Cross asset investment strategy Recherche, Stratégie et Analyse 11 # MENSUEL Novembre 2014 2015... et au-delà Numéro Spécial Achevé de rédiger le 7 novembre 2014 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 Sommaire Thèmes clef, scénarios et allocation d’actifs 1 2015 et au-delà : déflation, « lowflation », reflation ou stagnation séculaire ? Conséquences pour les allocations d’actifs Page 4 > FOCUS > Risque de déflation : pourquoi maintenant et pas en 2009 ? > Les canaux de transmission de la politique monétaire conventionnelle > Changement des droits de vote au sein de la BCE, un événement somme toute marginal > La Fed et le marché de l’emploi : un nouvel indicateur plus troublant que rassurant Scénario macroéconomique 2 Le Nouveau Meilleur des Mondes ? Il appartient désormais à la politique budgétaire de vaincre la déflation Page 18 3 Perspectives économiques des pays développés en 2015 et au-delà : la balle toujours dans le camp des banques Page 22 centrales et… surtout des gouvernements > FOCUS > Le risque de « stagnation séculaire » en zone euro > Des hoquets politiques significatifs toujours possibles en 2015 > Les craintes de défl ation poussent la Banque du Japon à de nouveaux gestes > La dynamique de l’immobilier résidentiel, facteur clef de différenciation des rythmes économiques 4 Économies émergentes : les gouvernements sont désormais seuls face à leurs engagements Page 29 > FOCUS > Pourquoi les économies émergentes ont-elles très souvent déçu depuis 2011 ? > L’indicateur de croissance chinoise de Li Kequiang Change 5 L’euro continuera à se déprécier en 2015 Page 33 > FOCUS > Le dollar n’est pas fort en soi mais… 2 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 MENSUEL Taux 6 Des taux durablement bas dans le monde développé Page 35 > FOCUS > Dette publique et solvabilité : la fragilité de certains États demeure 7 Dette émergente : 2015 sera marquée par moins de volatilité des devises mais plus de dispersion des rendements Page 39 > FOCUS > Décomposition des performances des indices dette émergente > Spread de terme et yield ratio Crédit 8 Un environnement toujours favorable aux marchés du crédit Page 43 > FOCUS > Offre d’obligations d’entreprise en euro : tendances récentes et perspectives 2015 > La BCE va-t-elle vraiment s’engager dans des achats d’obligations d’entreprises ? Actions 9 Une nouvelle donne pour les actions Page 49 10 Actions européennes : préférences sectorielles en période de faible croissance et faible inflation Page 52 Prévisions macroéconomiques et financières page 55 Annexes Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 3 11 # Novembre 2014 Thèmes clef, scénarios et allocation d’actifs 1 2015 et au-delà : déflation, « lowflation », reflation ou stagnation séculaire ? Conséquences pour les allocations d’actifs PHILIPPE ITHURBIDE, Directeur Recherche, Stratégie et Analyse – Paris L’année 2014 a pour une grande partie, confirmé certaines des tendances lourdes qui prévalent depuis un peu plus de 3 ans désormais : la recherche de rendement et de spreads, la faiblesse de la reprise économique en zone euro, la meilleure santé de bon nombre de pays périphériques, les divergences économiques à l’intérieur de la zone, mais aussi entre Europe – États-Unis – Asie, le resserrement des spreads (crédit et dette souveraine), l’impossible remontée des taux courts et longs, la difficulté de sortie des programmes de Quantitative Easing (QE)… Elle a aussi remis au goût du jour des facteurs de risque essentiels comme le danger déflationniste, les craintes de « grande stagnation », le « risque d’erreur » de communication et d’action de la Réserve Fédérale, les dysfonctionnements des canaux de transmission des politiques monétaires, les craintes / doutes sur la valorisation des actifs risqués, le caractère peu protecteur des stratégies longues en duration, la remontée de la volatilité financière… Le repli des indices de prix, y compris aux États-Unis, ainsi que d’assez mauvais indicateurs économiques publiés au cours de l’été ont fragilisé les marchés financiers, influencés également par de nouveaux doutes sur l’efficacité des politiques monétaires. Au retour de l’été, l’ensemble des marchés ont subi une correction sévère, influencés également par des facteurs techniques aisément identifiables. Même si la chute a finalement été de courte durée, ce coup de semonce (première réelle correction depuis le début de l’année) a laissé des traces. Certaines questions de fonds demeurent, et nous allons tenter d’y répondre clairement. Nous conclurons sur les scénarios en présence et sur les recommandations d’allocation d’actifs pour 2015… et au-delà. 10 thèmes essentiels seront ainsi traités : - Thème # 1 Zone euro : le danger de la déflation généralisée n’est pas encore écarté - Thème # 2 La zone euro est-elle en train de se japoniser ? Si oui, quel Japon : celui des années 1990 ou celui des années 2010 ? - Thème # 3 La croissance est redevenue un déterminant important de la valorisation des actifs risqués - Thème # 4 Réformer maintenant pour une meilleure croissance plus tard… facile à dire mais encore diffi cile à faire dans certains pays - Thème # 5 Stagnation séculaire : causes, stratégies de sortie et conséquences sur les classes d’actifs - Thème # 6 Politiques monétaires conventionnelles : peut-on miser sur un retour de leur efficacité ? Le cas de la zone euro - Thème # 7 BCE : entrée durablement dans une phase de taux bas et d’ajouts de liquidités - Thème # 8 Fed : la sortie du QE est un exercice difficile - Thème # 9 Prime de risque, coût du capital et valorisation des actifs risqués L’essentiel L’année 2014 a pour une grande partie, confirmé certaines des tendances lourdes qui prévalent depuis un peu plus de 3 ans désormais : la recherche de rendement et de spreads, la faiblesse de la reprise économique en zone euro, la meilleure santé de bon nombre de pays périphériques, les divergences économiques à l’intérieur de la zone, mais aussi entre Europe – États-Unis – Asie, le resserrement des spreads… Elle a aussi remis au goût du jour des facteurs de risque comme le danger déflationniste, les craintes de « grande stagnation », le « risque d’erreur » de communication et d’action de la Réserve Fédérale, les dysfonctionnements des canaux de transmission des politiques monétaires, les craintes / doutes sur la valorisation des actifs risqués… Pour 2015 et au-delà, on retiendra que le danger de la déflation généralisée en zone euro n’est pas encore écarté, et que la croissance est redevenue un déterminant important de la valorisation des actifs risqués. Le thème de la stagnation séculaire est incontournable, et les voies de sortie (QE, réformes…) ont des conséquences importantes et bien différentes que ces réformes se traduisent ou non par de nouveaux déficits. Dans ces conditions, il semble bien établi que la BCE est entrée durablement dans une phase de taux bas et d’ajouts de liquidités. Nous ne misons pas non plus sur des hausses rapides de taux aux États-Unis. L’environnement de taux bas pousse à un « repricing » des actifs. Au total, nous restons positionnés dans un scénario de « reflation » dans un monde de faible croissance. - Thème # 10 Lowflation, déflation, récession, reflation: scénarios et stratégies d’investissement 4 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 # 1 - Zone euro : le danger de la déflation généralisée n’est pas encore écarté Il y a deux types de déflation : la « Price deflation », déflation des prix, qui se traduit par des taux d’inflation négatifs, et la « Debt deflation », déflation par la dette, qui se traduit par une baisse simultanée des indicateurs d’activité et de tous les prix (les prix sur le marché des biens et services, le cours de change sur le marché des changes, les salaires sur le marché du travail, les taux d’intérêt sur le marché des capitaux…). La déflation est une spirale négative qui menace de toucher la production, et de se transformer en récession En situation de désinflation et de déflation par les prix, les dépenses de consommation sont repoussées, au regard de la certitude de pouvoir disposer des mêmes biens ultérieurement à un prix plus bas. Au-delà de cette particularité, la déflation est une spirale négative qui menace de toucher la production, et de se transformer en récession. C’est là le danger principal. Selon Mario Draghi, la déflation (des prix) est une situation où l’on observe une baisse du niveau des prix : - dans de très nombreux pays, - pour de très nombreux produits, - de manière auto-entretenue, ce qui signifie que les prévisions d’inflation pèsent sur l’inflation actuelle. L’inflation étant négative en Italie, 35 % du PIB de la zone euro sont désormais en déflation, contre 5 % fin 2012. La France, elle aussi, est proche de la déflation, en raison de la fragilité du marché du travail, du désendettement et de la persistance des capacités excédentaires. En fait, si l’on raisonne à taxes constantes, la France est elle aussi en déflation. Autrement dit, même si la zone euro dans son ensemble n’est pas en déflation, plus de 50 % de ses composantes (en termes de PIB) le sont désormais. Plus on avance dans le temps, et plus la part de la zone euro en déflation progresse. Bien que nécessaires, des réformes vertueuses de l’offre pourraient même accroître les pressions déflationnistes à court terme. En résumé, ces dernières continuent à augmenter. Il est à noter que les marchés financiers « pricent » la BCE comme ils « pricent » la Banque du Japon et le Banque Nationale Suisse, deux pays clairement en déflation. Les courbes futures 3 mois restent extrêmement plates au moins pour les 3 à 4 prochaines années. Même si la zone euro dans son ensemble n’est pas en déflation, plus de 50 % de ses composantes (en termes de PIB) le sont désormais > Risque de déflation : pourquoi maintenant et pas en 2009 ? Le risque de défl ation qui avait menacé l’économie mondiale lors de la crise fi nancière de 2008 redevient d’actualité en Europe. Il ne s’était pas concrétisé suite à la crise fi nancière grâce à deux caractéristiques essentielles, selon le FMI : l’ancrage des anticipations d’inflation du fait de la crédibilité des cibles d’infl ation d’une part, et la rigidité des salaires nominaux d’autre part. Ces deux aspects favorables ont désormais disparu dans certains pays européens : la cible d’infl ation s’éloigne et les salaires ont été réduits fortement, la baisse des salaires étant au cœur des programmes de conditionnalité initiés par la Commission européenne. En outre, le cycle de deleveraging n’est pas terminé. La confi ance dans le système bancaire est une chose, l’amélioration des pouvoirs d’achats et des revenus disponibles en est une autre. Pour en arriver là, il faudra sans aucun doute une infl exion forte dans les politiques d’austérité, des réformes structurelles « budgétairement neutres » si possible, et l’assurance que les déficits ne sont pas systématiquement financés par des hausses d’impôts… là sont sans doute les grands enjeux pour la zone euro. Sortir de la déflation et renouer avec la croissance sont deux objectifs majeurs, car ils déterminent notamment, la solvabilité des dettes publiques et le niveau des spreads intrazone euro. Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 5 11 # Novembre 2014 # 2 - La zone euro est-elle en train de se japoniser ? Si oui, quel Japon : celui des années 1990 ou celui des années 2010 ? Il est vraiment tentant de comparer zone euro et Japon, tant les caractéristiques sont similaires. Le Japon est en défl ation depuis le début des années 90. Il connaît une croissance très faible, un endettement public colossal, une infl ation négative / déflation, sa dette est fortement détenue par les résidents, des taux courts et longs extrêmement bas… Comparons zone euro et Japon, mais quel Japon ? Celui des années 90 ou celui des années 2010 ? - Le Japon des années 90 connaît une bulle immobilière, une bulle sur les actions (avec des valorisations extrêmes), une politique monétaire peu active et très en retard, des politiques budgétaire et fiscale inadéquates… La zone euro d’aujourd’hui ressemble assez peu à ce Japon-là. Elle ne connaît pas de bulle immobilière ou de bulle sur les actions (la valorisation actuelle en Europe est très nettement inférieure au niveau atteint au Japon il y a deux décennies), elle a une politique monétaire active, des politiques budgétaire et fiscale certes trop peu pro-croissance, mais avec des inflexions en cours (?)… L’une des similitudes toutefois, c’est que la zone euro a besoin d’un soutien extérieur, tout comme le Japon où les marchés haussiers ont été arrêtés nets par des chocs externes : 1994, 1997, 2000, 2007. - Le Japon des années 2010 est quant à lui caractérisé par une politique monétaire ultra-expansionniste (qui se traduit par une gigantesque augmentation du bilan de la banque centrale) et une politique économique activiste (les Abenomics) ayant fortement poussé à la baisse le yen. La zone euro nous semble bien plus proche du Japon des années 2010, ce qui est plutôt une bonne nouvelle a priori : c’est dans ces années que l’archipel nippon a renoué avec les profits, et les fortes performances des marchés d’actions. Le marché obligataire japonais est mieux « protégé » que le marché européen par la présence plus grande des investisseurs domestiques, mais la zone euro a par ailleurs un atout supplémentaire, en l’occurrence un rendement des dividendes trois fois supérieur aux taux longs. Au total, le fait de ressembler au Japon des années 2010 et non au Japon des années 1990 est plutôt une bonne nouvelle… mais il faut pour cela que la BCE parvienne à mettre en place le programme non conventionnel promis et qu’une dépréciation supplémentaire de l’euro en découle. Il est vraiment tentant de comparer zone euro et Japon, tant les caractéristiques sont similaires Ressembler au Japon des années 2010 et non au Japon des années 1990 est plutôt une bonne nouvelle # 3 - La croissance est redevenue un déterminant important de la valorisation des actifs risqués La croissance et les perspectives de croissance ont eu peu d’importance au cours de ces dernières années dans la détermination des prix d’actifs. D’autres facteurs ont été bien plus cruciaux. En fait, on peut distinguer différentes phases dans l’évolution des actifs risqués. Phase 1 : la crise financière (2008). Elle a provoqué le plongeon des actions et l’envolée des spreads de crédit, indépendamment des considérations de croissance économique. Les actifs risqués ont atteint des valorisations sans commune mesure avec les fondamentaux réels. Les effets de contagion ont joué à plein, et tous les marchés ont été violemment impactés. Phase 2 : l’élimination des risques systémiques (2009 aux États-Unis, 2010/2011 en zone euro). En dépit de la récession qui se matérialise un peu partout dans le monde industrialisé, les actions des banques centrales – baisse des taux, QE1, QE2 et QE3 aux États-Unis ; baisse des taux, LTRO et annonce des OMT en zone euro – ont propulsé les actifs risqués vers le haut, avec notamment, une performance très forte des obligations privées, dans un climat économique pourtant fortement déprimé. Phase 3 : l’abondance de liquidité (depuis 2009 aux États-Unis, depuis 2011 en zone euro). Elle a porté encore plus haut l’ensemble des actifs, parfois au détriment de l’investissement productif. Même si l’évolution de prix d’actifs 6 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 guidés par la seule liquidité n’est pas durable, ou soutenable, cette tendance a perduré quelque temps, touchant l’ensemble des actifs, et notamment les marchés émergents qui ont pu attirer une part importante de ces excès de liquidité. Phase 4 : la course aux spreads et au rendement (depuis 2012). Le niveau extrêmement bas des taux longs, et la reprise économique, ont enfin permis de consolider les tendances sur les marchés d’actions et d’obligations d’entreprises. C’est bien la recherche de rendement et de spread qui domine, avec un avantage important, celui de permettre aux grandes entreprises de se (re)financer aisément sur le marché des capitaux, au moment où les banques se faisaient plutôt timides. L’appétit pour les papiers à spread a consolidé l’activité des marchés primaires, tandis que le bas niveau des taux longs incitait à « repricer » la valeur d’actifs tels que la dette émergente ou les actions. Conclusion d’étape : jusqu’ici, la croissance économique n’a pas eu un rôle important dans la détermination du prix des actifs de la zone euro (hormis dans les pays périphériques). Est-ce durable ? Sans doute pas, parce qu’une stagnation de la croissance, ou, pire, un nouvel effondrement de celle-ci, ne manquerait pas de raviver les doutes sur la solvabilité de certains États. Il en serait alors fini avec des taux bas et des spreads bas pour certains pays périphériques. Le renchérissement des conditions de crédit et du coût de capital serait sans doute fatal pour les actifs risqués. Une stagnation de la croissance, ou, pire, un nouvel effondrement de celle-ci, ne manquerait pas de raviver les doutes sur la solvabilité de certains États. Il en serait alors fini avec des taux bas et des spreads bas pour certains pays périphériques Phase 5 : stratégies de « reflation » dans un environnement de faible croissance. C’est la phase actuelle. La course aux rendements et aux spreads n’est pas terminée, mais avec une croissance plus faible, cela n’est pas sans risque. Trois éléments-clef : - L’ampleur et le succès des mesures qu’adoptera la BCE, - L’ampleur – et le financement ou non – des réformes structurelles, - Et enfin la capacité de la zone euro à mener des politiques économiques contra-cycliques. Autrement dit, il nous semble bien évident que la croissance et les perspectives de croissance – sont redevenues et vont rester un facteur déterminant dans la valorisation des actifs risqués… et des spreads souverains. La course aux rendements et aux spreads n’est pas terminée, mais avec une croissance plus faible, cela n’est pas sans risque # 4 - Réformer maintenant pour une meilleure croissance plus tard… Facile à dire mais encore difficile à faire dans certains pays La BCE ne peut pas tout faire, c’est un fait que les marchés fi nanciers ont eu un peu trop tendance à oublier ou à négliger ces dernières années. Il est question de relancer la croissance via l’investissement (privé en France et dans les périphériques, public en Allemagne…), la politique budgétaire et fiscale. Il est également question de réformer les économies, afi n de mettre en place des conditions durables de croissance plus solide. En