Trente ans de déréglementation financière
Trente ans de déréglementation financière
Sommaire
La globalisation des marchés financiers s'est réalisée en trois
étapes principales
Des pétrodollars aux eurodollars
Réallocation, déréglementation et développement du marché international
des titres
L'essor des marchés de capitaux émergents (MCE)
Le système financier actuel est traversé depuis le début des années
90 par une succession de crises financières
Un système financier instable
Une succession de crises financières
La remise en cause du système financier
La nécessaire réforme du système financier mondial
Conclusion
Pour en savoir plus
par Sandrine Della Gaspera.
Quels sont les bouleversements majeurs qu'ont connus les relations financières
internationales au cours des trois dernières décennies ? Sandrine Della Gaspera
rappelle ici les trois grandes étapes - recyclage des pétrodollars et développement
du marché des eurodollars, déréglementation des marchés financiers, essor des
marchés de capitaux émergents - qui ont marqué la globalisation des marchés
financiers. Elle analyse ensuite les grandes crises financières qui se sont succédé
durant les années 90, avant de s'interroger sur la nature et les causes des
principaux dysfonctionnements du système financier international.
Ces trente dernières années ont été des années de bouleversements des relations financières
internationales, marquées par une intensification des flux, l'ouverture des marchés, la
création de nouveaux instruments financiers internationaux. Cette mobilité des capitaux est
telle que l'on parle désormais de globalisation financière, dans le sens de la mise en place
progressive d'un marché unique de l'argent au niveau planétaire. La globalisation débute par
l'essor du marché des eurodollars, le développement du marché bancaire international, puis
du marché mondial des titres, la déréglementation des marchés et finalement la création des
marchés émergents.
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Trente ans de déréglementation financière
La globalisation financière est cependant certainement à l'origine de l'instabilité des
marchés, et des crises boursières ou cambiaires qui ont secoué ces dernières années
l'économie mondiale.
La globalisation des marchés financiers s'est réalisée en trois étapes
principales
Des pétrodollars aux eurodollars
Le début de l'internationalisation des transferts financiers date du recyclage des
pétrodollars dans les années 70, et du développement du marché des eurodollars.
Les accords de Bretton Woods, à la base du nouvel ordre monétaire international de l'après-
guerre, ont pour but le retour à la croissance dans le cadre d'une stabilité des taux de change.
Les flux internationaux de capitaux restent marginaux dans les années 50 et 60. La hausse
du cours du pétrole à partir de 1973 entraîne un transfert de revenus entre les pays
exportateurs et les pays importateurs de pétrole. Les premiers ont un niveau de
consommation et d'investissement inférieur à leurs richesses nouvellement acquises, et
placent leur épargne excédentaire auprès du système bancaire privé, en particulier sur le
marché des eurodollars, qui est devenu, en quelques années, le coeur de la finance
internationale.
Les pays développés importateurs, quant à eux, ne désirent pas prélever sur leurs réserves de
change pour régler leurs factures pétrolières. Ils ont donc recours à l'endettement extérieur.
La plupart des pays de l'OCDE connaissent par ailleurs des déficits budgétaires importants,
en raison du ralentissement de la croissance, et financent le plus souvent ces déficits par
emprunt auprès des grandes banques. Le marché bancaire international joue pleinement
son rôle d'intermédiaire financier, collectant les dépôts, d'une part, des pays pétroliers, et
accordant des eurocrédits, d'autre part, sur la base de ces dépôts. On rappelle que les
eurodollars sont des dollars détenus par une banque à l'extérieur des États-Unis. Par
extension, une euro-monnaie est un dépôt en monnaie dans une banque installée hors du
pays émetteur de cette monnaie. Les eurocrédits, crédits internationaux adossés aux
eurodollars, connaissent ainsi une forte expansion.
Toute cette période est très favorable aux débiteurs qui tirent profit du système d'économie
d'endettement. Avec des taux d'intérêt faibles en raison de l'abondance des fonds prêtables,
et des taux d'inflation relativement élevés, les taux d'intérêt réels sont négatifs et créent une
forte incitation à l'endettement.
