MB7 : Bactériologie B3 – Génétique bactérienne
Janvier 2007
C. Carrière 1 Faculté de Médecine Montpellier - Nîmes
GÉNÉTIQUE BACTÉRIENNE
1. Définition de la génétique
Science de la variation et de l'hérédité, née de
l'étude chez les organismes doués de reproduction
sexuée, du croisement ou hybridation entre races ou
variétés de la même espèce.
2. Les variations génotypiques bactériennes
2.1. Définition de la variation génotypique
Il s'agit d'une modification spontanée ou induite,
discontinue, stable, rare, spécifique et iée à une modi-
fication du génome bactérien (ADN). Ceci définit, la
mutation.
2.2. Caractères
Spontanée : l'antibiotique, par exemple, sélec-
tionne les rares formes variantes pré-existantes
dans une population bactérienne comme dans
une tuberculose pulmonaire.
Induite : le caractère induit de la mutation bacté-
rienne est bien connu lors de l'utilisation de
rayonnements de type UV ou de substances
chimiques génotoxiques.
Discontinue ou brusque : elle apparait selon la
loi du tout ou rien.
Stable : le caractère acquis est alors transmissible
à la descendance, donc héréditaire.
Rare : elle est mesurable par le taux de mutation
qui est la probabilité pour une bactérie de muter
pendant une unité de temps définie (souvent le
temps de génération). Il est caractéristique d'un
caractère donné, de l'ordre de 10-5 à 10-10, le taux
moyen étant de l'ordre de 10-6. Il convient de sa-
voir qu'il y a une corrélation avec la fréquence
de mutants ou proportion de mutants qui
existe à un moment donné dans une culture.
Celle-ci est de détermination aisée.
Spécificité - Indépendance : la probabilité pour
une bactérie de subir simultanément deux mu-
tations distinctes est le produit des probabilités
individuelles de ces mutations. Cette notion est
d'importance, afin d'éviter la sélection d'un mu-
tant résistant, dans l'antibiothérapie, antitubercu-
leuse par exemple. L'instauration d'une mono-
thérapie est suivie de la sélection d'une souche
résistante. En effet, une caverne évolutive de 2
cm de diamètre peut contenir une population ba-
cillaire de l'ordre de 108 bacilles tuberculeux. Si le
taux mutation est de 10-5 pour l'isoniazide (INH)
et de 10-7 pour la rifampicine (RIF), la probabili-
té d'isoler un double mutant résistant à INH-RIF
est de 10-12.
Une telle émergence sera évitée par une antibio-
thérapie associant, au-moins deux antitubercu-
leux.
Modification de la structure du gène : unité de
transmission héréditaire, entrainant quelquefois
une modification de la structure primaire de la
chaine polypeptidique correspondante. La muta-
tion est une modification de l'ADN, donc de la
séquence désoxyribonucléotidique. Divers types
de mutation sont connues telles la modification
d'une paire de nucléotides ou plus. Leurs effets
sont variables: silencieux ou léthal.
2.3. Conclusions
Il s'agit d'un mécanisme mineur d'évolution
bactérienne, car la probabilité d'obtention de mutants
spontanés est faible souvent sans avantage sélectif
pour la forme variante, à l'exception de la résistance
aux antibiotiques.
3. Transferts de matériel génétique
3.1. Introduction
Il en existe trois : la transformation, la conjugai-
son et la transduction
Ces transferts d'acide désoxyribonucléique (ADN)
bactérien doivent être suivis de recombinaison géné-
tique dite légitime (s'il provient d'une même espèce ou
d'une espèce voisine). Dans d'autres circonstances,
l'ADN peut ne pas se recombiner (cf plasmide). Ces
transferts sont unidirectionnels, le plus souvent partiels
(1 à 2 % du génome transféré) et d'efficacité faible (fré-
quence de recombinaison de l'ordre de 10-6).