périphérie de la zone euro, on trouve désormais des champions des réformes structurelles. Selon l’OCDE (Economic Policy Reforms – Going for Growth 2013 – OECD Report), “Les pays qui ont le plus réformé sont les pays sous assistance”. La Grèce, l’Irlande, le Portugal et l’Espagne sont dans le top 5 des pays réformateurs. À titre de comparaison, le Japon est au rang # 29, l’Italie au rang # 9, la France au rang # 25, les États-Unis au rang # 26, l’UE au rang # 17, et l’OCDE dans son ensemble au rang # 19. Rang des pays (Rapport OCDE) Grèce Irlande Les pays qui ont le plus réformé sont les pays sous assistance Estonie Portugal Espagne Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 7 11 # Novembre 2014 Si l’on prend en compte la difficulté à mettre en place des réformes, la Grèce est #1, l’Espagne #2, et le Portugal #3 Les réformes sont insuffisantes dans certains pays, comme la France. Il est question ici de réduire la fiscalité, notamment celle des entreprises, de rendre plus flexible le marché du travail, de réformer les systèmes de santé notamment … afin de redonner des marges de manœuvre et de relancer les perspectives de croissance à moyen et long terme. Quels sont les choix qui se présentent pour les pays concernés ? • Scénario # 1 : réformer sans financer les réformes. Dans un tel cas de figure, la hausse de l’activité qui découlerait à terme des réformes se traduirait rapidement par des hausses de déficits publics et de dette publique. La question centrale concerne d’une part la réponse des instances européennes (Commission européenne et partenaires européens) qui sont déjà réticentes à l’égard des déficits de certains pays, considérant les efforts menés actuellement insuffisants. C’est principalement le cas de la France. Elle concerne d’autre part la réaction des investisseurs, résidents et nonrésidents. Cela est d’autant plus gênant que d’autres pays de la zone euro ont prouvé leurs capacités de réformes tout en parvenant à renouer avec des excédents primaires, des excédents courants… et avec la croissance. • Scénario # 2 : réformer et financer les réformes. Réformer sans dégrader les déficits publics est une option que certains pays n’envisagent pas d’explorer car à court terme, on peut miser sur un effet récessif sur l’activité économique. Cela fut d’ailleurs le cas dans la plupart des pays périphériques qui se sont engagés dans cette voie. Cela fut le cas également en Allemagne qui a mené des réformes lourdes en 2001 qui ont eu des effets positifs sur l’activité à partir de 2005. Autrement dit, accepter ce scénario revient à accepter des mesures dépressives pour l’activité dans un premier temps. La France, par exemple, ne s’est jamais engagée depuis 2008 dans une telle voie. La dépense publique y est restée un moteur de croissance, contrairement à bon nombre de ses partenaires européens. • Scénario # 3 : ne rien faire, retarder les réformes, est assurément le pire des scénarios. Il se traduit par une poursuite de la stagnation économique, de la désindustrialisation… et trace la voie à une croissance potentielle de plus en plus faible. Ne rien faire revient à entériner les retards par rapport aux pays qui ont mené à bien bon nombre de réformes et en tireront les bénéfices. La hausse de l’activité qui découlerait à terme des réformes pourrait se traduire par des hausses de déficits publics et de dette publique Peut-on accepter que les réformes ait un effet récessif ? Ne rien faire faire, le pire des scénarios # 5 - « Stagnation séculaire » : causes, stratégies de sortie et conséquences sur les classes d’actifs Nous vivons dans un monde de taux très bas, du fait de l’environnement d’infl ation ultra-faible (« lowfl ation »). Mais ce n’est pas seulement cela. Ce qui intrigue depuis la crise fi nancière, c’est la faiblesse de l’investissement et des innovations, et cela pèse évidemment sur la croissance, les salaires et donc sur les taux d’intérêt. Quelle en est la raison ? Gordon (2012) a identifié les « vents de face » venant peser sur l’activité économique, dont certains sont transposables à bon nombre d’économies, avancées ou dites « émergentes » : - Le vieillissement de la population se traduit par une baisse du taux d’activité et un déclin des gains de productivité. Les baby-boomers se retirent graduellement de la vie active, les taux de natalité sont souvent trop faibles et l’allongement de l’espérance de vie maintient l’effet dépressif sur l’activité économique. Le Japon est sans aucun doute le meilleur exemple de cette situation néfaste. L’Allemagne a un taux de natalité trop bas, mais bénéficie depuis la crise financière et la crise de la dette d’une immigration forte, jeune, diplômée… et trouvant des emplois. Ce qui intrigue depuis la crise financière, c’est la faiblesse de l’investissement et des innovations - La mondialisation exerce une pression à la baisse sur les salaires des pays avancés, conséquence de la concurrence des pays émergents et de la délocalisation industrielle. L’égalisation des prix des facteurs s’opère inévitablement au détriment des pays aux salaires les plus élevés, i.e. les 8 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 pays avancés. On notera cependant que la mondialisation pousse les salaires à la hausse dans les pays qui se développent. C’est ainsi que la Chine a vu ses salaires passer au-dessus de bon nombre de concurrents asiatiques, un handicap pour la compétitivité, et ce d’autant plus que les devises asiatiques ont cédé du terrain contre le yuan en 2013 notamment. - Le désendettement du secteur privé et la nécessaire stabilisation de la dette publique réduisent revenu disponible et dépenses de consommation. Le retour de l’endettement public sur une trajectoire soutenable pèse inéluctablement sur le taux de croissance du PIB. - La gestion de la crise environnementale réduira graduellement le budget que les ménages consacrent aux autres postes de dépenses de consommation. La « Grande Récession » a mis en exergue des changements importants (rendements décroissants pour les facteurs de production, innovations technologiques insuffisantes), conduisant à une « grande stagnation ». Rappelons toutefois que l’idée d’une stagnation durable apparaît chaque fois que l’économie ralentit de façon sérieuse (elle fut également populaire dans les années 1930 (Alvin Hansen, « Full recovery or stagnation ? » (1938)). Les conséquences d’une « grande stagnation » (ou plus simplement de danger de grande stagnation) sont assez claires : La « Grande Récession » a mis en exergue des changements importants, conduisant à une « grande stagnation » - Des taux courts bas, - Des taux longs bas, - Des prix d’actifs élevés, - Une volatilité financière plus élevée. Il est difficile de trouver actuellement d’où pourrait provenir une croissance économique suffisamment forte pour enrayer ces conséquences. La période actuelle de faible croissance peut encore durer longtemps. « La « nouvelle normalité, c’est une situation de taux bas et de prix d’actifs élevés, et ceux qui croient en une normalisation des taux d’intérêt auront tort, c’est une quasi-certitude » (P. Krugman, juin 2014, Forum Amundi). Comment sort-on de cet engrenage ? Trois voies semblent possibles. La première met l’accent sur la recherche du plein-emploi, la deuxième sur la recherche d’inflation, et la troisième mise sur l’impact à moyen terme des réformes structurelles. • Stratégie de sortie # 1 : selon cette stratégie, il serait crucial de renouer avec le plein emploi, et pour cela de poursuivre des politiques ultraaccommodantes, pendant une période de temps plus longue que nécessaire, quitte même au besoin, à accepter l’existence de bulles. Clairement suivie par Alan Greenspan autrefois, cette stratégie avait conduit à des excès dévastateurs… Il ne faudrait pas que les marchés financiers associent J. Yellen à de tels risques. En tout cas, cette stratégie de reflation est favorable aux classes d’actifs risqués, et elle maintient les taux d’intérêt – courts et longs – à de faibles niveaux. • Stratégie de sortie # 2 : rendre la politique économique efficace passe par un retour de l’inflation. Ce thème, évoqué à de nombreuses reprises par O. Blanchard (FMI) et par P. Krugman, est également l’un des chevaux de bataille de banques centrales (le vice-président de la Fed, S. Fisher évoque fréquemment ce sujet) et de gouvernements. Si elle réussit, cette stratégie pousse les taux courts et longs à la hausse, et la reprise de croissance censée en découler favorise les actifs risqués. • Stratégie de sortie # 3 : mener des réformes structurelles s’avère indispensable. La Banque des règlements internationaux (BRI) et les banquiers centraux en général, ne manquent jamais de rappeler la nécessité de rendre les économies moins dispendieuses et plus flexibles, seule façon de ne pas créer de bulles financières (stratégie #1) ou (stratégie # 2), de laisser déraper l’inflation, un des objectifs cruciaux – sinon le seul – pour certaines banques centrales. À court terme, cette stratégie pénalise les actifs risqués. Stratégie # 1 : renouer avec le plein-emploi Stratégie # 2 : un retour de l’inflation Stratégie # 3 : mener des réformes structurelles Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 9 11 # Novembre 2014 Selon le cas de fi gure, l’allocation d’actifs varie fortement : Obligations Obligations souveraines d’entreprises Stratégie de sortie #1 : Recherche de plein emploi Stratégie de sortie # 2 : Recherche d’inflation Stratégie de sortie # 3 : Politiques de réformes (*) Actions Immobilier + ++ +++ +++ --- - + ++ +++ + -- -- (*) Voir thème #4 pour une analyse détaillée # 6 - Politiques monétaires conventionnelles : peut-on miser sur un retour de leur efficacité ? Le cas de la zone euro Les variations de taux (politiques conventionnelles) et de liquidité (politiques non conventionnelles) ont un impact sur l’économie réelle, via les taux d’intérêt et le crédit bancaire, les effets de richesse ou encore les effets de change (voir encadré ci-dessous). > Les canaux de transmission de la politique monétaire conventionnelle Les politiques de taux d’intérêt ont « normalement » un impact sur l’économie réelle via les taux d’intérêt et le crédit bancaire, les effets de richesse ou encore les effets de change Plusieurs canaux sont normalement en action : – Le canal des taux d’intérêt : une baisse des taux réduit le coût du capital et favorise l’investissement. Elle réduit le service de la dette, ce qui a un impact sur la consommation ; – Le canal des cours de change : en changes flexibles avec mobilité des capitaux, une baisse des taux provoque une dépréciation du change, un support pour les exportations et la croissance ; – Le canal du « Q » de Tobin : la valeur d’une action (= valeur présente des dividendes futurs) dépend du niveau des taux d’intérêt. Plus ils sont bas, plus la valeur de l’action est élevée ; – Le canal des effets de richesse : la hausse du prix des actifs résultant de politiques monétaires accommodantes entraîne des effets de richesse positifs qui stimulent la consommation ; – Le canal des anticipations d’inflation : les baisses de taux sont susceptibles de générer des anticipations de hausse des prix, ce qui réduit les taux réels et accroît la consommation ; – Le canal du crédit bancaire : plus les taux sont bas, et plus cela améliore les conditions de financement des banques qui, toutes choses égales par ailleurs, accroissent leurs activités de crédit, un support pour la consommation et l’investissement. Plus le rôle des banques dans le financement est important, et plus ce canal est vital ; – Le canal des bilans (théorie de l’accélérateur financier) : le mécanisme de transmission de la politique monétaire dépend de la qualité des bilans. Plus les agents sont endettés, plus le canal de transmission est faible en cas de baisse des taux, et plus il est dévastateur en cas de hausse des taux. L’histoire montre i) que les politiques monétaires conventionnelles et nonconventionnelles doivent être suffisantes pour générer des effets de richesse conséquents, et ii) que les taux longs doivent baisser en deçà des anticipations de croissance économique afin d’encourager les investisseurs à acheter des actifs risqués. 10 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 Les leçons de 2008 (crise financière) et de 2011 (crise de la dette) sont multiples. - Les canaux de transmission « taux d’intérêt » et « crédit bancaire » sont largement inefficaces quand les agents économiques sont en cycle de deleveraging. Ce n’est plus le cas aux États-Unis, mais c’est encore le cas dans les pays périphériques de la zone euro. - Les canaux de transmission « effet de richesse » sont très puissants en situation de deleveraging dès que les politiques monétaires non conventionnelles entrent en action. Les États-Unis en ont fourni un exemple remarquable, ainsi que la zone euro, à un degré moindre… et avec retard. L’enjeu de la BCE est donc clair : maintenir les taux bas et favoriser les effets de richesse - Le canal « taux de change » dépend du déséquilibre entre épargne et investissement. Un excès d’épargne (surplus courant) ne plaide pas en faveur d’une dépréciation de la devise. C’est sans doute là une différence importante, actuellement, entre le Japon (ou l’effet change a joué à plein) et la zone euro (où il a été quasiment inexistant… jusqu’en 2014). L’enjeu de la BCE est donc clair : maintenir les taux bas et favoriser les effets de richesse. L’enjeu de la zone euro est également clair : adopter un policy-mix qui accroît les anticipations de croissance. La BCE ne peut pas tout faire, et tant que le canal du crédit bancaire (politiques conventionnelles) est « grippé », l’adjonction de liquidités (politiques non conventionnelles) est inévitable. # 7 - BCE : entrée durablement dans une phase de taux bas et d’ajouts de liquidités Pour l’heure, les marchés financiers considèrent à juste titre que la politique à venir de la BCE restera accommodante pour une période de temps considérable (encore plus considérable qu’aux États-Unis !). La Fed a tout récemment mis fin à son programme de Quantitative Easing, mais la Banque du Japon poursuit dans cette voie, tandis que la BCE est en passe d’accélérer le rythme. En somme, l’excès de liquidité mondiale n’est pas en train de se tarir. L’enjeu de la zone euro est également clair : adopter un policy-mix qui accroît les anticipations de croissance L’excès de liquidité mondiale n’est pas en train de se tarir La BCE affiche son souhait de voir son bilan revenir au niveau de celui qui prévalait début 2012 : 2 700 Mds € en janvier et 3 000 Mds € en mars, contre 2 000 Mds € actuellement. En clair la BCE souhaite que son bilan atteigne de nouveau plus de 30 % du PIB de la zone (contre 20 % environ actuellement). La stratégie de la BCE est claire et ses actions de taille : - Lancement du programme TLTRO, pour un montant de l’ordre de 400 Mds € , mené en huit étapes sur deux ans. Le premier a été jugé décevant, mais il ne fallait pas s’attendre à un grand succès à quelques semaines des Assets Quality Review (AQR) et stress tests. - Annonce d’un programme d’achat d’ABS et de Covered Bonds (titres immobiliers compris), d’une taille non spécifiée, mais potentiellement très importante. Il règne un peu de scepticisme à l’égard de ce programme, peut-être parce qu’il intervient un peu tard dans le cycle : les banques n’ont guère d’incitations (réglementaires, mais aussi financières) de se défaire des crédits bancaires (deleveraging presque terminé), la situation économique est moins dégradée, la profitabilité en grande partie restaurée… Autrement dit, ce qui aurait été salutaire il y a deux ans apparaît aujourd’hui moins indispensable. Il s’agit pourtant d’un programme opportun et même vital, et on peut penser que si la BCE s’engage sur ce terrain, il s’agira de montants conséquents. Aider au financement des PME (très dépendantes des banques contrairement aux grandes entreprises) en maintenant les taux bas, en facilitant l’accès à la liquidité banque centrale et en réactivant le marché des ABS est crucial, quand on connaît le poids des PME dans l’économie européenne. En clair, en 2012, les PME employaient 87 millions de personnes dans l’Union européenne (67 % de la main-d’œuvre totale) et généraient 58 % de la valeur ajoutée globale. Elles représentent près Aider au financement des PME en maintenant les taux bas, en facilitant l’accès à la liquidité banque centrale et en réactivant le marché des ABS est crucial, quand on sait le poids des PME dans l’économie européenne Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 11 # Novembre 2014 de 80 % de la main-d’œuvre et 70 % de la valeur ajoutée en Italie, en Espagne et au Portugal. Dans ces pays, le secteur des PME est dominé par les toutes petites entreprises comprenant moins de dix salariés. Enfin, elles ont assuré 85 % des créations nettes d’emploi entre 2002 et 2010. - Perspectives d’achat d’obligations privées (si l’on en croit les rumeurs). - Perspective d’un QE souverain si besoin est. Le sujet est délicat : on connaît la réticence de certains pays, Allemagne en tête, à l’égard des programmes OMT (Outright Monetary Transactions) qui prévoyaient que la BCE se porte acquéreur de dettes de pays en difficulté. L’annonce de cette facilité avait grandement contribué à apaiser le stress financier et à réduire les primes de risque que portaient les souverains périphériques. Mais la sélectivité de ces actions aurait conduit la banque centrale à accumuler des dettes en souffrance et à financer des États en déficit. Si cela n’est pas, semble-t-il, conforme aux statuts de la BCE, en revanche, se porter acquéreur de dettes européennes (au prorata du capital des États dans le capital de la BCE par exemple) le serait. Débat à suivre, sans aucun doute, et sujet troublant, assurément : comment imaginer que le président de la BCE puisse proposer des solutions non conformes aux statuts de l’organisation qu’il dirige ? QE souverain ou pas ? Un débat à suivre Au total, il est évident que les taux courts européens resteront très bas pour les 3 à 5 ans à venir, et que des mesures quantitatives seront dévoilées au cours des mois à venir. La stratégie de la BCE est claire, et inévitable. > Changement des droits de vote au sein de la BCE, un événement somme toute marginal À partir du 1er janvier 2015, la BCE va procéder à une rotation mensuelle des droits de vote. Les 19 gouverneurs devront se partager 15 voix : 4 pour les 5 « grands » pays, et 11 pour les « petits ». L’Espagne sera le premier des 5 à « perdre » son droit de vote, accompagnée de l’Irlande, de la