La nouvelle année a plutôt mal commencé pour les marchés boursiers et encore une fois, ce
sont des préoccupations d’outre-mer qui en sont la cause. En n de session le 8 janvier, le S&P/
TSX était en baisse de 4,34 % en 2016, le S&P 500 de 5,96 % et l’indice MSCI mondial des actions
de 5,20 %. Le catalyseur principal de ce repli a d’abord été la baisse de 7 % du marché boursier
de Shanghai lundi le 4 janvier, qui a déclenché les interrupteurs automatiques nouvellement
mis en place, suivi d’une autre chute de 7 % mercredi, menant à une fermeture du marché pour
la journée. À la n de la première semaine de l’année, le marché boursier chinois s’était replié
de 9,97 %. Bien que ce qui survient dans ce marché boursier chinois plutôt fermé ne devrait pas
avoir d’impact signicatif sur le reste du monde, il en est autrement ces jours-ci parce que les
investisseurs sont préoccupés par le contexte mondial et les craintes quant aux perspectives
économiques chinoises, qui sont perçues comme un des principaux risques à court terme.
Nous sommes d’avis que ces tendances récentes du marché boursier chinois en disent plus
sur les facteurs techniques de ce marché que sur l’économie du pays. Malgré ces facteurs
techniques, certains perçoivent cette baisse des actions chinoises comme un autre symptôme
des problèmes spéciques à la Chine. Un marché boursier chinois en chute libre touche les
investisseurs particuliers qui détiennent des actions et qui sont les consommateurs au cœur
de la transition économique en cours. De plus, on craint que les Chinois puissent tenter de
régler leurs problèmes en dévaluant encore plus leur devise. Puisque le yuan est partiellement
relié au vigoureux dollar des États-Unis, il s’est apprécié contre la plupart des autres devises. La
dépréciation anticipée pourrait engendrer d’autres sorties de capitaux.
Pour mieux comprendre la situation actuelle, il est utile d’examiner de plus près le marché
boursier chinois. La Bourse de Shanghai est la plus importante des deux bourses de la Chine
continentale qui comprend aussi le plus petit marché bousier de Shenzhen où se transigent les
actions des sociétés de plus petite taille. Hong Kong possède aussi son propre marché boursier
depuis le début des années 1900 mais il demeure encore presque complètement à l’abri de
Tribulations des marchés boursiers chinois et mondiaux,
prise 2
Rapport éclair
11 janvier 2016
La clé de notre expertise : la recherche approfondie
Rapport éclair
l’inuence directe des autorités de la Chine continentale. L’investissement boursier en Chine
est encore une activité relativement nouvelle puisque ces concepts capitalistes n’étaient pas
permis sous l’ancienne doctrine communiste. La Bourse de Shanghai a ouvert dans sa forme
actuelle en 1990 et s’est développée rapidement. Selon le classement de la Fédération mondiale
des bourses, elle aurait été la 7e plus importante en 2014. Les données plus récentes indiquent
qu’elle se classerait maintenant au 5e rang. Elle n’est toutefois pas aussi ouverte que les bourses
de New York (NYSE), le Nasdaq OMX, de Tokyo ou de Londres, les quatre plus importantes
places boursières, ou que le marché de Hong Kong. La participation directe des investisseurs
étrangers est limitée par les contrôles des capitaux et le gouvernement chinois intervient plus
fréquemment dans les opérations des bourses que dans les places boursières plus ouvertes.
L’investissement institutionnel, autre que celui du gouvernement qui intervient directement
ou indirectement, y est en outre plus limité qu’ailleurs. La plupart des actions chinoises sont
détenues à 85 % (selon une estimation) par des investisseurs au détail qui ont relativement peu
d’expérience en matière de placements.
Un graphique de l’indice Composite de la Bourse de Shanghai depuis 1992 montre une
appréciation constante, sans plus, jusqu’en 2006. En 2005, le gouvernement a interdit tout
premier appel public à l’épargne (PAPE) pendant un an alors qu’il convertissait les titres qu’il
détenait dans les entreprises d’État en actions oertes au public. C’était sa façon de résoudre
en partie une crise bancaire qui s’étirait. On s’est retrouvé alors en 2006 avec un inventaire de
PAPE qui ont propulsé le marché boursier de Shanghai, amenant même l’indice à plus du triple
de sa valeur à un sommet vers la n de 2007. Ce sommet tient aujourd’hui encore. Le marché
s’est ensuite enrayé jusqu’en 2008 alors que la crise mondiale du crédit s’est aggravée, même
si la Chine en a été moins aectée que bien d’autres pays. Le marché s’est relevé modestement
en 2009-2010 puis est resté stable jusqu’en 2014. C’est alors que la Bourse de Shanghai s’est
redressée de son creux et a crû de 64 % jusqu’à son sommet de la n de 2014 avant de poursuivre
sur son élan et d’y ajouter un bond de 53 % au début de 2015 jusqu’au sommet du 12 juin.