Les grandes banques servent d'intermédiaire également entre les pays du Sud : elles
financent le déficit du Tiers monde grâce aux excédents de l'Organisation des pays
exportateurs de pétrole (OPEP), mais ce système va accentuer le fractionnement entre les
pays du Sud. Certains pays d'Amérique latine (Brésil, Mexique), ou d'Asie (Corée du Sud)
parviennent à financer leurs investissements en empruntant des capitaux à des taux
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avantageux, alors que les pays les plus pauvres reçoivent une part de plus en plus faible des
prêts internationaux car les créanciers préfèrent prêter aux pays en développement (PED)
possédant des richesses potentielles et dotés de gouvernements stables. Au total, les pays
d'Amérique latine représentent la moitié de la dette des pays en développement à la fin des
années 70.
Le recyclage des pétrodollars peut donc être considéré comme le début de la globalisation
financière avec un fort développement des flux Sud/Nord et Sud/Sud. Les montants traités
par les euromarchés ont été multipliés par trois entre 1975 et 1980. Cette première étape de
la globalisation prend fin avec la crise du Mexique de 1982 et les difficultés de paiement de
plusieurs PED.
Les pays en développement ont été confrontés à un double mouvement de détérioration des
termes de l'échange (-15 % entre 1978 et 1982), et de hausse des taux d'intérêt. En effet, les
États-Unis ont mené une politique monétaire d'inspiration monétariste donnant la priorité à
la lutte contre l'inflation en freinant la création monétaire. La hausse des taux d'intérêt
s'étend à l'ensemble de l'économie mondiale. Alors que leurs revenus stagnent, les PED
doivent faire face à un alourdissement du service de la dette. En 1982, suivis d'autres pays
du Sud, le Mexique menace de ne plus honorer ses dettes. Confrontées à un risque croissant
d'insolvabilité des pays emprunteurs, les banques privées réduisent les prêts à destination
des pays les plus endettés. En privant les PED des ressources dont ils avaient besoin, les
banques accélèrent la crise financière.
Réallocation, déréglementation et développement du marché
international des titres
Réallocation géographique des flux
Les pays de l'OCDE mettent dès 1980 la lutte contre l'inflation au premier rang de leurs
priorités. Ils opèrent un resserrement général de leur politique monétaire, entraînant une
hausse des taux d'intérêt. D'autre part les équilibres internationaux se modifient :
- les excédents de l'OPEP disparaissent ; dans le même temps, les politiques d'ajustement
imposées par le Fonds monétaire international (FMI) aboutissent à une réduction du déficit
global des PED ;
- les États-Unis cumulent désormais les déficits budgétaires, mais aussi commerciaux, en
raison d'une moindre croissance entre 1983 et 1985 par rapport aux autres pays occidentaux,
et d'importantes importations de produits manufacturés. Grâce à des taux d'intérêt élevés, les
États-Unis ont pu attirer des capitaux afin de financer leurs importations. Pour la première
fois en 1985, les États-Unis empruntent à l'extérieur plus qu'ils ne prêtent. Le Japon et
l'Allemagne sont leurs créanciers principaux, grâce à d'importantes capacités de
financement issues de l'excédent de leur balance commerciale, et un fort taux d'épargne des
ménages et des entreprises.
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Ces phénomènes expliquent les fluctuations des taux de change. L'afflux de capitaux vers
les États-Unis se traduit par une demande croissante de dollars, et donc par l'appréciation de
cette monnaie dont la valeur a doublé par rapport au deutschemark et augmenté de près de
30 % par rapport au yen.
Dans les années 80, on assiste donc à un recentrage des flux financiers entre pays
développés, le Japon et l'Allemagne devenant créanciers des États-Unis.
En revanche, les capitaux désertent, au cours des années 80, les PED à la suite de la crise de
paiement de 1982. La part des pays du Sud dans les mouvements de capitaux internationaux
se restreint. La charge de la dette (remboursement du capital et paiement des intérêts)
devenant même supérieure aux nouveaux capitaux reçus, les PED financent pendant cette
période la croissance des pays développés. On peut se demander, à ce propos, si les
investisseurs ont réellement opéré, en excluant les PED de leurs choix, une allocation
optimale des ressources financières dans l'économie mondiale entre pays et secteurs
d'activité.
Une profonde déréglementation des marchés financiers
Afin de drainer l'épargne mondiale pour financer leurs déficits budgétaires croissants, les
pays développés procèdent à une profonde déréglementation de leur système financier, plus
favorable aux mécanismes de marché. L'abolition des réglementations a pour but de faciliter
la circulation internationale de capitaux. On aboutit en dix ans à la constitution d'un vaste
marché des capitaux dans lequel s'intègrent les marchés nationaux.
