Cross Asset Invt Strategy Mensuel_Janvier 2015_VF.indd

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Cross asset
investment
strategy
Recherche, Stratégie et Analyse
01
#
MENSUEL
Janvier 2015
Allocation d’actifs
QE souverain
Chine
Déflation
Pétrole
Banques centrales
Valeurs de croissance
TLAC
Europe centrale
Obligations High Yield
Achevé de rédiger le 8 janvier 2015
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
01
#
Janvier 2015
Sommaire
Repères
Allocation d’actifs : stratégies d’investissement d’Amundi
Page 4
Quel serait l’impact d’un QE européen de grande ampleur ?
L’année 2015 s’ouvre avec la perspective d’un nouveau programme de quantitative
easing de la part de la Banque centrale européenne. La progression annoncée par
M. Draghi de 50 % du bilan de la BCE ne peut qu’avoir des conséquences importantes :
la confirmation du maintien de taux courts à zéro, une nouvelle baisse des taux longs
notamment.
Facteurs de risque
Contexte macroéconomique
Prévisions macroéconomiques et financières
Page 9
Page 10
Page 11
Pétrole
1 Baisse du prix du pétrole : impacts sur la croissance
et sur la vulnérabilité financière
Page 12
Depuis la mi-2013, le baril de pétrole a perdu plus de 40 $, passant de 100 $ à moins de
60 $. Cette chute trouve ses origines dans le ralentissement économique de grands pays
comme la Chine, le Brésil et la Russie, mais cela ne suffi t pas, loin de là, à tout expliquer.
Politique monétaire
2 Fed vs BCE : des stratégies totalement antagonistes ?
Page 16
La Fed a terminé le quantitative easing tandis que la BCE est sur le point de s’engager
dans un programme, sans doute de grande ampleur. Alors que la première devrait
procéder à ces premières hausses des taux en fin d'année 2015 (au plus tôt ?), la
seconde ne devrait pas être en mesure de faire de même avant 3 ou 5 ans. Au-delà de
ces divergences majeures, quelques points rapprochent ces deux banques centrales,
comme l'absence d'inflation, la lutte contre la déflation, et la nécessité d'éviter une
hausse des taux longs.
> FOCUS > La baisse du prix du pétrole emmène les anticipations
d’inflation à la baisse
Europe centrale
3 Les pays d'Europe centrale réagissent de façon
différenciée au risque déflationniste
Page 20
Depuis quelques trimestres, les pressions déflationnistes en zone euro ont amené la
BCE à muscler sa politique monétaire, tandis qu’elles se propageaient vers les pays
d’Europe émergente. Dans ce contexte, la Pologne, la Hongrie, la République Tchèque
et la Roumanie doivent maintenant trouver les réponses de politique économique
appropriées : compte tenu de leur forte intégration à la zone euro, leur ambition sera de
contenir la contagion déflationniste en provenance de la zone euro.
> FOCUS > Les prêts en devises étrangères, un facteur aggravant
dans la lutte contre la déflation
2
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Janvier 2015
Chine
4 La Chine au XXIe siècle :
manipuler avec précaution
Page 25
Le risque déflationniste va-t-il se répandre ou non sur l'économie mondiale, par
l'intermédiaire des surcapacités accumulées depuis 2009 ? Cela dépendra de la Chine
et du succès de sa transition vers une vraie économie de marché. Une éventuelle (pour
ne pas déjà dire probable) dépréciation modeste et graduelle du yuan traduirait une
récession (de croissance) ( légèrement) déflationniste due à un atterrissage plus rude
que prévu par les autorités. Malgré leur apparence désordonnée, la multiplication de
mesures toujours plus diverses visant à stabiliser les secteurs immobilier et financier
tend à confirmer un début de ralentissement dans la croissance tendancielle.
> FOCUS > Comment Deng Xiaoping a façonné
la Chine d’aujourd’hui
Obligations High Yield
5 High Yield américain vs High Yield européen :
une différence notoire
Page 31
Le découplage récent entre les performances du haut rendement américain et
européen s'explique à la fois par des facteurs bottom-up et top-down. Des écarts dans
la composition de ces deux marchés jouent notamment un rôle important, dans la
mesure où l'univers des obligations spéculatives américaines contient plus d'émetteurs
faiblement notés que son homologue européen.
> FOCUS > Taux de défaut des obligations spéculatives :
tendances 2014 et anticipations des agences
de notation pour 2015
Actions
6 Valeurs de croissance :
un risque ou une opportunité ?
Page 33
Le ratio des valeurs de croissance rapportées aux valeurs décotées du MSCI Monde
(MSCI Growth/Value) casse à nouveau ses plus hauts de la mi-2012. Historiquement les
cycles en faveur des valeurs de croissance se sont toujours finis par des exagérations…
et la chute qui a suivi n’en n’a été que plus brutale. Si l'on veut accompagner le
mouvement, la sagesse consiste à combiner valeurs de technologie, majoritairement
américaines (ce qui permet en plus d’être exposé au dollar US), et valeurs de rendement
(une autre façon de profiter des taux bas). Mais mieux vaut éviter la biotechnologie et
les réseaux sociaux, déjà bien engagés sur le chemin d’une bulle.
Éclairage sectoriel
7 Le ratio de capacité d’absorption des pertes
du Conseil de stabilité financière : plus de peur
que de mal pour les banques européennes ?
Page 36
Le TLAC (« ratio de capacité d’absorption des pertes ») est le nouveau ratio réglementaire
introduit par le Conseil de stabilité financière en novembre dernier. Le conseil recommande
ainsi que les banques d’importance systémique détiennent l’équivalent de 16 % à 20 %
de leurs actifs pondérés sous forme d’instruments de capital ou de dette, susceptibles
d’être liquidés pour contribuer à une résolution ordonnée.
> FOCUS > Vue d’ensemble des exigences du TLAC
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3
01
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Janvier 2015
Allocation d’actifs : stratégies d’investissement d’Amundi
Quel serait l’impact d’un QE européen
de grande ampleur ?
PHILIPPE ITHURBIDE, Directeur Recherche, Stratégie et Analyse – Paris
Depuis bientôt 3 ans, la Banque centrale européenne (BCE) s'est engagée dans
des programmes de politique monétaire non conventionnelle. La raison est
multiple :
• Tout d'abord, la faiblesse de la croissance économique qui fait suite à une
récession de grande ampleur et l'apparition de divergences économiques
sans précédent entre les états membres de la zone euro. Une large part de
ces divergences persiste, et certaines convergences ne sont qu‘apparentes,
comme par exemple les excédents courants, qui reflètent en fait des excédents
d’épargne dans le nord de l’Europe, et des déficits d’investissement dans le
sud, deux réalités diamétralement opposées, par nature, et aux conséquences
bien différentes ;
• Ensuite la volonté de remettre à flot le système bancaire européen, fortement
affecté par les excès de crédit, la baisse des résultats et globalement la fragilité
financière ;
• Pousser les taux à des niveaux extrêmement bas a également fait partie de sa
stratégie pour, d'une part stimuler l'investissement, et d'autre part - et surtout
- rendre plus solvables des entités qui ne l'étaient plus ou dont la solvabilité
était mise à mal.
• La BCE a également pris conscience de la nécessité de favoriser l'accès au
crédit, notamment pour les petites et moyennes entreprises dont le rôle est
crucial dans les économies européennes, aussi bien en matière d’emploi que
d’investissement (voir sur ce point notre édition du mois de décembre).
• Enfin, il est question ici de sortir la spirale déflationniste qui gêne la croissance
économique. La baisse des taux d’inflation a pour conséquence de reporter
les plans de consommation, d’investissement et d’embauche, ce qui réduit
considérablement les perspectives de croissance.
Tout récemment, Mario Draghi, le président de la BCE rappelait à quel point il était
attaché à ce que le bilan de la banque centrale progresse de nouveau. L'objectif
de 3 000 Mds d'euros (une hausse de 1 000 Mds, soit un équivalent de 10 % du
PIB de la zone) a été confirmé en même temps que les prévisions de croissance
économique étaient révisées à la baisse : la BCE prévoit désormais une croissance
du PIB de 1 % en 2015 (contre 1,6 % précédemment), et de 1,5 % en 2016 (contre
1.9 % précédemment). Il a également rappelé que la BCE était prête à modifier dès
le début 2015 si besoin est « la taille, le rythme et la composition de ses mesures »
si les signaux de croissance et d'inflation se détérioraient encore. Plus récemment
encore, M. Praet, chef économiste de la BCE, indiquait qu’il était possible que
le taux d’inflation de la zone euro passe – temporairement – en territoire négatif.
Quand on sait qu’il y a un peu plus de 2 ans, seuls 5 % de la zone étaient en
déflation, on comprend mieux les annonces du gouverneur de la BCE. Au-delà
des LTRO, et des programmes d’achats d’ABS et de covered bonds (qui, au total,
représenteront au mieux 500 ou 600 Mds d’euros), il est désormais question d’un
QE souverain, ou d’un QE portant sur les dettes privées… ou des deux.
Il convient de signaler un fait « nouveau ». Pendant ces trois dernières années, les
banques ont été des acheteurs « naturels » de dette publique, du fait de la nécessité
de réduire le risque, mais aussi et surtout pour des raisons réglementaires, pour
restaurer leurs ratios de liquidité / capital… Cela a permis un financement plus
aisé de la dette publique nationale (via une renationalisation de la dette et des
débouchés naturels ou forcés), mais cela a renforcé le lien entre banques et États.
Un lien qui a déjà eu des effets dévastateurs il y a moins de 4 ans. Or les banques
ne sont plus des acheteurs aussi actifs, surtout dans les pays du noyau dur,
maintenant que ces ratios sont respectés (ou quasiment). Le fait que les achats
bancaires se tarissent dans les pays du noyau dur et se poursuivent dans les
pays périphériques est un argument fort en faveur d’un QE de la BCE : celle-ci
4
L’essentiel
L’année 2015 s‘ouvre avec la
perspective d’un nouveau programme
de quantitative easing de la part de
la Banque centrale européenne. La
progression annoncée par M. Draghi
de 50 % du bilan de la BCE ne
peut qu’avoir des conséquences
importantes : la confirmation du
maintien de taux courts à zéro,
une nouvelle baisse des taux longs
notamment et, si cela plaît aux
marchés financiers, une nouvelle
progression des actions et une
nouvelle rédaction des spreads,
souverains et corporates.
La baisse de l’euro est également une
des conséquences souhaitables du QE.
Pour parvenir à accroître le bilan de
1 000 Mds, il faudra bien plus que des
TLTRO, des achats d’ABS ou de « covered
bonds ». Sont désormais attendus soit
un programme d’achats d’obligations
d’entreprises, soit un programme d’achat
d’obligations souveraines… soit les deux.
Le risque serait de voir la BCE décevoir ces
espoirs.
Un nouveau QE serait
amplement justifié
Vers des achats de dettes
souveraines, de dettes
d'entreprises… ou les deux ?
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Janvier 2015
doit pallier l’absence des banques « du nord », et confirmer son soutien aux
banques « du sud » en affaiblissant le risque lié au lien banques – États.
115
EUR/USD
Nominal trade-weighted euro
110
105
100
95
01-15
09-14
05-14
01-14
09-13
90
05-13
À l’opposé des OMT qui prévoyaient d’acheter la seule dette des pays « en
détresse », une mesure en conflit avec les statuts de la BCE (et à laquelle on ne
peut adhérer qu’en dernier recours), il est probable que la BCE achète des titres
souverains de l’ensemble des pays de la zone. Selon quelles modalités ? Sans
doute en lien avec la participation relative de chaque pays au capital de la BCE,
car des achats en lien avec le stock de dette seraient fortement biaisés en faveur
des pays les plus endettés, ce qui serait perçu comme une aide aux « mauvais
élèves ». L’objectif de la BCE est désormais de justifi er une telle mesure par la
nécessité de lutter contre la menace déflationniste, une menace sur la stabilité
des prix, en d’autres termes, sa mission unique.
EUR/USD et taux de change nominal effectif
de l'euro (100 en janvier 2012)
01-13
Adopter un QE conforte également notre anticipation de maintien des
taux longs à un bas niveau… et de l’existence d’un potentiel de baisse
supplémentaire. L'extension du bilan de la BCE devrait se traduire par un repli
supplémentaire des taux à 10 ans en zone euro. Pour atteindre un programme
total de 1 000 Mds d’euros, la BCE serait sans doute « forcée » de compléter les
mesures actuelles (TLTRO, Achats d’ABS et de covered bonds) par des achats
d’obligations privées ou souveraines. Si tel était le cas, les taux obligataires de
la zone reprendraient le chemin de la baisse.
1
09-12
3. Impact sur les dettes souveraines : poursuite des baisses de taux longs,
même si le potentiel est désormais extrêmement limité s’agissant des
pays du noyau dur
Taux 10 ans allemand :
un objectif à 0,25 % ?
05-12
La perspective d’un QE de grande ampleur conforte amplement les anticipations
de voir l'euro se dégrader au cours des mois à venir. Que ce soit aux ÉtatsUnis ou au Japon, les programmes de QE se sont traduits par une dépréciation
de la monnaie nationale… c’est d’ailleurs un objectif implicite (États-Unis et sans
doute zone euro) ou explicite (Japon). À supposer que le QE soit rapidement
annoncé, de taille conséquente et très bien perçu par les marchés, l’EUR/USD
pourrait revenir en dessous de 1.10. Il serait assez étonnant que « toutes les
planètes soient aussi bien alignées » en même temps et que la baisse de la
parité soit aussi conséquente. Autrement dit, nous conservons notre objectif de
1,15 / 1,20 pour la parité EUR/USD tout au long de 2015, avec une inclination à
aller plus bas à court terme. À dire vrai, ce qui importe pour la croissance de la
zone euro, ce n’est pas vraiment la parité EUR/USD, mais le cours de change
effectif de l’euro, c’est-à-dire le cours de l’euro pondéré par les échanges avec
les pays partenaires de la zone. Alors que l’EUR/USD a récemment perdu près
de 10 %, le cours effectif actuel de l’euro a peu bougé ces derniers mois (voir
graphique).
01-12
2. Impact sur le marché des changes : vers un euro plus faible…
09-11
La probabilité de voir les taux directeurs progresser à horizon 3 ou 5 ans
est quasiment nulle. Comme dans le cas des États-Unis, tant que dureront
des mesures non conventionnelles, il ne saura être question de relever les taux
directeurs. Autrement dit, le décalage entre la politique monétaire américaine et
européenne ne peut qu'amplifi er. Ceci justifi e la poursuite de l'élargissement des
écarts de taux court et longs entre ces deux zones.
05-11
1. Impact sur les taux courts : très bas pour (très) longtemps
Les banques du noyau dur
achètent moins de dette
publique, les banques du Sud
en achètent encore :
la BCE doit pallier l’absence
des premières et soutenir les
secondes
01-11
Que faut-il penser d’un QE de grande ampleur ?
Une évaluation des impacts potentiels
Source : Datastream, Recherche Amundi
Dans ce cas, il faut regarder deux choses :
• La dette relative entre les pays,
• Le montant des émissions nettes.
Plus la dette est faible et plus les besoins d’émissions sont faibles, et plus le pays
bénéficiera du QE. Le tableau de la page suivante met en évidence l’impact relatif
d’un QE souverain de 500 Mds portant sur l’ensemble des titres à coupon, et dont
les achats de titres seraient effectués au prorata des différents pays dans le capital
de la BCE. On voit que les pays bénéficiant le plus d’un tel programme seraient
l’Allemagne (compte tenu de l’absence de besoins de financement) et l’Autriche
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Janvier 2015
(faible dette et faibles besoins de financement). Il bénéficierait également à l’Italie :
certes, la dette publique est élevée, mais les émissions nettes y sont relativement
faibles… en outre, les achats de la BCE qui découleraient d’un QE de 500 Mds
seraient de l’ordre de deux fois et demi le montant des émissions nettes de l’Italie
en 2015. La France et l’Irlande, quant à elles, en bénéficieraient moins, en termes
relatifs (dette et besoins de financement plus élevés). Grâce à cet effet rareté, et
à condition que le QE soit ample et bien perçu, le taux 10 ans allemand pourrait
atteindre 0,25 %. Un tel mouvement s’accompagnerait également de réduction
des spreads souverains, avec un biais plus favorable pour les pays à plus faible
dette et moindres besoins de financement… et qui bénéficieraient le plus du
programme d’achats de la BCE.
Une question importante se pose au sujet de la stratégie d’annonce de la BCE.
Plusieurs options se présentent :
• Annoncera-t-elle un QE à étages, un peu comme aux États-Unis (d’abord
un Q1 (de faible montant), puis un Q2, puis un Q3)… ou annoncera-t-elle
rapidement un QE de grande ampleur ? Dans le premier cas, il pourrait y avoir
des déceptions (mesures trop faibles, trop tardives…), et dans le second cas
l’espoir d’un regain d’optimisme sur la croissance et un impact conséquent
sur les actions, les taux et les spreads.
• Annoncera-t-elle un montant global sans mentionner d’échéance particulière,
ou préférera-t-elle annoncer en même temps un montant global avec une
échéance spécifique ? Dans le premier cas, beaucoup d’incertitudes sur le
rythme des achats, et dans le second cas, la possibilité de réduire cette
incertitude et de déduire des montants d’achats mensuels par pays.
Les jeux sont ouverts. Ce qui est sûr, c’est que la stratégie d’annonce peut
s’avérer cruciale car elle peut rassurer – ou inquiéter – sur le financement de
tel ou tel pays. Certains pays peuvent avoir leurs émissions nettes (voire même
leurs besoins totaux de financement) couverts uniquement par les achats de
la BCE. Pour d’autres, suivant les montants et les échéances, cela peut être
moins favorable. Les chiffres mentionnés ci-dessus et qui figurent sur le tableau
montrent bien l’avantage, toutes choses égales par ailleurs de l’Autriche,
l’Allemagne et de l’Italie sur la France ou l’Irlande.
4. Impact sur les obligations d’entreprises
Un QE sur les obligations privées se heurterait sans doute aux problèmes de
liquidité de ce marché. Ceci étant, que ce soit un programme portant sur les
obligations privées ou sur les titres souverains, il semble acquis que les spreads se
resserreraient davantage, d’une part grâce à la liquidité apportée par la BCE, mais
aussi du fait de la baisse des taux et de l’augmentation de l’appétit pour le risque.
Il faut sans doute privilégier les titres à rareté relative (ceux à solide solvabilité et
faibles programmes d’émissions).
5. Impact sur les marchés d’actions
Les marchés d’actions bénéficieront également d’un programme de QE souverain.
On peut avancer 5 facteurs favorables :
1) la baisse de l’euro,
2) le niveau des taux courts,
3) le niveau des taux longs,
4) l’amélioration des perspectives de croissance,
5) l’appétit pour le risque.
6. Impact sur l’activité économique
L’histoire montre que les politiques, qu’elles soient conventionnelles ou non, sont efficaces
si elles suffisent à générer des effets de richesse conséquents, et si les taux baissent
en deçà des anticipations de croissance économique. Le QE sera favorable à l’activité
économique si un certain nombre de canaux de transmission opèrent correctement :
• Le canal des cours de change : une baisse de l’euro contre dollar n'est
pas la solution, c’est une baisse du cours de change effectif de l’euro qui
est nécessaire. Pour cela, il faudra d’une part que l’euro soit plus fragile que
le yen ou nombre de devises émergentes : le QE européen est à mettre en
perspective avec le QE japonais, ou la faiblesse des économies émergentes.
6
Dette Publique : quelques indicateurs clé
Part dans
le capital
BCE
Dette
Émissions
obligataire,
nettes,
hors T-bills
2015
(en Mds €)
Allemagne
25,7 %
1 094
-10
France
20,3 %
1 358
89
Italie
17,6 %
1 654
33
Espagne
12,6 %
855
41
Pays-Bas
5,7 %
339
16
Belgique
3,5 %
320
11
Grèce
2,9 %
68
-7
Autriche
2,8 %
203
4
Portugal
2,5 %
104
7
Finlande
1,8 %
95
5
Irlande
1,7 %
117
12
La politique monétaire
va-t-elle redevenir efficace
grâce à un QE souverain ?
L'impact d'un QE souverain de 500 Mds €
Achats
BCE
(en Mds €)
% de la
dette
obligataire
% des
émissions
nettes
Allemagne
129
11,8 %
France
101
7,5 %
114 %
Italie
88
5,3 %
267 %
Espagne
63
7,4 %
154 %
Pays-Bas
29
8,4 %
179 %
Belgique
18
5,5 %
161 %
Grèce
15
21,4 %
Autriche
14
6,9 %
351 %
Portugal
12
12,0 %
178 %
Finlande
9
9,4 %
180 %
Irlande
8
7,1 %
69 %
Les risques
n'ont pas disparu
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Janvier 2015
Il faudra d’autre part que les comportements de marges ne se traduisent pas
par l’élimination de cet avantage de compétitivité. Cela serait dommageable à
la croissance économique. Or les marges des entreprises sont insuffisantes
dans certains pays, comme la France.
