d'autres diminuent mais le prix moyen doit rester aussi stable que possible.
Suite à la
grande inflation
et à la difficulté d'en sortir, les BC ont reçu la mission
d'éviter l'inflation et ont été profilées dans ce but. Récemment, la crise financière et
la stagnation économique ont mis en avant la préoccupation symétrique: la déflation.
Inflation et déflation
Toute hausse du NGP n'est pas de l'inflation. Un processus inflationniste apparaît
lorsque la hausse des prix devient cumulative et autoentretenue par les
anticipations : une hausse des prix (1er tour) est d'abord absorbée : si elle se
reproduit, les acteurs économiques apprennent à répercuter sur leurs prix de vente
l'augmentation qu'ils subissent de leurs prix d'achat (effets de 2nd tour) ; si cela
continue, ils s'aperçoivent que, ce faisant, ils sont toujours en retard et apprennent
à ajuster leurs prix de vente, non plus sur l'inflation passée mais sur l'inflation
future qu'ils anticipent. Le processus s'emballe : les prix ne signifient plus rien, la
demande augmente pour se protéger des hausses futures (et accélère l'inflation),
le pouvoir d'achat de la monnaie diminue et la charge réelle des dettes aussi :
l'endettement devient sans limites puisqu'il ne coûte rien.
La déflation est un processus symétrique : la baisse des prix profite aux acheteurs
mais les acheteurs sont aussi des vendeurs ; prix et revenus, demande et offre
diminuent, l'économie se contracte et la charge des dettes (charge constante alors
que les revenus diminue) conduit aux défauts de paiement qui se traduisent par
des pertes pour les banques prêteuses qui font faillite ainsi que leurs créanciers. Le
système financier s'effondre et, avec lui, le système économique.
b) objectifs de la BC
Selon le cas, la BC reçoit la stabilité des prix comme objectif prioritaire (BCE) ou
comme un objectif parmi d'autres (FRS).
La BC européenne doit avant tout assurer la stabilité des prix. Si cet objectif est
atteint, il lui faut se préoccuper aussi de la croissance, dans la mesure où son action
dans ce but n'affecte pas la stabilité des prix. Comme cet objectif est inscrit dans un
traité international ("Traité de Maastricht") dont la révision exige l'unanimité des
signataires, en pratique, il n'est pas modifiable.
Le
Fed
s'est vu assigner trois objectifs non hiérarchisés : stabilité des prix, plein
emploi, taux d'intérêt à long terme aussi bas que possible pour favoriser
l'investissement. Comme des conflits d'objectifs sont possibles (par exemple, à l'été
2007 : forte inflation et début de la crise), des arbitrages sont à faire et des