Grèce et de l’Estonie. Malgré les mesures à venir (BCE, plan Juncker de 300 Mds d’infrastructures), la croissance en zone euro va rester faible pour plusieurs années encore… reconnaissons toutefois que la zone euro bénéficie d’une combinaison de facteurs très favorables : - Un large QE de la BCE (qui n’en est qu’à ses débuts et pourrait être élargi aux titres obligataires privés et aux titres souverains, si besoin), La croissance en zone euro va rester faible pour plusieurs années encore - Des taux d’intérêt qui ne sont pas près de remonter, - Un affaiblissement de l’euro qui devrait se poursuivre, - Un possible plan de relance européen centré sur des investissements en infrastructures (le « plan Juncker »), - Un assouplissement des conditions de crédit, - Des politiques budgétaires moins restrictives qu’au cours des dernières années, - Une reprise dans les économies périphériques les plus durement touchées par la crise (Espagne, Portugal, Grèce et Irlande). Tous ces facteurs sont favorables à la poursuite de la défragmentation économique et financière de la zone euro, ce que recherchent gouvernements et BCE. Le risque, c’est que la croissance mondiale s’étiole encore, que les craintes sur la solvabilité des États européens refassent surface, que les situations politiques et sociales se dégradent… # 8 - Fed : la sortie du QE est un exercice difficile Poursuite de la défragmentation économique et financière de la zone euro, ce que recherchent gouvernements et BCE Avec des chiffres d’inflation faibles – ou bien plus faibles que prévu – aux ÉtatsUnis, au Royaume-Uni, en Allemagne et en Chine, le thème de la défl ation a refait son apparition. Il n’en fallait pas plus pour que les « colombes » de la Fed 12 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 interviennent. Pour John Williams, président de la Fed de San Francisco, la Fed devra reprendre sa politique de QE… qui vient à peine de se terminer (fi n octobre), si l’inflation ne parvient pas à converger vers la cible de 2 %. Stanley Fisher, le vice-président de la Fed, a également insisté sur le caractère crucial de la remontée de l’inflation. Quant à James Bullard, président de la Fed de SaintLouis, réputé « faucon » (voir tableau ci-dessous), il a déclaré que la Fed devrait retarder la fin du QE afin de s’assurer que les perspectives d’inflation soient préservées. Il faut dire que, malgré les améliorations cycliques indéniables sur le marché du travail, l’inflation salariale reste aux abonnés absents : les salaires réels continuent de stagner, ce qui empêche une accélération solide de l’inflation. FOMC : membres votants en 2015 « Hawkish » / Faucons Jeffrey M. LACKER (Richmond) Modérés Lael BRAINARD (Board) Le thème de la déflation a refait son apparition. Il n’en fallait pas plus pour que les « colombes » de la Fed interviennent « Dovish » / Colombes William C. DUDLEY (New York) Stanley FISHER (vice chairman of the Board) Charles L. EVANS (Chicago) Dennis LOCKHART (Atlanta) Janet YELLEN Jerome H. POWELL (Board) (Chairman of the Board) Daniel TARULLO (Board) John WILLIAMS (San Francisco) FOMC : membres non votants en 2015 « Hawkish » / Faucons James BULLARD (St Louis) Richard W. FISHER (Dallas) (prendra sa retraite en avril 2015) Modérés Loretta J. MESTER (Cleveland) « Dovish » / Colombes Narayana KOCHERLAKOTA (Minneapolis) Eric S. ROSENGREN (Boston) Esther L. GEORGE (Kansas City) Charles PLOSSER (Philadelphie) (prendra sa retraite en mars 2015) On notera le décalage important entre, d’une part les déclarations de Mme Yellen (qui annonce un laps de temps considérable entre la fin du QE et le début des hausses de taux), d’autre part les « prévisions » des membres du board de la Fed (compatibles avec des hausses des taux identiques (rapides et conséquentes) à celles qui ont prévalu dans les phases de resserrement monétaire passées, et enfin avec ce qu’indique le nouvel indicateur fétiche de la Fed, un indice composite concernant le marché de l’emploi (voir encadré p.14) qui montre clairement que la Fed aurait dû resserrer il y a au moins 6 mois. Tout ceci confirme qu’il est bien difficile de sortir d’un vaste programme de QE, et que les erreurs de politique monétaire restent un facteur de risque majeur pour des marchés qui ont jusqu’ici accordé aux banques centrales une confiance absolue et parfois aveugle. Au total, force est de reconnaître qu’il n’y a pas de raison de voir l’économie américaine ralentir durablement. De nombreux facteurs plaident en faveur de la poursuite de l’expansion : Il est bien difficile de sortir d’un programme de QE, et les erreurs de politique monétaire restent un facteur de risque majeur pour des marchés qui ont jusqu’ici accordé aux banques centrales une confiance absolue Il n’y a pas de raison de voir l’économie américaine ralentir durablement… mais la politique monétaire restera accommodante - Les conditions monétaires et fi nancières sont très accommodantes ; - Les effets de richesse jouent à plein : par exemple, les taux longs ont rebaissé depuis le début de l’année, la bourse est au plus haut ; Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 13 11 # Novembre 2014 - La politique budgétaire devient moins restrictive ; - Les ménages se sont désendettés ; - Le chômage baisse ; - Les entreprises sont en bonne santé (marges élevées) ; - La croissance mondiale tient bon. Peut-on en revanche espérer une nette accélération ? Pas sûr… le cycle économique américain est moins impressionnant concernant l’investissement, les salaires… Au total, la remontée des fed funds interviendra donc probablement un peu plus tard que prévu, fin 2015 voire début 2016. Au-delà de la date de début du resserrement, se pose la question de l’ampleur des hausses et de la fréquence. Même la Fed aujourd’hui n’en sait rien (il y a tellement de paramètres en jeu et la date du premier resserrement est encore bien éloignée !). Mais ce que l’on peut dire actuellement, c’est que le resserrement à venir sera moins rapide et moins brutal que ne l’ont été les précédents, et moins brutal et moins rapide que les prévisions des gouverneurs de la Fed (les « dots »), prévisions auxquelles les marchés financiers accordent bien peu de crédit. Au-delà de la date de début du resserrement, se pose la question de l’ampleur des hausses et de la fréquence > La Fed et le marché de l’emploi : un nouvel indicateur plus troublant que rassurant Depuis le 6 octobre dernier, la Fed publie le lundi suivant la publication mensuelle sur l’emploi, un nouvel indicateur censé représenter la quintessence du marché de l’emploi américain. Cet indicateur LMCI (Labour Market Conditions Index) repose sur un modèle factoriel dynamique portant sur 19 indicateurs dont : – Des indicateurs de chômage : taux de chômage, taux de participation, temps partiel pour raisons économiques ; – Des indicateurs d’emploi : emploi privé, emploi public, emploi temporaire ; – Des indicateurs relatifs au travail hebdomadaire : durée hebdomadaire du temps de travail, salaires horaires ; – Postes à pourvoir ; – Recrutement : taux de recrutement, taux de transition chômage – emploi ; – Licenciements : nombre de personnes ayant quitté leur emploi et sans emploi depuis moins de 5 semaines ; – Enquêtes de consommation et enquêtes d’affaires : plans de recrutement, emplois difficiles à combler. L’objectif – fort louable – de cet indicateur est de fournir une vue large des conditions d’emploi, une volonté bien en ligne avec la philosophie de Janet Yellen, dont on sait qu’elle suit de nombreux indicateurs depuis longtemps. Trois commentaires cependant : – En premier lieu, ce choix fait suite à la difficulté de la Fed de se débarrasser d’une forward guidance basée sur un taux de chômage à 6,5 %. – Ensuite, il s’agit ici de tempérer l’optimisme du marché de l’emploi. Le taux de chômage est passé en dessous de la barre de 6 %, alors qu’il existe encore de fortes capacités excédentaires sur ce marché. – Enfin, et c’est sans doute involontaire, force est de reconnaître que le LMCI brouille les messages. Si l’on se réfère aux cycles passés, la Fed aurait dû resserrer sa politique monétaire conventionnelle il y a bien longtemps : c’est ce qu’indique le LMCI. Malgré cela, Yellen réaffi rme qu’il se passera une période de temps considérable entre la fin du QE et le premier resserrement monétaire. Au total, on peut douter de l’intérêt qu’il y a à publier un indicateur que l’on ne suit pas et qui montre à quel point la Fed est « derrière la courbe ». # 9 - Prime de risque, coût du capital et valorisation des actifs risqués : un débat récurrent L’environnement de taux bas – courts et longs – n’est bien évidemment pas sans conséquences pour les actifs fi nanciers, et notamment les actifs risqués. Les taux d’intérêt entrent en effet en ligne de compte dans les modèles de valorisation d’actions et de primes de risque. Ce point est important car la 14 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 hausse du prix des actifs risqués, dans le monde actuel de faible croissance, est souvent perçue comme étant excessive, et donc représentative d’une création de bulle. Qu’en est-il exactement ? Et si la hausse des prix d’actifs était tout simplement liée à un « repricing » et à l’intégration de taux durablement bas dans les modèles d’évaluation ? Répondre à cette question serait aisé s’il n’existait qu’une seule façon de calculer la valeur d’une action ou d’une prime de risque. Ce n’est malheureusement pas le cas. Les méthodes d’évaluation et les hypothèses de croissance, de taux varient d’un bureau de recherche à l’autre mais aussi d’un analyste à l’autre, d’un secteur à l’autre… On retrouvera par exemple la méthode des cash flows actualisés (DCF), de l’EVA (Economic Value Added), de l’actualisation des dividendes, des multiples de transactions, de l’actif net réévalué (ANR)… bref, différentes approches, même si la méthode des cash flows actualisés est la méthode la plus commune. Elle consiste à déterminer la valeur actuelle des liquidités qu’une entreprise sera capable de dégager dans le futur. Cette évaluation sera sensible à des hypothèses comme le taux d’actualisation (coût moyen pondéré du capital ou WACC – Weighted Average Cost of Capital), qui représente en fait le taux de rentabilité annuel moyen attendu par les actionnaires et les créanciers, en retour de leur investissement. Plus le taux d’intérêt est bas, et plus le coût du capital sera bas (à fiscalité inchangée). Une autre composante des modèles d’évaluation concerne l’hypothèse de croissance (la croissance à l’infi ni). On utilise généralement la croissance à long terme, soit une moyenne historique longue, soit la croissance potentielle. Il existe également plusieurs méthodes pour évaluer les primes de risque, mais il est courant d’utiliser l’écart entre la rentabilité des actions (rendement du dividende + taux de croissance du PIB nominal) et le taux sans risque, que l’on approxime généralement par le taux d’intérêt à 10 ans (on prend en général le taux allemand). Au cours des 25 dernières années, on constate que la rentabilité du marché des actions a « relativement peu » fluctué autour de sa moyenne (autour de 10 % au plus haut, environ 5 % au plus bas, avec une moyenne de 7 %). En revanche, le taux 10 ans s’est effondré sur la période, passant d’un plus haut de 9,1 % au moment de la réunification allemande à un plus bas de 0,9 % en cette fin de mois d’octobre. Autrement dit, si la rentabilité du marché des actions n’est aujourd’hui que légèrement en dessous de sa moyenne (6,3 %), le taux sans risque a quant à lui été divisé par 10, d’où une prime de risque qui demeure à des niveaux très (trop) élevés. Pour réduire ce biais, on peut faire deux aménagements : i. Plutôt que de prendre les taux allemands, on prend une moyenne des taux d’intérêt en Europe, pondérée en fonction des poids dans l’indice. Le taux est alors de 1,6 % vs. 0,9 % ; Et si la hausse des prix d’actifs était tout simplement liée à un « repricing » et à l’intégration de taux durablement bas dans les modèles d’évaluation ? La rentabilité du marché des actions n’est aujourd’hui que légèrement en dessous de sa moyenne (6,3 %), le taux sans risque a quant à lui été divisé par 10, d’où une prime de risque qui demeure à des niveaux très (trop) élevés ii. Compte tenu de la situation actuelle (démographie, investissements / innovations, stagnation séculaire…), tout le monde a revu à la baisse les potentiels de croissance, y compris la Fed pour ce qui concerne les ÉtatsUnis. Les taux d’intérêt d’équilibre (courts et longs) sont ainsi également revus à la baisse. On réduit donc les potentiels de croissance potentielle long terme. Pris ensemble, selon nos estimations, ces deux correctifs réduiraient la prime de risque de 150 pb. Celle-ci s’établirait donc autour de 4 % au lieu de 5,5 %, avec l’ensemble des conséquences qui en découlent sur le coût du capital. Au total doit-on revoir le coût du capital des entreprises ? Au regard des perspectives de croissance et du taux d’équilibre long terme, la réponse est oui… à quelques nuances près : La prime de risque s’établirait désormais autour de 4 %, contre 5,5 % auparavant La baisse des taux d’intérêt allemands ou américains et leur maintien à des niveaux en moyenne plus bas qu’au cours des années passées est un fait, mais cela ne veut pas dire que cela s’applique nécessairement à tous les pays. Pour les pays périphériques, la composante spread est importante, et l’on peut Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 15 11 # Novembre 2014 penser qu’un nouvel effondrement de croissance pèserait sur la solvabilité et sur les spreads. Autrement dit, la baisse du coût du capital est généralisable tant que la situation reste apaisée. Dans le cas contraire, on assisterait à une hausse du coût du capital dans certains pays. Chez Amundi, nous avons d’une part réduit le coût du capital dans nos modèles d’évaluation il y a plus d’un an (ce qui justifie des valorisations plus élevées), mais nous avons aussi décidé de revoir à la baisse le potentiel de croissance à long terme et de dissocier pays du cœur de la zone euro et pays périphériques, avec un taux de capital plus élevé pour le second groupe. On notera que revoir à la baisse le coût du capital accroît - parfois considérablement - la valorisation des actions alors que revoir à la baisse la croissance potentielle la réduit. Difficile de revoir l’une sans revoir l’autre. Ceci explique pourquoi, avec des hypothèses différentes (sur le couple taux de croissance – taux d’intérêt), mais avec une méthode identique, on peut parvenir à des évaluations similaires… et aussi peu excessives ou « anormales ». # 10 - Lowflation, déflation, récession, reflation: scénarios et stratégies d’investissement Chez Amundi, nous avons réduit le coût du capital et de taux de croissance dans nos modèles d’évaluation il y a plus d’un an, mais nous avons aussi dissocié pays cœur et pays périphériques, avec un taux de capital plus élevé pour le second groupe Au total, trois scénarios alternatifs se dessinent : • Notre scénario central pour 2015 (probabilité : 65%) est développé dans le texte 3 pour la partie purement macroéconomique. Dans ce scénario, la croissance mondiale reste relativement solide, mais la croissance de la zone euro reste faible. La déflation menace encore, ce qui pousse la BCE à mettre en place des mesures qui poussent la taille du bilan à la hausse. Une dépréciation supplémentaire de l’euro nous semble inévitable. Les politiques économiques s’infléchissent quelque peu (texte 2), mais l’accélération de la reprise économique prend du temps. 2015 devrait être une année caractérisée par des politiques de reflation, dans un environnement de faible croissance. Un environnement suffisamment sain pour éviter une nouvelle crise, mais un environnement de plus forte volatilité, qui n’empêche cependant pas la convergence économique et la défragmentation financière de se poursuivre. La Fed conserve quant à elle une politique monétaire accommodante, mais les courbes futures se pentifient dans la deuxième partie de l’année. La baisse de l’euro serait sans aucun doute l’un des facteurs les plus favorables pour les marchés d’actions de la zone, avec le rendement du dividende, historiquement et systématiquement plus élevé qu’au Japon ou aux États-Unis. Il faut tout de même noter que dans un environnement de taux très bas et de plus grande volatilité, être long duration des pays du noyau dur ne protège plus des secousses sur les marchés d’actions. Cette limite au « macro hedging » est elle-même génératrice d’une plus grande volatilité. • Le scénario intermédiaire est un scénario de déflation – récession … « à la japonaise – années 1990 et 2000 » (probabilité : 30%). C’est précisément ce scénario que banquiers centraux, gouvernements et instances européennes veulent éviter à tout prix. Car dans un tel cas de figure, les doutes sur la solvabilité de certains États périphériques et sur l’efficacité des politiques monétaires en zone euro referaient surface, des éléments annonciateurs d’une crise sévère. On assisterait alors à une nouvelle dégradation des spreads de crédit, entreprises et souverains. Les marchés d’actions n’y résisteraient sans doute pas, affectés par les perspectives de croissance dégradées, la remontée des spreads, la volatilité de marché et les perspectives de profit. • Au troisième et dernier scénario est associée la probabilité la plus faible. Le scénario de « normalisation » (probabilité : 5%) est fort peu probable. Même si la croissance gagne du terrain, il n’est pas possible dans les conditions actuelles de croire en une quelconque normalisation : pas plus des politiques monétaires que des taux longs, ou encore des croissances potentielles irrémédiablement revues à la baisse. De même, il n’est pas possible de croire qu’un tel scénario ne passe pas d’abord par notre scénario central qui met l’accent sur le rôle majeur des banques centrales et des policy-mix. 16 Scénario central : reflation dans un monde en faible croissance Scénario i ntermédiaire : retour de la déflation /récession Scénario à faible probabilité : retour d’une croissance forte et normalisation Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 Les deux tableaux ci-dessous présentent de façon synthétique les trois scénarios en présence, ainsi leurs principales caractéristiques. Les trois scénarios en un clin d’œil Déflation – Récession (S2 - probabilité : 30 %) Macro Stagnation – Reflation (S1 - probabilité : 65 %) Vers un creusement de l’output gap par une baisse de la croissance Taux courts Bas pour très longtemps… et futures hausses des