• Le canal des taux d’intérêt : la BCE peut pousser les taux plus bas, mais ils sont
déjà à un niveau extrêmement bas. Le QE et les LTRO pousseront-ils les banques
à prêter davantage ? Ce qui est sûr, c’est que les conditions de crédit continuent
de s’améliorer, mais pas pour les PME, qui dépendent fortement des banques.
• Le canal de la liquidité et des effets de richesse : la zone euro peut compter
sur ces canaux si les mesures de la BCE sont bien perçues. On sait le retard
accumulé depuis 4 ans entre les profits et les valorisations entre États-Unis et
Europe. Rappelons toutefois que l’effet de richesse via les actions est, du fait
de la composition des portefeuilles des particuliers, bien plus efficace (pour le
meilleur et pour le pire) aux États-Unis qu’en zone euro.
• Le canal des anticipations d’inflation est crucial. Une hausse de ces
dernières accélérerait les plans de consommation et d’investissement.
Nul doute qu’un QE de grande ampleur aurait de quoi plaire à des marchés financiers
en attente de mesures fortes de la part de la BCE. À moyen terme, il faudra toutefois
que les canaux de transmission à l’économie réelle opèrent avec efficacité, faute
de quoi on retournera dans les doutes et interrogations sur la capacité de la zone
euro à accroître son potentiel de croissance, à sortir de la stagnation / déflation, et
à maîtriser l’évolution de sa dette publique. L’enjeu est de taille.
Au total, nous ne validons pas (pas encore ?) les prévisions extrêmes présentées cidessus sur les taux longs (0,25 % pour l’Allemagne, 0,40 % pour la France…) et sur
les spreads souverains, et même si l’on reste prudent quant à l’efficacité immédiate
d’un QE sur la croissance économique de la zone euro (nous ne révisons pas à la
hausse nos prévisions de croissance (0,9 % pour le PIB de la zone en 2015, 1 %
en Allemagne, 0,7 % en France…), nos stratégies - qui misent sur une réaction
favorable à la mise en place d’un vaste QE - restent les suivantes :
• Short euro contre dollar
• Long souverains périphériques
• Long duration sur les souverains du noyau dur
• Long obligations d'entreprises
• Long actions zone euro
Nul doute qu’un QE de grande
ampleur aurait de quoi plaire
à des marchés financiers en
attente de mesures fortes
de la part de la BCE
Impact d'un programme de QE souverain de 500 Mds
Rationnel
Objectifs / Stratégies
Taux courts
Pendant le QE, maintien des taux
courts à zéro (cela durera au moins
3 ans)
Taux 3 mois entre 0 % et 25 pb
Taux longs
noyau dur
Repli de l'ensemble des taux longs
car achats de titres souverains
par la BCE, y compris du noyau dur
10 ans allemand : 0,25 %
10 ans FR : 0,40 %
Spreads
souverains
Le soutien de la part de la BCE
renverse l’asymétrie du risque, qui
redevient favorable aux obligations
Miser sur un resserrement des
spreads souverains, sur la baisse
des taux longs, et sur le fait qu’un
QE souverain serait plus favorable à
l’Allemagne, à l’Italie, et à l’Autriche
qu’à la France ou à l’Irlande
Obligations
d'entreprises
Les spreads se resserreraient
davantage : 1) grâce à la liquidité
apportée par la BCE, 2) du fait de la
baisse des taux et 3) grâce à l'appétit
pour le risque
Privilégier les titres à rareté relative
(ceux à solide solvabilité et faibles
programmes d'émissions)
Actions
4 facteurs favorables :
1) la baisse de l'euro, 2) le niveau
des taux d¹intérêt (courts et longs),
3) l'amélioration des perspectives de
croissance et 4) l'appétit pour le risque
Privilégier les actions sensibles
au taux d'intérêt, au cours de change,
à fort beta, et qui pourraient bénéficier
d'opérations de fusions - acquisitions
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#
Janvier 2015
Quels sont les risques ?
Quatre risques majeurs persistent :
• un nouvel affaiblissement de la croissance en zone euro, qui pourrait provenir
soit d’un ralentissement économique mondial, soit de l’incapacité à relancer
l’investissement ;
• les marchés financiers saluent favorablement le QE de la BCE, mais les
perspectives de croissance restent faibles, car les canaux de transmission
de la politique monétaire non conventionnelle restent bloqués ;
• le regain des pressions déflationnistes ;
• la BCE déçoit les marchés financiers, du fait de mesures tardives ou jugées
insuffisantes.
Parmi les autres risques, mentionnons :
• une incompréhension sur la politique monétaire de la Fed ;
• des déséquilibres financiers dans certains pays émergents du fait de la
baisse du prix du pétrole ;
• une guerre des changes en Asie.
ALLOCATION D’ACTIFS
PERSPECTIVES COURT TERME
-- -
+ ++
CASH
Dollar US
Euro
OBLIGATIONS SOUVERAINES
États-Unis
Zone euro (noyau dur)
Zone euro (pays périphériques)
Royaume-Uni
Japon
Dettes émergentes
OBLIGATIONS CORPORATE
Investment Grade Europe
Investment Grade US
High Yield Europe
High Yield US
ACTIONS
États-Unis
Zone euro
Europe hors zone euro
Japon
Émergents
DEVISES
Dollar US
Euro
Sterling
Yen
Devises émergentes
(--) Nettement sous-pondéré
(-) Sous-pondéré
( ) Neutre
(+) Surpondéré
(++) Nettement surpondéré
TYPE DE PORTEFEUILLE
Portefeuilles d’actions
• Préférer les actions zone euro
• Neutre à sous-pondéré en actions US
Portefeuilles obligataires
• Surpondération crédit, plus spécialement
Europe High Yield
• Sous-pondération US et RU (short duration)
• Marchés émergents : choix pays clivant…
• Rester surpondéré sur le souverain Italie,
- surpondéré Inde, Thaïlande et Mexique
- neutre Chine, Turquie, Brésil,
Afrique du Sud et Indonésie
- sous-pondéré : Malaisie, pays du Golfe,
Grèce, Taiwan, Russie, Corée et Chili
• Neutre cycliques et pharma, sous-pondéré
consommation courante
• Rester long USD et GBP, short JPY et EUR
8
• Rester neutre en actions US
• Préférer les actions zone euro et Japon
• Bêta du portefeuille maintenu à neutre
• Au sein des pays émergents :
Portefeuilles diversifiés
et Espagne
• Rester en dehors des pays à très faibles
solvabilité et liquidité
• Prudence sur les actions émergentes…
préférer les pays consommateurs
de matières premières
• Préférer les actions aux crédits
• Rester long en crédit HY pour le portage,
• Long duration sur cœur zone euro
• Dettes émergentes : surpondérer
les dettes des pays consommateurs
de matières premières
• Long fi nancières
et plutôt zone euro qu’États-Unis
• Surpondérer obligations périphériques
européennes
• Positif sur dette émergente en dollar
• Rester long USD et GBP, short EUR et JPY
• Rester long USD, GBP, short JPY, EUR
•
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01
#
Janvier 2015
Facteurs de risque
JANVIER
NIVEAU DE RISQUE
FED :
UNE POLITIQUE MONÉTAIRE MAL COMPRISE
Le marché du travail s’est nettement raffermi au cours des 18 derniers mois, mais l’excès d’offre sur le marché du
travail reste important, le taux de participation faible et les salaires contenus. La Fed doit gérer au mieux les indicateurs
économiques, ses propres prévisions et celles des marchés financiers. La normalisation n’est pas à l’ordre du jour, mais
tout plaide pour un regain de volatilité et des risques d’incompréhension.
RISQUE MODÉRÉ
••
ZONE EURO :
UN QE PERÇU COMME ÉTANT TARDIF ET TROP FAIBLE
La BCE va s’engager dans un programme de QE. Il est désormais question d’un QE souverain et/ou d’un QE sur
les obligations d’entreprises. Ce qui est surtout attendu, au-delà de la composition, c’est un programme de grande
ampleur, afin de parvenir à l’expansion de bilan de la BCE évoquée par M. Draghi. Qu’il soit perçu comme tardif et/
ou insuffisamment important, et il en sera fini du confort tout relatif sur les perspectives de croissance tandis que les
craintes sur la solvabilité de certains États ne manqueront pas de refaire surface, avec à la clef, les impacts que l’on
imagine aisément sur les spreads souverains.
RISQUE MODÉRÉ
•
ZONE EURO :
INTENSIFICATION DES RISQUES DE DÉFLATION
Les pressions déflationnistes se sont intensifiées durant l’été. Le ralentissement des prix est surtout dû à la désinflation
des prix des matières premières et de l’alimentation. La BCE est passée en mode de risk management et se tient prête
à passer en mode QE. Que le QE à venir soit bien reçu par les marchés financiers est positif, mais encore faudra-til que les canaux de transmission (canal des effets de richesse, canal du cours de change, canal des taux d’intérêt,
canal de la liquidité) se mettent enfin à fonctionner, ce qui se traduirait par de meilleures perspectives de croissance,
un financement plus aisé des entreprises (PME comprises, un retour de l’investissement…). Dans le cas contraire, les
pressions déflationnistes s’intensifieront.
RISQUE MODÉRÉ
•
PÉTROLE :
POURSUITE DE LA BAISSE DES PRIX
La baisse du prix du pétrole a donné un coup de pouce à la croissance des pays consommateurs, ainsi qu’une bouffée
d’oxygène aux pays en lutte avec une inflation mal maîtrisée (Inde, Indonésie…). En revanche, elle accroît la vulnérabilité
financière de certains États producteurs de pétrole, ceux qui dépendent fortement du pétrole en matière d’exportations
et de recettes fiscales (Venezuela, Angola, Nigeria, Équateur). La situation actuelle pousse la Russie vers la récession et
le Venezuela vers le défaut. Une poursuite de la baisse du prix du brut aggraverait encore une situation déjà fortement
dégradée.
RISQUE MODÉRÉ
•
CHINE :
UN RALENTISSEMENT BRUTAL
L’enjeu de la Chine est de réduire la dette (maîtriser le crédit et le shadow banking, réduire dette et créances douteuses),
renouer avec une croissance potentielle plus forte et une plus forte productivité (la démographie n’aidera pas). La
croissance sera désormais plus faible, mais elle doit être de « meilleure qualité ». La Chine a les moyens d’accompagner
cette - longue - transition, mais l’enjeu et la tâche à accomplir restent néanmoins colossaux. La forte baisse du prix du
pétrole est un atout, mais la dynamique actuelle est faible.
RISQUE MODÉRÉ
•
ÉCONOMIES ÉMERGENTES :
UN REPLI PLUS PRONONCÉ DE LA CROISSANCE
La fin du QE américain n’a pas pesé sur les marchés émergents. Les anticipations de remontée des taux directeurs
américains plus tard, fin 2015, semblent bien ancrées. Ce sont les fondamentaux de certains pays qui inquiètent
(récession en Russie, nette détérioration de la conjoncture au Brésil, ralentissement immobilier en Chine, etc.). Le risque
d’accélération de la poursuite du ralentissement en 2015 pour l’ensemble des pays émergents nous semble limité, mais
il est à suivre de très près.
RISQUE MODÉRÉ
••
UNE GUERRE DES CHANGES RÉGIONALE
Le regain de faiblesse de l’euro et du yen, le QE de la BCE et les mesures d’assouplissement supplémentaires de la
BoJ exacerbent les tensions en Asie (en particulier en Corée et en Chine), où la chute du yen en 2013 avait pesé sur les
relations commerciales. Ceci dit, la BoJ n’a pas intérêt à affaiblir trop le yen car cela pèse sur le pouvoir d’achat des
ménages et risque de nuire à la reprise. En ce qui concerne l’euro, l’affaiblissement sur lequel nous tablons n’est pas
suffisant pour inquiéter les États-Unis, où la reprise sera avant tout tirée par la demande intérieure.
RISQUE MODÉRÉ
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9
01
#
Janvier 2015
Contexte macroéconomique
JANVIER
AMÉRIQUES
ÉTATS-UNIS
FACTEURS DE RISQUE
Poursuite de la reprise et baisse de l’inflation.
> Le PIB a progressé de 5 % au T3 et les premiers chiffres du T4 sont encourageants.
> Des fragilités subsistent : le marché de l’emploi n’est pas encore pleinement réparé et les chiffres de
l’immobilier restent irréguliers.
> La reprise va se poursuivre en 2015, mais sans forte accélération, avec une inflation en baisse en raison
du recul du prix de l’énergie. La faiblesse de l’économie dans le reste du monde et la hausse du dollar
freineront légèrement l’activité.
> La Fed ne normalisera sa politique que très lentement : en raison de la faiblesse de l’inflation, la première
hausse de taux pourrait ne pas intervenir avant fin 2015.
> La conjoncture reste dégradée sur beaucoup d’aspects et une récession ne peut être exclue en
2015. Plusieurs indicateurs se sont dégradés en novembre à l’image de la production industrielle qui
continue sa chute et accuse une baisse de 3,6 % sur un an. En outre, le PMI manufacturier HSBC s’établit
à 48,7 (contre 49,1 en octobre), au plus bas depuis juin dernier. En sus de ces données manufacturières,
le pays connaît un déficit commercial de 2,35 Mds $ en novembre, les exportations chutant de 25 %
sur un an. De plus, l’inflation persiste en territoire élevé à +6,6 %. Ce sont principalement les postes
les plus volatils qui expliquent cette hausse.
> L’atonie et la morosité caractérisent assez bien l’économie brésilienne. Ces chiffres viennent rappeler
combien le pays doit être réformé alors qu’il connaît une croissance très faible et une inflation très élevée.
BRÉSIL
EUROPE
ZONE EURO
INDE
JAPON
10
> Un assouplissement
relatif de la politique
monétaire
> Un prix du pétrole
qui remonterait plus
rapidement que prévu
> Intensification des
Reprise lente, persistance de la menace déflationniste.
pressions déflationnistes
> Après une croissance toujours très faible au T3 (+0,2 %), les premiers chiffres du T4 sont mitigés.
> Contagion des difficultés
> La reprise va rester lente en 2015. La bonne tenue de la demande intérieure devrait permettre une amélioration économiques et/ou
en Allemagne. En Espagne, le rebond devrait se poursuivre, à partir de niveaux très bas, mais le chômage financières du monde
restera élevé, pesant sur l’inflation. En Italie et en France, l’amélioration sera, au mieux, très graduelle. La émergent
réduction des efforts d’austérité et la dépréciation de l’euro devraient tout de même avoir des effets positifs. > Risque politique
> L’inflation va passer, au moins temporairement, en territoire négatif, l’effet de la baisse du pétrole s’ajoutant (montée des partis
aux sources internes de pressions déflationnistes (surcapacité, désendettement, marchés de l’emploi anti-institutions lors des
élections prévues en
très dégradés. Les mesures déjà annoncées et/ou mises en œuvre par la BCE ne suffiront pas à les
2015)
contrer. Un QE portant sur les obligations souveraines est probable, de même qu’une intensification des
appels en vue d’une politique budgétaire plus stimulante.
ROYAUME-UNI
ASIE
CHINE
> Potentiel de croissance
durablement entamé
(« stagnation séculaire »)
> Contagion des difficultés
économiques et/ou
financières du reste du
monde
> Formation d’une nouvelle
Reprise toujours dynamique, quoiqu’un peu moins forte en 2015 qu’en 2014.
> La solide reprise en cours devrait se poursuivre en 2015. La progression de la consommation et la bulle immobilière
> Faiblesse prolongée des
hausse de l’immobilier (malgré une décélération) resteront des facteurs importants. L’augmentation de
exportations
l’investissement des entreprises (révisé en hausse) devrait permettre un rééquilibrage progressif. Les > Montée du thème de la
exportations resteront en retard, freinées par la lenteur de la reprise en zone euro.
sortie de l’UE
> Le marché de l’emploi s’améliore : les salaires réels ont cessé de baisser. La baisse de l’inflation réduit
l’urgence d’une hausse des taux directeurs, qui devrait cependant avoir lieu en 2015.
> L’économie chinoise devrait croître de 7,4 % cette année, soit son rythme le plus lent depuis 1990. En
2015, la croissance pourrait décélérer davantage et se situer au-dessous des 7 % qui font le
consensus actuel.
> L’inflation reste bien en dessous de la cible de la PBoC (+3,5 %). Les pressions dé(sin)flationnistes
ont conduit l’inflation à +1,6 % sur un an alors que les prix à la production (indicateur avancé des prix
à la consommation) chutaient pour le 32e mois consécutif. Baisse surprise des taux d’intérêt par la
PBoC. Par cette mesure d’assouplissement monétaire couplée à des mesures ciblées sur les taux des
prêts immobiliers, Pékin assure sa volonté de voir la baisse des prix immobiliers se stabiliser.
> Le pays est en proie à un dégonflement de bulle immobilière qui pour l’instant paraît bien géré et à une
restructuration du marché du crédit, qui profite de l’environnement de liquidité abondante notamment
du fait de la politique monétaire accommodante de la PBoC.
> Climat économique relativement favorable dans un contexte de gain de crédibilité de la RBI.
> En maintenant ses taux directeurs à 8 % pour le cinquième comité de politique monétaire consécutif,
la RBI marque son engagement en faveur d’un véritable changement de régime d’inflation. Raghuram
Rajan, l’actuel gouverneur de la RBI, a indiqué qu’une baisse des taux pourrait être envisageable dès
le début de 2015 à la condition, entre autres, que le gouvernement respecte ses objectifs en matière
fiscale (prochain comité le 2 février 2015).
Reprise progressive après des chiffres décevants
> Après un T3 toujours négatif, les chiffres s’améliorent légèrement au T4.
> Des mesures de soutien budgétaire ont été décidées.
> Après les élections de décembre 2014, l’horizon politique est dégagé pour le gouvernement, mais sa
capacité et sa volonté à mener à bien des réformes structurelles importantes restent à prouver.
> La BoJ va maintenir son programme d’assouplissement quantitatif, d’autant plus que la baisse du prix
du pétrole va peser sur l’inflation. Des mesures additionnelles sont possibles.
> Détérioration plus rapide
qu’anticipée de la qualité
de crédit
> Baisse de la demande
externe
> Hausse des pressions
déflationnistes
> Pas assez de mesures de
soutien à l’économie
> Remontée des prix des
matières premières
> Une normalisation de la
politique monétaire US
plus rapide que prévu
> Exposition au
ralentissement chinois
> Reflux de l’inflation avec
la baisse du prix du
pétrole
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01
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Janvier 2015
Prévisions macroéconomiques et financières
PRÉVISIONS MACROÉCONOMIQUES
États-Unis : le cycle d’expansion va continuer. La reprise a surpris par sa vigueur au T3,
l’environnement est favorable à une poursuite de la hausse de la consommation (baisse
du chômage, bourses au plus haut) et de l’investissement des entreprises. En raison de la
persistance d’excès de capacité et de la chute du prix du pétrole il n’y a pas de risque d’inflation.
Japon : une lente sortie de la déflation. Après sa forte chute du T2, le PIB a de nouveau reculé
au T3. L’évolution des salaires est la clé de la reprise, les ménages ayant vu leur pouvoir d’achat
s’éroder (montée des prix des produits importés induite par la baisse du yen, effet de la TVA).
Zone euro : croissance très faible et menace de déflation. Bien qu’un peu plus forte qu’au T2,
la croissance est restée lente au T3 (+0,2 %). Les chiffres allemands et français sont décevants
tandis que l’Italie est toujours en récession. En revanche, l’amélioration se poursuit en Espagne,
au Portugal et en Irlande. Les pressions déflationnistes restent très marquées. 2015 peut être
une année de changements politiques dans plusieurs pays (dont la Grèce et l’Espagne).
Pays émergents : la croissance des pays émergents devrait se stabiliser en 2015. La baisse du
prix des matières premières (près de 20 % en moyenne) devrait, pour le moins à court terme,
offrir des marges de manœuvres supplémentaires pour les principaux pays importateurs nets,
notamment de produits énergétiques.
Brésil : la croissance reste très faible et pourrait même passer en territoire négatif alors que
l’inflation elle, persiste en territoire élevé. La Banque centrale a surpris les marchés en relevant
son principal taux directeur de 50 pb à 11,75 %.
Chine : croissance et inflation ralentissent alors que la correction immobilière en cours reste un
sujet de préoccupation. Les autorités tentent de mettre en place une stratégie de stabilisation
des prix de l’immobilier et la PBOC a surpris les marchés en abaissant son taux directeur à
2,75 %. Cette mesure pourrait être les prémices d’une longue série d’autres mesures.