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3.2. La transformation bactérienne
3.2.1. Définition
La transformation "naturelle" ou physiologique
est le premier modèle connu de transfert de matériel
génétique lui-même (ADN), qui est fixé et absorbé
par des bactéries réceptrices, dites en état de compé-
tence. Ce modèle a permis de démontrer que l'ADN
était le support chimique de l'hérédité en 1944.
3.2.2. Caractéristiques
D'une part, il doit y avoir de l'ADN libéré d'une
bactérie (exogénote). D'autre part celui-ci doit être
fixé sur une bactérie réceptrice en phase de compé-
tence
Cette absorption d'ADN polymérisé est suivie
d'une recombinaison génétique légitime avec
acquisition de nouveaux caractères génétiques stables,
donc transmissibles à la descendance dénommés
recombinants ou transformants.
Ce transfert naturel d'ADN bactérien est limité à
quelques espèces telles Streptococcus dont S. pneu-
moniae, Neisseria, Haemophilus..... Il est partiel : une
partie de l'exogénote (1-2% du génome) pénètre et
se recombine (si homologie suffisante).
3.2.3. Applications scientifiques
En bactériologie médicale, son intérêt est lié à
l'émergence d'espèces résistantes aux antibiotiques
comme le pneumocoque ou récemment, le ménin-
gocoque.
Cette émergence de la résistance, à la pénicilline G
par exemple, a été lente depuis l'introduction des
antibiotiques. En fait ce phénonème n'a été possible
qu'après sélection de mutants résistants (streptoco-
ques buccaux) lors d'antibiothérapie puis de trans-
fert du ou des gènes de cette résistance par transfor-
mation naturelle à l'espèce pathogène potentielle en
situation de portage.
3.3. Conjugaison ou sexualité bactérienne
3.3.1. Définition
Processus sexuel strict qui nécessite un contact
préalable et un appariemment entre bactéries de sexe
différent avec la formation d'un pont cytoplasmique
permettant les échanges bactériens dont celui du
chromosome. Le facteur de sexualité ou de fertilité
(F) permet la synthèse de pilis sexuels chez la bacté-
rie donatrice ou mâle et donne la polarité au chomo-
some. Le transfert d'ADN chromosomique est à sens
unique, orienté, progressif et quelquefois total (2 h).
3.3.2. Caractéristiques
Spécificité - Fréquence : Le transfert d'ADN
chromosomique suivi de recombinaison est spé-
cifique (intra espèces), mais limité, en particulier
aux espèces à Gram négatif telles E. coli, Salmonel-
la, Pseudomonas aeruginosa et aussi chez les Strepto-
coccus.
Différenciation sexuelle : Le transfert d'ADN
qui est à sens unique ou orienté (croisements fer-
tiles (F) que dans un sens), met en évidence la
différenciation sexuelle entre le donneur et le re-
ceveur. Elle porte sur la présence du facteur
sexuel, appelé encore facteur de fertilité (F),
donnant la polarité à la bactérie donatrice ou
mâle (F+). Il s'agit du premier plasmide connu.
Son potentiel d'information génétique (de l'ordre
de 2 % de celui du chromosome bactérien) code
pour la biosynthèse d'appendices ou pili sexuels,
pour son insertion possible au chromosome bac-
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térien, pour la mobilisation ou le transfert partiel
ou non de ce dernier dans la bactérie réceptrice
(F-). La conjugaison est ainsi dénommée sexuali-
té des bactéries.
Contact ou appariement : Cette phase indivi-
dualise ce mode de transfert. En effet, le trans-
fert de gènes du donneur au receveur n'est pos-
sible qu'après la formation de paires ou couples
de bactéries donatrice-réceptrice. Le rôle des pilis
sexuels, flexibles ou non (2 à 3 par donneur) est
essentiel, bien qu'incomplètement élucidé. Leurs
extrémités spécifiques, repérées par des bactério-
phages, reconnaissent des zones de contact à la
surface cellulaire des bactéries réceptrices, s'y
fixent et se rétractent. Cette rétraction des pilis
sexuels a pour effet de rapprocher les deux bac-
téries de sexe différent permettant un contact
cellulaire étroit (pont cytoplasmique de 100 à 300
mµ).