taux extrêmement modérées Taux longs Bas pour très longtemps pour certains pays du cœur, hausses des spreads pour les autres Courbe des taux Très plate pour longtemps pour certains pays du cœur, très pentue pour les autres Obligations d’entreprises Spreads insuffisamment protecteurs face à ce scénario. Elargissement des spreads inévitable Actions Croissance et profits vs taux bas… une lutte inégale… baisse des marchés Vers une élimination de l’output gap par une révision – à la baisse – de la croissance potentielle ; inflation ultra basse Bas pour longtemps… et futures hausses des taux modérées Normalisation (S3 - probabilité : 5 %) Vers une élimination de l’output gap par la hausse de la croissance Hausse des taux, vers 3 % à horizon 2 ans Bas pour longtemps Remontée rapide et ample (correction d’une « anomalie ») Plate, ou plutôt peu pentue Bear flattening Stratégies de portage dangereuses (effet taux vs effet de crédit) Devise Baisse de l’euro Stratégies de portage attractives sauf si anticipations de récession ou déflation Taux de l’actif sans risque à long terme plus bas, impact sur valorisation des actions… forte différenciation par secteur. QE et euro décisifs Baisse de l’euro Expected returns Revus fortement à la baisse Revus à la baisse Croissance et profits vs hausse des taux et remontée des anticipations d’inflation. Hausse des marchés Hausse de l’euro Retour à la normale Stratégies d’allocations d’actifs L’allocation d’actifs actuelle (colonne 3) fait référence au positionnement des portefeuilles diversifiés d’Amundi. L’allocation d’actifs selon (S1) représente la cible actuelle, conformément au scénario central (+ signifie surpondéré ; = signifie neutre et – signifie sous-pondéré). Le tableau ci-dessous met en évidence les allocations d’actifs cible en fonction des différents scénarios sous-jacents. Nous avons rappelé pour mémoire l’allocation cible pour 2014 établie en décembre 2013. On constate que notre allocation d’actifs actuelle est extrêmement proche de cette cible. Classe d’actifs CASH ACTIONS Euro Europe États-Unis Japon Emergents OBLIGATIONS SOUVERAINES Cœur euro Périphériques États-Unis Japon Emergents OBLIGATIONS D’ENTREPRISES IG euro HY euro IG US HY/US Financières EUR vs USD Allocation cible Allocation Allocation d’actifs cible pour 2014 (édition d’actifs actuelle Scénario 1 – 65 % Scénario 2 – 30 % Scénario 3 – 5 % de janvier 2014) (octobre 2014) ++ ++ + + ++ + + --+ ++ ++ ++ + + ++ - ++ ++ + + + + + + -+ ++ ++ ++ + + ++ - ++ ++ + + + + + = -+ ++ ++ ++ + + ++ - + + + + = + -+ =/--= = --- Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier --++ +++ ++ + + ++ + --+ + + + + + ++ + 17 11 # Novembre 2014 2 Le Nouveau Meilleur des Mondes en 2015 ? Il appartient désormais à la politique budgétaire de vaincre la déflation NICOLAS DOISY, Stratégie et Recherche Économique – Paris 1. Six ans après, la déflation devrait à nouveau être la menace mondiale à affronter en 2015 (de la Chine à l’Europe) 1.1 L’insuffisance du crédit et les surcapacités se conjuguent pour freiner la demande chinoise et européenne Tandis que les États-Unis se tiennent éloignés de la déflation, la zone euro et la Chine entrent dans ce régime en raison d’une demande agrégée insuffisante provoquée par le resserrement du crédit bancaire (aux ménages). Dans les trois cas (mais à des degrés différents), l’insuffisance du crédit bancaire est une conséquence directe de la conjugaison de deux phénomènes : (i) risque de crédit important dans les bilans des banques et (ii) absence d’emprunteurs solvables auxquels accorder de nouveaux prêts. C’est notamment le cas des ménages, dont la croissance du revenu est doublement rognée : la stagnation de l’immobilier empêche d’emprunter plus, et l’inflation des salaires est insuffisante. La demande globale insuffi sante et les vastes surcapacités de production (en hausse, qui plus est) freinent l’infl ation des prix en Chine, tandis qu’en Europe, la défl ation des prix et des salaires s’alimentent déjà l’une l’autre. Les surcapacités en zone euro se rapprochent désormais de 5 % du PIB, ce qui est suffisant pour faire passer l’infl ation des prix sous la barre des 0 % si rien n’est fait rapidement. Alors que les entreprises peinent encore à rentabiliser leurs surcapacités, les salaires suivront le mouvement dans un contexte de chômage important, ce qui explique l’insuffisance de demande agrégée. Bien qu’elle ne soit pas encore à ce stade, la Chine risque clairement d’être la prochaine sur la liste. 1.2 La Chine et l’Europe menacent de disséminer leurs pressions déflationnistes au reste du monde par l’intermédiaire des États-Unis Bien qu’ils se situent à un stade plus avancé dans leur réparation des mêmes maux, les États-Unis restent exposés à une rechute en (pré) défl ation car leur couple croissance/infl ation est trop faible pour continuer de monter sensiblement de lui-même. Cela fait près de deux ans que la hausse des prix demeure obstinément inférieure à l’objectif de 2 %, et il n’y a aucun signe d’accélération tangible de l’infl ation salariale vers les 3 % requis pour l’y amener. Les surcapacités compressent en effet la croissance des salaires pour accroître la part des profi ts dans la valeur ajoutée (la rémunération du capital) : en conséquence, le taux d’utilisation de la population en âge de travailler et la demande globale plafonnent. Si tel n’était pas le cas à l’origine, les tendances (pré)défl ationnistes en Chine et en zone euro pourrait se synchroniser du fait d’une réaction de politique économique insuffisante, et toucher les États-Unis par le biais du change. La dépréciation de l’euro face au dollar depuis la mi-2014 est aussi bien due aux anticipations de (i) faible infl ation, voire de défl ation, qu’à (ii) la promesse d’une réaction politique audacieuse par Mario Draghi. Sauf promesse en l’air, le dollar devrait donc s’apprécier face à l’euro tandis que le risque d’une dévaluation du yuan est réel si la Chine devait faire face à des faillites en chaîne dans son secteur financier et son économie réelle. 2. À elles seules, les politiques monétaires non conventionnelles ne peuvent réduire efficacement les taux d’intérêt réels 2.1 Les politiques monétaires non conventionnelles ne peuvent pas se substituer aux gouvernements dans l’économie réelle L’essentiel Avec une inflation positive mais obstinément inférieure à l’objectif de 2 %, les États-Unis ne contribuent pas à sortir le reste du monde (à commencer par la Chine et la zone euro) de sa récente tendance (pré)déflationniste. De plus, tant que la hausse des prix ne sera pas durablement étayée par une hausse de l’inflation salariale, les États-Unis pourraient retomber dans la situation de prédéflation observée entre 2009 et 2013 si (i) la zone euro ne met pas fin à la chute libre de son inflation (pour empêcher une déflation à la japonaise) et si (ii) la Chine s’avère incapable de résoudre ses problèmes structurels tout en contrant les tensions déflationnistes nées de l’éclatement de sa bulle immobilière et du crédit. Face à une politique monétaire (y compris non conventionnelle) qui peine à stimuler la reprise, l’enjeu pour les politiques budgétaires actives sera de parvenir en 2015 à relancer l’inflation pour réduire les taux d’intérêt réels dans le monde. Comme les États-Unis et la Chine ont renoncé à une nouvelle vague d’assouplissement monétaire (pour des raisons différentes spécifiques à leur cas), la BCE devrait saisir cette opportunité en or pour injecter d’importantes liquidités afin de maintenir la coordination implicite à l’œuvre avec la Fed depuis juin 2010. De ce fait, le principal risque en 2015 sera que la politique budgétaire de la zone euro ne soit pas modifiée suffisamment pour stimuler proactivement la région. Six ans après, la déflation devrait à nouveau être la menace mondiale à affronter en 2015 Les politiques non conventionnelles sont plus effi caces durant les crises fi nancières (lorsque les primes de risque entraînent les taux nominaux vers 18 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 4,5% 2% inflation des prix = 3% inflation salariale 4,0% 3,5% 3,0% 2,5% 2,0% 1,5% 1,0% 3,0% 1,5% 2,5% salaire = prix inflation y = 1.04x + 0.009 R² = 0.34 2,0% 1,0% Alors que la BCE a clairement et volontairement un train de retard (en reportant un véritable assouplissement quantitatif), la Chine doit étaler habilement dans le temps d’importantes faillites potentielles car son programme d’assouplissement quantitatif a déjà été mis en œuvre en 2009. Étant donné la hausse marquée de l’endettement de la Chine ces dernières années (de 150 % du PIB à 250 %), on peut raisonnablement en déduire qu’il est inutile d’injecter davantage de liquidités et de crédit : l’économie a plutôt besoin d’une importante restructuration, à l’instar de celle des économies post-soviétiques1. En parallèle, freinée par les craintes de l’Allemagne, la BCE interviendra sûrement trop tard pour faire plus qu’enrayer la chute de l’infl ation. La relation entre infl ation des salaires et infl ation des prix 1 Inflation salariale (depuis 1998) des sommets) et moins en cas de faible inflation ou de défl ation (lorsque ce sont les taux réels, c’est-à-dire l’infl ation, qui importent). Le QE-1 a permis d’abaisser les taux nominaux du Trésor à 10 ans de 350 pb à 3,5 % fin 2009 ; alors que les QE-2 et QE-3 ont contribué à relancer les prix et l’inflation salariale, ils ont abaissé les taux longs nominaux de seulement quelques dizaines de points de base. Parallèlement, la hausse des prix pourrait rester faible dans un contexte d’appréciation du dollar américain, tandis que l’inflation salariale n’augmente pas en raison de la demande insuffisante. Inflation des prix (depuis 1998) Source : Bureau of labor statistics, Recherche Amundi 2.2 L’accélération de l’infl ation va devenir l’objectif complexe des grandes banques centrales Comme le montre l’exemple américain, l’objectif ultime de toute stratégie de refl ation est de relever l’infl ation pour réduire les taux d’intérêt réels et rendre la dette privée soutenable alors que la croissance tendancielle recule. Si les taux sont historiquement bas sur les marchés obligataires, les taux nominaux facturés par les banques aux entreprises ont été à peine réduits de 50 pb avec 3 500 Mds de dollars de QE, tandis que la hausse de l’inflation de 150 pb a contribué à diviser de trois fois autant ces mêmes taux en termes réels. En conséquence, lorsque les taux directeurs sont bloqués à 0 % et que la stabilité financière est source de préoccupation, la refl ation budgétaire est la seule option efficace qui reste. La politique budgétaire est l’adjuvant nécessaire pour relancer l’inflation au niveau mondial En Chine et en zone euro, la stratégie raisonnée des banques centrales afin de maintenir une infl ation positive risque d’être fortement compliquée par les tergiversations gouvernementales concernant les politiques budgétaires et fi nancières. La Chine devra prouver sa capacité à soutenir une demande globale et des gains d’efficacité avec le bon dosage de (i) croissance réelle des salaires (c’est-à-dire corrigée de l’infl ation) et de gains de productivité et de (ii) soutien budgétaire aux établissements fi nanciers et aux ménages, parallèlement à (iii) une restructuration approfondie des secteurs industriels et fi nanciers. En zone euro, la reflation reste compliquée par l’absence de soutien budgétaire aux politiques monétaires quantitatives. 2 La relation emploi/infl ation 3.1 Des politiques monétaires quantitatives non coordonnées ne peuvent que déboucher sur une guerre des changes injustifi ée 5,0% 4,5% Au-delà de rendements décroissants, les politiques monétaires quantitatives ont l’effet indésirable de (i) potentiellement mettre en péril la stabilité financière et de (ii) nécessiter une coordination délicate 3,5% 3,0% 2,5% 2,0% 1,5% 63% 62% 58% 61% y = -6.7x2 + 8.9x - 2.9 R² = 0.46 0,0% 65% 0,5% 64% équilibre Grande Modération 1,0% 60% Inflation salariale 1 Malgré de nombreuses apparences (et le fait qu’elle soit membre de l’OMC), la Chine est encore très loin d’être une économie de marché, en conséquence de quoi elle souffre de nombreux maux qui frappaient également les économies à planifi cation centralisée du bloc soviétique, jusqu’à leur transition vers l’économie de marché. Parmi ces maux : un système fi nancier ineffi cace dont l’incapacité à allouer sainement le crédit engendre l’accumulation d’importantes quantités de capacités de production ineffi caces (qui, dans une économie de marché, deviennent des surcapacités de même que s’est avérée inutile l’industrie lourde de l’époque soviétique) parallèlement à d’importants arriérés de paiement (du moins dans le secteur public encore prépondérant). À cet égard, les économies de marché développées partagent les bulles de crédit avec la Chine, en ce qu’elles résultent d’une exubérance irrationnelle due, au moins en partie, à une réglementation et une supervision allégée du secteur fi nancier. 4,0% 59% 3. La politique budgétaire est l’adjuvant nécessaire pour relancer l’inflation au niveau mondial Taux d'emploi Source : Bureau of labor statistics, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 19 11 # Novembre 2014 Allemagne Espagne 3% 2% 1% 0% 2014 2012 2010 2008 2006 2004 2002 2000 1998 1996 1994 1992 -1% Source: OCDE, Recherche Amundi Le meilleur antidote à la menace déflationniste est que la politique budgétaire commence à jouer le rôle de consommateur en dernier recours, et que la BCE prenne le relais des injections de liquidités La Chine doit désormais mettre à niveau son système économique en accordant plus de place à un État providence moderne et à un secteur privé performant par l’augmentation des dépenses budgétaires et une politique de concurrence efficace. Alors que la nécessité d’offrir des services publics est une opportunité en or pour stimuler la demande globale à court terme avec des bénéfices de long terme, c’est désormais à la politique budgétaire que cette mission incombe, et non plus au crédit 3. Quant à la restructuration des secteurs industriels et financiers, il faudra autant de temps et de capital politique avant que le gouvernement central ne s’impose aux collectivités locales, mais cela aura, si c’est le cas, des effets institutionnels aussi structurants que le New Deal de Roosevelt. Évolution de l’EUR/USD selon les scénarios 4 20 Italie 4% En Europe et aux États-Unis, le meilleur antidote à la menace déflationniste est que la politique budgétaire commence à jouer le rôle de consommateur en dernier recours, et que la BCE prenne le relais des injections de liquidités. Si la meilleure option des États-Unis pour l’instant est de reporter la hausse des taux directeurs d’un an (voire éventuellement moins) et de suspendre les ajustements budgétaires, la BCE devra rétablir sa crédibilité écornée et tenir sa promesse d’augmentation rapide de son bilan. Pour y parvenir, la zone euro doit s’engager à l’avance à accélérer l’inflation en procédant de manière volontaire au financement monétaire d’une expansion budgétaire, avec l’accord formel de l’Allemagne. 1,50 1,45 1,40 1,35 1,30 1,25 EUR/USD Modèle Upper Lower 10-14 06-14 02-14 10-13 06-13 02-13 10-12 06-12 02-12 10-11 02-11 10-10 1,20 06-10 2 Voir notamment l'article : « Quels facteurs déterminent la parité euro-dollar ? Essentiellement le biais (défl ationniste) de la BCE », dans notre mensuel Cross Asset de décembre 2013. Les injections de liquidités par la Réserve fédérale et la BCE sont statistiquement décorrélées : chaque banque centrale reste attentiste lorsque l'autre injecte ou retire des liquidités. En conséquence, ces injections de liquidités semblent coordonnées, ne serait-ce que de manière implicite. 3 La Chine a stimulé son économie grâce à une relance par le crédit en janvier 2009, ce qui a conduit au poids actuel de la dette privée (notamment les crédits immobiliers aux ménages) : en conséquence, le bon sens impliquerait de ne pas réutiliser le même outil, ce qui signifie que toute mesure de relance éventuellement prise par la Chine devra être plus limitée qu'il y a six ans. Cet outil de relance budgétaire serait d'autant plus limité que les institutions nécessaires pour le mettre en œuvre sont pratiquement inexistantes (ce qui pourrait avoir été un argument pour opter pour une relance monétaire en 2009) et qu'il faudrait les créer : voilà un exemple éclairant de la stratégie du gouvernement chinois destinée à faire d'une pierre (réformes structurelles et politique budgétaire) deux coups, (gérer les répercussions de l'éclatement de la bulle immobilière et la transition vers une gouvernance économique davantage axée sur le marché). C'est exactement ce que Franklin Roosevelt a fait avec son New Deal, qui a, par ailleurs, contribué à asseoir définitivement l’autorité du gouvernement fédéral sur les États fédérés. France 5% 06-11 3.2 Il est nécessaire de mettre les QE sous adjuvant budgétaire pour mettre la liquidité au travail dans les trois grandes économies mondiales 6% 1990 Les facteurs monétaires et financiers jouant un rôle déterminant dans les fluctuations du change, l’absence de coordination risque de déboucher sur une guerre des changes (injustifiée) comme effet secondaire des intérêts nationaux. De fait, avec la décision prise par la Fed de mettre formellement fin à son programme QE, la zone euro doit prendre le relais dans la coordination efficace (même non admise)2 des injections de liquidités, ce qui explique le bon accueil que les marchés ont réservé aux annonces de Mario Draghi (avant même leur mise en œuvre). Si la Chine a choisi d’arrimer le yuan au dollar, il reste possible qu’un atterrissage forcé engendre une dépréciation. Zone euro : surcapacités en capital (en % PIB zone euro) 3 1988 des banques centrales. Alors que ces deux conditions sont difficilement compatibles, la question est encore compliquée par d’autres aspects relevant des seuls « actionnaires » des banques centrales, à savoir les gouvernements. La coopération des banques centrales (entre elles et avec leurs gouvernements respectifs) comporte donc un important aléa moral : en témoignent le fait que les banques soient partout lentes à se restructurer de même que l’annonce par la Fed du retrait de son programme d’assouplissement quantitatif. Source : Datastream, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 Conclusion Les élections de 2016 devraient inciter le Congrès américain à adopter un budget neutre (ou de relance) car la plupart des législateurs joueront leur réélection, tandis que la Fed devrait judicieusement reporter sa première hausse de taux. Une