Croissance du PIB
réel, %
2014 2015 2016
2,4
2,7
2,6
0,2
1,2
1,5
0,8
0,9
1,1
1,4
1,0
1,6
0,4
0,7
0,9
-0,4 0,2
0,4
1,3
1,7
1,6
2,6
2,4
2,4
0,3 -4,5 -1,5
2,5
3,0
3,7
7,0
6,5
6,3
5,4
6,0
6,5
5,2
5,4
5,8
0,3 -0,3 0,5
1,7
1,9
2,0
4,4
4,2
5,0
3,2
3,2
3,7
Moyennes
annuelles (%)
États-Unis
Japon
Zone euro
Allemagne
France
Italie
Espagne
Royaume-Uni
Russie
Turquie
Chine
Inde
Indonésie
Brésil
Pays développés
Pays émergents
Monde
Inflation (IPC, a/a, %)
2014
1,7
2,6
0,4
0,9
0,6
-0,3
-0,5
1,7
7,4
9,0
2,3
7,8
6,0
6,3
1,4
4,2
2,9
2015
1,3
1,2
0,4
0,9
0,3
0,0
0,0
1,6
10,5
7,0
2,0
6,2
6,7
5,9
1,1
4,3
2,9
2016
1,8
1,5
0,9
1,5
0,8
0,5
0,5
2,0
9,0
6,5
2,0
5,8
6,1
5,6
1,5
4,2
3,0
Source : Recherche Amundi
PRÉVISIONS DE TAUX DIRECTEURS
Fed : la 1re hausse de taux directeurs aura lieu au plus tôt à la fin de 2015. Le cycle de
resserrement monétaire sera lent.
BCE : la BCE a annoncé un programme d’achat d’actifs (ABS et covered bonds) qui durera
2 ans. Elle prévoit d’augmenter la taille de son bilan d’environ 10 % de PIB et va lancer un
QE incluant des titres souverains. Elle gardera des taux zéro pendant plusieurs années.
BoJ : la politique d’assouplissement quantitatif et qualitatif (QQE) continuera pendant
une période prolongée.
BoE : la 1re hausse de taux directeurs pourrait avoir lieu dans la seconde partie de 2015.
PRÉVISIONS DE TAUX LONGS
États-Unis : la hausse des taux longs américains sera lente. Le traditionnel bearflattening, lié à l’anticipation d’une remontée des taux directeurs, a déjà commencé et
va se poursuivre, notamment sur la partie courte de la courbe.
Zone euro : les taux des pays du cœur resteront au niveau actuel pour une période
prolongée car la croissance et l’inflation resteront faibles en 2014 et 2015 et car
la BCE gardera une politique de taux zéro pendant encore longtemps. Les spreads
périphériques devraient rester étroits (effet- QE).
Royaume-Uni : la hausse des taux longs britanniques sera lente et l’aplatissement de
courbe va se poursuivre.
Japon : les taux des emprunts d’État japonais sont entièrement sous le contrôle de la
BoJ ; tant que le QE durera, il n’y a pas de raison de les voir remonter significativement.
02/01/2015
États-Unis
Zone euro
Japon
Royaume-Uni
0,25
0,05
0,10
0,50
Amundi Consensus Amundi Consensus
+ 6m. T2 2015 + 12m. T4 2015
0,25
0,40
0,75
0,95
0,05
0,05
0,05
0,05
0,10
0,10
0,10
0,10
0,50
0,60
1,00
1,00
Taux 2 ans
Amundi Consensus
02/01/2015
+ 6m.
T2 2015
États-Unis
0,69
0,80/1,00
1,02
Allemagne
-0,11 -0,10/0,10 -0,03
Japon
-0,02 0,00/0,20 0,01
Royaume-Uni
0,44
0,80/1,00
0,99
Taux 10 ans
Amundi Consensus
02/01/2015
+ 6m.
T2 2015
États-Unis
2,18
2,40/2,60 2,76
Allemagne
0,53 0,40/0,60 0,86
Japon
0,33 0,60/0,80 0,49
Royaume-Uni
1,78 2,40/2,60 2,58
Amundi Consensus
+ 12m.
T4 2015
1,20/1,40
1,54
0,00/0,20 -0,01
0,00/0,20 0,01
1,20/1,40
1,45
Amundi Consensus
+ 12m.
T4 2015
2,40/2,60 3,06
0,40/0,60
1,09
0,80/1,00
0,55
2,40/2,60 2,75
PRÉVISIONS DE CHANGE
EUR : encore baissier sur la parité EUR/USD. L’écart de taux courts entre les États-Unis
et l’Allemagne va continuer de s’élargir. Le gonflement du bilan de la BCE pèsera sur
l’euro. Objectif à 1,15 voire plus bas de façon temporaire.
USD : le ton moins « colombe » du FOMC et les perspectives de croissance meilleures
que dans les autres pays développés soutiendront le dollar.
JPY : le yen devrait continuer de s’affaiblir, à cause de la politique très agressive de la
BoJ mais aussi des performances macroéconomiques médiocres.
GBP : modérément haussier. Les fondamentaux s’améliorent rapidement au RoyaumeUni. L’écart de taux devrait soutenir la livre par rapport à l'euro.
02/01/2015
EUR/USD
USD/JPY
GBP/USD
USD/CHF
USD/NOK
USD/SEK
USD/CAD
AUD/USD
NZD/USD
1,20
121
1,54
1,00
7,54
7,89
1,17
0,81
0,77
Amundi Consensus Amundi Consensus
+ 6m.
T2 2015 + 12m.
T4 2015
1,15
1,20
1,15
1,18
120
122
125
125
1,56
1,54
1,60
1,55
1,02
1,01
1,02
1,04
6,83
7,24
6,75
7,26
7,75
7,70
7,75
7,82
1,15
1,16
1,15
1,16
0,85
0,80
0,85
0,8
0,75
0,74
0,75
0,73
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
11
01
#
Janvier 2015
1 Baisse du prix du pétrole : impacts sur la
croissance et sur la vulnérabilité financière
PHILIPPE ITHURBIDE, Directeur Recherche, Stratégie et Analyse – Paris
Depuis un peu plus d’un an, le prix du pétrole ne cesse de baisser. Le cours du
brent est désormais inférieur à 60 $ le baril. Pourquoi une telle chute de 50 %
depuis juin dernier ?
Plusieurs facteurs sont à l’origine de cela :
• Tout d'abord, il faut voir dans la baisse du brut la conséquence du net
ralentissement économique des principaux pays consommateurs,
Chine en tête. Il s’agit ici d’un choc de demande traditionnel.
Cet argument n’est cependant pas suffisant pour expliquer à lui seul la
baisse du prix du pétrole. La croissance mondiale fléchit, c’est un fait
avéré, mais elle tient bon. La croissance américaine reste solide, elle s’est
stabilisée en Europe. Au total, du fait du ralentissement dans de grands pays
émergents, la croissance mondiale (de l’ordre de 3,5 %, comme en 2013),
devrait être de 3,2 % en 2015. Bref, tout semble indiquer que le facteur
croissance, qui a indubitablement joué sur le prix du pétrole durant la perte
de dynamique, n’explique pas tout. La preuve en est que les autres matières
premières (métaux ferreux et non ferreux, matières premières agricoles…)
ont nettement moins baissé durant la même période (voir graphique 1).
• L'exploitation de pétrole de schiste par les États-Unis a par ailleurs
déstabilisé le marché de l’énergie. Leur production de pétrole a progressé
de plus de 65 % en l’espace de 5 ans, et ils sont désormais l’un des plus
gros producteurs de pétrole, sinon, le plus gros, et c’est peu de dire que les
exploitations de schiste ont modifi é la géopolitique du pétrole. À cela il faut
également ajouter que les États-Unis, déjà exportateurs de pétrole raffiné,
pourraient bien devenir exportateurs de brut, une activité bannie depuis plus
de 40 ans. La perspective d’une levée de cette interdiction par le prochain
Sénat pousse les prix à la baisse.
• L'attitude particulière de l'Arabie Saoudite a également poussé les prix du
brut à la baisse. Habitué à faire l'amortisseur face à tout mouvement de prix,
ce pays a tout récemment changé de stratégie, pour des raisons géopolitiques.
Il avait déjà fait cela en 1986, et cela avait entraîné une baisse similaire de 50 %
du prix du brut. Maintenir le prix du pétrole très bas niveau est une façon de
gêner fortement certains pays, partenaires ou ennemis traditionnels :
- il faut rappeler que les exploitations de schiste ont, aux États-Unis, des points
morts compris entre 40 et 180 $ le baril. À 60 $ le baril, c’est une grande partie
des programmes qui ne sont plus rentables. L'Arabie Saoudite a semblet-il assez peu apprécié le développement non coopératif de ces technologies
alternatives, et la volonté de maintenir les prix à un bas niveau en est une
conséquence. Il faut noter que tout récemment, l'Arabie Saoudite a également
accordé un rabais de 2 $ le baril sur ses ventes aux États-Unis et en Asie,
L’essentiel
Depuis la mi-2013, le baril de pétrole a
perdu plus de 40 $, passant de 100 $
à moins de 60 $. Cette chute trouve
ses origines dans le ralentissement
économique de grands pays comme
la Chine, le Brésil et la Russie, mais
cela ne suffit pas, loin de là, à tout
expliquer.
Les excès de capacité de production
(qui font suite à des années de (sur)
investissement en exploration, extraction
et production), l’avènement du pétrole
de schiste aux États-Unis et la gestion
du marché du pétrole par l’OPEC et plus
précisément par l’Arabie Saoudite sont les
grands déterminants de ce mouvement.
Au-delà de la nouvelle baisse des taux
d’inflation et des anticipations d’inflation (un
problème supplémentaire pour les pays qui
sont en lutte contre la défl ation), la baisse
du prix du pétrole favorise l’ensemble des
pays consommateurs, Chine en tête…
et elle fournit une bouffée d’oxygène à
des pays en lutte contre l’inflation (Inde,
Indonésie). En revanche, la baisse du
prix du pétrole affaiblit davantage les
pays très dépendants de cette matière
première (exportations, recettes fiscales).
La Russie voit son ralentissement
économique se transformer en sévère
récession. La situation actuelle conduit à
préférer, dans les investissements, les pays
consommateurs de matières premières au
détriment des pays producteurs. Pour ces
derniers, on prendra également en compte
les critères habituels de solvabilité et de
vulnérabilités fi nancières. Canada, Norvège
et Kazakhstan apparaissent dès lors bien
moins risqués que Russie, Venezuela,
Angola, Bahreïn, Équateur et Nigeria…
- la Russie, qui soutient la Syrie, dépend fortement de ses exportations de
pétrole, et l'équilibre de son budget est lié à l'évolution du prix du baril,
- l’Iran qui n’est pas non plus un allié de l’Arabie Saoudite, souffre également
face à un pétrole peu cher,
- enfin, l’Arabie Saoudite considère que les pays partenaires de l'OPEP ne
sont pas suffisamment solidaires dans la gestion des prix. Nul doute que
la situation actuelle leur montre à quel point une collaboration étroite avec
l’Arabie Saoudite s’impose.
Chine, Brésil, Russie…
Un ralentissement
économique avéré
Au total, l'Arabie Saoudite montre sa capacité à gérer l'évolution du cours du
pétrole, une matière cruciale pour beaucoup de pays, aussi bien en ce qui concerne
la profitabilité d'exploitation que dans la réalisation des équilibres budgétaires.
- Enfin, la baisse du prix du pétrole est liée à l’excès de capacité de production
qui fait suite à toutes les périodes de prix élevés qui, toutes, se traduisent par des
investissements de grande ampleur : le pétrole de schiste américain, les sables
bitumineux canadiens… en sont les exemples les plus emblématiques, et les
12
L’Arabie Saoudite pèse
sur les prix
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01
#
Janvier 2015
investissements annuels en exploration, extraction et production ont été
multipliés par 7 entre les années 90 et les années les plus récentes. Toutes
ces périodes de forts investissements ont invariablement conduit à des
phases de prix plus bas. Nous vivons en ce moment une de ces phases-là.
La baisse du brut :
un choc d’offre et un choc
de demande
Il est aisé de constater que parmi les facteurs mentionnés ci-dessus, certains
sont des chocs de demande, d’autres des chocs d’offre. Les identifi er est
une chose, pouvoir les quantifi er en est une autre. Sans négliger l'importance
évidente du ralentissement économique, on voit bien le poids de la géopolitique
et des chocs d'offre dans l'évolution actuelle du prix du pétrole.
Quelles sont les conséquences ?
On dénombre de multiples conséquences :
Prix des matières premières
(100 le 1er juillet 2014)
1
110
100
90
2. Ne pas confondre cause et conséquence. S’agissant précisément
de croissance économique, il faut garder à l’esprit que si le ralentissement
économique est – au moins pour partie – responsable de la chute des cours du
brut, on ne saurait alors être enthousiaste à l’idée que cette même baisse sera
très favorable à l’activité des pays déjà en net ralentissement.
80
3. La situation actuelle incite à revoir à la baisse les anticipations d'inflation,
y compris en zone euro. Cela vient s'ajouter aux pressions déflationnistes
actuelles, et conforte l'idée que la BCE devra poursuivre ses programmes de
quantitative easing.
50
Métaux
60
Produits alimentaires
Brent
02-15
01-15
12-14
11-14
10-14
09-14
08-14
40
06-14
4. En termes de profits, le secteur de l’énergie a un poids qui varie d’un
pays à l’autre. Le graphique ci-dessous montre l’importance de ce secteur
dans des pays comme la Norvège, mais aussi l’Italie. Il est certain que la baisse
du prix du pétrole aura un impact marqué dans ces pays. On notera également
l’absence de l’Allemagne dans ce graphique : ce pays exporte beaucoup, mais
ne dépend pas du secteur de l’énergie… autrement dit, deux effets favorables
dans le contexte actuel.
70
07-14
1. Pour revoir le cours du pétrole à la hausse, il faut que la croissance reprenne
de la vitesse, et/ou que les facteurs d’offre s’étiolent. Croire en un prix du brut à
80 $ le baril à horizon 6 – 12 mois semble raisonnable. Dans les phases de bas
prix, les investissements en exploration, extraction et production fléchissent,
ce qui pousse les prix à la hausse, toutes choses par ailleurs. Ajoutons que
le ralentissement de pays émergents tels que la Chine, le Brésil et la Russie
pèse sur la demande, tandis que le pétrole de schiste va sans doute continuer
à déséquilibrer le marché.
Source : Datastream, Recherche Amundi
Part des profi ts en provenance du secteur de l’énergie
Ne pas confondre cause
et conséquence
Italie
Norvège
Royaume-Uni
France
Espagne
Suisse
Pays-Bas
%
0
10
20
30
40
50
60
Source : Moody’s, Recherche Amundi
5. Il faut séparer les pays en deux groupes :
• ceux qui produisent du pétrole, et qui pour certains d’entre eux sont très
fortement exposés, aussi bien pour la rentabilité de leurs exploitations
que pour la réalisation de leurs équilibres budgétaires ; le graphique page
suivante représente le prix du baril qui équilibre recettes et dépenses dans
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
13
01
#
Janvier 2015
différents pays. On voit à quel point la baisse de 50 % du prix du brut
a fragilisé l'équilibre budgétaire en Équateur, Russie, Algérie, au Nigeria,
Bahreïn, Venezuela…
Prix du baril qui équilibre recettes et dépenses
3$
0$
15
15
4$
12
7$
11
7$
3$
11
11
3$
11
2$
11
2$
10
$
$
99
98
$
95
$
95
$
84 71$ 4$ 9$ 8$
6 5 5 2$ $
5 6 0$
4 4
m
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n
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Ye
m
en
215$
Source : FMI, Banque Mondiale, Bloomberg, Thomson Reuters, Recherche Amundi
• ceux qui consomment le pétrole et qui bénéficient de cette situation, d’une
part grâce à la hausse du revenu réel des ménages, d’autre part du fait
de l’impact sur le coût de production des produits utilisant cet input et un
effet positif sur les profits, et enfin grâce à l’impact sur l’inflation. Plus un
pays est importateur de brut (Japon, zone euro, Chine, Inde…) et/ou moins
il produit de pétrole (à l’inverse des États-Unis), et plus son PIB est à forte
intensité énergétique (Chine, Inde…), et plus ces effets favorables seront
conséquents.
6. Pour certains pays, la baisse du prix du pétrole peut s'avérer un avantage
important. Selon les estimations du FMI (World Economic Outlook), une baisse
de 20 $ du prix du baril entraînerait, toutes choses égales par ailleurs, une hausse
de 0,5 % du PIB mondial en 2015, suivi d’une autre hausse de 0,7 % pour peu que
cela se traduise par une amélioration de la confiance. Rappelons que depuis la
mi-2013, c'est à une baisse de 40 $ que nous avons assistés. Dans le cas de la
zone euro, la baisse en dollar du prix du brut serait en partie compensée par la
baisse de l'euro contre dollar (ne négligeons toutefois pas le fait qu’une partie de nos
importations de pétrole sont déjà facturées en euros). Dans le cas de la Chine, les
chiffres parlent d’eux-mêmes : ce pays importe 6 millions de barils/jour, ce qui signifie
qu’une simple baisse de 1 $ représente 2 milliards de $. Ajoutons que le pétrole et les
produits dérivés du pétrole représentent 13 % des importations de la Chine. La baisse
du brut a un effet immédiat sur l’amélioration des comptes courants de la Chine.
7. Pour d’autres pays, la baisse du prix du pétrole peut s’avérer
catastrophique. Dans le cas de la Russie, une baisse de 20 $ se traduirait par
une baisse du PIB de 2 % au bout de 3 ans. Or la Russie était déjà en phase de
ralentissement économique, et la baisse du prix du pétrole ne vient qu’amplifi er
des difficultés déjà existantes. La Russie est en train d’entrer dans une sévère
récession, et nous prévoyons une croissance du PIB de -4,5 % en 2015. En
revanche, la Russie est actuellement en mesure d’honorer les engagements sur
sa dette pour 2015. Le Venezuela est un cas bien plus sérieux encore, tant il
est proche du défaut et du chaos : le pétrole représente en effet près de 40 %
des revenus du gouvernement et 95 % des exportations. Bahreïn, Angola et
l’Équateur sont les autres pays les plus vulnérables à la baisse du prix du pétrole.
Russie et Venezuela :
deux grands perdants
La baisse du prix du pétrole va se traduire par une baisse des exportations
et donc une dégradation des comptes courants. Il va entraîner également
une baisse des revenus des États exportateurs, et rendre les équilibres
budgétaires plus difficiles à atteindre. Mentionnons simplement que les pays
d’Amérique latine exportateurs de pétrole tirent un tiers de leurs revenus de
leurs activités liées à cette matière première. Cela représente près de 80 %
des recettes pour les pays du Golfe (57 % pour le Qatar, et un peu moins de
95 % pour le Koweït).
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01
#
Janvier 2015
Russie
Arabie Saoudite
Venezuela
Mexique
Part du pétrole dans les
exportations totales
65 %
85 %
95 %
15 %
Part du pétrole
dans les revenus fiscaux
50 %
90 %
40 %
30 %
Au total, les pays producteurs doivent être scindés en trois groupes :
• Un groupe de pays « sûrs » qui seront en surplus même si le prix du
pétrole reste au niveau actuel. Parmi ces pays, on trouve le Koweït, les
Émirats Arabes Unis, le Qatar et la Norvège, des pays ayant des excédents
courants et budgétaires suffisants pour amortir la forte baisse du prix du
brut. Dans le cas de la Norvège, on peut même miser sur une stabilité des
excédents des finances publiques.
• Un groupe de pays « fragiles » que la dépendance au pétrole et dérivés
du pétrole rend particulièrement vulnérables, compte tenu de leur situation
actuelle. La baisse du prix du brut réduira considérablement leurs excédents
voire même entraînera des déficits courants et/ou budgétaires. L’Arabie
Saoudite, Oman, Azerbaïdjan et le Venezuela vont connaître des déficits
publics.
• Un groupe de pays « inquiétants » dont la situation financière et la
dépendance au pétrole laisse penser que récession et/ou défaut ne
peuvent être que les seules issues. La vulnérabilité financière de ces pays
est sérieusement mise à mal par la baisse du prix du brut.
Conclusion
La situation actuelle conduit à préférer, dans les investissements, les pays
consommateurs de matières premières au détriment des pays producteurs. Pour
ces derniers, on prendra également en compte les critères habituels de solvabilité
et de vulnérabilités financières. Canada, Norvège et Kazakhstan apparaissent
dès lors bien moins risqués que Russie, Bahreïn et Nigeria… ou, pire encore,
que le Venezuela. Attention au rating des pays : la Russie est désormais à une
« notch » du high yield…
Soldes courants, soldes budgétaires et baisse du prix du pétrole :
typologie des pays
Déficit
public
plus large
D’un excédent Réduction
Stabilisation
public
de l’excédent de l’excédent
vers un déficit budgétaire
budgétaire
Déficit courant
plus large
Congo
D’un excédent courant
à un déficit courant
Réduction de l’excédent
courant
Stabilisation de
l’excédent courant
Des pays sûrs, des pays
fragiles et des pays
inquiétants… une typologie
basée sur la vulnérabilité
financière
Oman,
Venezuela
Russie,
Bahreïn,
Nigeria
Arabie
Saoudite,
Azerbaïdjan
E.A.U.,
Qatar,
Koweït
Norvège,
Kazakhstan
Canada
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01
#
Janvier 2015
2 Fed vs BCE : des stratégies
totalement antagonistes ?