Transfert de l'ADN chromosomique : La
mobilisation du chromosome de la bactérie do-
natrice peut alors débuter à travers le pont cyto-
plasmique sous la forme monocaténaire (un des
deux brins transmis). Ce transfert est à sens uni-
que, orienté et progressif, quelquefois total, du-
rant alors une centaine de minutes à 37° C. Son
interruption artificielle par agitation mécanique a
permis l'analyse cinétique.
Caractères transférés - fréquence : N'importe
quel gène bactérien peut être transféré comme
l'aptitude à biosynthétiser un acide aminé (thréo-
nine, leucine, sérine). La fréquence de recombi-
naison est faible, de l'ordre de 10-6.
Ce mode de transfert d'information génétique est
rencontré lors d'échange d'ADN non chromo-
somique comme l'ADN plasmidique (plasmides
conjugatifs). Il s'agit du principal facteur d'évolution
des bactéries, en particulier pour l'acquisition de la
résistance aux antibiotiques.
3.4. Transduction
3.4.1. Définition
Il s'agit d'un transfert d'ADN bactérien partiel,
par l'intermédiaire de bactériophages dont le rôle
est passif (vecteur). Il est dans ce cas, virulent donc
se multiplier dans la bactérie. Lors de la phase d'en-
capsidation, il incorpore de l'ADN bactérien frag-
menté.
3.4.2. Caractéristiques
INCIDENCE : Ce phénomène est en relation
avec l'existence de nombreuses souches lysogè-
nes. Il est décrit aussi bien chez les espèces bac-
tériennes à Gram positif (Staphylocoques, Bacil-
lus) qu'à Gram négatif (Entérobactéries, Pseudo-
monas).
TYPES : Trois variantes conditionnent les autres
caractères tels spécificité du ou des caractères
transduits, fréquence de transduction, recombi-
naison génétique ou non.
Ce transfert partiel de gènes bactériens peut
s'accompagner d'une recombinaison légitime (trans-
duction généralisée) ou non (tr. abortive et quelque-
fois tr. spécialisée).
En bactériologie médicale, on évoquera le
terme de conversion lysogénique qui pourrait être
une autre modalité de transduction ? Plusieurs exem-
ples ont un intérêt médical.
3.5. Conversion lysogénique
3.5.1. Définition
C'est l'acquisition par une bactérie d'un caractère
somatique particulier déterminé par le génome
d'un prophage spécifique. Son expression dans
toutes les bactéries est lié à l'état lysogène. Il dis-
parait avec la perte de celui-ci.
3.5.2. Exemples :
- toxine du bacille diphtérique
- toxine érythrogène par le streptocoque A
- certaines cytotoxines (vérotoxines) chez E.coli
ECEP
4. Les plasmides
4.1. Définition
ADN à double brin, circulaire, cytoplasmique
douées de réplication autonome et de taille variable.
Ils sont médiateurs de nombreuses propriétés per-
mettant une meilleure adaptation des bactéries, bien
que non indispensables au métabolisme normal de la
cellule-hôte (endosymbiotes). Leur transmission natu-
relle d'une cellule à l'autre s'effectue habituellement
par conjugaison, quoique les autres modes de trans-
fert soient possibles.
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4.2. Principales caractéristiques
On notera l'addition de ces propriétés par une même
souche :
Autres propriétés :
Ils sont doués de réplication autonome, assurant
sa survie ou son existence. Leur transmission d'une
cellule à l'autre s'effectue habituellement par
conjugaison (codent pour des pilis sexuels), ou encore
transduction ou transformation, mais souvent sans
spécificité d'hôte, d'où une diffusion entre espèces
bactériennes différentes.
4.3. Conclusion
Élèments de l'hérédité extrachromosomique, ils
donnent aux nombreuses espèces qui les hébergent
de nouveaux caractères. Il s'agit du principal proces-
sus d'évolution rapide des bactéries .
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