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Pancytopénie sous méthotrexate à faibles doses
Serraj et coll. (2007), dans un article paru récemment dans « La Revue de Médecine Interne », rappellent que le méthotrexate
peut induire même à faible dose (< 25 mg/semaine) des pancytopénies. A partir de l’analyse rétrospective de dossiers de pa-
tients hospitalisés au CHRU de Strasbourg sur une période de 10 ans et de la revue de la littérature récente, Serraj et coll.
tentent de faire le point sur les mécanismes et les facteurs prédisposant à cette complication.
L’auteur a identifié 5 cas sur une période de 10 ans à partir des résumés médicaux de sortie. Il s’agissait de 5 femmes âgées
en moyenne de 76 ans, traitées pour polyarthrite rhumatoïde (n = 4) et rhumatisme psoriasique (1) ayant pour antécédents une
cardiopathie dans 3 cas et une insuffisance rénale chronique dans 2 cas. Le délai moyen de survenue était de 21ans (3-35) (A
noter des délais beaucoup plus courts rapportés dans la littérature, p.ex. Gutierrez-Urena et coll. 1996 , avec un cas de pancy-
topénie survenu au bout de 2 prises de 5 mg/semaine). On notait la prise concomitante d’anti-inflammatoires non stéroïdiens
(AINS) chez 2 patientes et une supplémentation en acide folique (n = 2). Au moment de la découverte de la pancytopénie,
toutes les patientes avaient une insuffisance rénale, une hypoalbuminémie, un déficit en acide folique dans 4 cas et en vita-
mine B12 dans un cas. L’évolution a été favorable dans 4 cas et fatale dans un cas. L’auteur évoque une probable sous-
notification, Guttierez-Urena et coll. (1996) retrouve une fréquence de 1,4% dans des études prospectives à long terme chez
des patients traités pour polyarthrite rhumatoïde.
L’analyse de ces 5 dossiers retrouve certains facteurs favorisants bien connus et décrits entre autre dans le résumé des carac-
téristiques du produit comme l’insuffisance rénale, l’hypoalbuminémie, la prise d’AINS qui favorisent une augmentation de
la part efficace du méthotrexate, la carence en acide folique. Concernant l’influence du déficit en acide folique, l’auteur rap-
pelle que si des études rétrospectives ont mis en évidence un risque accru de pancytopénie lors de déficit en folates, d’autres
travaux n’ont pas réussi à montrer l’intérêt d’une supplémentation. Malgré cela, il existe des recommandations quant à une
administration systématique d’une dose de 5 mg d’acide folique par semaine, le lendemain de la prise de méthotrexate. Par
ailleurs, il rappelle que la macrocytose n’est pas un indicateur de risque de survenue de toxicité comme c’est le cas pour 3
patientes sur 5 de la série.
En plus des facteurs précités, il existerait des facteurs de susceptibilité individuelle à développer une insuffisance médullaire
sous méthotrexate. Ainsi certains patients présenteraient une baisse constitutionnelle de l’activité de la méthyltétrahydrofolate
réductase capable de convertir l’homocystéine en méthionine par une mutation des gènes codant cette enzyme. Pour les for-
mes homozygotes et hétérozygotes, cette baisse serait respectivement de 70 et de 30 à 40%. Il a été constaté une fréquence
élevée d’insuffisance médullaire chez les sujets porteurs de cette mutation par rapport à une population générale.
En conclusion, cet article rappelle le risque de pancytopénie lors de traitement par de petites doses de méthotrexate,
avec une fréquence (1,4%) considérée comme élevée, un délai de survenue extrêmement variable et des facteurs de
risque identifiés.
Pancytopénie sous méthotrexate à faibles doses : étude de cinq observations et revue de la littérature. K.Serraj, L.Federici, F.Maloisel, M.Alt, E.Andres. La
revue de Médecine Interne 28 (2007) 584-588.
Pancytopenia secondary to methotrexate therapy in rheumatoid arthristis. S. Guttierrez-Urena, J.F Molina, C.O. Garcia,M.L. Cuellar and.LR.Espinoza.
Arthristis and Rheumatism, 1996, 39 (2), 272-6.
Marie ZENUT
Une liste française de médicaments potentiellement dangereux chez le sujet âgé
Un travail de nos collègues du Centre Régional de Pharmacovigilance de Limoges a abouti à une liste de médicaments poten-
tiellement dangereux en pratique gériatrique, issue d’un consensus de quinze experts français (5 pharmacologues, 5 gériatres,
2 médecins généralistes, 2 pharmaciens et un pharmacoépidémiologiste) interrogés sur l’opportunité de prescription aux 75
ans et plus. Elle a récemment été publiée dans l’European Journal of Clinical Pharmacology
(2007) 63 : 725-731
Une telle liste existait déjà aux Etats-Unis et au Canada mais son contenu restait parfois difficilement transposable à la France
et à l’Europe.
Ces classes thérapeutiques ont été considérées comme inappropriées en raison :
- dans 25 cas, d’un rapport bénéfice risque jugé défavorable,
- dans 1 cas, d’une efficacité douteuse,
- dans 8 cas, d’une efficacité douteuse doublée d’un rapport bénéfice / risque défavorable.
Pour chacune de ces classes, il a été proposé des alternatives thérapeutiques : substitution, adaptation posologique, voire abs-
tention pure et simple.
Le tableau des pages suivantes donne quelques exemples de cette liste qui ne prétend bien sûr pas remplacer le jugement du
clinicien mais peut lui fournir une aide à la prescription.
Alexandre PERRAZI