telle stratégie permettrait de soutenir considérablement la reprise (voire de l’accélérer), notamment en cas de baisse des impôts et/ ou de nouvelles dépenses publiques (dans les transports par exemple) qui contribueraient à relancer la dépense privée. Son impact ne peut être qu’accru si le relèvement des taux actuellement attendu à la mi-2015 était retardé, sans même mentionner de nouvelles injections de liquidités en cas d’incident mondial provoqué par la Chine et/ou la zone euro. Avec cinq ans de retard, la zone euro va enfi n emboîter le pas aux ÉtatsUnis en assainissant ses banques et en accroissant la taille du bilan de la BCE, alors que la contribution de la politique budgétaire reste l’inconnue. L’inconnue budgétaire empêche la BCE de communiquer clairement sur sa stratégie auprès des marchés, et, de ce fait, devient déterminante pour la réussite du programme de reflation de Mario Draghi. Si l’Allemagne continue de refuser que la politique budgétaire soit réorientée de manière à stimuler l’économie, l’ensemble du programme fi nira par être considéré comme une promesse en l’air. Cependant, la menace défl ationniste qui plane sur des pays systémiques comme la France est le meilleur argument pour inciter à l’action. Bien qu’elle soit également confrontée à deux enjeux (déflation et réformes structurelles), la Chine devra se montrer encore plus prudente que la zone euro car les risques de déraillement y sont nettement plus élevés. La clé du succès sera la capacité des autorités chinoises à trouver le bon dosage entre les deux piliers de leur stratégie économique destinée à maintenir une croissance suffisamment forte et à orchestrer le rééquilibrage macroéconomique au profi t de la demande intérieure. Cela devrait inclure (i) une stimulation budgétaire à court terme avec des dépenses publiques socialement rentables et (ii) la restructuration des secteurs fi nancier et réel (libéralisation et privatisation). Avec cinq ans de retard, la zone euro va enfin emboîter le pas aux États-Unis en assainissant ses banques et en accroissant la taille du bilan de la BCE, alors que la contribution de la politique budgétaire reste l’inconnue Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 21 11 # Novembre 2014 3 Perspectives économiques des pays développés en L’essentiel 2015 et au-delà : la balle toujours dans le camp des banques centrales et… surtout des gouvernements Si la croissance économique a été positive dans la quasi-totalité du monde développé en 2014, elle n’en a pas moins été presque partout décevante quoiqu’à des degrés très divers. En 2015, parmi les principaux facteurs de soutien, figureront une dynamique de reprise cyclique toujours robuste aux États-Unis et la poursuite de la réparation financière en zone euro. La baisse du pétrole et (pour le monde hors États-Unis) la hausse du dollar apporteront également une contribution positive. TRISTAN PERRIER, Stratégie et Recherche Économique – Paris 2014, une année décevante pour la croissance mondiale Si la croissance économique mondiale est restée nettement positive en 2014, elle n’en a pas moins déçu, dans la majorité des régions, à des degrés divers par rapport à ce qui était attendu fi n 2013. - Les États-Unis ont fait relativement bonne figure, rétablissant une trajectoire de reprise soutenue après un 1er trimestre très faible. Cependant, de nombreux indicateurs ont montré le caractère incomplet de l’amélioration, notamment en ce qui concerne le marché de l’emploi (le taux de participation a connu une chute continue et les salaires réels ont stagné), l’immobilier (dont le rebond, vigoureux en 2013, a ralenti cette année) et l’investissement des entreprises (qui ne s’est pas rétabli aussi vite que lors des précédentes reprises économiques). Le soutien des autorités monétaires et budgétaires n’en sera pas moins indispensable, car ces pays devront également affronter, en 2015 et au-delà, de nombreux défis : effets des craintes liées à une chute durable des potentiels de croissance presque partout et, pour la zone euro, risque de déflation. Par ailleurs, les pays développés ne sont pas immunisés, loin de là, vis-à-vis des risques importants présents dans le monde émergent. Aussi, l’évolution du policy mix, monétaire et budgétaire aura un rôle déterminant dans le déroulement de 2015. Ce sont, avant tout, ces perspectives concernant l’attitude des banques centrales et des gouvernements qui nous conduisent à privilégier un scénario de légère amélioration pour les années à venir. - Les performances de la zone euro ont été, dans l’ensemble, très audessous des attentes. Si certains pays périphériques (à commencer par l’Espagne) ont surpris positivement, les inquiétudes se sont recentrées sur les trois principaux États membres (France, Italie et, de façon inattendue, Allemagne) dont les taux de croissance du PIB ont été négatifs ou nuls au 2e trimestre. Surtout, l’infl ation a fait des incursions ou s’est établie en territoire négatif en Espagne et en Italie (et même en France hors effets des taxes indirectes), faisant craindre un basculement dans un scénario de défl ation auto-entretenue. - Hors zone euro, le Royaume-Uni a constitué une exception avec une reprise plus forte que prévu. Néanmoins les interrogations sont restées importantes sur la soutenabilité de cette amélioration, qui semble encore faire trop de place à la consommation tirée par la reflation immobilière, au détriment de l’investissement productif et des exportations. - Au Japon, la trajectoire économique a été très irrégulière, la hausse de TVA en avril générant plus d’effets négatifs que ce qui était prévu tandis que la baisse du yen n’a pas abouti à une amélioration des exportations. Ces développements mitigés ont prolongé et accentué les défis auxquels sont confrontées les grandes banques centrales, conduisant à l’annonce de nouvelles mesures de politique monétaire de la part de la BCE et de la banque du Japon et suscitant des doutes sur le calendrier de resserrement de la Fed. 22 10 66 65 8 64 6 63 4 62 Taux de chômage, %, éch gche 2 61 Taux de participation, %, éch dte 60 07-14 10-13 01-13 04-12 07-11 10-10 01-10 04-09 07-08 10-07 0 01-07 - Le rythme satisfaisant des créations d’emplois (supérieur à 200 000 par mois en moyenne) et la baisse continue du taux de chômage, constituent des facteurs favorables à une hausse de la consommation, même en l’absence de progression des salaires réels. Un soutien en provenance des salaires n’est d’ailleurs pas exclu. Il faut cependant, pour cela, que la baisse du chômage permette d’absorber effectivement l’offre de travail excédentaire 67 04-06 La reprise américaine restera, en 2015, la pierre angulaire nécessaire à la poursuite de l’amélioration dans l’ensemble du monde développé : les principaux déterminants de la consommation et de l’investissement commenceront l’année, aux États-Unis, sur une dynamique positive. 12 07-05 Des éléments de soutien non négligeables en 2015 : reprise américaine, réparation financière en zone euro, taux et pétrole bas, rééquilibrage des changes États-Unis : taux de participation et taux de chômage 1 10-04 En l’absence de signes d’accélération tangible de la conjoncture des pays développés au 4e trimestre 2014, 2015 ne commencera pas sous les meilleurs auspices. Cependant, l’économie mondiale pourra tout de même, l’année prochaine, compter sur quelques facteurs positifs. Source : US BLS, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 - Si la faiblesse de la demande de crédit reste un problème sans solution facile, les freins contraignant l’offre, hérités de la crise financière, se sont tout de même desserrés en 2014. La revue des bilans des banques par la BCE et les mesures de credit easing (TLTRO, achats d’ABS et de Covered Bonds) menées ou annoncées au titre de la politique monétaire en 2014 ont préparé un terrain plus favorable pour 2015. Le crédit bancaire pourrait ainsi retrouver, à partir de début 2015, une orientation positive à l’échelle de la zone euro (ce qui a déjà été le cas, pour le crédit aux entreprises, en 2014, en Allemagne et en France). 4 3 2 1 0 -1 06-14 02-14 10-13 06-13 02-13 10-12 06-12 02-12 10-11 06-11 02-11 -2 10-10 En zone euro : la réparation fi nancière et celle des marchés de l’emploi se poursuivent Inflation (indice général) % a/a Salaire horaire moyen, % a/a Salaire réel (salaire - inflation), % a/a 5 06-10 - Enfin, si les marges élevées des entreprises et l’amélioration de l’offre de crédit n’ont pas été, jusqu’à présent des éléments de soutien à l’investissement productif aussi forts qu’attendu, les chiffres étaient tout de même en amélioration fin 2014. L’élévation progressive du taux d’utilisation des capacités dans l’industrie, l’âge moyen élevé du capital physique et la bonne tenue des marchés d’actions (rendant plus onéreuses, pour les entreprises, les acquisitions externes que le développement des capacités internes) constituent, à cet égard, des éléments favorables. 6 02-10 - Les taux durablement bas devraient permettre au secteur de l’immobilier de poursuivre son rebond après la trajectoire hésitante de 2014. États-Unis : infl ation, salaires nominaux et salaires réels 2 10-09 (dont une partie se trouve aujourd’hui en dehors de la population active) ou que se vérifie l’hypothèse de pent-up wage defl ation, avancée par Janet Yellen, suivant laquelle la rigidité des salaires à la baisse durant les années de crise explique, en retour, leur retard à la hausse en période de reprise, avant qu’ils ne connaissent une période de rattrapage. Source : US BLS, Recherche Amundi - A en juger par les chiffres déjà disponibles, l’emploi total a légèrement progressé en zone euro en 2014, malgré les surprises négatives sur la croissance. Concernant les grands pays, si le rebond se fait attendre en Italie et en France, l’emploi reste dynamique en Allemagne, alimentant une hausse des salaires significative. Surtout, les marchés de l’emploi de plusieurs pays périphériques (Espagne, Portugal et Irlande) devraient prolonger, début 2015, l’amélioration significative observée depuis plusieurs mois (à partir de niveaux, certes, très dégradés). La reprise américaine restera la pierre angulaire de l’amélioration pour tous les pays développés Au Japon : la sortie graduelle de la déflation viendra soutenir la demande interne - Le rétablissement d’une inflation positive, conjugué à la bonne tenue des marchés actions, constituera une incitation à l’investissement des entreprises, décevant jusqu’à présent malgré la forte hausse des profits suite à la dépréciation du yen. Les hausses de salaires, encouragées par le gouvernement, peuvent également venir mitiger l’impact de l’inflation sur le pouvoir d’achat et soutenir la consommation des ménages. Le mouvement de baisse du prix du baril observé cette année constitue un élément « auto-stabilisant » pour la conjoncture de la majorité des pays, dont l’effet positif devrait être ressenti en 2015. Cette baisse peut, certes, poser un problème spécifique en zone euro, en contribuant à alimenter les craintes de déflation, mais elle agira, même dans cette région, favorablement sur la consommation et l’investissement. À supposer que le baril se maintienne à son niveau actuel, la baisse déjà observée à partir du prix moyen de la période 2013-mi 2014 pourrait apporter une contribution positive de +0,4 pp, en moyenne, au PIB des pays développés d’ici un an (même si nous avons retenu des hypothèses plus prudentes). La hausse du dollar est un canal par lequel la meilleure conjoncture aux États-Unis pourra se diffuser aux autres zones géographiques (via les bénéfices rapatriés des entreprises et les exportations), si tant est qu’un changement d’attitude de la Fed ne modifie pas ce mouvement. Pour la zone euro, nous avons intégré, dans nos prévisions de croissance, les ordres de grandeur calculés par l’OCDE en termes Zone euro : Indice harmonisé des prix à la consommation, à taxes constantes, % a/a 3 4 Allemagne France Italie Espagne Zone euro 3.5 3 2.5 2 1.5 1 0.5 0 -0.5 -1 10-09 02-10 06-10 10-10 02-11 06-11 10-11 02-12 06-12 10-12 02-13 06-13 10-13 02-14 06-14 10-14 En plus des taux durablement bas dans le monde développé, la baisse des prix du pétrole sera un facteur de soutien additionnel. La hausse du dollar permettra également un certain rééquilibrage des dynamiques de croissance entre grandes zones économiques. Source : Eurostat, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 23 11 # Novembre 2014 1,6 Inflation zone euro 0,3 0,7 1 0,9 0,9 Niveau du PIB États-Unis -0,1 -0,2 -0,2 -0,3 -0,3 Inflation États-Unis -0,1 -0,1 -0,1 -0,2 -0,3 Source : Modèle Global OCDE, mai 2010 2015 n’en sera pas moins jalonné de défis et d’obstacles : craintes de « stagnation séculaire » et pressions déflationnistes 10% 75% 0% 70% -10% -20% 65% 60% Les facteurs de soutien listés ci-dessus risquent cependant de s’avérer insuffisants face aux multiples défis de 2015 : Une perception accrue du risque de « stagnation séculaire » aux États-Unis. -30% -40% T4 2014 1,8 T4 2013 1,7 T4 2012 1,3 T4 2011 0,7 20% 80% T4 2010 Année 5 T4 2009 Année 4 T4 2008 Année 3 30% T4 2007 Année 2 85% T4 2006 Niveau du PIB zone eur o Année 1 États-Unis : taux d’utilisation des capacités et investissement en équipements T4 2005 Effet d’une baisse de 10 % du taux de change effectif nominal de l’euro 4 T4 2004 d’effet sur la croissance et l’inflation (en prenant comme base, une dépréciation de 5 % du taux de change effectif nominal de l’euro), d’ici mi-2015, à partir de son niveau moyen de 2013-mi 2014, dont environ 3 % a déjà été réalisé. Taux d'utilisation des capacités, éch gche Invest. en équipements, vol, % a/a, éch dte Source : Fed, US BEA , Recherche Amundi Aux États-Unis, la réparation des fragilités subsistant sur le marché de l’emploi (recul du taux de participation, durée moyenne du chômage et poids du temps partiel contraint toujours nettement supérieurs aux moyennes historiques) prendra du temps. La réparation du marché de l’immobilier peut, elle aussi, décevoir, notamment (mais pas seulement) parce que les capacités d’achats des jeunes générations sont obérées par le poids de la dette étudiante. Surtout, les interrogations vont rester vives, en 2015, au sujet du potentiel de croissance à long terme des États-Unis. Rappelons que la Fed n’a cessé de réviser en baisse, au cours des derniers mois, ses estimations à ce sujet (évolution guidée en partie par la faiblesse du taux de participation et le fait que la reprise actuelle s’avère moins riche en gains de productivité que celles des cycles précédents). Ces craintes sont évidemment de nature à rétroagir sur le rythme de la conjoncture, freinant, notamment, l’appétit des entreprises pour les investissements de long terme. Les interrogations vont rester vives, en 2015, au sujet du potentiel de croissance à long terme des États-Unis « Stagnation séculaire » couplée à la défl ation en zone euro. En zone euro, des questions du même type se posent (cf. nos projections de croissance et d’inflation à très long terme, encadré). Qui plus est, elles soulèvent, de façon plus aiguë qu’aux États-Unis, la question de la soutenabilité à long terme des dettes publiques (qui se sont à peine réduites malgré les politiques d’austérité des dernières années) et privées (qui restent très élevées, malgré le reflux observé dans plusieurs pays périphériques, Espagne et Irlande notamment). > Le risque de « stagnation séculaire » en zone euro Nous avons (cf. Cross Asset de septembre) construit trois scénarios de croissance à long terme à partir d’hypothèses alternatives en termes de population active, de capital physique et de productivité de ces deux facteurs). Dans notre scénario central (et même dans notre scénario optimiste) infl ation et croissance réelle ressortent plus faibles au cours de la décennie 2015-2025 qu’au cours des deux décennies 1987-2007. 5 Zone euro : crédit bancaire aux entreprises non fi nancières, % a/a 30% 25% 20% PIB réel Inflation PIB nominal 2,3% 2,5% 4,9% 10% 1987-1997 2,4% 2,7% 5,0% 5% 1997-2007 2,3% 2,4% 4,7% 0% -5% 1987-2007 15% 2008-2013 -0,3% 2,0% 1,7% 2015-25 Optimiste 1,9% 2,0% 3,9% -15% 2015-25 Central 1,2% 1,7% 2,9% -20% 2015-25 Pessimiste 0,6% 0,9% 1,5% 10-05 05-06 12-06 07-07 02-08 09-08 04-09 11-09 06-10 01-11 08-11 03-12 10-12 05-13 12-13 07-14 -10% Allemagne France Italie Espagne Zone euro Source : BCE, Recherche Amundi 24 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 France Espagne Allemagne Italie Portugal Grèce Zone euro Irlande 25 20 15 10 5 Source : Eurostat, Recherche Amundi > Des hoquets politiques significatifs toujours possibles en 2015 Prochains grands rendez-vous politiques Déc 2014 Expiration du budget temporaire aux États-Unis Février 2015 Élection présidentielle en Grèce Mars 2015 Expiration du plafond de la dette aux États-Unis Mai 2015 Élections générales au Royaume-Uni Octobre 2015 Élections générales au Portugal Novembre 2015 Élections générales en Espagne Mars 2016 Élections générales en Irlande La perception du risque de stagnation seculaire peut rétroagir sur la conjoncture • Aux États-Unis, après la période d’accalmie observée depuis les tensions au sujet du budget de fin 2013, un risque (limité) existe que surviennent de nouveaux blocages politiques, entre la Présidence et le Congrès après la victoire des Républicains aux élections de mi-mandat. 0.6% Conso. privée Invest. résid. Invest. productif Dépense publique Exportations nettes Autres PIB 0.5% 0.4% 0.3% 0.2% 0.1% 2016* 2015* -0.1% 2014* • Enfin rappelons qu’en Italie, la majorité politique reste fragile et confrontée à des défis importants (réforme des institutions politiques et du marché du travail, qui vont se poursuivre en 2015) tandis qu’en France, sans que le risque soit de même nature compte tenu de la stabilité des institutions politiques, le gouvernement peut également avoir à composer avec une majorité de plus en plus réduite. Dans ces deux pays, de même qu’en Allemagne, les milieux d’affaires pourraient s’inquiéter d’une poursuite de la progression des forces politiques hostiles à l’euro. États-Unis : contributions à la croissance du PIB, pp, *nos prévisions après 2013 2013 • Après les élections au Royaume-Uni, en cas de victoire des Conservateurs, le débat au sujet du référendum à propos du maintien du pays au sein de l’UE peut s’intensifier, source d’incertitude pour le climat des affaires, surtout si l’avancée de ce dossier se fait dans un climat de conflits et de blocages avec les autres États européens. 