PHILIPPE ITHURBIDE, Directeur Recherche, Stratégie et Analyse – Paris
Fed et BCE mènent des politiques monétaires décalées, c’est un fait. Il faut
dire que les situations économiques des deux zones sont bien différentes :
• Une nette reprise économique aux États-Unis, et une reprise encore très
fragile en zone euro. Certes, la reprise économique américaine est très en
deçà des précédentes sorties de récession (investissement, emploi, heures
travaillées…), mais elle n’en est pas moins solide et soutenable. En zone
euro, les vulnérabilités demeurent : les moteurs de croissance sont différents
selon les pays (exportations en Espagne, exportations et consommation en
Allemagne, dépenses publiques en France…), la consommation est fragile,
la solvabilité des pays périphériques – et de certains pays du noyau dur –
discutable, et les perspectives de croissance restent faibles…
• Une amélioration du marché de l’emploi outre-Atlantique, une
situation encore déprimée en Europe. Rappelons toutefois que l’essentiel
de l’amélioration du taux de chômage provient d’une baisse du taux de
participation, ce qui reste un élément d’insatisfaction aux yeux de Janet Yellen.
• Des politiques budgétaires fi scales plus restrictives en Europe, qui tente
depuis plusieurs années de limiter les dérapages, alors que les États-Unis (mais
aussi le Royaume-Uni et le Japon) ont délibérément laissé filer leurs finances
publiques pour renouer plus rapidement avec une croissance plus solide.
• Des canaux de fi nancement des entreprises encore grippés en zone
euro, ce que la BCE tente de combattre (voir notre édition du mois de
décembre « Le financement des PME : un enjeu crucial pour l’Europe »).
L’essentiel
La Fed a terminé son programme
de quantitative easing tandis que la
BCE est sur le point d’accélérer et
d'amplifier ses mesures de politique
non conventionnelles. Alors que
la première devrait procéder à ces
premières hausses des taux fin 2015
– début 2016, la seconde ne devrait
pas être en mesure de faire de même
avant 3 ou 5 ans.
Au-delà de ces divergences majeures (qui
trouvent incontestablement leur justification
dans une situation économique bien plus
favorable aux États-Unis), quelques points
rapprochent ces deux banques centrales :
l'absence d'infl ation, la lutte contre la
déflation, la nécessité d'éviter une hausse
des taux longs, et un marché de l'emploi
encore fragile. Beaucoup d’antagonismes
entre Fed et BCE, mais aussi des similitudes
évidentes.
Au total, ces divergences sont déterminantes pour structurer les stratégies
d'investissement. Passons en revue les éléments de ces politiques monétaires.
Politiques de taux d’intérêt : une divergence inévitable
Maintenant que le programme de quantitative easing est terminé, il est
quasiment assuré que l'étape suivante dans laquelle la Fed va s'engager sera
de procéder à des resserrements monétaires. Le maintien du statu quo peut
provenir de deux facteurs :
• soit une nouvelle dégradation de la situation économique,
États-Unis vs zone euro :
des situations économiques
durablement différentes
• soit l’absence de facteurs de risque poussant la Fed à relever les taux
(emballement de la croissance, hausse brutale de l’inflation…). En réalité,
les perspectives d’inflation sont cruciales. S. Fisher (vice-gouverneur de la
Fed, rappelait il y a quelques semaines que la « normalisation » des Fed
funds ne pourrait intervenir que lorsque la Fed sera confiante dans les
perspectives d’inflation. Or celles-ci baissent encore.
Au regard des conditions actuelles, six conclusions s’imposent
• La banque centrale américaine ne sera pas amenée à agir avant la fin 2015,
au plus tôt ;
• Miser sur des taux de Fed funds (actuellement à 0,25 %) à 1 % fin 2016
semble raisonnable ;
Fed : pas de pression pour
relever rapidement les taux
directeurs
• Les hausses de taux ne seront pas en ligne avec les annonces actuelles de
la Fed. Selon les « dots », les taux des Fed funds devraient atteindre 3 % dixhuit mois après le premier resserrement monétaire. La Fed sera moins rapide
dans la séquence de hausse des taux (sauf si elle retarde très fortement son
premier geste).
• La courbe forward indique des taux à 3 mois à 2 % à horizon début 2017, ce
qui semble un peu exagéré ;
• Le plafond pour les Fed funds sera de l’ordre de 3,75 %, soit un niveau plus
faible que lors des cycles précédents, car il tient compte de la plus faible
croissance potentielle actuelle ;
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Janvier 2015
• L’atteinte du plafond des Fed funds se fera vraisemblablement moins
rapidement que lors des cycles précédents.
En ce qui concerne la BCE, la situation est bien différente. Il n’est pas question
de s’interroger aujourd’hui sur la moindre hausse des taux. Le décalage
avec la Fed est flagrant : il est évident que la banque centrale américaine a
été extrêmement plus réactive que son homologue européenne s'agissant
des mesures non conventionnelles. Certes, le consensus était plus facile
à trouver outre-Atlantique, et les autorités monétaires américaines ont une
forte réputation de proactivité. Suite à la crise financière, les États-Unis ont
utilisé tout l'arsenal à leur disposition : outils monétaires conventionnels,
politique monétaire non conventionnelle, politique de change, politique
budgétaire, politique fiscale… Cela ne fut pas réellement possible en zone
euro : contraintes institutionnelles, nécessité de consensus, gestion de crise
difficile... Le « retard » accumulé en Europe est en train d'être comblé : il
n’est plus question d'austérité budgétaire et fiscale, et les programmes non
conventionnels (y compris un programme de QE souverain) ne sont plus
tabous. Pour accompagner cela, il est hautement probable que la BCE
maintiendra des taux bas pendant 3 ans, voire 5 ans…
Injection de liquidités : la BoJ et la BCE prennent le relais
de la Fed
La Fed a terminé son programme de quantitative easing en octobre dernier.
Il faut cependant noter qu’au sein même du conseil des gouverneurs, les
divergences persistent, certains considérant cet arrêt prématuré, d'autres
considérant que l'institution doit être prête à le réactiver pour peu que l'inflation
ne progresse pas suffisamment.
BCE : pas de hausse
des taux avant 3 ou 5 ans
La liquidité mondiale ne va
pas s'effondrer en 2015,
BoJ et BCE prenant le relais
de la Fed
Tout comme la banque du Japon, la BCE semble « condamnée » à élargir
son arsenal de mesures non conventionnelles : TLTRO, ABSPP (ABS Purchase
Programme), CBPP (Covered Bond Purchase Programme) ne seront pas
suffisants pour assurer l'expansion de bilan souhaitée par Mario Draghi. Il est
donc ici question d'éventuels programmes d'achat d'obligations d'entreprises
ou d'obligations souveraines. Quoi qu'il en soit, il est bien évident que la
liquidité mondiale ne va pas s'effondrer en 2015, la Banque du Japon et la
Banque centrale européenne prenant le relais de la Réserve Fédérale.
Fed et BCE : éviter une (forte et ample) remontée des taux longs
Les programmes de quantitative easing avaient en réalité 2 ambitions :
• D'une part, briser le lien entre deleveraging et prix des actifs, afin d'éviter que
le cycle de désendettement ne se traduise par de forts effets de richesse
négatifs, une menace pour croissance ;
• D’autre part, pousser et maintenir les taux à un bas niveau pour rendre
solvables des entités qui ne l’étaient plus ou dont la solvabilité était menacée.
Éviter une remontée des taux
longs, une volonté commune
de la BCE et de la Fed
Il est clair que les États-Unis n’ont plus réellement besoin d’un programme de QE,
mais ils ne peuvent pas non plus se permettre de voir les taux longs remonter
vite et fortement, ce qui occasionnerait, notamment du fait d’un effet de richesse
négatif, un grand choc sur des marchés d’actions jugés un peu chers.
La BCE, quant à elle, ne peut que favoriser des taux (courts et longs) à de faibles
niveaux, pour consolider la croissance, la solvabilité… Au total, les taux longs du
noyau dur de la zone euro vont rester bas pour encore de nombreux trimestres.
Cela sera également facilité par la stratégie de la Fed, mais aussi par la capacité de
la BCE à « déconnecter » les taux de la zone et ceux des États-Unis. Ces derniers
ont maintenu les taux longs à un niveau bien plus bas que leur taux d’équilibre
grâce aux programmes de QE, et c’est ce que la BCE va désormais faire. La vraie
question en zone euro réside en réalité dans les spreads souverains : avoir une
politique monétaire accommodante et une liquidité abondante sont évidemment
des conditions nécessaires au maintien de spreads souverains étroits, mais pas
suffisantes : une amélioration des perspectives de croissance (qui conduisent à
une croissance économique supérieure aux taux d’intérêt) est indispensable si
l’on veut éviter que les craintes sur la solvabilité des États ne refassent surface.
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
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01
#
Janvier 2015
EUR/USD : la poursuite de la baisse a encore du sens
La parité EUR/USD est passée de 1,40 à 1,24 en l'espace de quelques
trimestres. Ce sont les conditions économiques et les perspectives d'évolution
des politiques monétaires qui sont à l'origine de ce mouvement. Rien de bien
surprenant, donc. On notera cependant que deux forces opposées jouent sur
la valeur de l'euro : les excédents courants plaident en faveur d'un euro plus
fort, tandis que les perspectives de nouveaux assouplissements quantitatifs
poussent l'euro à la baisse. Au total, il nous semble toutefois inévitable que
la parité euro dollar converge vers 1,15.
Notons également qu'au niveau actuel, le dollar n’est pas surévalué. Le
potentiel d'appréciation en termes effectifs est conséquent (entre 10 et
15 %), et l'euro en bénéficiera (voir notre édition du mois d’octobre).
L’euro pris entre deux feux :
les excédents courants contre
le quantitative easing
Courbe des taux monétaires : la BCE perçue comme la banque
centrale d’une zone en déflation
La simple observation des courbes de taux « futures » montre que la BCE
est perçue comme la Banque du Japon ou la Banque nationale Suisse, deux
pays où les pressions déflationnistes sont fortes. Dans ces trois zones, il n'y
a pas réellement d'anticipation de resserrement monétaire. La courbe est
plate, et elle devrait le rester.
Aux États-Unis, au fur et à mesure que les perspectives de hausses des
taux gagneront en crédibilité, la courbe des taux « futures » se pentifiera
davantage.
Autrement dit, les écarts de taux vont continuer à s’élargir, favorisant la
hausse du dollar.
Courbe des coupons : vers un bear flattening aux États-Unis
Mêmes tendances sur la courbe des coupons, avec un élargissement
supplémentaire des écarts de taux, et la perspective d’assister à un nouveau
bear flattening aux États-Unis.
Volatilité : les incertitudes autour de la Fed resteront un moteur
puissant
Hausse de la volatilité
et maintien de celle-ci
à un niveau élevé, une
conclusion inévitable
Le prochain mouvement de la Fed sera un resserrement monétaire, c’est une
certitude, mais les anticipations varient, tant sur la date que sur l’ampleur. En
outre, les renversements de politiques monétaires sont toujours un exercice
délicat pour les banquiers centraux, qui ne veulent pas être trop rapides
(casser la croissance) ou trop tardifs (générer des excès de valorisations sur
les marchés financiers). Les divergences au sein des conseils de politique
monétaire sont ainsi fréquentes dans ces phases de cycles bien spécifiques.
Tour cela ne manquera pas d’alimenter la volatilité des marchés au gré des
déclarations officielles, des indicateurs économiques, et des changements
d’anticipations. La hausse de la volatilité et le maintien de celle-ci à un niveau
élevé, voilà une nouvelle composante à laquelle il faudra s’habituer.
Conclusion
Au total, il est facile d’identifier les divergences entre l'orientation de la politique
monétaire aux États-Unis et celle de la zone euro. Il est également aisé de
mettre en évidence les similitudes. Celles-ci proviennent essentiellement de
trois situations :
• Tout d'abord celle qui prévaut sur le marché de l'emploi : même si le
taux de chômage a fortement baissé aux États-Unis, la forte chute du
taux de participation reste un sujet de préoccupation. En zone euro, les
améliorations, aussi conséquentes soient-elles, ne sont pas suffisantes
pour masquer une réalité plus douloureuse ;
Lutter contre tout risque
de spirale déflationniste :
une préoccupation commune
• Ensuite, la volonté des deux côtés de l'Atlantique d'éviter une forte
remontée des taux longs. Elle risquerait aux États-Unis de faire chuter le
marché des actions et de l’immobilier, générant ainsi un effet de richesse
négatif qui serait bien malvenu à cet instant du cycle. En zone euro, une
18
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01
#
Janvier 2015
telle hausse des taux aurait deux effets préjudiciables à l'économie :
elle dégraderait la situation des agents endettés et elle gênerait encore
davantage les plans d'investissement ;
• Enfin, la lutte contre les pressions déflationnistes et les dangers de la spirale
déflationniste sont certes bien plus forts en zone euro, mais ils n'ont pas
pour autant disparu aux États-Unis.
Ceci n'est évidemment pas suffisant pour modifier les perspectives : la BCE
va garder des taux très bas pendant au moins 3 à 5 ans, et la Fed entamera
vraisemblablement son cycle de hausse des taux fin 2015 – début 2016.
États-Unis : point-mort d'inflation vs évolution
du prix du pétrole
1
2.8
40%
2.6
30%
2.4
20%
10%
2.2
0%
2
-10%
1.8
> La baisse du prix du pétrole emmène les anticipations
d’infl ation à la baisse
-20%
1.6
-30%
1.4
La spectaculaire baisse des prix du pétrole depuis l’été 2014 pèse mécaniquement
sur l’infl ation des pays avancés, l’énergie représentant par exemple un peu plus de
10 % de l’indice des prix en zone euro. En plus de peser directement sur l’infl ation,
la baisse des prix du pétrole pèse lourdement sur les anticipations d’infl ation.
Quelles que soient les mesures de marché considérées (point-mort d’infl ation,
swaps d’infl ation forward, etc.), les anticipations d’infl ation sont empiriquement très
corrélées aux variations des prix du pétrole. Ainsi, une grande part de la baisse des
anticipations d’infl ation aux États-Unis et en Europe depuis cet été s’explique par la
baisse des prix du pétrole.
1.2
1
-40%
-50%
-60%
Source : Bloomberg, Recherche Amundi
Ceci est problématique pour la BCE comme pour la Fed. Pour la BCE, cela arrive à
un moment où les anticipations d’infl ation (telles que mesurées avec des indicateurs
de marché ou par le biais d’enquêtes) sont extrêmement basses et où le risque
d’un cercle vicieux défl ationniste n’a jamais été aussi fort. Lors de son conseil des
gouverneurs de décembre, la BCE a indiqué qu’elle allait devoir évaluer l’impact de
la baisse des prix du pétrole sur les tendances d’infl ation à moyen terme de façon à
éviter un déraillement des anticipations d’infl ation et de la mécanique de formation
des salaires.
Pour la Fed, l’érosion des anticipations d’infl ation se produit alors que les salaires
réels ne se sont pas encore mis à remonter, malgré l’amélioration sur le marché du
travail. Le communiqué du FOMC du 18 décembre montre clairement du doigt la
dichotomie entre anticipations d’infl ation mesurées avec des indicateurs de marché
et celles mesurées avec des enquêtes. Toujours est-il que le point mort d'infl ation
à 10 ans a nettement baissé, passant de 2,20 % en juillet à quasiment de 1,65 %
aujourd'hui. L'évolution du point mort d'infl ation à 5 ans a même été plus défavorable
puisqu'il est passé de 2 % à environ 1,15 % aujourd'hui. il semble illogique que la
Fed veuille normaliser sa politique de taux alors que les indicateurs traditionnels des
anticipations d'infl ation demeurent aussi faibles.
Point-mort 5 ans
Point-mort 10 ans
Evolution du brent sur 3 mois (D.)
01-10
06-10
11-10
04-11
09-11
02-12
07-12
12-12
05-13
10-13
03-14
08-14
01-15
06-15
BASTIEN DRUT, Stratégie et Recherche Économique - Paris
Les anticipations d’inflation
sont empiriquement très
corrélées aux variations
des prix du pétrole
2
Part des consommateurs qui pensent que les
prix vont baisser sur les 12 prochains mois
14
Italie
Espagne
Zone euro
France
Allemagne
12
10
8
6
4
2
Source : Commission européenne, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
19
2015
2013
2011
2009
2007
2005
2003
2001
1999
1997
1995
1993
1991
1989
1987
0
01
#
Janvier 2015
3 Les pays d'Europe centrale réagissent
de façon différenciée au risque déflationniste
MARC-ALI BEN ABDALLAH, Stratégie et Recherche Économique – Paris
BASTIEN DRUT, Stratégie et Recherche Économique – Paris
NICOLAS DOISY, Stratégie et Recherche Économique – Paris
La zone euro exporte des pressions déflationnistes
chez ses voisins
Lors des derniers mois, à l’instar de l’infl ation en zone euro, l’infl ation a fortement
baissé dans les pays d’Europe émergente, allant même jusqu’à passer en
territoire négatif en Pologne et en Hongrie (-0,4 % en octobre en Hongrie par
exemple). Il y a évidemment des facteurs communs sous-jacents à la décélération
de l’infl ation en zone euro et dans les pays d’Europe Centrale : baisse du prix de
l’énergie et de l’alimentation, fort ralentissement de la demande interne sur les
dernières années et dégradations des conditions sur le marché du travail. Les
anticipations d’inflation des consommateurs baissent tout aussi rapidement en
Europe centrale que dans la zone euro ce qui tend à indiquer que les pressions
défl ationnistes y sont tout aussi fortes. Une analyse en composantes principales
réalisée sur les taux d’infl ation à taxation constante sur la période 2008-2014
sur le groupe « zone euro – Europe Centrale » montre que le facteur principal
explique 77 % de la variance. Il nous paraît donc pertinent d’analyser dans
quelle mesure les tendances défl ationnistes à l’œuvre en zone euro ne seraient
pas en train de contaminer ses voisins.
La dynamique de l’inflation est généralement tributaire de développements
externes et s’en trouve, pour partie, « importée », par exemple via l’évolution du prix
des matières premières (énergie et alimentation) sur les marchés internationaux.
Dans le cas de petits pays, qui ne sont pas en mesure d’imposer leurs prix sur
les marchés, les facteurs externes sont encore plus importants. Pour les pays
d’Europe centrale, qui représentent typiquement de tels price-takers, très intégrés
économiquement à la zone euro et dont la taille est limitée, l’évolution des prix
dans la zone euro est déterminante. L’impact du taux de change nominal est, à
cet égard, un élément déterminant du processus de rééquilibrage des prix relatifs,
selon que ce dernier est ou non répercuté par les entreprises (à l’importation
comme à l’exportation) sur l’acheteur final et donc le consommateur.
Un document de travail récent du FMI1 a montré qu’entre 2 et 37 % des
fluctuations de l’inflation des pays de l’Union européenne hors zone euro sont
expliquées par l’inflation sous-jacente de la zone euro sur la période 20042014. Cette proportion est encore plus élevée sur la période récente. Selon
cette étude, la baisse de l’infl ation sous-jacente en zone euro a eu un impact
net et significatif sur l’infl ation des pays d’Europe centrale (Hongrie, Pologne,
République tchèque), avec une transmission de la désinfl ation d’autant plus
forte que la demande interne du pays est satisfaite avec une forte proportion
de biens produits à l’étranger (Hongrie, République tchèque). En réalité, quoi de
plus logique avec la forte augmentation de l’intégration économique des pays
CEE et de la zone euro depuis le début des années 2000 ? Selon les pays, la
zone euro constitue entre la moitié et les deux tiers des exportations et des
importations. De plus, le taux d’ouverture total (et donc la sensibilité aux effets
indirects de la zone euro sur des pays tiers, qui tend à accroître cet effet de
composition) a grimpé dans ces pays, surtout en Hongrie et en République
tchèque, ce qui rend ces deux pays encore plus vulnérables à l’importation des
tensions déflationnistes de la zone euro.
L’essentiel
Dans un contexte mondial qui prend
un tour déflationniste (notamment
sous l’influence de la Chine), les
économies d’Europe centrale et
orientale entrent à leur tour dans une
dynamique pré-déflationniste dont
il est maintenant évident qu’elle ne
peut qu’être renforcée par la baisse
continue du taux d’inflation vers 0 %
(si ce n’est en deçà) en zone euro.
