MARS 2009
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expansion de la masse monétaire qui a
cours aura pour effet de déprécier la
monnaie. Cette dépréciation, combinée
à l’effet inflationniste de la croissance
de la masse monétaire, redonne à l’or
son étiquette de valeur refuge. D’autant
qu’à ses yeux, les États-Unis ne sont pas
nécessairement un endroit sûr pour
mettre les liquidités à l’abri. En matière
de conjoncture économique, le pire
n’est pas derrière, soutient-il. « Avec
toute cette monnaie qu’ils impriment,
l’or s’en trouve favorisé. Avec ces taux
d’intérêt de court terme à zéro, le coût
d’opportunité s’en trouve réduit », ajoute
le gestionnaire qui n’écarte pas la pos-
sibilité que la stagflation puisse emboîter
le pas à l’inflation l’an prochain.
L’OFFENSIVE DE LA FED
Les besoins financiers des gouverne-
ments sont énormes et sans précédent.
Le financement requis par les États-Unis
est évalué à 2 000 milliards $US cette
année. Pour l’Europe, il devrait atteindre
les 1 000 milliards de dollars, alors que
celui des pays de l’Asie n’est pas encore
chiffré. Au-delà de cette demande visant
à financer dette et déficit, la Réserve
fédérale (Fed) applique des mesures,
dites quantitatives, qui font appel massi-
vement à son bilan. Carlos Leitao ne s’en
fait pas : « Un tel niveau de financement
m’aurait inquiété si, au même moment,
le secteur privé avait été en expansion. Il
y aurait eu, alors, ce que l’on appelle un
effet d’éviction (crowding out). »
Les analystes du Mouvement
Desjardins vont plus loin, dans leur Point
de vue publié le 15 janvier dernier, en
démontrant que, malgré l’offensive mus-
clée de la Fed, « la masse monétaire n’est
pas en voie d’exploser. Au contraire, n’eut
été les gestes posés, la masse monétaire
se serait même probablement repliée au
cours des derniers mois, ce qui aurait
accru les risques de déflation ».
ANALYSES ET PRÉVISIONS
L’économiste de Desjardins Hendrix
Vachon retient dans son analyse que la
banque centrale américaine parvient à
éviter, pour l’heure, le recours à la planche
à billets. Dans l’ensemble, l’effet devrait
donc être neutre sur l’inflation. La Fed
procède essentiellement par la vente de
ses propres actifs, soit des titres du Trésor
particulièrement prisés ces temps-ci, par
un prêt consenti par le Trésor américain
et par l’utilisation des réserves excéden-
taires des institutions financières, ces
dernières demeurant assises sur des mon-
tagnes de liquidités. « Le resserrement des
conditions de crédit par les institutions
financières interfère dans le processus
normal de création de la monnaie et sur
la quantité de monnaie disponible dans
l’économie », renchérit M. Vachon.
« Étant donné que la masse monétaire
subit des pressions baissières en raison
d’une contraction du crédit par les insti-
tutions financières et que les interventions
de la Fed sous-tendent une utilisation
responsable de la planche à billets, les
risques d’une inflation monétaire sont
très faibles », ajoute-t-il. Le risque infla-
tionniste vient plutôt de la stratégie de
sortie que la banque centrale devra appli-
quer. « Des pressions inflationnistes à
moyen terme pourraient surgir si la Fed
attendait trop longtemps avant de
dénouer ses engagements et de remonter
ses taux d’intérêt directeurs. »
« Il va bien falloir retirer tout cela ! »,
insiste Carlos Leitao. L’économiste
soutient qu’une telle intervention des
autorités monétaires, nécessaire dans
les circonstances, ne sera pas sans créer
des distorsions. Il s’attend à des cycles
économiques de plus grande amplitude
pour les prochaines années, similaires
au paysage économique ayant prévalu
au cours des années 1980 : un important
rebond de l’activité économique en
2010, suivi d’une décélération marquée
en 2011-2012.
Pour l’immédiat, « je ne suis pas aussi
pessimiste que la Banque du Canada
pour 2009, et pas aussi optimiste pour
2010. » Ses prévisions font ressortir une
contraction du PIB de 1 % en 2009,
suivie d’un rebond de 2 % l’an prochain.
En janvier dernier, lorsqu’elle annonçait
une réduction d’un demi-point de pour-
centage de son taux cible, de 1,5 % à
1 %, la banque centrale canadienne a
surpris en doublant sa cible de contrac-
tion du PIB à 1,2 % en 2009, contre
0,6 % lors de sa prévision d’octobre. Du
même souffle, elle réajustait à la hausse
sa cible pour 2010, le rebond attendu
devenant 3,8 %, contre 3,4 % avancé
précédemment, cette projection situant
la banque parmi les prévisionnistes les
plus optimistes pour 2010.
Une semaine plus tard, le gouverneur
de la Banque du Canada, Mark Carney,
qualifiait d’improbable le basculement du
Canada dans la déflation. L’évolution de
l’indice des prix à la consommation devrait
être négative au deuxième et troisième
trimestres de 2009, mais ce recul attribua-
ble à la chute des prix de l’énergie sera,
pense-t-il, de courte durée.
Un des grands
ingrédients de la
présente crise est
le manque de
liquidité.
Et l’or n’est pas
un placement
liquide.
L’or, toujours une valeur refuge ?