7 2012 • En ce qui concerne l’élection présidentielle grecque, rappelons que l’obtention de la majorité requise parmi les députés (180/300) n’est pas acquise. Faute de majorité, la constitution prévoit une nouvelle élection générale alors que la gauche radicale est, aujourd’hui, en tête des sondages. Son arrivée au pouvoir serait de nature à générer de nouvelles incertitudes concernant l’avenir de ce pays dans la zone euro, avec un risque de contagion à d’autres États membres. Dans une moindre mesure, les élections au Portugal (voire en Espagne) peuvent aboutir à l’émergence de majorités politiques fragiles, ou cherchant à remettre en cause une partie des réformes des dernières années, générant des tensions avec le reste de la zone euro. Source : US BEA, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 25 10-14 02-14 06-13 10-12 02-12 06-11 10-10 02-10 06-09 10-08 02-08 06-07 0 10-06 Enfin, si les secousses géopolitiques susceptibles, comme l’a fait la crise ukrainienne en 2014, de générer des chocs économiques sont, par nature, diffi ciles à prévoir, rappelons qu’il y aura, en 2015, quelques grands rendez-vous politiques (voir tableau ci-dessous), dont certains sont de nature à causer des épisodes de stress financiers et économiques. 30 02-06 Au Japon, malgré les récentes mesures monétaires supplémentaires, les effets négatifs de la hausse de TVA d’avril 2014 peuvent se prolonger en 2015, pénalisant la crédibilité de la politique d’Abenomics et hypothéquant l’atteinte de la cible d’inflation de la BoJ. Un tel développement serait préjudiciable à la reprise de l’investissement des entreprises. La confirmation (prévue à la fi n de cette année) de la seconde hausse de TVA qui doit, en principe, intervenir en octobre 2015, pourrait constituer un frein supplémentaire. Zone euro : taux de chômage 06-05 Risques spécifiques liés aux hausses de TVA au Japon 6 10-04 Ces craintes ne peuvent qu’être renforcées par l’accentuation prévisible des pressions défl ationnistes, dont les grands déterminants (réduction des capacités excédentaires, poursuite de la nécessaire consolidation de l’immobilier dans plusieurs pays après les excès de la décennie précédente, marchés de l’emploi toujours dégradés, nécessaire réduction de l’endettement public et privé, voire effet défl ationniste de réformes structurelles pourtant vertueuses à long terme) vont subsister en 2015 et au-delà. 11 # Novembre 2014 0.2 0.2 0.1 0.1 0.0 Le soutien apporté par les politiques monétaires va s’intensifier en zone euro et au Japon, rester important aux États-Unis. -0.1 - En zone euro, la direction de loin la plus probable est celle du déploiement de nouveaux instruments : alors que les annonces de 2014 (TLTRO, ABS/Covered) s’avéreront probablement insuffisantes face à la menace déflationniste, il n’y aura sans doute pas d’autre choix que de surmonter les obstacles politiques et institutionnels qui empêchent encore l’annonce d’un plan d’achats d’obligations souveraines. Un tel dispositif pourrait d’ailleurs également être déployé en urgence, dans la logique « OMT » définie à l’été 2012, en cas de hausse des spreads souverains liée à une résurgence des interrogations des marchés concernant la soutenabilité de la dette de certains pays. -0.2 Conso. priv. FBCF Conso. publ. Exportations nettes Autres PIB -0.1 -0.2 2016* 2015* 2012 -0.3 2014* Face à ces fragilités et embûches, le policy mix ne restera pas inchangé Zone euro : contributions à la croissance du PIB, pp, * nos prévisions après 2013 8 2013 D’une façon plus générale, le monde développé n’est pas immunisé face aux risques en provenance des pays émergents. Via le canal des exportations, la diffusion d’un éventuel ralentissement des économies émergentes aux pays développés serait, certes, probablement différée et d’ampleur limitée (une étude réalisée par la Commission européenne à l’automne 2013 estimait qu’un ralentissement des émergents de 0,9 pp réduirait de 0,1 pp le PIB de l’Union Européenne après un an). Cependant, la contagion via d’autres canaux, ceux de la confiance et du stress financier, en particulier, pourrait être beaucoup plus importante. Source : Eurostat, Recherche Amundi - Aux États-Unis, l’accroissement des doutes sur la solidité de la reprise et sur le potentiel de croissance à long terme (couplés, éventuellement, à une montée des préoccupations liées à la hausse du dollar) plaide pour un décalage du calendrier du resserrement (dont le début était, jusqu’il y a peu, attendu pour mi-2015). Sans être le scénario le plus probable, le déploiement d’un nouveau plan d’achats d’actifs ne peut être catégoriquement exclu en cas de ralentissement marqué du momentum économique, de chocs externes ou de forte appréciation du dollar, éléments non mutuellement exclusifs les uns des autres). La déflation soulève la question de la soutenabilité des dettes publiques - Au Japon, de nouvelles mesures de politique monétaire pourraient être déployées, en plus de celles annoncées récemment, en cas de rechute de l’inflation ou de façon à mitiger l’effet de la seconde hausse de TVA, si elle est confirmée. > Les craintes de déflation poussent la Banque du Japon à de nouveaux gestes Le 31 octobre, la Banque du Japon a de nouveau annoncé des mesures d’assouplissement quantitatif. Elle craint que les prix ne repartent à la baisse. Le risque déflationniste n’a donc pas disparu. La BoJ souhaite : 2014 (prévision) 2 0 -2 -4 • 25 % d’actions étrangères (contre 16 % mi-septembre et un précédent benchmark à 12 %) ; -6 • 35 % d’obligations japonaises (contre 50,7 % mi-septembre et un précédent benchmark à 60 %) ; -10 Espagne -8 Etats-Unis • 15 % d’obligations étrangères (contre 14,8% mi-septembre et un précédent benchmark à 11 %). 2009 4 Italie • 25 % d’actions japonaises (contre 17.3 % mi-septembre et un précédent benchmark à 12 %) ; 6 France Dans le même temps, le fonds de pension japonais (GPIF) a révélé son allocation d’actifs actuelle et sa nouvelle cible : Solde primaire ajusté du cycle, % du PIB Allemagne • Acheter des ETF et des actifs immobiliers (J-Reits) pour faire accroître le stock actuel de 3 Trln ¥ (un rythme donc trois fois supérieur au rythme actuel). 9 Roy.-Uni • Accroître ses achats de JGBs (passer à un rythme d’environ 80 Trln ¥ contre 50 Trln ¥ actuellement) et la maturité de ces actifs (désormais entre 7 et 10 ans, soit une hausse de près de 3 ans par rapport à sa stratégie actuelle) ; Japon • Faire progresser la base monétaire à un rythme annuel d’environ 80 Trln ¥, contre 60/70 Trln actuellement ; Source : OCDE, Recherche Amundi 26 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 Les décisions de GPIF ne sont pas anodines car, outre sa taille, les autres fonds de pension ont tendance à copier ses grandes tendances : les mouvements en faveur des actions japonaises excèderont sans aucun doute les 10 Trln ¥, soit plus de 100 Mds $. Idem pour les actions étrangères. GPIF réduit donc fortement son exposition aux obligations japonaises au profit des actions, mais on notera que les achats de la BoJ font plus que compenser cette baisse. Plus que jamais, la BoJ reste l’acheteur en dernier ressort des JGBs. Au total, les nouvelles mesures d’assouplissement de la BoJ (achats de JGB et d’ETF) et les annonces de GPIF (moins d’obligations et davantage d’actions) restent des soutiens aux marchés d’actions japonais, et au dollar contre le yen. Surtout, les fragilités de l’économie mondiale généreront un changement d’attitude budgétaire, bénéfique pour la croissance. Si une réduction de l’austérité est acquise, une évolution vers de véritables mesures de relance est également possible. Alors que les banques centrales ont massivement œuvré pour soutenir la reprise mondiale, les appels se sont multipliés en 2014 (de la part, notamment, de la BCE pour la zone euro, du FMI à l’échelle du monde) en faveur d’un policymix intégrant des politiques budgétaires plus favorables pour la croissance. Ces appels se font d’autant plus pressants que les surprises négatives les plus récentes en matière de croissance se sont focalisées sur des pays (l’Allemagne notamment) qui ne sont pas confrontés à des problèmes de taux nominaux ou réels trop élevés et pour lesquels la politique monétaire ne semble pas l’élément de soutien le plus approprié. En zone euro, une première étape semble acquise à ce sujet : le recul des politiques d’austérité, déjà observé en 2014, va se poursuivre. En Italie, les objectifs de coupes de dépenses publiques ont été révisés en baisse tandis qu’en France, pays venu tardivement à l’austérité, les cibles annoncées ne seront probablement pas atteintes. Dans ces deux pays, les gouvernements choisissent de laisser jouer les « stabilisateurs automatiques », s’abstenant de compenser par de nouvelles coupes de dépenses le manque à gagner, en termes de recettes, lié à la mauvaise conjoncture. Dans d’autres pays périphériques (Espagne, Irlande et même Grèce), la « fatigue de l’austérité » couplée aux progrès indéniables de l’ajustement et, dans certains cas, à une logique électoraliste en prévision des élections de 2015 ou 2016, conduit à un relâchement des efforts. À lui seul, ce facteur de « moindre austérité » influera positivement sur la croissance en 2015 et, probablement, en 2016. Les fragilités de l’économie mondiale généreront un changement d’attitude budgétaire, bénéfique pour la croissance L’avènement d’une seconde étape, constituée par une relance budgétaire proactive, reste plus incertain : en Allemagne, le débat progresse sur des mesures de relance budgétaire portant sur les infrastructures. Des décisions à ce sujet sont probables en 2015, mais elles n’auront sans doute pas une ampleur suffisante pour stimuler l’économie des pays voisins de façon tangible. Le thème d’un véritable plan de relance des infrastructures à l’échelle européenne va probablement progresser, tant un tel développement est aujourd’hui largement perçu comme combinant les avantages d’un soutien à la demande à court terme et au potentiel de croissance à long terme. Certes, un tel programme pourrait ouvrir des possibilités intéressantes (notamment via d’éventuels schémas mixtes, encore peu clairs à ce stade, combinant politiques monétaires et budgétaires). Néanmoins, alors que les divergences de vue entre États européens restent très fortes à ce sujet, sa mise en place demandera du temps et il est peu probable de le voir déployé assez tôt pour générer des effets directs substantiels dès 2015 (même si quelques effets de confiance liés à son annonce ne peuvent être exclus. Aux États-Unis également, la direction générale est probablement celle d’une moindre austérité, alors que la réduction du déficit public a été plus rapide que prévu (le déficit fédéral, qui atteignait près de 10 % du PIB en 2009, est tombé à 2,8 % en 2014) et que les deux principaux partis politiques s’efforceront probablement de plaire à leurs clientèles électorales au cours des deux années qui précéderont la présidentielle de fin 2016. Il est néanmoins trop tôt pour dire si cet assouplissement graduel prendra plutôt la forme de baisses d’impôts (chères aux Républicains) ou, plutôt, de relance des infrastructures (projets qui pourraient trouver des soutiens au sein des deux partis). Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 27 11 # Novembre 2014 Aussi, si les facteurs d’amélioration observables fin 2014 risquent de s’avérer insuffisants, à eux seuls, pour franchir les obstacles que rencontreront les économies développées en 2015, les policy mix, tant monétaires que budgétaires, vont évoluer. Au final, ce sont bien ces perspectives d’efforts accrus de la part des banques centrales et des gouvernements qui nous incitent à privilégier une direction légèrement positive pour l’économie mondiale en 2015 et, par extension, en 2016, avec, toujours, une reprise soutenue mais sans accélération spectaculaire aux États-Unis et une réparation économique très lente, n’accélérant que de façon modérée en 2016, pour la zone euro. Les principaux risques susceptibles de remettre en cause ce scénario sont l’installation d’un processus de déflation auto-entretenue en zone euro et la survenance d’un choc de croissance ou de confiance en provenance des pays émergents. La dynamique de l’immobilier résidentiel restera un facteur essentiel de différenciation des rythmes économiques entre pays développés > La dynamique de l’immobilier résidentiel, facteur clef de différenciation des rythmes économiques En 2015, l’immobilier résidentiel jouera positivement sur la croissance économique aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Allemagne et en Espagne… malgré des positions très différentes en termes de cycle ! Il risque de rester un facteur négatif, en revanche, en France et en Italie. L’état du marché immobilier résidentiel est un facteur clef de différenciation, en matière de conjoncture, entre les pays développés, la hausse des prix des logements jouant positivement sur la confiance des ménages et, directement, sur la croissance et l’emploi via la construction. 10 300 250 Logements : ratio prix/revenus, base 100 au T1 2000 Etats-Unis Allemagne Italie Espagne Japon France Royaume-Uni 200 • Aux États-Unis, le marché a repris une direction haussière depuis 2012, même si sa progression a été moins soutenue qu’attendu en 2014. • Au Royaume-Uni, les autorités (BoE et Trésor) ont fait le choix de reflater le marché immobilier. Dans la mesure où les prix n’ont que peu consolidé avec la crise, et où les ménages restent très endettés, ce choix paraît risqué à long terme mais l’immobilier devrait tout de même constituer un facteur positif en 2015. • L’Allemagne n’a pas connu de forte hausse au cours de la décennie 2000. Taux bas et hausses des salaires soutiendront probablement l’investissement résidentiel des ménages et la construction. 150 100 50 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 • En Espagne, les prix des logements sont, très probablement, proches de leur point bas. Après avoir pesé de façon très conséquente sur le PIB depuis 2008, la construction résidentielle pourrait apporter, de nouveau, une contribution positive en 2015. Source : OCDE, Recherche Amundi • En revanche, en France et en Italie, la consolidation après l’euphorie de la décennie 2000 paraît encore insuffisante. Elle risque de se prolonger, sans phénomène de krach brutal (notamment parce que les taux resteront durablement bas et que l’endettement des ménages reste raisonnable) mais avec un effet négatif sur la conjoncture. Des mesures de soutien de la part des gouvernements (notamment en France) sont cependant probables. 28 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 4 Économies émergentes : L’essentiel les gouvernements sont désormais seuls face à leurs engagements Les économies émergentes demeureront les principales contributrices à la croissance mondiale. L’année 2014 aura été « politique » étant donné les calendriers électoraux. L’année prochaine sera celle de la mise en place des engagements pris par les gouvenements réformateurs. MARC-ALI BEN ABDALLAH, Stratégie et Recherche Économique – Paris À l’instar des années précédentes, les économies émergentes demeureront les principales contributrices à la croissance mondiale. Pour autant, les perspectives domestiques prises pays par pays sont loin d’être au beau fi xe. Ces économies poursuivront en 2015 un processus d’ajustement entamé dès 2010 visant à la fois à renforcer leur croissance potentielle, et à gérer les conséquences des déséquilibres issus de la crise de 2008. À horizon du premier semestre 2015, les deux facteurs globaux qui seront déterminants pour la réalisation de ce double objectif sont, à notre sens, le maintien des prix des matières premières à des niveaux bas et la politique de la BCE. La deuxième partie de l’année sera exposée à deux aléas différents et qui s’inscrivent dans une problématique de moyen terme : un risque de remontée de la volatilité sur les marchés de dette et un risque d’intensification du ralentissement en Chine. La première partie de l’année devrait être bien orientée pour les économies importatrices nettes de matières premières, notamment les économies émergentes d’Europe centrale et d’Asie. La seconde partie de 2015 devrait être marquée par le ralentissement chinois, entraînant une plus grande instabilité conjoncturelle pour ses principaux partenaires économiques. L’année 2014 marque la prise de conscience du besoin de réformes structurelles L’agenda politique de cette année, particulièrement chargé, a pu faire craindre un temps à une parenthèse sans grands changements de cap politique. Pour autant, cela n’aura pas été le cas. Quatre mois après les banques centrales indienne et russe, et à la suite des turbulences des marchés, la banque centrale de Turquie a choisi d’opter en janvier pour une politique de ciblage d’infl ation. Malgré l’hostilité ouverte du nouveau président Erdogan, au resserrement monétaire, Erdem Basci, (gouverneur de la banque centrale turque) aura réussi à maintenir très vraisemblablement une ligne acceptable par les investisseurs. La deuxième partie de l’année sera exposée à deux aléas différents : un risque de remontée de la volatilité sur les marchés de dette et un risque d’intensification du ralentissement en Chine En mai, se sont déroulées les élections générales en Afrique du Sud et en Inde. Les premières ont confirmé le parti au pouvoir (l’ANC) alors que les secondes ont balayé le parti du Congrès national indien qui a dominé la scène politique indienne depuis son indépendance. Depuis, un formidable espoir de renouveau de l’économie indienne est né avec l’élection de Narendra Modi. La stratégie de la nouvelle administration indienne qui se dessine depuis mai est plus une stratégie par petites touches qu’une véritable révolution. Les efforts se concentrent principalement sur la réforme d’une administration encore trop bureaucratique. Une segmentation des économies émergentes en trois blocs : un bloc Chine, un bloc Europe centrale et un bloc constitué des économies en transition Avant de rentrer plus avant dans notre scénario, rappelons que nos différentes études relatives à la segmentation des pays émergents ont mis en lumière une répartition des économies émergentes assez simple en trois blocs (cf. Cross Asset septembre 2014 « Une approche globalisée de la classification émergente »). Un bloc Chine regroupant la Chine et ses principaux partenaires commerciaux dont, entre autres, la Corée du Sud, Taïwan ou la Malaisie. Le deuxième bloc, constitué des économies d’Europe centrale. Enfin un bloc 1 2015 : prévisions de croissance et infl ation /E Zh Inflation En juillet, les élections en Indonésie ont porté au pouvoir le candidat réformiste de l’opposition, Joko Widodo. L’économie indonésienne a d’importants besoins en infrastructures qui ne pourront être financés qu’à la condition de réduire les subventions des prix du carburant qui représentent 9 % du budget de l’État et coûtent au pays environ 3 points de PIB. Enfin en octobre, les élections au Brésil se sont soldées par la réélection de Dilma Rousseff après que cette dernière ait effectué un virage électoraliste marqué. Nous pensons que ceci ne changera qu’à la marge la conduite de la politique économique au Brésil. La stabilisation des anticipations d’inflation demeure la priorité. dZ / Z Dz Dy > K ZK ,h W, <Z E W W> Croissance 6RXUFH'DWDVWUHDP5HFKHUFKH$PXQGL Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 29 11 # Novembre 2014 constitué des économies en transition : les économies exportatrices de matières premières telles que la Russie ou les économies minières d’Amérique Latine (Chili, Colombie, Pérou) en mal de diversification de leur offre, et les économies à fort déficit courant comme l’Afrique du Sud, la Turquie ou le Brésil. 