Ces économies ne sont pas autant
contraintes dans leur réaction de politique
économique que le sont les économies de
la périphérie par leur appartenance à l’euro,
ce qui leur laisse en particulier l’usage de
l’outil monétaire via le taux de change, outil
dont se satisferaient probablement les
mêmes économies méridionales de la zone
euro qui sont aujourd’hui à l’origine de la
pression déflationniste affectant l’Europe
centrale. Idéalement souhaitable mais
malheureusement contrainte, une relance
budgétaire aura d’autant plus d’effet qu’elle
accompagnera une politique monétaire de
reflation qui restera dans les pas de la BCE.
Par ailleurs, des facteurs spécifiques à
chacune des grandes économies de la région
sont également à l’œuvre, à commencer
par le fort taux d’endettement des ménages
hongrois en Francs suisses, ce qui est à
l’origine de la stagnation du PIB/tête constatée
en Hongrie sur la dernière décennie. De
même, l’inflation en République tchèque tend
à se synchroniser avec celle de la zone euro
en raison d’une forte intégration commerciale
(notamment avec l’Allemagne) ainsi que d’une
politique monétaire relativement passive
de ciblage du taux de change contre l’euro.
Si elle a conservé un certain dynamisme
relativement à ses pairs (notamment en raison
de la flexibilité de son change mais aussi d’un
moindre poids de la dette des ménages en
devises), la Pologne est néanmoins contrainte
par l’étroitesse de ses marges de manœuvre
budgétaires : ceci devrait la conduire à terme
à privilégier l’outil monétaire tout en acceptant
de voir son inflation s’aligner sur le régime de
la zone euro.
Globalement, ces économies sont donc contaminées par les tendances
déflationnistes de la zone euro. De plus, les risques géopolitiques font peser
une épée de Damoclès sur ces pays : pour la Pologne, par exemple, 94 %
des importations de pétrole et 80 % des importations de gaz naturel sont en
provenance de Russie (IEA, 2011). De ce point de vue, la baisse du prix du
1
"Are Non-Euro Area EU countries importing low inflation from the euro area?",
IMF Working paper n°14/191
20
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01
#
Janvier 2015
pétrole a un effet direct sur la dynamique d’infl ation dans de petits pays ouverts
comme les Pays d’Europe centrale et orientale (PECO). Mais elle représente
aussi un effet indirect des pressions défl ationnistes venues de zone euro… mais
aussi et surtout de Chine (y compris sur la zone euro elle-même), dont l’effet de
composition est loin d’être négligeable alors qu’elle est en passe de devenir la
première économie mondiale par sa taille.
Les anticipations d’inflation des
consommateurs baissent tout
aussi rapidement en Europe
centrale que dans la zone euro
La République tchèque et la Pologne sont très proches
des standards de l’Union européenne
La rapide convergence de la Roumanie ne s’est pas faite
sans déséquilibres
La Roumanie présente une vitesse de convergence comparable à la Pologne
malgré une accession plus tardive 2. Le PIB par tête de la Roumanie à parité
de pouvoir d’achat représentait 37 % de celui de l’Europe à savoir 9 200 $
par habitant en 2002. Avec un peu plus de 19 400 $ par habitant il représente
aujourd’hui 54 % du revenu moyen par tête de l’Europe. C’est probablement en
partie l’illustration principale de ce que cette convergence ne s’est pas réalisée
de façon continue, la Roumanie n’ayant pas su éviter l’émergence d’un certain
nombre de déséquilibres qui ont toutefois été réduits depuis.
110%
Hongrie
100%
90%
Rep. Tchèque
80%
70%
60%
Roumanie
50%
Pologne
Part des échanges avec la zone euro
Source : Datastream, Recherche Amundi
La Pologne a réalisé la
prouesse d’être la seule
économie européenne à éviter
une récession en 2008-2009,
ce qui indique un potentiel de
croissance soutenu tout autant
que les effets d’une dévaluation
bienvenue
L’épargne brute (publique et privée) a cru plus vite que l’investissement. Le
déficit courant était encore de 11,6 % du PIB en 2008, il s’est abaissé depuis à
2 % en 2014. Le stock de dette externe a atteint un pic de 75,7 % du PIB avant
de s’abaisser actuellement à 61,1 %. Quant au stock de dette publique (externe
et domestique), il devrait atteindre un pic à 40 % cette année grâce à une
2
63%
62%
61%
60%
59%
58%
57%
56%
55%
54%
40%
53%
La Pologne est la seconde économie la plus proche des standards européens
avec un revenu par habitant équivalent à 68 % de celui de l’Union européenne.
Le rythme de convergence a été impressionnant puisque la Pologne aura été
capable depuis 2009 de délivrer chaque année une croissance supérieure de
1,3 point à celle de la moyenne européenne. Cette performance s’explique,
essentiellement par l’ampleur et la profondeur à la fois du marché local mais
aussi des réformes structurelles engagées par vagues depuis la transition. Au
cours des deux dernières décennies, la Pologne aura réussi à croître en moyenne
de 4 % par an malgré l’intensification de la crise souveraine en Europe. Elle a
réalisé d’ailleurs, la prouesse d’être la seule économie européenne ayant réussi
à éviter une récession en 2008-2009, ce qui indique un potentiel de croissance
soutenu tout autant que les effets d’une dévaluation bienvenue (tant d’un point
de vue financier que réel) grâce à un régime de taux de change fl exible.
Proportion du commerce extérieur réalisée
avec la zone euro vs taux d'ouverture
52%
Si l’on raisonne en revenu par tête d’habitant, l’économie la plus proche
des standards européens est la République tchèque avec un PIB per capita
de 28 500 $, soit 79 % du PIB per capita de l’Union européenne. Toutefois,
l’économie tchèque est assez peu diversifi ée. Son secteur industriel est
concentré sur un seul secteur : le secteur automobile. Ce dernier produit plus
d’un million de voitures depuis 2010 dont 80 % sont à destination de l’exportation.
Le secteur financier domestique est étroit mais plutôt sain. Sans surprise,
l’économie tchèque a traversé récemment deux épisodes récessifs en 20082009 et 2011 qui sont la conséquence directe des infl exions conjoncturelles
de la zone euro, au point de pouvoir être considérée comme une extension de
l’économie allemande.
1
Taux d'ouverture de l'économie
Les économies d’Europe centrale sont donc aux prises avec des tensions
défl ationnistes importées. Pour autant cet ensemble est loin d’être homogène.
Elles diffèrent par leur degré d’intégration à la zone économique européenne,
la diversité de leurs spécialisations économiques (spécialisation industrielle,
poids relatifs des secteurs manufacturiers et de celui des services). Elles
diffèrent aussi par leur capacité d’absorption du choc lié à la crise souveraine
européenne, capacité qui dépend en large part des choix stratégiques de
politique macroéconomique apportés en réponse à cette crise tout autant que,
par exemple, du niveau de vie et d’endettement privé et public.
La Roumanie a accédé à l’Union européenne en 2007, la Pologne, la République
Tchèque et la Hongrie en 2004.
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
21
01
#
Janvier 2015
La Hongrie, le seul des quatre pays, à vitesse
de convergence nulle
Enfin, la Hongrie est en termes de revenus à rapprocher de la Pologne. Le
PIB per capita y est identique. Cependant, sur ce quartet, la Hongrie est la
seule économie dont le PIB par tête est resté stable sur la décennie écoulée.
Son revenu par habitant était équivalent à 67 % du revenu moyen d’un
habitant de l’Union européenne en 2004, au moment de son accession à
l’Union. Aujourd’hui, il représente 68 % de la moyenne européenne. Parmi les
nombreuses raisons, figure une relative instabilité et incohérence en matière
de régime macroéconomique, notamment des tentatives d’ancrage sur la zone
euro trop précoces eu égard aux enjeux structurels post-transition.
Pour les économies d’Europe centrale, les marges
de manœuvres sont très étroites
Evolution des devises par rapport à l'euro
(100 = moyenne de la période 2000-2007)
2
140
CZK
PLN
HUF
RON
130
120
110
100
90
80
70
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
poursuite de la consolidation fiscale et une baisse des coûts de financement 3.
Sans surprise, l’agence de notation souveraine Standard & Poors a placé la
notation souveraine de la Roumanie en investment grade en mai dernier. Elle
était, d’ailleurs, la seule des trois grandes agences à ne pas l’avoir encore fait.
Source : Datastream, Recherche Amundi
Afin de lutter contre le risque défl ationniste, les banques centrales des pays
d’Europe centrale ont assoupli leur politique monétaire depuis la mi-2012, en
baissant leurs taux directeurs de manière énergique. Dans ce contexte, quelles
sont les marges de manœuvre de politique économique ? Elles dépendent des
points de départ, c’est-à-dire des conditions initiales, dans le jargon économique.
En premier lieu, les stocks de dette publique ont progressé très rapidement
notamment en Roumanie bien que le ratio de dette sur PIB reste inférieur à
40 %. L’orientation de politique économique actuelle dans la zone est plutôt au
resserrement fiscal. D’ailleurs, avec un ratio dette sur PIB aux alentours de 80 %, la
Hongrie ne pourra recourir à une politique budgétaire expansionniste sans prendre
le risque de voir ses coûts de financement accélérer contrairement à la Pologne,
la Roumanie ou la République tchèque. En effet, la dette hongroise est une dette à
haut rendement avec une notation souveraine BB. Seules, la République tchèque
ou la Roumanie peuvent envisager une pause dans leur stratégie d’assainissement
de leurs finances. Leur déficit primaire se situe entre 1,5 et 2 points de PIB. Le déficit
primaire polonais dépasse les quatre points de PIB, niveau dont la soutenabilité
requiert le maintien d’une performance de croissance inchangée.
L’option la plus plausible en 2015 reste l’assouplissement monétaire. Pourtant,
la question de fond demeure la nécessité d’un ancrage à l’euro susceptible
d’intensifi er les pressions défl ationnistes. En conséquence, il apparaît évident
qu’une intégration à l’euro ne sera pas d’actualité en 2015 et probablement
quelques années, en raison des performances économiques médiocres de la
zone euro tout autant que de l’intérêt de ces pays à conserver leurs marges de
manœuvre de politique économique. C’est particulièrement vrai d’un change
fl exible dont l’Espagne bénéficierait probablement en ce moment même, n’étaitce son appartenance à l’euro.
En 2009, 70 % des prêts aux
ménages hongrois sont libellés
en francs suisses. Cette
statistique est à comparer
au cas de la Pologne où ce
type de prêt n’excédait pas
les 38 %
Marges de manoeuvre en termes
de politique économique
3
120%
Le maintien d’un biais accommodant pour longtemps
est le plus probable en 2015
3
"Romania: Country Program Snapshot" October 2014 World Bank Group
22
Ratio dette-sur-PIB
C’est d’ailleurs, une stratégie d’assouplissement qui est retenue par les
banques centrales de ces économies depuis la mi-2012, en baissant leurs
taux directeurs de manière énergique. Nous anticipons que les politiques
monétaires de ces pays évolueront de façon disparate en 2015, à raison
des contraintes et objectifs spécifiques des pays concernés. Jusqu’à
présent, la stratégie la plus efficiente est celle de la République tchèque qui
cible une dépréciation de sa devise par expansion monétaire. L’enjeu est la
reconstitution de marges de compétitivité pour le secteur exportateur tchèque
et le moyen des injections de liquidité en quantités nécessaires à la réalisation
de la dépréciation recherchée. À cet égard, elle apparaît comme une réplique
directe de la stratégie poursuivie par la Banque Nationale Suisse.
Zone euro
100%
Hongrie
80%
60%
Roumanie
40%
Rep. Tchèque
Pologne
20%
0%
-2%
-1%
0%
1%
2%
Taux directeur moins inflation anticipée conso.
3%
Source : Datastream, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
01
#
Janvier 2015
Début novembre, la CNB a réaffirmé son ciblage de la parité EUR/CZK
jusqu’au T1 2016. Toutefois, la CNB pourrait aller plus loin, tant l’appréciation
de la couronne face à l’euro a été importante sur les années 2000. Notons
qu’en République tchèque, l’évolution du crédit est au point mort. Dans un
contexte où l’inflation salariale reste contrainte, ceci ne plaide pas en faveur
d’une baisse des tensions déflationnistes.
La banque centrale hongroise (MNB), en plus de fortement baisser son
taux directeur (de 7 % à la mi-2012 à 2,1 % actuellement), a lancé en
avril 2013 le « Funding for Growth Scheme », un mécanisme fournissant des
4
Anticipations d'infl ation des consommateurs
(solde net)
120%
Zone euro
100%
Ratio dette-sur-PIB
Après avoir rapidement atteint des taux directeurs de 0 %, la banque centrale
tchèque (CNB) a opté pour une dévaluation de sa devise et un ciblage de la
parité contre l’euro à un niveau de 27 : de facto, la couronne tchèque a perdu
environ 6 % face à l’euro lors de la dévaluation. Cette politique est cohérente
quand on sait que la couronne tchèque est l’une des rares devises d’Europe
centrale à s’être appréciée durablement face à l’euro par rapport à la période
2000-2007 : face à l’euro, la couronne tchèque est encore 12 % au-dessus
de sa moyenne sur la période 2000-2007 alors que les autres devises sont
aujourd’hui sous leur moyenne de cette période.
Hongrie
80%
60%
Roumanie
40%
Rep. Tchèque
Pologne
20%
0%
-2%
-1%
0%
1%
2%
Taux directeur moins inflation anticipée conso.
3%
Source : Datastream, Recherche Amundi
> Les prêts en devises étrangères, un facteur aggravant
dans la lutte contre la déflation
Sur la deuxième partie des années 2000, les prêts au secteur privé libellés en
devises étrangères se sont répandus dans les pays d’Europe centrale et de l’Est
(Lettonie, Croatie, Serbie, Roumanie, Bulgarie, Hongrie, Pologne). Une bonne
partie de ces prêts est libellée en francs suisses, ce qui pose problème avec
les pressions haussières sur cette devise sur les dernières années.
La Hongrie lourdement endettée en devises étrangères. Ce phénomène a pris une
ampleur colossale en Hongrie où la part de prêts aux ménages libellés en devises
étrangères a atteint 70 % dès 2008, contre 10 % en 2005. Il est d’une importance
moindre en Pologne où le régulateur a pris les mesures nécessaires pour l’endiguer :
la part des prêts aux ménages libellés en devises étrangères n’a pas dépassé 38 %
(au début 2009). On dénombre, en revanche, très peu de prêts en devises étrangères
en République tchèque.
La question de fond demeure
la nécessité d’un ancrage
à l’euro susceptible
d’intensifier les pressions
déflationnistes
Le fait d’emprunter en devise étrangère crée un risque de currency mismatch :
en cas d’appréciation de la devise étrangère, le service de la dette s’alourdit
considérablement. Si l’appréciation s’avère trop importante, le risque de défaut et
de déstabilisation du secteur bancaire monte fortement. Dans le cas de la Hongrie,
les risques sont d’autant plus élevés que la dette gouvernementale est, elle aussi,
libellée à 40 % en devises étrangères. Les politiques économiques menées par les
autorités hongroises doivent donc veiller à ne pas trop laisser le forint se déprécier.
Forte dégradation de la situation à la suite de la Grande récession. La grande
récession de 2008-2009 a marqué le début d’une période de forte appréciation du
franc suisse par rapport au forint, d’environ 65 % entre septembre 2008 et la fi n
2011. Les ménages hongrois se sont donc retrouvés étranglés par leurs emprunts et
la consommation s’est fortement affaiblie. La situation s’est tellement dégradée que
le gouvernement a dû solliciter le FMI, l’Union européenne et la Banque mondiale en
2008 afin d’obtenir un prêt d’urgence de 25 Mds $. Cette aide avait été conditionnée
par l’adoption de mesures d’austérité drastiques, ce qui a aggravé la récession.
5
PIB en volume (100 au T4 2007)
125
120
115
En 2010, peu après l’élection de Victor Orban, le nouveau gouvernement hongrois a
mis en place des allégements d’impôts pour les ménages et les entreprises tout en
imposant une fi scalité de crise pour certains secteurs comme le secteur fi nancier
mais aussi les secteurs de l’énergie, des télécommunications et de la distribution.
En 2014, le gouvernement Orban a notamment fait adopter une loi permettant aux
ménages endettés en devises étrangères de rembourser leurs emprunts à un taux
de change environ 30 % inférieur au taux de marché.
110
Globalement, un fort endettement en devises étrangères constitue un véritable
handicap dans la lutte contre la défl ation car une politique de dépréciation du taux
de change, encore plus pour un petit pays, est tout simplement impossible dans la
mesure où elle alourdit la charge de la dette.
90
Pologne
Roumanie
Rep. Tchèque
Zone euro
Hongrie
105
100
T1 2007
T3 2007
T1 2008
T3 2008
T1 2009
T3 2009
T1 2010
T3 2010
T1 2011
T3 2011
T1 2012
T3 2012
T1 2013
T3 2013
T1 2014
T3 2014
95
Source : Datastream, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
23
01
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Janvier 2015
25%
20%
15%
10%
5%
en HUF
2014
2013
2012
2011
2010
2008
2009
en devises étrangères
0%
2007
La banque centrale polonaise (NBP) apparaît moins inquiète du risque
déflationniste que ses consœurs. De fait, elle a été la banque centrale des pays
CEE qui a été la moins active ces dernières années. Dans son dernier rapport
trimestriel sur l’inflation (novembre 2014), la NBP dédie un long encadré à la
mesure du risque de déflation en Pologne ("Deflation – assessment of risk
for Poland") : pour elle, la faiblesse de l’inflation est principalement due à des
facteurs externes et ne devrait pas, de par son origine, menacer la croissance.
Pour la NBP, le risque de déflation en Pologne est contenu par la robustesse de
la croissance économique et des salaires, l’absence de deleveraging bancaire
ainsi que la bonne tenue des marchés financiers locaux et de l’immobilier. En
résumé, la NBP est confiante quant aux perspectives d’inflation et ne devrait
pas baisser ses taux à nouveau.
Hongrie : dette des ménages (en % du PIB)
2006
En Roumanie, la banque centrale (NBR) est vraisemblablement loin d’avoir
terminé son cycle d’assouplissement monétaire (la dernière baisse de taux
directeurs a été décidée début novembre). La croissance en Roumanie a
été particulièrement faible lors des derniers trimestres, notamment en ce
qui concerne l’investissement des entreprises, et le crédit à la sphère privée
continue à se contracter. La NBR estime que l’inflation ne rejoindra pas sa
cible (2,5 %) avant 2016 au plus tôt.
6
2005
liquidités à moindre coût aux institutions prêtant aux PME. Cette politique a
vraisemblablement porté ses fruits puisque l’investissement s’est repris de
manière spectaculaire en Hongrie depuis cette date et le taux de chômage y a
fortement baissé. La MNB affirme avoir terminé son cycle d’assouplissement
monétaire, pourtant la consommation des ménages ne progresse que
faiblement, notamment à cause du poids du remboursement des prêts aux
ménages libellés en devises étrangères et de la baisse tendancielle de la taille
de la population. De nouvelles surprises négatives sur l’inflation en zone euro
devraient se transmettre à la Hongrie et la MNB pourrait devoir baisser ses
taux directeurs à nouveau.
Source : Datastream, Recherche Amundi
Ceci étant, il est intéressant de tenter de comprendre si cette rigidité ne
masque pas la conscience d’un besoin de conserver des taux réels positifs
pour inciter une épargne privée qui reste encore trop faible. En effet, l’épargne
des ménages s’est réduite en Europe centrale et en particulier en Pologne
où elle représente moins de 5 % du PIB, ce qui la positionne en dessous de
10 % du revenu disponible des ménages alors qu’en France il est au-dessus.
De plus, une émigration massive des jeunes les plus qualifiés vers les autres
pays européens a fini par rendre le financement des retraites impossible. En
début d’année, le gouvernement polonais a donc opté pour une réforme du
financement des retraites par une structure publique pour limiter l’impact
budgétaire de déficits récurrents des fonds de pensions.
24
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
01
#
Janvier 2015
e
4 La Chine au XXI siècle :
manipuler avec précaution
NICOLAS DOISY, Stratégie et Recherche Économique – Paris
La Chine est sur le point de devenir la première puissance économique
mondiale, et nul doute que son envergure désormais systémique revient à son
expansion sans précédent depuis quinze ans (depuis son adhésion à l'OMC).
Le pays adhère en effet à l'organisation en 2001 alors que la dévaluation du yuan
opérée en 1994 commence à porter pleinement ses fruits ; à partir de ce moment,
les exportations chinoises profitent de la bulle du crédit et de l'immobilier aux
États-Unis et propulsent rapidement la Chine sur le devant de la scène mondiale.