Encadré [La déréglementation en France]
Tout d'abord, les taux d'intérêt ne sont plus contrôlés par les pouvoirs publics mais
librement déterminés par le marché. Aux États-Unis, la réglementation " Q ", qui plafonnait
les taux d'intérêt, est abrogée en 1986.
En France, il y a eu décloisonnement des activités bancaires et mise en concurrence des
établissements (cf. encadré). Le contrôle des changes est complètement aboli en 1984. En
1990, en Europe, la création du marché unique des capitaux marque la fin de tous les
systèmes de contrôle des changes nationaux.
La suppression de la réglementation des capitaux accélère les échanges. Par exemple, les
États-Unis suppriment en 1984 le prélèvement à la source de 30 % sur la rémunération des
obligations détenues par les étrangers.
Les principales places boursières dans le monde sont également déréglementées, à
commencer par le " Big Bang " de la City à Londres, où, dès 1987, les charges d'agents de
change sont mises en concurrence et doivent ouvrir leur capital à des investisseurs
nationaux ou étrangers. Jusqu'alors, seuls des courtiers (brokers), intermédiaires qui
enregistrent les ordres et procèdent aux cotations, et les contrepartistes (jobbers), pouvaient
intervenir sur le marché des actions. Désormais, les personnes morales, et pas seulement les
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individus, peuvent devenir membres de la Bourse. Les compagnies d'assurance et les
banques américaines et européennes prennent le contrôle de firmes de courtage afin de
devenir membres de la Bourse et améliorer les performances de leurs placements. Cette
concurrence se traduit par une baisse des coûts car les commissions versées aux
intermédiaires deviennent libres. Le London Stock Exchange (LSE) devient l'International
Stock Exchange(ISE) en 1987 et affirme sa position comme une des principales places
financières dans le monde, loin devant Paris ou Francfort.
Pour rester concurrentielles, les autres Bourses suivent l'exemple britannique et
déréglementent leurs activités. Ainsi, à Paris, en 1987, le statut des agents de change est
modifié et les charges d'agent de changes sont remplacées par des " sociétés de Bourse "
dont le capital est ouvert à des partenaires extérieurs ( 1 ).
Le développement du marché international des titres
Les flux de capitaux se font dans le cadre du système bancaire international jusqu'au début
des années 80, la finance directe prend le relais du crédit bancaire international, en
parallèle avec le passage à l'intérieur des économies nationales du financement par crédit
bancaire au financement par émission de titres.
Lever des fonds directement sur le marché international des titres signifie par exemple,
pour une entreprise française, emprunter des capitaux en dollars sur le territoire européen en
émettant des obligations en dollars. Elle a également la possibilité de lever des fonds
propres directement sur le sol américain ou ailleurs en cotant ses actions en dollars à la
Bourse de New York. Les pouvoirs publics, aux côtés des investisseurs privés, ont recours
également de plus en plus au financement par titres et non par crédit bancaire pour couvrir
leurs déficits. En 1998, les prêts accordés par le marché bancaire international sont encore
de 959 milliards de dollars, et les émissions nettes de titres de 678 milliards de dollars.
Pour les différents acteurs de la finance internationale (investisseurs institutionnels,
entreprises, banques, Trésors publics), le recours à la finance directe, et globale, répond à la
volonté de trouver des solutions plus souples à leurs besoins de financement, et aussi moins
coûteuses, grâce à la suppression du coût de l'intermédiation.
L'essor des marchés de capitaux émergents (MCE)
Au début des années 90, une vingtaine de nouveaux pays industrialisés, d'Amérique latine
(sept pays dont le Mexique et le Brésil), d'Asie (neuf pays parmi lesquels Hong Kong et
Taïwan) et quatre d'Europe de l'Est deviennent des marchés attractifs pour les investisseurs.
Il s'agit de la troisième et dernière phase de la globalisation financière.
Le plan Brady de 1989 met fin à huit années d'échec pour trouver une issue à la crise de la
dette des pays d'Amérique latine, depuis le défaut de paiement du Mexique de 1982. On
utilise la technique de la titrisation pour gérer la crise de l'endettement des PED : le plan
Brady autorise les banques à échanger une partie de leurs créances sur les pays endettés par
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