Bien qu’en partie cette poussée ne soit qu’un rattrapage du marché boursier chinois dans le
contexte de la reprise boursière mondiale qui a suivi la crise de crédit, le gouvernement y a aussi
contribué en utilisant de nouveau le marché boursier pour résoudre d’autres problèmes. Pour
aider certaines entreprises à faire face à des problèmes nanciers, le gouvernement a favorisé
les PAPE et les nouvelles émissions d’actions pour qu’elles puissent réduire leur endettement.
Les PAPE chinois ont constitué une des principales raisons expliquant la poussée boursière de
2014-2015. Après avoir atteint son sommet en juin 2015, le premier mouvement de correction
d’un marché surévalué a été exacerbé par l’intervention du gouvernement pour freiner la chute.
Les autorités ont resserré les critères des ventes à découvert et de transactions marginées (dont
on avait abusé) et dans certains cas, ont même interdit arbitrairement à certains investisseurs
de vendre leurs actions. Ces interventions ont incité plusieurs autres investisseurs à se dépêcher
de vendre pour se soustraire au même traitement. Les autorités ont aussi mis en place des
interrupteurs automatiques, semblables à ceux d’autres marchés, quoique plus contraignants.
Au cours de l’été, le gouvernement est aussi intervenu dans le marché en achetant directement
des actions, en forçant les compagnies qu’il contrôle à en faire autant et en inuençant d’autres
investisseurs à acheter. Tous ces gestes ont contribué à restaurer le calme au marché, mais l’eet
ne fut que temporaire.
Rapport éclair
Bourse de Shanghai – Indice de prix
70
470
870
1270
1670
2070
2470
1992
1996
2000
2004
2008
2012
2016
Source : Bloom berg Finance L.P., Addenda Capital
(Rendement total; 1992-01-01=100)
Un des éléments techniques derrière le repli de cette semaine en Chine provient du fait que
l’interdiction de vendre s’appliquant aux actionnaires majeurs en force depuis l’été dernier,
allait expirer le 8 janvier. Les nouveaux interrupteurs automatiques sont aussi devenus un
problème alors que les ventes s’intensiaient plus la baisse s’approchait du seuil déclencheur
(i.e. -7 %). Ces interrupteurs automatiques sont en voie d’être modiés. Ce n’est pas un marché
ouvert et l’intervention du gouvernement a engendré des transactions insolites qui n’ont rien
à voir avec les compagnies en question ou l’économie. La promotion par le gouvernement des
PAPE en 2014-2015 a encouragé les investisseurs particuliers à prendre beaucoup plus de risques
que ce qui se fait ailleurs dans les marchés ouverts. Cela a aussi contribué à déclencher la chute
des cours boursiers et les interventions supplémentaires du gouvernement ont causé plus de
pression de vente.
Les Chinois possèdent encore la capacité et les fonds pour gérer les baisses de leur marché
et nous croyons qu’ils continueront à le faire, mais l’intégrité du marché boursier de
Shanghai, dans une perspective mondiale, est mise à rude épreuve. Le plan du gouvernement
de transformer l’économie, d’une dépendance sur l’exportation vers plus d’accent sur la
consommation, a été partiellement compromis par les pertes importantes subies par les
investisseurs particuliers. Leurs dépenses seront contraintes par la baisse de leurs épargnes.
Nous demeurons dopinion que la correction boursière ne reète pas les tendances de
l’économie chinoise. Le marché a crû de plus de 100 % alors que l’économie ralentissait en
2014 et au début de 2015. La baisse du marché depuis ce temps ne traduit pas la conjoncture
économique mais pourrait peut-être contribuer à ralentir la croissance davantage. Mais surtout,
nous et d’autres investisseurs mondiaux sommes inquiets quant aux prochaines interventions
possibles du gouvernement dans leurs marchés boursier, de dette ou de devise. Nous estimons
que c’est l’incertitude quant aux prochains gestes du gouvernement qui a provoqué la réaction
des marchés mondiaux au cours des derniers jours. Cette réaction pourrait s’atténuer si le
gouvernement parvient à contrôler le marché boursier à court terme, mais certaines questions
restent en suspens.
Rapport éclair
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