Conséquence : tout comme les États-Unis en 2009, la Chine risque aujourd'hui la
déflation (voir encadré)
Le risque déflationniste va-t-il se répandre ou non sur l'économie mondiale,
par l'intermédiaire des surcapacités accumulées depuis 2009 ? Cela
dépendra de la Chine et du succès de sa transition vers une vraie économie
de marché. Les dirigeants chinois ont mis au point une stratégie économique
et financière très élaborée afin d'achever sans accidents majeurs la transition
du pays vers une économie de marché. Toutefois, alors que des bulles éclatent
maintenant à travers tout le pays, la Chine doit accélérer la restructuration et
la libéralisation de ses secteurs financier et réel ou prendre le risque d’une
dévaluation involontaire du yuan qui pourrait nuire à sa crédibilité.
Le défi économique : libéraliser le secteur fi nancier pour achever
la transition vers une économie de marché
1. Libéraliser et privatiser les ressources pour éliminer les surcapacités
à la fois dans l'industrie et la finance
La stratégie des autorités chinoises consiste à faire d'une pierre deux
coups : elle vise donc à profiter de l'éclatement inévitable de la bulle du
crédit pour assainir, puis libéraliser le secteur financier. L’assouplissement
au cas par cas et sélectif actuellement conduit par la PBoC (au total
1 000 Mds de RMB de liquidités injectées cette année 1) s'apparentent plus à un
assouplissement des conditions de crédit qu’à un assouplissement quantitatif,
ne serait-ce que parce qu'elles visent plus à stabiliser la finance qu'à générer de
l'inflation pour l’heure 2. Dans ce contexte, la seule stratégie viable pour la BPoC
est d'empêcher une dégradation supplémentaire de la situation en délestant
plus vite le secteur bancaire de ses actifs dépréciés3.
Réduire le volume croissant d'actifs non performants qui paralysent le
secteur financier implique de gérer de nombreuses faillites d'entreprises
et leur impact sur l'économie réelle, tout en préservant le marché du
logement. Le niveau d'endettement de la Chine est passé de 150 % à 250 % du
PIB en cinq ans, en troisième position après celui de l'Irlande et de l'Espagne :
par conséquent, même s'il est difficile de donner des chiffres précis, l'économie
chinoise compte certainement des surcapacités importantes qui doivent être
éliminées au plus vite pour empêcher la déflation. La Chine a également tout
intérêt à stabiliser le marché du logement car les bulles immobilières sont
généralement plus longues à disparaître.
2. La croissance du secteur des services sera utilisée pour réaffecter la
main-d’œuvre et répondre à la demande intérieure
Le secteur industriel emploiera plus d’ouvriers qualifiés et des
technologies moins gourmandes en main-d’œuvre, tandis que les
travailleurs moins qualifiés (issus de l'industrie ou nouveaux sur le
marché du travail) viendront travailler dans les services et permettront
de répondre à la demande intérieure. S'ajoutant à la mise à niveau du
capital et de la main-d’œuvre dans l'industrie, la réduction des surcapacités
va invariablement entraîner des vagues de licenciement massives (même si
celles-ci sont transitoires) qui risquent de provoquer de la déflation et une
croissance (nettement) plus faible. Ce n'est donc pas uniquement pour
L’essentiel
Le risque défl ationniste va-t-il se
répandre ou non sur l'économie
mondiale, par l'intermédiaire des
surcapacités accumulées depuis 2009 ?
Cela dépendra de la Chine et du succès
de sa transition vers une vraie économie
de marché. Les dirigeants chinois ont
mis au point une stratégie économique
et financière très élaborée afin d'achever
la transition du pays vers l’économie de
marché sans accidents majeurs. Toutefois,
alors que des bulles éclatent maintenant à
travers tout le pays, la Chine doit accélérer
la restructuration et la libéralisation de ses
secteurs réel financier ou prendre le risque
d’une dévaluation involontaire du yuan
nuisible à sa crédibilité.
Une éventuelle (pour ne pas déjà
dire probable) dépréciation modeste
et graduelle du yuan traduirait une
récession (de croissance légèrement)
défl ationniste due à un atterrissage plus
rude que ne le prévoyaient les autorités.
Elle mettrait alors en évidence des failles
dans la coordination soigneusement gérée
de (i) la restructuration des secteurs réel
et financier (faillites, recapitalisations,
privatisations) et (ii) la modernisation de
l'environnement économique (concurrence
et loi sur les faillites). En réalité la
dépréciation du yuan témoignerait de
pressions récessionnistes et déflationnistes
plus prononcées que prévu, alimentées par
les surcapacités et l'éclatement des bulles
financières.
Malgré leur apparence désordonnée, la
multiplication de mesures toujours plus
larges visant à stabiliser les secteurs réel
et fi nancier tend à confi rmer un début
de ralentissement de la croissance
tendancielle. En effet, qu'elles proviennent
de l'éclatement d'une bulle ou d'un système
financier inapte à sélectionner des projets
industriels viables, les surcapacités ont
toujours les mêmes conséquences : (i) une
dévaluation si le régime de taux de change
est flottant ou (ii) une déflation si le régime
de taux de change est fi xe. Et si l'installation
de nouvelles capacités (services) prend
du retard par rapport à l'élimination des
anciennes capacités (industrie), alors la
dépréciation peut adoucir la transition vers
une croissance plus modérée.
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
25
01
#
Janvier 2015
Les dévaluations répétées. Avec le développement rapide des activités commerciales
avec l’étranger, la question du taux de change est devenue de plus en plus importante.
Le fait que le yuan était surévalué dans les années 80, a constitué un frein au secteur
exportateur. Alors que le yuan était ancré à un panier de devises jusqu’en 1985, un régime
de change administré a été adopté par la suite. Les autorités chinoises ont dévalué de
façon répétée le yuan par rapport au dollar, notamment car un taux de change de « marché
noir » s’était développé pour les exportateurs (surfacturation des importations, sousfacturation des exportations, contrebande)1. Les autorités chinoises ont pris en compte
l’évolution de ce taux de change de « marché noir » et les dévaluations répétées ont eu
pour but d’égaliser le taux de change officiel au taux de change de « marché noir ». Il en va
de même pour la méga-dévaluation de 1994 (dévaluation de 50 % face au dollar). À la suite
de celle-ci, le marché de change de « marché noir » a quasiment disparu. À la fin 1996, le
yuan est devenu totalement convertible pour les transactions de compte courant. Le taux
de change nominal est resté quasiment stable pendant plus d’une décennie, jusqu’en
juillet 2005, ce qui a alimenté les accusations de manipulation du change.
La Chine est devenue « systémique ». L’avènement de Deng Xiaoping a ouvert une
période de croissance économique très forte : 10 % de croissance réelle du PIB en
moyenne entre 1980 et 2010. D’une taille économique négligeable au début des années
1980 (2 % de la production mondiale), la Chine a acquis aujourd’hui une taille systémique,
en représentant plus de 16 % de la production mondiale. Toute crise de l’économie
chinoise est désormais susceptible d’avoir des répercussions mondiales.
1
Voir à ce sujet Ding J., 1998, "China’s foreign exchange black market and exchange
fl ight : analysis of exchange rate policy", The Developing Economies.
26
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
1952
1954
1956
1958
1960
1962
1964
1966
1968
1970
1972
1974
1976
1978
1980
1982
1984
1986
1988
1990
1992
1994
1996
1998
0%
Source : NBS, Recherche Amundi
2
Parité USD/CNY
10
9
dévaluation de 50% en 1994
8
7
6
5
4
3
2
1
2014
2010
2006
2002
1998
1994
1990
1986
1982
1978
1974
0
1970
L’accélération des réformes en 1992-1993. L’un des changements majeurs en termes
de pensée économique est intervenu en 1992 quand le Parti communiste a embrassé
l’idée que l’économie de marché n’était pas incompatible avec le socialisme et a promu
le concept d’« économie de marché socialiste ». Cela a marqué l’avènement définitif de
la politique de Deng Xiaoping, qui s’est retiré de la vie politique en 1992. Davantage de
libertés ont été accordées aux entreprises. L’État s’est désengagé de façon spectaculaire
du processus de production au fil des années 1980 et 1990 (cf. graphique). Davantage
de « zones économiques spéciales » ont été créées, attirant des dizaines de millions de
travailleurs des zones rurales. En l’espace de quelques années, la Chine est passée d’une
quasi-autarcie au statut de grande puissance exportatrice, notamment dans le secteur
des produits manufacturés.
Deng Xiaoping
devient
chef suprême
90%
1966
Moins de contrôle par l’État et davantage d’ouverture à l’international. Deng Xiaoping
a concrétisé la politique des « quatre modernisations », à savoir celle de l’agriculture,
de l’industrie, de la défense nationale et de la technologie. L’État chinois a rendu les
exploitations agricoles aux agriculteurs, ce qui a permis de générer d’importants gains de
productivité, et a investi dans l’industrie, où de faibles investissements pouvaient mener à
des résultats considérables. Surtout, Deng Xiaoping a lancé la politique « portes ouvertes »,
ouvrant les bras aux entreprises étrangères désirant s’établir en Chine et favorisant les
investissements directs étrangers. Le gouvernement a créé des « zones économiques
spéciales » où les entreprises étrangères, dédiées à l’exportation, bénéficient d’un certain
nombre d’avantages (fiscaux notamment) et ont tiré parti d’une main-d’œuvre bon marché.
Cela a notamment permis des transferts de technologie massifs, permettant d’importants
gains de productivité.
100%
1962
À l’accession de Deng Xiaoping au pouvoir en décembre 1978, la situation économique
de la Chine est catastrophique. Le système hypercentralisé (outils de production
détenus ou contrôlés par l’État central) mis en place lors de la politique de Mao
Zedong est en échec : environ 90 % de la population vit avec moins de 1,25 dollar
par jour, 70 % des Chinois travaillent dans le secteur agricole et la productivité est
globalement très faible. L’arrivée au pouvoir de Deng Xiaoping a été l’occasion de
réformes économiques majeures, qui ont profondément transformé l’économie
chinoise. C’est à cette époque que la Chine a fait machine arrière en termes de
contrôle par l’État des activités économiques et s’est dirigée vers une économie de
marché. Cette politique a été couronnée de succès. Alors que la croissance réelle
du PIB par habitant était de 3 % sur la décennie qui a précédé son accès au pouvoir,
elle a été supérieure à 8 % sur la décennie qui a suivi. Le taux de pauvreté, lui, a
chuté de façon spectaculaire (cf. graphique).
Part des entreprises détenues par l'État dans
la valeur ajoutée brute industrielle en Chine
1958
Bastien Drut, Stratégie et Recherche Économique Paris
1
Source : Datastream, Recherche Amundi
3
Chine : part de la population vivant
avec moins de 1,25 $ par jour
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
1981
1983
1985
1987
1989
1991
1993
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
2011
> Comment Deng Xiaoping a façonné la Chine d’aujourd’hui ?
Source : Banque mondiale, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
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14
12
10
8
6
4
2
2013
2011
2009
2007
2005
2003
2001
1999
0
1997
1. La transition vers l'économie de marché s'accompagnera d'un
rééquilibrage de la part des bénéfices et des salaires
16
1995
Le défi politique : instaurer un État de droit afi n de s'assurer
le soutien fi dèle des classes moyennes
Chine : croissance réelle du PIB
1993
Protégés contre la concurrence internationale sur les prix, les services
et les exportateurs pourront supporter une augmentation des coûts plus
rapide, favorisant ainsi une inflation des salaires également rapide et
durable, qui ne mettra pas en danger le yuan 4. En rééquilibrant l'économie
au profit des services, la Chine va pouvoir faire monter en gamme sa production
industrielle (par exemple via les services aux entreprises) et orchestrer une
croissance rapide, mais durable, des salaires afin de soutenir la demande
intérieure (principalement la consommation). En effet, en vertu du mécanisme
de Balassa-Samuelson, l'inflation des coûts dans les services peut n'avoir
aucun impact sur la compétitivité de l'industrie (voir ci-dessous).
1
1991
répondre aux besoins des entreprises et des ménages que la Chine souhaite
développer les services : il se trouve que ce secteur emploiera beaucoup de
travailleurs faiblement qualifiés.
Source : Datastream, Recherche Amundi
Pour créer de réels gains d'efficience, la libéralisation et la privatisation
du secteur privé et de la finance devront être conduites dans un cadre
juridique favorable aux entreprises. Pour obtenir les gains de productivité
nécessaires à une inflation soutenue des coûts et des salaires (dans l'esprit
du mécanisme de Balassa-Samuelson), la Chine va (devoir) moderniser son
cadre juridique afin d'adapter celui-ci aux besoins d'une économie de marché
fonctionnelle, en s'inspirant de la transition des économies post-soviétiques.
D'où les efforts déployés par les autorités pour lutter contre la corruption et la
législation sur les faillites et la concurrence.
Réduire le volume croissant
d'actifs non performants
qui paralysent le secteur
financier implique de gérer
de nombreuses faillites
d'entreprises et leur impact
sur l'économie réelle
Grâce à l'efficacité accrue du capital et à l'expansion des services,
l'augmentation de la productivité favorisera une inflation des salaires
supérieure à celle des prix, qui bénéficiera à la consommation sans
affecter les exportations. De fait, le mécanisme de Balassa-Samuelson
montre qu'une inflation rapide des salaires dans le secteur des services n'a
pas d'impact négatif sur la compétitivité de l'industrie dans la mesure où
les services ne sont pas échangeables et ne sont donc pas confrontés à la
concurrence étrangère sur les prix. Mais ce mécanisme ne fonctionne qu'à
condition que les gains de productivité s'accompagnent d'une forte croissance
des salaires dans l'industrie, afin que celle-ci soit soutenable en termes de
compétitivité internationale 5.
2. Consolider les niveaux de vie de la classe moyenne pour étendre la
base de soutien du régime
Sa capacité de remboursement étant assurée, la classe moyenne devrait
se montrer toute disposée à travailler toute sa vie pour conserver son
logement, à condition que la stabilité du pays et du marché immobilier
soit assurée. La deuxième astuce pour s'assurer la fidélité de la classe
moyenne consiste donc à stabiliser le marché immobilier afin de rendre la dette
des ménages soutenable : cela implique d'éliminer les surcapacités du marché
du logement via la mise en faillite de promoteurs immobiliers, ce qui délestera
aussi les bilans des banques de prêts non performants 7. Autre avantage, cela
pourrait également ralentir la chute des prix immobiliers 8 .
2
Chine : emploi par secteur (en millions)
450
400
350
300
250
200
150
100
50
0
Secteur primaire
Secteur secondaire
Secteur tertiaire
1978
1980
1982
1984
1986
1988
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
2012
Tout en tenant lieu de relance budgétaire, la croissance réelle des
salaires (liée à l'essor des services et à l'augmentation de la productivité
industrielle) va également améliorer le niveau de vie des classes
moyennes. L'un des objectifs premiers des dirigeants chinois est à n'en pas
douter de stabiliser la classe moyenne, et ce pour des raisons politiques
évidentes : en s'arrangeant pour que les salaires augmentent durablement,
et plus vite que les prix, ils garantissent le soutien de la colonne vertébrale
du régime en plus de celui du Parti. Au final, cette stratégie devrait éviter
de recourir à un dispositif de relance budgétaire plus vaste pour soutenir la
croissance de la production 6 .
Source : Datastream, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
27
01
#
Janvier 2015
1. Même si elle est bénéfique dans un environnement déflationniste,
la dévaluation du yuan sera évitée pour préserver la stabilité
Bien qu'elle soit utile en cas de récession par les exportations, une
dévaluation n'est pas envisageable, car elle nuirait à la crédibilité
dont a besoin le yuan en tant que vecteur de la stratégie d'intégration
régionale de la Chine. Cette stratégie d'intégration est capitale pour
assurer la transition, dans la mesure où elle vise à atténuer la récession
par les exportations en repositionnant la Chine plus haut dans la chaîne de
valeur mondiale, tout en prenant le contrôle des facteurs de production à
bas coût qu'elle importera depuis l'Asie en développement. Selon le succès
de cette mise à niveau industrielle, une dévaluation pourrait se révéler moins
nécessaire (si ce n’est inutile étant donné le niveau déjà faible de la demande
mondiale).
Bien qu'elle soit également utile en cas de déflation alimentée par
une baisse de la demande intérieure, une dévaluation entraînerait une
accumulation supplémentaire de réserves de change tout en exportant
ouvertement la déflation chinoise. Si le risque d'atterrissage forcé se
concrétise, la dévaluation serait une option éprouvée pour protéger la Chine
contre la déflation ; on se doute que les autorités ne s'en priveront pas, mais
elles ne sont pas prêtes à en faire usage pour l'instant, car elles manqueraient
alors à leur promesse (répétée récemment au G20) de ne pas s'engager dans
une guerre des devises. Les taux américains et internationaux se mettraient
alors à baisser en signe de la propagation de la déflation chinoise 9.
35000
30000
Secteur primaire
Secteur secondaire
Secteur tertiaire
25000
20000
15000
10000
5000
0
Source : Datastream, Recherche Amundi
Grâce à l'efficacité accrue
du capital et à l'expansion
des services, l'augmentation
de la productivité favorisera
une inflation des salaires
supérieure à celle des prix,
qui bénéficiera
à la consommation
2. Bien qu'elle soit viable à long terme, l'appréciation du yuan
sera contenue pour empêcher la formation de bulles
À long terme, l'appréciation tendancielle du yuan sera un thème clé de la
transition vers l'économie de marché car elle reflétera une inflation élevée
mais durable des salaires, accompagnée d'une croissance équivalente
de la productivité de la main-d’œuvre. Si la Chine réussit à entrer dans le
XXI e siècle en position de première puissance économique durable, elle doit
accepter que sa stratégie d'expansion via la tertiarisation de son économie et
la montée en gamme de sa production industrielle entraîne une appréciation
tendancielle de la valeur d’équilibre du yuan sur le long terme. Cette tendance
reflétera la hausse inévitable et substantielle des salaires sous l'effet d'une
série de gains de productivité durables, générés par une offre plus efficiente 10.
À court terme, il semble qu'une désindexation prudente (c'est-à-dire
graduelle et continue) du yuan sur le dollar soit la meilleure option pour
empêcher que les bulles actuelles reprennent forme ultérieurement. Le
compromis entre une appréciation à long terme et une dévaluation à court
terme consiste à laisser la valeur du yuan se déterminer librement par les flux
de capitaux (y compris ceux des portefeuilles d'investissement) et fluctuer dans
une fourchette qui ira s'élargissant à mesure que l'économie se stabilisera.
Cette solution coïnciderait avec la plupart des scénarios probables, y compris
celui d'une dépréciation modeste et lente jusqu'à un nouveau point bas dans
les prochaines années11.
Chine : PIB par employé
(en yuans, prix de 1978)
3
1978
1980
1982
1984
1986
1988
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
2012
Le défi international : faire du yuan une devise régionale
sans déstabiliser l'équilibre mondial
4
Etat de droit (de -2,5 (faibles)
à 2,5 (fortes) performances gouvernementales)
2
1.5
1
0.5
0
Conclusion
28
-0.5
Canada
R.-U.
Allemagne
US
Japon
France
Italie
Brésil
Chine
-1
Russie
Une éventuelle (pour ne pas déjà dire probable) dépréciation
modeste et graduelle du yuan traduirait une récession (de croissance
légèrement) déflationniste due à un atterrissage plus rude que ne le
prévoyaient les autorités. Elle mettrait alors en évidence des failles dans la
coordination soigneusement gérée de (i) la restructuration des secteurs réel
et financier (défauts, recapitalisations, privatisations) et (ii) la modernisation
de l'environnement économique (concurrence et loi sur les faillites). En
réalité la dépréciation du yuan témoignerait de pressions récessionnistes et
déflationnistes plus prononcées que prévu, générées par les surcapacités et
l'éclatement des bulles financières.
Source : Banque mondiale, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
01
#
Janvier 2015
La multiplication de déclarations officielles et de mesures toujours plus
diverses visant à stabiliser les secteurs réel et financier tend à confirmer
un début de ralentissement de la croissance tendancielle. En effet, qu'elles
proviennent de l'éclatement d'une bulle ou d'un système financier inapte à
sélectionner des projets industriels viables, les surcapacités ont toujours les
mêmes conséquences : (i) une dévaluation si le régime de taux de change
est flottant ou (ii) une déflation si le régime de taux de change est fixe. Si
l'installation de nouvelles capacités (services) prend du retard par rapport à
l'élimination des anciennes capacités (industrie), alors une dépréciation peut
adoucir la transition vers une croissance plus modérée.