2 > Pourquoi les économies émergentes ont-elles très souvent déçu depuis 2011 ? Dans son document de perspectives économiques du mois d’octobre 2014, le FMI est revenu sur les raisons des écarts signifi catifs entre ses projections de croissance et les croissances effectives des économies émergentes. Première observation, les prévisions du FMI comportaient un biais optimiste ; en d’autres termes les prévisions étaient plus élevées que les croissances réalisées. Ce biais a été d’autant plus dommageable que, sur la période, les économies émergentes représentent 80 % de la croissance mondiale. Seconde observation, les erreurs concernant les émergents sont en moyenne presque le double de celles observées pour les économies avancées, alors que la période est marquée par une intensifi cation de la crise souveraine européenne et une catastrophe naturelle d’ampleur au Japon. Une analyse post-mortem fait apparaître que c’est essentiellement l’investissement, notamment au Brésil, en Inde et en Russie qui a été surestimé. Ce sont bien des facteurs domestiques mal identifi és qui expliqueraient l’essentiel de ces contreperformances. Il est intéressant de noter que parmi les trois économies présentant les plus forts écarts, deux sont des producteurs de matières premières : le Brésil et la Russie. Ceci soulève un certain nombre d’interrogations, notamment quant à l’existence de surcapacités, étant donné la tendance post-crise de 2008 à la défl ation des prix des matières premières. 1 Prix moyen du brut permettant d’assurer à une économie pétrolière son équilibre budgétaire. 2 Prix du Brent. 30 %UpVLO 5XVVLH ,QGH &KLQH $XWUH 6RXUFH)0,5HFKHUFKH$PXQGL La baisse récente des matières premières est durable car elle reflète une appréciation tendancielle du dollar Le choc récent sur les matières premières est un ajustement durable à la baisse. Il reflète à la fois un excédent d’offre, la hausse tendancielle du dollar et des attentes de performances économiques moindres pour les économies émergentes. Il est bien évidemment pénalisant pour les économies émergentes exportatrices nettes de matières premières notamment les économies pétrolières : Russie, économies du Moyen-Orient, économies d’Afrique (Nigeria, Angola). Toutefois, si l’on suppose un apaisement progressif des tensions géopolitiques actuelles, dont le principal foyer se situe au MoyenOrient, ce choc ne devrait être que temporaire. Avec une croissance quasi-nulle, la Russie fait figure d’exception puisque nous y anticipons une stabilisation de la consommation, dans un contexte de normalisation très progressive des relations avec l’Europe. Ceci devrait permettre à la Russie d’éviter une croissance nulle en 2015. Les perspectives au-delà restent très moroses en l’absence de reprise de l’investissement. La Banque mondiale prévoit pour cette économie une stagnation prolongée jusqu’au moins 2016. La baisse des prix des matières premières est synonyme de dégradations macroéconomiques pour les pays exportateurs de matières premières… Néanmoins, cet ajustement aura un coût pour les économies pétrolières qui devrait se matérialiser par une détérioration significative des équilibres fiscaux, ceci au cours de 2015, en raison de la hausse des points morts fiscaux1. Nous projetons un prix du baril de brut 2 en moyenne autour de 90 $ en 2015 (prix moyen du brut à 100 $ en 2014). Ce niveau de prix est problématique pour des économies telles que l’Irak, le Nigeria et surtout le Venezuela auquel les marchés associent un risque de défaut souverain imminent. Il l’est, cependant, nettement moins pour des économies pétrolières comme la Russie ou les principaux producteurs du Moyen-Orient qui disposent de plus de marges de manœuvres fiscales. Nous projetons un tassement de la croissance pour ces économies en 2015. FMI : erreurs de prévision (2011-14) 3 Russie : defi cit primaire (% PIB) contre prix du brut (Brent) (Brent) 3UL[GXEUXW%UHQWUHWDUGpWULP 'pILFLWSULPDLUH3,%PR\HQQHWULP(FK' 6RXUFH'DWDVWUHDP5HFKHUFKH$PXQGL Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 … de coup de pouce pour les importateurs… La baisse des prix des matières premières n’a, toutefois, pas été une perte sèche pour toutes les économies émergentes. Elle est un véritable coup de pouce aux économies importatrices nettes de matières premières. C’est, en premier lieu, une facture énergétique moins élevée qui devrait permettre un redressement des soldes commerciaux des économies d’Asie émergentes et d’Europe. C’est, en second lieu, un facteur de soutien à la compétivité pour les économies du « bloc Chine » dont les devises sont plus ou moins ancrées au dollar. Pour ces dernières, l’appréciation de la devise américaine reste pénalisante. On observe que leurs taux de change effectifs réels sont entre 5 et 10 % au-dessus de leur niveau moyen de la période 2010-2014. Plus généralement, cette baisse des prix des matières premières est un supplément de pouvoir d’achat pour les consommateurs ce qui, du point de vue des économies émergentes, signifie une bonne tenue de leur consommation domestique et probablement une hausse de la demande externe (en provenance des économies avancées). Taux de change effectifs réels (ratio moyenne 5 ans) 4 &KLQH &RUpHGX6XG 7&(5PR\HQ ... et de marges de manœuvres appréciables pour les banques centrales… Le dernier volet de l’impact macroéconomique de la baisse des prix des matières premières est l’infl ation. Sur ce front, la situation actuelle ne devrait pas radicalement changer l’année prochaine. L’infl ation est une variable économique discriminante pour ces économies. En l’absence de ralentissement, les disparités entre des économies à forte inflation et des économies en pré-déflation devraient perdurer tout au long de 2015. 7DLZDQ 0DODLVLH 6RXUFH'DWDVWUHDP5HFKHUFKH$PXQGL Le contexte inflationniste est très asymétrique : les pays à forte inflation vont bénéficier de la baisse du prix des matières premières Les économies à forte, voire très forte infl ation, comptent principalement des économies aux prises avec des déséquilibres d’ampleur : Turquie (+8,9 %), Afrique du Sud (+5,9 %), Brésil (+6,8 %) ou d’économies en transition telles que la Russie (+8 %) ou l’Inde (+6,8 %). À l’exception de la Russie et de la Turquie où les cibles d’infl ation sont respectivement de 4,5 % et 5 % en 2015, la plupart de ces économies se trouvent proches de leurs cibles officielles 3. Pour ces économies, à l’exception des économies exportatrices peu diversifi ées comme la Russie, la baisse des prix de l’énergie et des matières premières est une bonne nouvelle pour 2015. Elle diminue le risque que la banque centrale poursuive ou reprenne un resserrement monétaire qui viendrait briser des demandes domestiques déjà fragilisées. Le Brésil est une illustration parfaite de ce cas de figure. La reprise du cycle de resserrement risque de peser sur les perspectives de croissance. Le début d’année sera donc assez difficile pour l’économie brésilienne, mais l’ouverture de secteurs domestiques aux investisseurs étrangers devrait permettre de relancer l’investissement. ... dans un contexte de risque inflationniste asymétrique Marges de manoeuvre de politique économique 5 Solde fiscal % du PIB A contrario, à l’autre bout du spectre, l’effondrement des taux d’inflation en Europe centrale (Pologne : -0,3 %, République Tchèque : +0,7 %, Hongrie : -0,5 %) est préoccupant. Les écarts aux cibles des banques centrales sont importants. Ils se situent entre 2 et 3 %. Des taux d’infl ation durablement bas vont peser sur la demande domestique via divers canaux que sont le report de consommation dans un univers à prix en baisse, la baisse de la demande de crédit en raison de taux réels jugés trop élevés 4, ou la hausse du chômage comme expédient pour abaisser les coûts salariaux. En Europe centrale, la situation est d’autant plus délicate que peu de pays disposent de véritables marges de manœuvre. En moyenne, l’épargne brute n’est pas très élevée : elle représente 18 % du PIB contre 26 % dans les principales économies émergentes, et le stock de dette y est élevé (entre 40 et 75 % du PIB contre 37 % pour les économies émergentes). Une mesure empirique simple de ces marges de politique économique consiste à croiser les taux de politique ZK d< ,h 3 Afrique du Sud intervalle cible inflation 3 % - 6 %, Brésil cible d’inflation : 4,5 % +/-2 %, Inde cible à 6 % en 2015, Pologne cible de 2,5 % +/-1%, République Tchèque cible de 2 % +/-1 %, Hongrie cible à 3 %. 4 Lorsque l’infl ation baisse, la valeur du stock de dette des ménages ou des entreprises augmente mécaniquement en termes réels. W> Zh Taux directeur ajusté de l'inflation 6RXUFH'DWDVWUHDP5HFKHUFKH$PXQGL Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 31 11 # Novembre 2014 monétaire aux soldes budgétaires (voir graphique 5). Dans cet exercice, il apparaît que seule la Pologne dispose des marges de manœuvre puisqu’elle est à l’équilibre budgétaire et que son taux directeur ajusté du taux d’inflation courant reste très largement positif, à 2,3 %. Il est donc clair que seule une expansion quantitative de la BCE permettrait à ces économies de cesser d’importer des pressions défl ationnistes d’Europe. > L’indicateur de croissance chinoise de Li Kequiang On prête au premier ministre chinois Li Kequiang d’avoir dit en 2010, lors d’une conversation avec un diplomate américain, qu’il regardait toujours les chiffres de croissance offi ciels avec un certain recul. Il aurait d’ailleurs indiqué que selon lui, le momentum économique pouvait s’évaluer de manière plus fi able via trois indicateurs que sont la consommation d’électricité, le volume de fret des chemins de fer et le volume de prêts. Un indicateur de croissance peut être construit en regardant la variation 6 mois glissant de ces trois indicateurs. Par souci d’homogénéité des grandeurs, nous regardons la variation des prêts en termes réels du volume de prêts (exprimés en yuans) puisque les deux autres variables correspondent à des volumes de marchandises (voir graphique 6). Croissance chinoise : les trois indicateurs du Premier Ministre (=100 01/2010) 6 3URGXFWLRQpOHFWULTXH )UHWIHUURYLDLUH 3UrWVHQWHUPHVUpHOV 6RXUFH'DWDVWUHDP5HFKHUFKH$PXQGL Le ralentissement de la Chine demeure le risque majeur Il est probable que nous ayons de bonnes surprises en Inde où l’infl ation devrait être jugulée. La stratégie actuelle du gouvernement, faite de successions de microréformes pourrait s’avérer payante à deux/trois ans mais probablement pas en 2015. Nous pensons que l’Indonésie peut être aussi au nombre des économies qui ont un potentiel à surprendre. Le facteur central demeure le ralentissement chinois. Ce dernier conditionne les comportements d’investissement des pays de la zone Asie émergente à l’instar de la Corée ou des pays producteurs de matières premières. Il n’est donc pas étonnant par exemple que l’investissement ait surpris à la baisse au Brésil et en Russie entre 2011 et 2014. Que peut-on dire du ralentissement en cours en Chine ? Rappelons tout d’abord que les autorités tentent de le piloter en continuant d’utiliser des mesures de stimulus ciblées. L’option d’un assouplissement monétaire d’ampleur reste impossible dans la mesure où le risque d’excès dans le secteur de l’immobilier est probablement important. La problématique est plus importante qu’elle n’y paraît de prime abord. Elle comporte une composante stabilité fi nancière qui est assez aisément gérable à moyen terme du fait de l’importance de ses réserves de change). En cas de besoin de capitalisation d’une banque, un des fonds souverains chinois pourra fournir tout le capital nécessaire pour une remise à flot de l’établissement bancaire concerné. Par ailleurs, la Chine s’est lancée dans une réforme fiscale d’ampleur qui permettra à terme aux provinces d’émettre leur propre dette. En cas de difficulté d’un établissement financier, la province pourra aussi pourvoir aux besoins en capitaux. Ceci étant, les aspects de stabilité ne concernent pas que l’économie chinoise. Les marchés des capitaux en Asie, notamment ceux de la dette corporate, sont exposés au ralentissement chinois. Ce contexte rend très peu probable une envolée des taux longs américains. En effet, la demande d’obligations du Trésor de la part des investisseurs asiatiques risque de rester soutenue face aux incertitudes liées à la correction immobilière en cours en Chine. Nous anticipons en 2015 un tassement plus marqué de la conjoncture chinoise qui se traduira d’abord par plus de volatilité économique de la part de ses principaux partenaires (Corée, Taïwan, Malaisie) et ensuite par une poursuite de la baisse des prix des matières premières, notamment des métaux. Ce risque sera sans aucun doute le plus délicat à gérer en 2015. La possibilité d’un assouplissement d’ampleur en Chine est écartée en raison des risques sur la stabilité financière 7 Chine : Taux de réserves obligatoires (TRO) 7DX[G LQIODWLRQpFKJDXFKH 9DULDWLRQP752 6RXUFH'DWDVWUHDP5HFKHUFKH$PXQGL 32 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 5 L’euro continuera à se déprécier en 2015 L’essentiel BASTIEN DRUT, Stratégie et Recherche Économique – Paris L’appréciation du dollar aura attendu l’été pour se produire mais aura finalement été très forte. Le changement d’attitude de la BCE a eu un impact fortement négatif sur l’euro en 2014. L’appréciation du dollar s’est fait attendre mais a finalement été trop rapide Il y a un an, nous indiquions que nous attendions une appréciation du dollar par rapport aux devises développées sur 2014. Cette appréciation aura attendu l’été pour se produire, mais a été finalement été trop rapide, au point de mettre en péril les perspectives d’inflation américaine et de peut-être retarder le cycle de resserrement de fed funds. Le mouvement d’appréciation du dollar a coïncidé avec une forte dépréciation de l’euro, avec les annonces lourdes prises par la BCE. Globalement, sur l’année 2014, les devises asiatiques sont restées au contact du dollar en termes nominaux alors que les devises européennes (à l’exception de la livre) ont toutes décroché. Devises QE contre devises non-QE Sur les quatre principales devises développées, deux (l’euro et le yen) seront associées en 2015 à une banque centrale poursuivant une politique de quantitative easing, alors que les deux autres (le dollar et la livre) seront associées à une banque centrale ayant arrêté sa politique de quantitative easing. Cela reflète évidemment une divergence en termes de performances économiques : la croissance s’est bien reprise aux États-Unis et au RoyaumeUni et le chômage y a fortement baissé alors que la zone euro et le Japon restent englués dans une problématique déflationniste. La thématique du QE restera déterminante pour l’évolution des taux de change en 2015 : l’euro et le yen devraient continuer à se déprécier face au dollar et à la livre. La parité EUR/USD devrait converger vers 1,20 et pourrait même aller plus bas si la BCE adoptait une position encore plus agressive qu’actuellement. Effectivement, le swap d’inflation 5 ans dans 5 ans, que Mario Draghi a défini à Jackson Hole comme étant la mesure des anticipations d’inflation de moyen terme suivie par la BCE, a accéléré sa chute en octobre 2014 alors que les membres du conseil des gouverneurs n’ont eu de cesse à l’automne de rappeler que la BCE irait plus loin si les perspectives d’inflation de moyen terme se détérioraient. Il convient de mentionner que, malgré la baisse récente de la parité EUR/USD, le dollar n’est pas trop fort en soi (cf. encadré). À l’exception de la livre, les devises européennes resteront ancrées à l’euro et devraient donc se déprécier face au dollar. Nous avons toutefois des préférences intrazone. La couronne suédoise pourrait, elle, perdre du terrain face à la devise européenne car la Riksbank pourrait adopter une politique plus forte afin de lutter contre la déflation. En revanche, le forint hongrois et le zloty polonais pourraient bénéficier de flux entrants grâce à deux taux encore intéressants contre des taux de dépôts négatifs en zone euro. 1 Variation des devises par rapport au dollar en 2014 (au 20 octobre 2014) 2% 0% -2% -4% -6% -8% -10% -12% INR IDR KRW CNY JPY AUD GBP MXN NZD BRL TRY CAD ZAR CHF EUR NOK PLN SEK En réalité, le marché des changes a plus que jamais été dicté par les décisions de politique monétaire et cela restera le cas en 2015. En 2015, l’euro et le yen, zones de quantitative easing, devraient se déprécier face au dollar et à la livre sterling. Les devises « matières premières » devraient, quant à elles, continuer à souffrir. Source : Datastream, Recherche Amundi La parité EUR/USD devrait converger vers 1,20 Taille des bilans de banques centrales (en % du PIB) 2 70% BoE Des devises matières premières vont rester à la peine 60% Les dollars australien, canadien et néo-zélandais resteront à la peine en 2015 face au dollar américain, notamment en raison de la pression baissière sur les prix des matières premières liée au ralentissement de l’économie chinoise. En Australie, la RBA gardera ses taux inchangés en 2015, avec un biais accommodant, à cause de la dégradation des conditions sur le marché du travail. Toutefois, il faut souligner que le dollar australien reste surévalué d’environ 5 % en termes effectifs selon le principal modèle suivi par la RBA, qui conservera une communication offensive sur la valeur de la devise australienne. 50% En Nouvelle-Zélande, la RBNZ devrait poursuivre sa politique de resserrement monétaire, sur un rythme plus lent qu’en 2014 mais les autorités néozélandaises sont déterminées à faire baisser la devise (« Why the NZ exchange rate is unjustified and unsustainable », RBNZ, septembre 2014). 