Chine : prévisions d'inflation du consensuss
5
4
3.5
3
2.5
2
1.5
En plus de ces injections (qui apparaissent maintenant massives) de liquidités, la
PBoC a déjà activé progressivement tout l'arsenal de mesures à sa disposition :
assouplissement des conditions de prêt (notamment aux ménages), réduction du
ratio des réserves obligatoires imposé aux banques (aujourd’hui à 1/5 e, ce qui est
beaucoup au regard des standards occidentaux et procure un matelas relativement
épais en cas de pertes), garantie des dépôts bancaires pour les classes moyennes,
transfert des actifs financiers dépréciés vers des véhicules publics de gestion d'actifs
(structures de défaisance), légères dévaluations (en vue de l'élargissement à venir de
la fourchette de fluctuation du yuan par rapport au dollar : si le dollar s'apprécie contre
toutes les devises, le maintien de l’ancrage du yuan pèsera sur la compétitivité des
exportations). Il semble donc judicieux de commencer à familiariser le marché avec
l'instauration d'un régime flottant car une dépréciation légère et graduelle (contrôlée)
pourrait amortir le choc en cas de faillites importantes dans l'immobilier et la finance,
et contre les pressions déflationnistes qui s'ensuivront. Voir dernière section du texte
principal pour en savoir plus sur cette approche.
2
À cet égard, mieux vaut les comparer avec les interventions d'urgence de la Réserve
fédérale américaine fin 2008 puis QE-1 en 2009 (plutôt qu'avec QE-2 et 3, dont le but
était de contrer la déflation et de relancer l'inflation, et non plus de stabiliser le secteur
financier).
3
Fin des années 90 et début des années 2000, l'Allemagne a connu un épisode
de surendettement des ménages, qu'elle a brillamment résolu en réformant la
procédure de faillite personnelle de manière à ce qu'un ménage déposant une
requête d'allégement de sa dette et/ou de rééchelonnement soit quasiment assuré de
l'obtenir. En 2009, Barack Obama n'a pas convaincu le Congrès d'adopter la même
stratégie que l'Allemagne, car les banques auraient alors dû supporter des pertes
encore plus importantes que pendant la crise Lehman. Ces deux exemples montrent
qu'un programme de réduction de la dette contribue largement à empêcher que
l'éclatement d'une bulle de crédit ne se mue en (pré-)déflation, en particulier lorsque
ce programme est axé sur les ménages. La Chine a donc tout intérêt à laisser certaines
entreprises déposer leur bilan (pour délester les banques de prêts potentiellement non
performants) tout en protégeant la situation financière des ménages, pour les raisons
politiques exposées dans le texte principal.
4
Les services sont protégés contre la concurrence des prix étrangers dans la mesure
où ils ne sont tout simplement pas transportables, et donc pas échangeables
à l'international ; la production manufacturière, quant à elle (plus généralement
industrielle) est protégée par une amélioration constante de la productivité (liée à
l'innovation technologique et à des gains d'efficience), qui doit placer la Chine en
position de price maker sur le marché international : c'est l'un des objectifs du projet
d'accord d'intégration commerciale et financière avec des pays plus pauvres de la
région, dans lesquels la Chine prévoit de délocaliser sa production à bas coût.
5
Il faut impérativement que les salaires augmentent dans les mêmes proportions dans
l'industrie et dans les services à cause de la (quasi) liberté de mouvement existant
entre le secteur des biens et services échangeables (l'industrie) et non échangeables
(les services). Dans une certaine mesure, certains pays en fournissent une preuve
empirique, à l'image de la Slovaquie, où la couronne s'est appréciée de 40 % pendant
la seconde moitié des années 2000 sans subir pour autant de correction brutale et/ou
prononcée. C'est précisément grâce aux gains d'efficacité accumulés dans l'industrie
après la réforme et les changements budgétaires et les nombreuses réformes de
2003-2004.
6
Naturellement, ce calcul ne tient pas compte du coût budgétaire de la recapitalisation
éventuelle (bien que pas toujours souhaitable) de plusieurs groupes industriels. Si en
effet les autorités envisagent ce type de recapitalisation, elles devront s'interroger
sur les avantages induits par la restructuration d'entreprises publiques en vue de
1
2014
2015
0.5
0
01-12
03-12
05-12
07-12
09-12
11-12
01-13
03-13
05-13
07-13
09-13
11-13
01-14
03-14
05-14
07-14
09-14
11-14
1
2013
Source : Datastream, Recherche Amundi
À long terme, l'appréciation
tendancielle du yuan sera
un thème clé de la transition
vers l'économie de marché
car elle reflétera une inflation
élevée mais durable
des salaires, accompagnée
d'une croissance équivalente
de la productivité
de la main-d’œuvre
À court terme, il semble
qu'une désindexation
prudente (c'est-à-dire
graduelle et continue) du yuan
sur le dollar soit la meilleure
option pour empêcher que
les bulles actuelles reprennent
forme ultérieurement
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
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01
#
Janvier 2015
les fermer ou de les privatiser, ne serait-ce qu'à cause de la résonance politique
de ces sauvetages effectués avec l'argent des contribuables. Il faudra cependant
mettre en place une législation appropriée de la concurrence et des faillites. Toutes
ces considérations sont merveilleusement illustrées par la succession de réussites et
d'échecs accomplis dans le cadre de la transition des économies post-soviétiques
dans les années 90.
7
Naturellement, cela signifie qu'au cours des prochaines années, des banques seront
recapitalisées (ou poussées au dépôt de bilan) puis privatisées, dans le cadre de la
libéralisation du secteur financier.
8
Historiquement, souvent, le surplus de dette des ménages a tendance à diminuer
beaucoup moins vite que celui des entreprises ; par conséquent, aussi involontaire
qu'elle puisse paraître, la préservation du marché immobilier n'est qu'une autre
manifestation du réalisme pragmatique des dirigeants chinois.
9
Étant donné que la croissance chinoise dépendra de (i) celle du secteur industriel,
toujours axé sur les exportations, et (ii) celle du secteur des services, qui (espéronsle) se développera rapidement, la Chine devra s'appuyer encore sur ses exportations
tant que les services ne seront pas assez vigoureux pour prendre le relais et pour
que la croissance totale préserve la stabilité politique et sociale. Pour cette raison, la
Chine a intérêt à poursuivre sa transition sans (trop) dépendre de la croissance des
exportations, car la demande mondiale ralentit sous l'effet de pressions déflationnistes
qui proviennent elles-mêmes de l'Empire du Milieu. Autrement dit, les intérêts de
la Chine sont à peu près alignés sur ceux du reste du monde dans la mesure ou
celui-ci n'est plus là pour absorber les exportations de la Chine, et ceci par la faute
de cette dernière : il paraît donc logique que les dirigeants chinois cherchent une
solution domestique, et ce d'autant plus que l'indépendance nationale est un de leurs
principaux objectifs stratégiques.
11
C'est un point soulevé par les États-Unis pour appuyer leur demande de réévaluation
du yuan, un processus initié en 2005 avant d'être interrompu en 2008 après la crise
Lehman. Bien sûr, les États-Unis ont aussi d'autres raisons pour réclamer cette
réévaluation, à commencer par le fait qu'elle stopperait les pressions déflationnistes
grandissantes qui émanent de la Chine depuis les années 2000.
12
Le rythme de cette dépréciation dépendrait de deux principaux facteurs (qui
entretiennent entre eux un certain nombre de liens) : (i) le niveau actuel de sur- ou
de sous-évaluation du yuan et (ii) l'ampleur des surcapacités et les possibilités
de redéploiement de l'offre vers les services. Ces deux paramètres feront l'objet
d'estimations aux fins de futures publications.
30
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
01
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Janvier 2015
5 High Yield américain vs High Yield
L’essentiel
européen : une différence notoire
SERGIO BERTONCINI, Stratégie et Recherche Économique – Milan
Le découplage récent entre les
performances du haut rendement
américain et européen s'explique
à la fois par des facteurs bottomup et top-down. Des écarts dans la
composition de ces deux marchés
jouent notamment un rôle important,
dans la mesure où l'univers des
obligations spéculatives américaines
contient plus d'émetteurs faiblement
notés que son homologue européen.
Commençons par l'énergie…
Les obligations spéculatives européennes ont nettement surperformé leurs
homologues américaines au second semestre ; et la divergence croissante
des performances relatives en faveur de l'Europe tient à la combinaison de
plusieurs facteurs. Toutefois, l'un de ces facteurs joue un rôle primordial et n'a
pas de rapport avec les tendances top-down ; il refléterait plutôt la composition
des deux univers d'un point de vue bottom-up. Le secteur énergétique occupe
en effet une grande place parmi les émetteurs spéculatifs américains, car
il représente non seulement près de 15 % de l'ensemble du marché, mais
aussi la même proportion dans chaque grande catégorie de note (BB, B et
CCC). Or c'est le contraire en Europe, où son poids parmi les émetteurs est
relativement limité. Le recul brutal des prix du pétrole et de l'énergie a des
effets potentiellement positifs sur la consommation dans un horizon de moyen
à long terme, car il libère des ressources pouvant être consacrées à d'autres
secteurs économiques en dopant le pouvoir d'achat des ménages et, partant,
la demande privée. À court terme, cependant, la baisse des cours pétroliers
peut affecter sérieusement les secteurs qui y sont exposés, en particulier si
la tendance baissière est aussi brutale et aussi prononcée que ces derniers
mois. Selon nos calculs, 50 % de la sous-performance totale du HY américain
par rapport aux bons du Trésor entre novembre et mi-décembre provient du
secteur énergétique, alors que son poids sur le marché de la dette HY n'est
que de 15 %.
D'autre part, l'univers du haut rendement
américain est nettement plus exposé au
secteur énergétique. Quant aux facteurs
top-down, leur impact n'est pas encore
significatif. Globalement, nous considérons
toujours que le haut rendement européen
est plus défensif et davantage soutenu
par les facteurs techniques, bien que
dernièrement, les valorisations soient
devenues plus favorables aux obligations
spéculatives américaines. Enfin, en dépit
des effets négatifs de la baisse des cours
pétroliers sur le secteur énergétique
ces dernières semaines, les agences
de notation signalent toujours des
perspectives relativement stables pour les
taux de défaut en 2015 (voir notre encadré
pour plus de détail sur les tendances
récentes et les prévisions des agences).
… passons maintenant à la qualité
340
320
300
280
260
240
220
EUR BB
US BB
Source : Bloomberg, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
31
11-14
10-14
09-14
08-14
07-14
06-14
05-14
04-14
200
03-14
Les facteurs top-down jouent certainement aussi un rôle, même si pour
l'instant, ils semblent avoir moins d'influence que la qualité et la représentation
des secteurs. Les taux de défaut ont plus baissé en Europe qu'aux ÉtatsUnis, et les prévisions des agences de notation pour 2015 (voir encadré ci-
360
02-14
Et les facteurs top-down ?
380
01-14
Par conséquent la sous-performance américaine est liée au fait que le secteur
énergétique est très représenté parmi les émetteurs, et notamment parmi ceux
qui sont moyennement et faiblement notés. La performance relative de chaque
catégorie de notation en termes d'OAS est présentée dans les graphiques.
Spread vs government bonds :
US vs EUR BB-rated bonds
1
12-13
Le fait que 15 % des émetteurs HY de notation moyenne et faible proviennent
aussi du secteur énergétique est assez significatif, parce que comme nous
l'avons évoqué dans les précédents numéros hebdomadaires et mensuels,
les investisseurs ont cessé de chercher du rendement à tout prix sans se
soucier de la qualité et de la liquidité. Depuis les bouleversements d'octobre,
les obligations BB ont largement surperformé les B et CCC des deux côtés de
l'Atlantique, dans les phases baissières comme pendant les reprises. Comme
nous le savons, la note de crédit reflète la qualité, mais elle est aussi liée à une
autre variable qui est en train de devenir de plus en plus capitale, à savoir :
la liquidité. Les obligations HY européennes sont certes moins diversifiées
que celles du marché américain, mais elles présentent en revanche un profil
plus défensif. Et ce qui, entre autres, les rend plus défensives, c'est la forte
proportion d'obligations notées BB sur le marché spéculatif européen. De fait,
les titres BB représentent presque les deux tiers, soit 64 % de tout le marché
HY d'Europe, alors que les obligations notées B en représentent 29 % et les
CCC à peine 7 %. La répartition est très différente sur le marché américain :
les émetteurs assortis d'une note de crédit moyenne / faible sont plus
nombreux que les émetteurs de qualité, et le « maillon faible », les obligations
CCC, représentent 14 % du marché total soit deux fois plus qu'en Europe. Les
titres B représentent 39 % du marché HY américain, et seuls les 47 % restants
reviennent à des émetteurs BB.
01
#
Janvier 2015
après) annoncent des perspectives légèrement plus positives pour l'Europe
également. Certes, la croissance américaine est plus forte et s'accélère, mais
dans le même temps, le pays s'apprête à pratiquer une politique monétaire moins
accommodante que par le passé, surtout comparé à celle de la BCE. La quête
de rendement est une tendance toujours dominante sur le marché européen
dans la mesure où seulement 15 % des instruments obligataires rapportent
plus de 2 % (contre 51 % il y a un an !). Compte tenu de ces considérations et
du fait que le marché spéculatif est plus petit en Europe qu'aux États-Unis (à
peine 4 % du marché obligataire européen), les facteurs techniques semblent
mieux orientés pour les obligations HY en EUR, car il y a plus de chances que
la Banque centrale renforce son dispositif d'assouplissement quantitatif.
Spread vs government bonds :
US vs EUR B-rated bonds
2
650
600
550
500
450
400
> Taux de défaut des obligations spéculatives : tendances 2014
et anticipations des agences de notation pour 2015
350
32
11-14
10-14
09-14
08-14
07-14
06-14
05-14
04-14
03-14
02-14
01-14
12-13
EUR B
US B
Source : Bloomberg, Recherche Amundi
La quête de rendement
est toujours une tendance
forte en Europe
Spread vs government bonds :
US vs EUR CCC-rated bonds
3
1100
1000
900
800
700
600
500
EUR CCC
Source : Bloomberg, Recherche Amundi
V
11-14
10-14
09-14
08-14
07-14
06-14
05-14
04-14
03-14
02-14
400
01-14
05-15
11-14
05-14
11-13
05-13
11-12
05-12
11-11
05-11
11-10
05-10
11-09
05-09
11-08
L e s a g e n c e s d e n ot a ti o n
Taux de défaut calculés par Moody’s :
c o n s i d è r e n t to u j o u r s q u e
réels et prévisions
l'e nv i r o n n e m e n t d e s t a u x
de défaut bénéficie de
16
perspectives favorables,
14
comme elles l'ont réaffirmé
12
récemment. Ainsi, Moody’s
estime par exemple que les
10
défauts à l'échelle mondiale
8
vont rester à des niveaux faibles
et stables pendant les douze
6
mois à venir, et table sur 2,4 %
4
contre 2,3 % actuellement.
Certaines tendances apparues
2
dernièrement, plus favorables
0
à l'Europe qu'aux États-Unis,
devraient également persister
mais dans des propor tions
US
Europe
limitées. Les taux de défaut
Prévision US
Prévision Europe
H Y a m é r i c a i n s d e v r a i e n t Source : Bloomberg, Recherche Amundi
légèrement progresser pour
atteindre 2,5 % contre 1,9 % actuellement, mais dans le même temps, les obligations
d'entreprise spéculatives européennes devraient encore voir leurs taux de défaut
baisser pour s'établir à 1,9 % en octobre 2015 (2,3 % aujourd'hui). S&P table
également sur des perspectives en amélioration pour les défauts des entreprises
HY européennes au cours des prochains trimestres, après une embellie en 2014
conforme aux estimations de Moody's.
300
12-13
En 2014, les taux de défaut des obligations spéculatives ont continué à reculer
par rapport à des niveaux déjà faibles. Selon les dernières statistiques de
Moody's, le taux de défaut mondial des émetteurs spéculatifs sur 12 mois
glissants a atteint 2,3 % en octobre dernier, contre 2,8 % en décembre 2013.
Le recul des défauts a tout aussi bien concerné les États-Unis que l'Europe,
mais celle-ci a davantage contribué à la tendance baissière : ainsi les taux de
défaut HY européen ont presque diminué de moitié entre décembre 2013 (4,2 %)
et octobre 2014 (2,3 %) alors que les mêmes taux aux États-Unis sont passés
de 2,2 % à 1,9 % sur la même période. La situation paraît même encore plus
favorable quand l'on mesure les taux de défaut en pourcentage de la dette
et non du nombre d'émetteurs. Sur cette base, et selon les derniers chiffres
disponibles, les défauts de la dette spéculative américaine se montent à 1,9 %
et ceux de la classe d'actifs en Europe à tout juste 1,6 %. La différence entre
ces deux mesures implique que les taux de défaut sont moins importants parmi
les gros émetteurs que parmi les petites et moyennes sociétés.
US CCC
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
01
#
Janvier 2015
6 Valeurs de croissance :
L’essentiel
un risque ou une opportunité ?
ÉRIC MIJOT, Stratégie et Recherche Économique – Paris
Le ratio des valeurs de croissance
rapportées aux valeurs décotées du
MSCI Monde (MSCI Growth/Value)
casse à nouveau ses plus hauts de la
mi-2012. La baisse des prix du pétrole
et des valeurs pétrolières ne fait que
renforcer cette évolution.
Le ratio des valeurs de croissance rapportées aux valeurs décotées (MSCI
Gowth / MSCI Value) vient de casser ses plus hauts au niveau mondial (voir
graphique 1). Cette dynamique en faveur des valeurs de croissance, entamée en
2007 (crise Lehman) s’était interrompue à la mi-2012 (discours de M. Draghi). La
baisse des prix du pétrole donne un nouvel élan aux valeurs de croissance par
rapport aux valeurs décotées. Faut-il suivre ou non ce mouvement ?
Historiquement les cycles en faveur des
valeurs de croissance se sont toujours finis
par des exagérations… et la chute qui a
suivi n’en n’a été que plus brutale. Il existe
aussi d’autres moyens de tirer profi t des
taux bas avec les stratégies de dividendes.
Si on veut accompagner le mouvement
sur les valeurs de croissance, la sagesse
consiste à combiner valeurs de technologie,
majoritairement américaines (ce qui permet
en plus d’être exposé au dollar US), et
valeurs de rendement. Mais mieux vaut
éviter les valeurs de biotechnologie et de
réseaux sociaux, déjà bien engagées sur le
chemin d’une bulle.
Pourquoi les valeurs de croissance reprennent-elles le dessus ?
Deux arguments sont clé pour s’intéresser aux valeurs de croissance :
1. la faiblesse de l’inflation maintient les taux bas, ce qui soutient la valorisation
des actifs à duration longue
2. l’effet rareté de la croissance fait que cette dernière est recherchée.
La baisse des prix du pétrole, qui a démarré en juin 2014 et s’est amplifiée
à partir de septembre-octobre ne fait que renforcer ces deux arguments
au niveau macroéconomique. Elle ajoute aussi un argument sectoriel assez
mécanique : la consommation discrétionnaire, qui doit théoriquement en
profiter, est fortement présente dans l’indice de valeurs de croissance au
niveau mondial, devant la technologie et les valeurs de santé (voir tableau).
À l’inverse, les valeurs pétrolières sont, après les valeurs financières, celles qui
sont le plus surreprésentées dans l’indice Value. Ajoutons qu’en général, l’effet
d’une baisse des prix du pétrole sur la consommation est plus rapide que les
coupes de capacité des producteurs.
Cette dynamique est en place sur tous les continents
1
0.9
0.8
0.7
0.6
Récession
2013
2008
2003
1998
1993
0.5
1988
Il est intéressant de constater qu’ailleurs, la recherche de croissance prend
aussi le dessus si on se réfère à l’évolution récente du ratio MSCI Growth/Value
par région (voir graphique n° 4). C’est le cas au sein des marchés émergents, de
l’Europe et du Japon. Parmi ces trois bassins d’investissement, le cas du Japon
nous interpelle le plus, car historiquement les stratégies basées sur la recherche
de valeur l’ont toujours emporté. Cela montre bien qu’après plus de 20 ans
de normalisation des valorisations japonaises, quelque chose est en train de
Ratio des valeurs de croissance vs valeurs
décotées du MSCI Monde
1
1983
À ce stade du cycle (phase iii de notre feuille de route – voir Discussion Paper :
« Le cycle court de l’investissement : notre feuille de route »), il est assez classique
que si la croissance économique joue les prolongations, ce qui correspond à
notre scénario, les valeurs de croissance l’emportent. Il s’agit d’un des thèmes
que nous évoquions dans notre édition de novembre sur les perspectives 2015.
La baisse des prix du pétrole vient conforter notre conviction à cet égard. Cette
situation rappelle d’ailleurs étrangement la fin des années 1990, pendant laquelle
l’attractivité américaine profi tait aux valeurs de technologie et faisait monter le
dollar tout en maintenant les taux à un bas niveau.
Les valeurs de croissance
reprennent l’avantage
1978
Aux États-Unis, pays leader de ce cycle, les flux sont attirés par une croissance
économique supérieure à celle des autres régions du monde (2,7 % attendu
en 2015 contre +1,9 % en moyenne pour les pays industrialisés) ; il se pourrait
même que la progression des flux soit plus rapide que la croissance des profi ts.
Il suffi t de peu maintenant pour que la valorisation du marché dans son ensemble
passe le cap des 18x les profi ts connus (le PER a récemment atteint 17,8x), seuil
au-delà duquel on peut considérer qu’il entrerait en bulle comme ce fut le cas en
1987 ou en 1996-2000 (voir Cross Asset de mars 2014 : « Marchés d’actions :
faut-il envisager la formation d’une bulle ? »). Comme on peut justifi er une prime
pour la croissance domestique aux États-Unis par rapport au reste du monde,
ce mouvement pourrait s’installer et se concentrer sur les secteurs à plus forte
croissance. D’ailleurs, certains sous-segments de la thématique « croissance »
sont déjà en situation de bulle, à savoir les valeurs liées aux réseaux sociaux et
à la biotechnologie (voir graphique n° 3).
MSCI Monde Growth / Value
Source : Datastream, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
33
01
#
Janvier 2015
MSCI
Monde
Value
MSCI
Monde
Cons. Discrétionnaire
19 %
8%
13 %
Technologie
16 %
8%
12 %
Santé
15 %
8%
12 %
Industrielles
14 %
9%
11 %
Cons. Courante
12 %
10 %
10 %
Matériaux de base
5%
5%
5%
Télécommunications
2%
6%
4%
Services Publics
0%
6%
4%
Énergie
4%
10 %
8%
Financières
13 %
30 %
21 %
Total
100 %
100 %
100 %
Au final, le fait de casser les plus hauts sur le ratio MSCI World Growth/Value
envoie bien un signal favorable à cette thématique au niveau global, mais
peut-être davantage aux États-Unis qu’ailleurs. Rappelons que la croissance
mondiale est principalement tirée par les États-Unis.
La biotech est déjà bien
engagée sur le chemin
d’une bulle
Une stratégie non dénuée de risque
On remarque que par le passé les cycles en faveur des valeurs de croissance au
niveau global finissent toujours en mode « exagération ». Cela a été le cas en 1980,
1987, 1992-93, 1999-2000. Il n’y a pas de raison que cette fois-ci fasse exception
à la règle. C’est le bon côté de la médaille. Son revers est visible sur le graphique
n° 1 : ensuite… plus dure sera la chute. Depuis la fin des années 1970, après avoir
établi des plus hauts, le ratio MSCI Growth/Value a toujours corrigé sévèrement.
34
MSCI États-Unis Biotech vs Nasdaq
1400
Indice NASDAQ décalé de 15 ans
1200
MSCI USA BIOTECH
1000
800
600
400
200
2018
2016
2014
2012
0
2010
Aussi nous paraît-il intéressant de compléter cette stratégie par une approche
plus prudente, consistant à capitaliser sur la faiblesse durable des taux d’une
autre manière, en s’intéressant simplement au rendement des entreprises et à
sa pérennité. En effet, les rendements offerts par les actions sont maintenant
supérieurs à ceux des obligations d’État, voire des obligations d’entreprises.
Rappelons qu’avant août 1958, cette hiérarchie des rendements était la norme,
ce qui répondait à une rationalité, les actionnaires étant les derniers à se
faire rembourser en cas de faillite. La forte croissance de l’après-guerre, puis
l’abandon du système de taux de change fi xe, la montée de la financiarisation et
du levier des économies avaient renversé cet ordre établi depuis l’origine. Alors
que les scénarios de croissance faible pour longtemps (« stagnation séculaire »)
gagnent en crédibilité et que le rendement se raréfi e sur les placements à taux
fi xes, s’intéresser à nouveau aux rendements des valeurs fait sens.
3
2002
Tant que les investisseurs seront convaincus des arguments en faveur d’une
« stagnation séculaire », les valeurs de croissance devraient en bénéficier.
L’évolution du prix du pétrole vient redonner de l’élan à cette thématique et cela
pourrait durer. Mais il faudra être vigilant. Chacun sait que détecter un point
haut est délicat, même quand il existe des prémices. En 1987, le ratio MSCI
Growth/Value a établi un plus haut début mai, alors que le krach n’a eu lieu
qu’en octobre. En 2000, le ratio a fait un plus haut majeur en mars ; le krach n’a
vraiment pris corps qu’en septembre.
2008
Enfin, en Europe, le retour vers cette thématique est compréhensible, vu la
division par 2 de la croissance potentielle du PIB par rapport à l’avant crise de
2007 (1,2 % dans notre scénario central contre 2,3 % de 1987 à 2007). À noter
qu’en Europe la composante consommation du MSCI Growth est plus défensive
qu’ailleurs (consommation courante et santé représentent 39 % de l’indice MSCI
Growth même si la consommation discrétionnaire représente quand même
19 %). Compte tenu d’un positionnement plus en amont dans le cycle qu’aux
États-Unis et du QE de la BCE, le thème de la refl ation fait sens ; cela concerne
les financières et la consommation discrétionnaire, autrement dit des valeurs à
la fois Value et Growth.
MSCI
Monde
Growth
Capitalisations
en %
2006
Dans le cas des marchés émergents, habitués à une forte croissance, la recherche
de valeur a été à la mode de l’an 2000 jusqu’en 2008. Depuis, la croissance
économique de ces pays s’étiolant, le mouvement s’est progressivement
retourné en faveur des valeurs de croissance. Cela dit, cet univers est davantage
travaillé par régions ou par pays que par secteurs ou par styles. Le fait d’être
producteur ou consommateur de matières premières est particulièrement
clivant. La forte baisse des devises suggère par ailleurs de rester prudent sur les
pays aux fondamentaux les plus fragiles, notamment en matière d’endettement
externe. Nous nous en tenons pour l’instant à notre préférence pour l’Asie qui
n’est pas remise en cause par ces derniers développements.
Capitalisations des différents secteurs
dans le MSCI (%)
2
2004
changer. La rentabilité des capitaux propres augmente enfin, encouragée par la
politique de M. Abe, ce qui plaide pour une poursuite du mouvement. En regardant
de plus près la composition de l’indice MSCI Growth au Japon, on s’aperçoit
qu’il est riche de valeurs technologiques et d’industrielles, donc finalement
de valeurs exportatrices qui profi tent de la faiblesse du yen. On comprend
également mieux cette dynamique. Au Japon, les valeurs internationales sont
en effet là aussi un thème qui nous paraît porteur pour l’année à venir.
Source : Datastream, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
01
#
Janvier 2015
MSCI Growth / Value par régions
4
180
200
160
180
160
140
140
120
120
100
100
80
80
BRIC
JAPON
2014
2012
2010
2008
2006
2004
40
2002
40
2000
60
1998
60
1996
Le contexte d’une croissance globale suffisante mais contenue, et d’une
inflation basse est propice aux actifs risqués et plaide pour le maintien de taux
à bas niveau. La baisse des prix du pétrole vient accentuer ce scénario. Le
ratio MSCI Growth/MSCI Value en profite pour casser ses plus hauts de 2012.
Il faut dire que les valeurs pétrolières qui souffrent de cette situation font partie
des valeurs décotées alors que la baisse des anticipations d’inflation incite à
se porter sur les durations longues. Ce phénomène est vrai au niveau global
mais la thématique nous paraît plus pure aux États-Unis. Rappelons-nous
quand même que si les cycles favorables aux valeurs de croissance finissent
toujours en exagération, ces valeurs ne sont pas dénuées de risque. Si on veut
suivre le mouvement sur les valeurs de croissance, la sagesse consiste par
exemple à combiner valeurs de technologie, majoritairement américaines (ce
qui permet en plus d’être exposé au dollar), et valeurs de rendement (une autre
façon de profiter des taux bas). Mais mieux vaut éviter la biotechnologie et les
réseaux sociaux, déjà bien engagés sur le chemin d’une bulle.
1994
Conclusion
EUROPE
ETATS-UNIS
Source : Datastream, Recherche Amundi
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
35
01
#
Janvier 2015
7 Le ratio de capacité d’absorption des pertes
du Conseil de stabilité financière : plus de peur
que de mal pour les banques européennes ?
YASMINE DE BRAY, THOMAS LAPEYRE, Analyse Actions – Paris
ANH PHAM DUNG, STÉPHANE HERNDL, Analyse Crédit – Paris
En novembre 2014, le Conseil de stabilité financière (CSF) a publié un
document consultatif décrivant le ratio de Capacité d’absorption des pertes
(Total Loss Absorbing Capacity - TLAC). Pour réduire les risques induits
par les faillites bancaires et améliorer la stabilité financière mondiale,
le CSF recommande d’imposer des volumes sensiblement plus élevés
d’instruments d’absorption des pertes (capital et dette) aux institutions
considérées comme des établissements bancaires d’importance systémique
mondiale (EBIS). Ces établissements dits systémiques à l’exception de ceux
domiciliés dans les Pays émergents (y compris la Chine) devront respecter
ces exigences additionnelles à partir de 2019. La structure de financement
des établissements bancaires américains est déjà conforme à ce nouveau
cadre réglementaire tandis que les établissements d’Europe continentale
devront s’y adapter.
Les autorités mondiales de supervision du secteur bancaire ont l’intention
d’au moins doubler les exigences réglementaires de fonds propres des EBIS
par rapport à celles imposées par les normes mondiales de Bâle III, mises
en place par le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire après l’éclatement
de la crise financière. Le document confirme que les EBIS seront tenus de
détenir l’équivalent de 16 % à 20 % de leurs actifs pondérés (risk-weighted
assets - RWA) en instruments de capital ou de dette, susceptibles d’être
liquidés pour contribuer à une résolution ordonnée. Les exigences de Bâle III
concernant les volants de fonds propres s’ajouteront aux exigences du ratio
TLAC. L’exigence relative aux actifs pondérés en fonction des risques sera
également complétée par une contrainte sur le ratio de levier nominal de 6 %
minimum (deux fois le ratio de levier minimal sous le régime Bâle III).
L’essentiel
Le TLAC « ratio de capacité
d’absorption des pertes » est le
nouveau ratio réglementaire introduit
par le Conseil de stabilité financière
en novembre dernier. Le conseil
recommande ainsi que les banques
d’importance systémique détiennent
l’équivalent de 16 % à 20 % de
leurs actifs pondérés sous forme
d’instruments de capital ou de dette,
susceptibles d’être liquidés pour
contribuer à une résolution ordonnée.
Si ce ratio a pu dans un premier temps faire
peur (le capital et les dettes subordonnées
ne représentant qu’environ 15 % des
actifs pondérés pour la plupart de ces
banques), l’intégration de certaines dettes
senior dans ce ratio devrait permettre
aux banques concernées de s’y adapter
facilement. Le TLAC, de même que la
proposition de ratio de levier minimum en
Angleterre, témoignent selon nous d’une
certaine modération dans le durcissement
réglementaire connu depuis quelques
années.
Le TLAC n’est pas aussi contraignant qu’il n’y paraît
et les banques d’importance systémique possèdent
les ressources nécessaires pour y faire face
Bien qu’il semble exigeant à première vue, le ratio TLAC (16 %-20 %) pourra
être satisfait grâce à une gamme d’instruments financiers plus large que celle
imposée par le ratio total de fonds propres de Bâle III (en particulier la dette
senior), à condition que ces titres puissent être mobilisés sans entraîner un
risque juridique important. Citons notamment la dette senior émise par les
holdings bancaires, en général américains et britanniques. Seule une portion
(équivalente à 2,5 % des RWA) de la dette senior non garantie émise par les
banques d’Europe continentale (dont la majorité n’ont pas de holding) sera
éligible. Cependant, jusqu’en 2019, ces banques pourront remplacer la dette
senior non garantie existante par de nouveaux instruments de dette senior non
garantis assortis d’une clause contractuelle d’absorption des pertes (bail-in),
qui devront respecter la définition des instruments conformes au TLAC.
Même si les banques devront modifier la composition de leur dette et que
cela pourrait augmenter quelque peu leurs coûts, nous ne pensons pas que
leurs bénéfices en souffriront démesurément. Si l’on fait l’hypothèse que les
nouveaux titres senior non garantis afficheront un spread situé entre ceux
de la dette senior et de la dette Tier 2, nous pensons que la dilution des
bénéfices ne sera pas supérieure à 3-4 % en moyenne pour les banques
européennes dans un scénario intermédiaire (exigence du Pilier 1 de 18 %).
Notre calcul pourrait être révisé à la baisse en incluant les instruments de
dette senior non garantis non éligibles, dans la limite de 2,5 % des RWA.
Le ratio TLAC pourra être
satisfait grâce à une gamme
d’instruments financiers plus
large que sous Bâle 3
Même si nous pensons que le ratio TLAC n’aura qu’un impact modéré
sur les stratégies de pilotage des fonds propres des établissements
36
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
01
#
Janvier 2015
Les exigences de fonds propres du TLAC sont nettement
plus élevées que celles imposées par Bâle III
25
Volant contracyclique
(de 0 % à 2,5 % - CET 1)
Volant EIS /de risque systémique
(de 0 % à 3 % - CET1)
20
Volant de conservation des fonds
propres (2,5 % - CET 1)
15
Volant contracyclique
(de 0 % à 2,5 % - CET 1)
Volant EIS /de risque systémique
(de 0 % à 3 % - CET1)
10
Volant de conservation des fonds
propres (2,5 % - CET 1)
Ratio de fonds propres total
(8 % - T2/AT1/CET1)
5
0
Exigence TLAC
(16 % à 20 % dette senior/T2/AT1/CET 1)
Ratio Tier 1
(6 % - AT1/CET1)
Ratio de fonds propres total
(8 % - T2/AT1/CET1)
Ratio Tier 1
(6 % - AT1/CET1)
Ratio CET 1
(4,5 % - CET1)
Ratio CET 1
(4,5 % - CET1)
Basel III
TLAC
Source : Recherche Amundi
européens d’importance systémique (compte tenu de leur recours fréquent
au financement de marché), il pourrait néanmoins pénaliser les institutions
riches en dépôts. Cette tendance pourrait malheureusement contraindre ces
dernières à donner plus de poids au financement de marché, au détriment du
financement, plus stable, par les dépôts. Cela étant dit, bien que le concept
du TLAC ait été validé lors du sommet du G 20 à Brisbane, son étalonnage
et son calendrier de mise en œuvre font encore l’objet d’une étude d’impact
quantitative, pour veiller à ce que la proposition ne perturbe pas trop les
banques et l’économie en général, qui reste fragile.
L’imputation de pertes
(bail-in) aux titres de dette
senior émis par des banques
ou des entités opérationnelles
pourraient être contestés
devant les tribunaux, ce qui
pourrait les rendre inéligibles
au ratio TLAC, d’où la
nécessité de les assortir
d’une clause contractuelle
de bail-in
Une version édulcorée du TLAC semble raisonnable
et propice à la relance de la croissance économique
européenne
Le fait que le TLAC soit moins sévère que prévu montre que les autorités
de réglementation européennes sont de moins en moins inquiètes de
l’adéquation des fonds propres des établissements européens, mais qu’elles
craignent de plus en plus l’extrême faiblesse de la croissance du PIB nominal
de la région. Par exemple, la proposition finale relative à l’exigence de levier
minimum au Royaume-Uni est finalement bien moins contraignante (env. 4 %)
que le ratio initial (env. 5 %). Nous pensons que la réglementation bancaire
sera ajustée durant l’année 2015 (sous la houlette du Comité de Bâle qui
devra se pencher sur la variabilité excessive des RWA) ; un durcissement
modeste est donc à prévoir mais dans de faibles proportions, dans la mesure
où cela serait contradictoire avec les objectifs de relance de la croissance
du PIB et d’augmentation des anticipations d’inflation. La mise en œuvre
du TLAC n’était absolument pas nécessaire (étant donné le renforcement
des bilans des banques) mais au moins son implication n'entraînera pas une
surcharge financière importante pour les établissements européens.
Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier
37
01
#
Janvier 2015
> Vue d’ensemble des exigences du TLAC
Cadre
Obligation de détenir des instruments d’absorption des pertes équivalents à 16 à
20 % des RWA et, au moins, à deux fois le niveau du ratio de levier minimum (6 %
des expositions de levier1). Les exigences de Bâle III concernant les volants de
fonds propres s’ajouteront aux exigences du ratio TLAC (cf. graphique ci-dessus).
Exemple : une institution avec un volant de 2,5 % au titre de son statut d’EBIS et un
volant de conservation de 2,5 % devra affi cher un TLAC entre 21 et 25 %, tandis
qu’une institution avec une exigence supplémentaire de fonds propres de 1 % au
titre de son statut d’EBIS devra atteindre un TLAC situé entre 19,5 et 23,5 %. Les
volants contracyclique et de risque systémique seront ajoutés dès qu’ils auront été
fi xés par les régulateurs nationaux.
L’étalonnage du TLAC sera examiné dans le cadre du Processus d’évaluation de
liquidation mené par le CSF. Le non-respect des exigences du TLAC entraînera les
mêmes sanctions qu’un manquement aux exigences en matière de fonds propres.
L’exigence minimum du TLAC sera appliquée à chaque entité de résolution logée
au sein d’un EBIS ; en d’autres termes, dorénavant, les instruments éligibles au
TLAC seront probablement émis par plusieurs entités des 30 groupes concernés.
Périmètre d’application
L’exigence du TLAC sera appliquée aux 30 banques considérées comme des
établissements bancaires d’importance systémique (EBIS). Dans un premier temps,
les EBIS basés dans des pays émergents (Chine) ne sont pas concernés.
La liste des EBIS du CSF comprend 16 banques basées en Europe, 8 en Amérique
du Nord, 3 au Japon et 3 en Chine.
Instruments éligibles au TLAC
Le TLAC peut comprendre divers types d’instruments, à condition (1) qu’ils soient
subordonnés aux passifs exclus (notamment les dérivés, les pensions livrées, les
dépôts), (2) que ces instruments puissent absorber des pertes sans que cela ne
soit un obstacle sérieux à une résolution ordonnée (action judiciaire), et (3) que ces
instruments aient une échéance restante d’au moins un an.
Les instruments de fonds propres Tier 1 et Tier 2 détenus par des tiers sont éligibles
au TLAC externe. Les instruments senior émis par des sociétés holding sont déjà
conformes à la définition du TLAC. Le bail-in des titres de dette senior non garantis
émis par des banques ou des entités opérationnelles pourraient être contestés
devant les tribunaux, ce qui pourrait les rendre inéligibles. Les instruments senior
non garantis assortis d’une clause contractuelle de bail-in seraient néanmoins
éligibles.
Calendrier
Les institutions financières qui devront respecter le TLAC devront être en conformité
le 1er janvier 2019 au plus tôt, ce qui correspond à la mise en œuvre intégrale des
exigences de Bâle III en matière de fonds propres. En fonction du résultat de l’étude
d’impact quantitative qui sera menée en début d’année, ce calendrier pourra être
modifi é pour alléger le fardeau des EBIS.
1
Sur la base de la version actuelle, le ratio de levier minimum est fixé à 3 % (Bâle
III). Ce ratio pourrait être augmenté en fonction des résultats de l’étude d’impact
quantitative du Comité de Bâle sur le contrôle bancaire sur le ratio de levier.
38
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MENSUEL
Janvier 2015 #
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– PHILIPPE ITHURBIDE
Directeur Recherche, Stratégie et Analyse – Paris
Rédacteurs en chef adjoints
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SHIZUKO OHMI – Tokyo, STÉPHANE TAILLEPIED – Paris
Support
– PIA BERGER
Recherche, Stratégie et Analyse – Paris
– BENOIT PONCET
Responsable Éditions - Recherche, Stratégie et Analyse – Paris
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Directeur de la publication : Pascal Blanqué
Rédacteur en chef : Philippe Ithurbide
Les destinataires de ce document sont en ce qui concerne l’Union Européenne, les investisseurs « Professionnels » au sens de la Directive 2004/39/CE du 21 avril 2004
« MIF », les prestataires de services d’investissements et professionnels du secteur financier, le cas échéant au sens de chaque réglementation locale et, dans la mesure
où l’offre en Suisse est concernée, les « investisseurs qualifiés » au sens des dispositions de la Loi fédérale sur les placements collectifs (LPCC), de l’Ordonnance sur
les placements collectifs du 22 novembre 2006 (OPCC) et de la Circulaire FINMA 08/8 au sens de la législation sur les placements collectifs du 20 novembre 2008. Ce
document ne doit en aucun cas être remis dans l’Union Européenne à des investisseurs non « Professionnels » au sens de la MIF ou au sens de chaque réglementation
locale, ou en Suisse à des investisseurs qui ne répondent pas à la définition d’« investisseurs qualifiés » au sens de la législation et de la réglementation applicable.
Ce document n’est pas destiné à l’usage des résidents ou citoyens des États Unis d’Amérique et des « U.S. Persons », telle que cette expression est définie par la
« Regulation S » de la Securities and Exchange Commission en vertu du U.S. Securities Act de 1933.
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