0% Fed BCE 40% BoJ 30% 20% 2014 2013 2012 2011 2010 2009 2008 2007 10% Source : Datastream, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 33 11 # Novembre 2014 Au Canada, la BoC gardera probablement son taux directeur à 1 %, en raison de la faiblesse de la croissance : marché immobilier fortement surévalué et qui ralentit, investissement qui stagne, compétitivité dégradée à cause de l’appréciation du dollar canadien sur les années 2000. Le dollar canadien devrait continuer à baisser face au billet vert. 3 AUD, CAD, NZD vs USD et indice matières premières CRB (100 en janvier 2007) 160 150 140 > Le dollar n’est pas fort en soi mais… 130 120 100 CRB 90 AUD 80 NZD 10-15 01-14 08-14 03-15 02-11 09-11 04-12 12-09 07-10 10-08 05-09 11-12 06-13 CAD 70 Source : Datastream, Recherche Amundi 1973 1975 1977 1979 1981 1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 États-Unis : taux de change réel effectif Le taux de change réel effectif (100 = moyenne de long terme) calculé par la Fed n’a pris que 6,3 % depuis son plus bas 140 historique de juillet 2011 et se situe encore plus de 10 % sous 130 Taux de change réel effectif sa moyenne de long terme. Moyenne de long terme Son r y thme de progression 120 paraît même plutôt lent. La spectaculaire appréciation du 110 dollar contre l’euro et le yen masque d’autres phénomènes t r è s l o u r d s . D e p u i s 20 0 8 , 100 le renminbi est la devise la plus importante du panier de 90 devises de la Fed, or celuici s’est apprécié d’environ 80 19 % contre le dollar depuis cette date, rien qu’en termes Source : Fed, Recherche Amundi nominaux ! Il faut, de plus, prendre en compte les écarts d’infl ation : dans les pays asiatiques hors Japon et les pays d’Amérique latine, soit plus de la moitié du panier de devises de la Fed, l’inflation a été bien plus forte qu’aux États-Unis lors de la dernière décennie. Les zones à infl ation égale ou plus faible (Europe, Canada, Japon) n’ont cessé de décliner dans le panier de devises de la Fed. En conclusion, établir le diagnostic que le dollar serait fort aujourd’hui en ne considérant que l’appréciation récente du dollar par rapport à l’euro, au yen et au dollar canadien serait une erreur. 110 01-07 08-07 03-08 La Fed calcule chaque mois un taux de change effectif réel, dont l’historique est disponible depuis 1973. Elle met à jour chaque année les poids de chaque devise, afi n de prendre en compte l’évolution de la structure des échanges commerciaux des États-Unis. Ces poids ont fortement évolué dans le temps : la part de l’euro a baissé de 21,1 % en 1973 contre 16,2 % en 2014. De même, le poids du Canada et du Japon dans le panier de devises ont baissé respectivement de 20,7 à 12,6 % et de 17,4 à 7,5 % entre 1973 et 2014. A contrario, la part de la Chine est passée de 1 % en 1973 à 20,8 % en 2014. Toutefois, même si le dollar n’est pas fort en soi aujourd’hui, sa hausse, qui coïncide avec une baisse du prix des matières premières est venue écorner encore un peu plus les perspectives d’infl ation américaine et peut-être retarder la remontée des fed funds. À plusieurs reprises, les membres du FOMC ont rappelé en octobre (par exemple, Stanley Fischer, vice-président de la Fed, « The Federal Reserve and the Global Economy », 11 octobre) que la normalisation des fed funds ne pourrait intervenir que si la Fed pouvait avoir confi ance dans les perspectives d’infl ation. Cet affaiblissement de l’infl ation tombe mal car malgré les améliorations cycliques indéniables sur le marché du travail, l’infl ation salariale reste aux abonnés absents : les salaires réels continuent de stagner, ce qui empêche de penser que l’infl ation se maintiendra aux alentours de la cible de 2 %. 34 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 6 Des taux durablement bas L’essentiel dans le monde développé BASTIEN DRUT, Stratégie et Recherche Économique – Paris PHILIPPE ITHURBIDE, Directeur Recherche, Stratégie et Analyse – Paris Les taux développés ont fortement baissé en 2014, contrairement aux prévisions de tous les analystes. Les taux développés ont nettement baissé en 2014 150 100 50 0 -50 Source : Bloomberg, Recherche Amundi Le cycle de remontée des fed funds sera lent 2 Taux 10 ans US et variation des bilans de banques centrales (Fed, BCE, PBoC, BoJ) 5.5 70% 5 60% 4.5 50% 4 40% 3.5 30% 3 20% 2.5 10% 2 Taux 10 ans US 1.5 0% -10% 2014 2013 2012 2011 1 2010 Var. sur un an du bilan des BC 2009 Si la Fed a arrêté sa politique de QE en octobre, il ne faut pas perdre de vue que les trois autres grandes banques centrales (PBoC, BCE et BoJ) continueront de faire gonfler leur bilan sur l’année 2015 au moins, si bien que la liquidité continuera de croître à un rythme rapide au niveau mondial. Cela continuera à peser sur les taux longs des pays développés. Ces dernières années, chaque période d’augmentation rapide des bilans de banques centrales s’est traduite par un mouvement baissier généralisé sur les taux longs des pays développés (cf. graphique). 200 2008 Les liquidités resteront abondantes au niveau mondial 250 2007 Enfi n, la Fed elle-même a acté le fait que la croissance potentielle américaine était sensiblement plus faible qu’auparavant : elle a dégradé sa prévision de croissance de long terme cinq fois de suite pour la porter à 2,1 % en septembre. La faible amplitude et la lenteur du prochain cycle de resserrement monétaire de la Fed borneront la montée des taux longs, qui dépendent en théorie du chemin des taux courts réels futurs. Etats-Unis Royaume-Uni Canada Australie Suède Euribor Japon Suisse 2006 De plus, nous butons aujourd’hui sur le fait qu’il est très difficile pour les États-Unis de connaître une amélioration cyclique et d’envisager un cycle de resserrement monétaire de façon isolée. Puisque la Fed envisage une normalisation de sa politique monétaire alors que plusieurs banques centrales majeures se dirigent vers un assouplissement de leur politique monétaire, le dollar a entrepris un mouvement d’appréciation très rapide depuis l’été 2014. Même si le dollar n’est pas fort en soi aujourd’hui (le taux de change réel effectif est encore plus de 10 % inférieur à sa moyenne de long terme), la hausse du dollar, qui coïncide avec une baisse du prix des matières premières est venue écorner encore un peu plus les perspectives d’inflation américaine. C’est que, malgré les améliorations cycliques indéniables constatées sur les marchés du travail britannique et américain, l’inflation salariale reste aux abonnés absents : les salaires réels continuent de stagner, ce qui empêche toute accélération trop rapide de l’inflation. 300 DEC 14 MAR 15 JUN 15 SEP 15 DEC 15 MAR 16 JUN 16 SEP 16 DEC 16 MAR 17 JUN 17 SEP 17 DEC 17 MAR 18 JUN 18 SEP 18 DEC 18 MAR 19 Le cycle de remontée des fed funds sera lent, plus lent que ce qu’indiquent les projections des membres de la Fed, les « dots », notamment car les conditions sur le marché du travail sont structurellement moins favorables que lors des cycles précédents (cf. « FOMC : l’inéluctable synthèse doves-hawks », Cross Asset Investment Strategy, octobre 2014). Variation anticipée des taux monétaires 3 mois selon les futures 1 2005 La lenteur et la faible amplitude du cycle de resserrement des fed funds borneront la hausse des taux longs américains Les freins à la remontée rapide des taux longs dans les pays développés resteront nombreux en 2015. Ils devraient stagner en zone euro et au Japon et ne remonter que faiblement aux États-Unis et au Royaume-Uni. 2004 Contrairement à ce que la quasi-totalité des analystes avaient prévu, les taux longs ont baissé dans tous les pays développés en 2014. De nombreux éléments ont empêché les taux de monter. D’abord, la croissance américaine a fortement déçu les attentes au début de l’année 2014. En parallèle, le monde a connu un certain nombre de tensions géopolitiques (Ukraine-Russie, bande de Gaza-Israël, Lybie, Syrie-Irak) qui ont alimenté la recherche de valeurs refuge. De plus, on aurait pu penser que le tapering de la Fed (baisse de 10 Mds $ des achats mensuels d’actifs à chaque FOMC) allait induire une pression haussière sur les taux longs américains – et les taux longs développés en général – mais il n’en a rien été car la Chine a accéléré dans le même temps ses achats de titres du Trésor dans des proportions équivalentes. La montée du risque déflationniste en Europe a également pesé sur les taux longs. Toutefois, si ces derniers ont clairement baissé, ils ont plutôt monté sur la partie courte (2 ans à 5 ans) aux États-Unis et au Royaume-Uni avec l’amélioration cyclique sur le marché du travail et les perspectives de remontée de taux directeurs en 2015. Comme nous allons le voir, les freins à la remontée des taux longs n’ont pas disparu. Source : Datastream, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 35 11 # Novembre 2014 Prenant acte du dérapage des anticipations d’inflation (telles que mesurées avec des variables de marché ou par le biais d’enquêtes auprès des consommateurs), la BCE a fortement musclé sa politique vers la mi-2014 : taux de dépôts négatifs, TLTRO, plan d’achats d’actifs. L’objectif de la BCE est de voir son bilan revenir à son niveau de début 2012, c’est-à-dire aux alentours de 3 000 Mds € contre 2 000 Mds aujourd’hui. En dépit de ces actions, le swap d’inflation 5 ans dans 5 ans, que Mario Draghi a défini à Jackson Hole comme étant la mesure des anticipations d’inflation de moyen terme suivie par la BCE, a accéléré sa chute en octobre 2014. La BCE ira vraisemblablement plus loin en passant à une politique d’achats de titres souverains, qui maintiendra les taux longs des pays du cœur de la zone euro bien en deçà de leur valeur d’équilibre, qui est elle-même faible (aux alentours de 1,60 % pour le taux 10 ans allemand). La courbe des taux allemande est désormais très proche de son homologue japonaise. C’est qu’il est désormais clair que la BCE gardera une politique de taux zéro pendant des années, tout comme la Banque du Japon ou la Banque Nationale de Suisse. La courbe des taux allemande restera plate et proche de zéro sur la partie courte et pourrait davantage s’aplatir sur le segment 5 ans – 10 ans si l’inflation venait à décevoir davantage. Nous pouvons légitimement nous poser la question des achats nets de la part des non-européens : outre la diversification, l’intérêt d’acquérir des obligations à rendements très faibles et libellés dans une devise vouée à se déprécier est beaucoup plus faible. 10 ans France : taux nominal, taux réel et point mort d’infl ation 3 4.0 Taux nominal 3.5 Point-mort d'inflation 3.0 Taux réel 2.5 2.0 1.5 1.0 0.5 0.0 -0.5 01-11 04-11 07-11 10-11 01-12 04-12 07-12 10-12 01-13 04-13 07-13 10-13 01-14 04-14 07-14 10-14 Les taux européens resteront historiquement bas Source: Bloomberg, Recherche Amundi En outre, l’extension du plan d’achats d’actifs de la BCE aux titres souverains pèsera sur les spreads souverains, même si ceux-ci sont désormais clairement en deçà de leur valeur d’équilibre, comme l’a par exemple montré le Global Financial Stability Report d’octobre 2014. En particulier, l’écart de taux entre la France et l’Allemagne devrait se stabiliser à un niveau faible mais les risques de dégradations supplémentaires de la notation de crédit de la France sont de plus en plus importants : la France est le pays dont les prévisions de déficit public ont le plus été revues à la hausse dans les dernières prévisions du FMI (WEO, octobre 2014) et la Commission européenne prévoit qu’elle sera le pays de l’Union européenne avec le déficit le plus élevé en 2016. L’écart de ratio dette sur PIB ne cesse de croître entre la France et l’Allemagne et devrait encore grimper de 15 points sur les 5 ans à venir selon le FMI. Notons qu’en 2015, les émissions nettes de la France seront en nette hausse alors qu’elles seront négatives en Allemagne. Le risque est donc à l’élargissement du spread franco-allemand sur le moyen terme. La BCE ira vraisemblablement plus loin en passant à une politique d’achats de titres souverains Il y a peu de raisons de croire en une remontée des taux en zone euro Pour conclure, rappelons quatre points majeurs 4 Ratio dette-sur-PIB, projections du FMI 1) Les taux de la zone euro sont bas pour plusieurs raisons : • Une situation économique dégradée ; 110 • Des taux d’inflation extrêmement bas dans l’ensemble des pays ; 100 • Des anticipations d’inflation extrêmement basses ; 90 • Un excès d’épargne qui se traduit par des excédents courants ; 80 • Une offre d’obligations souveraines en baisse du fait de la politique d’émission de l’Allemagne ; 70 36 50 40 2019 2017 2015 2013 2011 2009 2007 2005 2003 2001 1999 1997 30 1995 • La présence des investisseurs non-résidents, notamment asiatiques, une situation justifiée par la liquidité mondiale. 60 1993 • Une volatilité en hausse, qui justifi e de conserver des positions longues obligations, afin de « macro hedger » les risques ; Allemagne 1991 • Une valorisation parfois jugée excessive des actifs risqués, qui a tendance à générer des phases de repli des taux, mettant en danger toute position de hausse des taux ; France Source : Datastream, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 • Une accélération de l’investissement des entreprises et une hausse de leurs besoins de financement. La faiblesse des taux d’utilisation des capacités de production et des intentions d’investir ne permettent pas d’attribuer une probabilité élevée à un tel cas de figure. Si l’on ajoute à cela la faible profitabilité des entreprises dans des pays comme la France ou encore l’Italie, on comprend mieux pourquoi il est bien difficile de miser sur cela ; • L’arrêt des achats de dettes souveraines par les non-résidents. À noter que cela demanderait une inflexion des politiques monétaires en cours, Banque du Japon en tête ; 2015 200 150 100 50 0 -50 Zone euro • Un retour des déficits extérieurs de la part des périphériques ; 2014 250 Espagne • Une hausse des anticipations d’inflation. À vrai dire, seul un choc géopolitique induisant une hausse du prix des matières premières, pétrole en tête, serait actuellement de nature à faire progresser les taux d’inflation ; 300 Italie • Une accélération de l’inflation, scénario également hautement improbable tant les craintes de déflation dominent encore ; France • Une accélération soudaine de la croissance, un scénario hautement improbable à l’heure actuelle ; Emissions nettes d’obligations de moyen et long terme en Mds € 5 Allemagne 2) Les taux partiraient à la hausse si les conditions suivantes étaient remplies : Source : JPM, Recherche Amundi • Des politiques budgétaires et fiscales bien plus expansionnistes ; • La fin du désendettement, y compris public ; • Une dégradation dans la perception de la solvabilité et de la dette publique (cf. encadré) ; • La fin de la baisse des salaires et des coûts salariaux unitaires ; • La hausse de gains de productivité ; • Une amélioration des conditions démographiques. 3) Il faut croire en une certaine déconnexion entre taux longs américains et européens Dans les cycles passés, les accélérations de croissance américaine ont toujours eu comme conséquence une remontée des taux longs et, par ricochet, en zone euro. Doit-on miser à coup sûr sur un tel scénario actuellement ? Rien n’est moins sûr : • La liquidité mondiale maintient les taux longs américains à un bas niveau. Certes, la Fed a terminé son QE, mais d’une part la BoJ et la BCE prennent le relais, et d’autre part, des voix s’élèvent aux États-Unis, au sein même de la Fed, pour regretter la fin du QE voire même en recommander sa reprise ; La politique de la BCE va sans aucun doute faire augmenter les positions de portage en faveur de la dette souveraine euro • Nous assistons actuellement à une forte déconnexion économique entre les États-Unis et la zone euro, et il est bien difficile de ne pas croire que cela est sans conséquence pour une plus grande déconnexion entre les taux longs ; • La politique de la BCE va sans aucun doute faire augmenter les positions de portage en faveur de la dette souveraine euro ; • L’excédent d’épargne de la zone euro depuis 2012 pousse les taux d’intérêt à la baisse 4) Quel pourrait être le grain de sable ? Assurément le cours de change. Une trop forte dépréciation de l’euro serait de nature à décourager les non-résidents de poursuivre leurs achats de dette européenne. C’est en ce sens que la zone euro ne ressemble pas au Japon, où la dette est très majoritairement entre les mains des investisseurs résidents (à plus de 90 %). Autrement dit, si au Japon la baisse du yen a eu peu d’impact sur les taux longs et favorisé croissance et profits des entreprises, en zone euro une trop forte dépréciation pourrait pousser les taux longs à la hausse, avoir un effet mécanique sur les profits mais entraver partiellement la croissance. Une trop forte dépréciation de l’euro serait de nature à décourager les nonrésidents de poursuivre leurs achats de dette européenne Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 37 11 # Novembre 2014 > Dette publique et solvabilité : la fragilité de certains États demeure La forte progression de la dette publique a dégradé la solvabilité de bon nombre d’États, et généré la crise de la dette du début des années 2010. Les mesures des banques centrales et un certain retour de la croissance ont repoussé les craintes de défaut ou les doutes sur la capacité de remboursement des États, mais il est bien évident qu’un nouvel effondrement de la croissance remettrait au goût du jour ce dossier épineux. L’évolution du ratio dette sur PIB dépend essentiellement de trois facteurs : L’évolution du ratio dette / PIB dépend fortement de l’écart entre croissance et taux d’intérêt • Le taux d’intérêt nominal payé sur la dette existante ; • La croissance nominale du PIB ; • Le solde primaire (différence entre les recettes de l’État et ses dépenses ; hors charges de la dette). 6.0% 5.5% 5.0% 4.5% 4.0% 3.5% Italie Espagne Allemagne France 3.0% 2.5% T1 2014 T1 2013 T1 2012 T1 2011 T1 2010 T1 2009 T1 2008 T1 2007 T1 2006 T1 2005 T1 2004 T1 2003 2.0% T1 2002 Le taux d’intérêt moyen du stock de dette publique « implicite » se situe vers 2,5 % en Allemagne et en France et vers 3,75 % en Italie et en Espagne : une croissance nominale du PIB en deçà de ces niveaux implique, toutes choses égales par ailleurs, un « effet boule de neige », où la dette nominale croît plus vite que l’économie. Sur les quatre grands pays de la zone euro, il n’y a qu’en Allemagne où la croissance nominale du PIB est supérieure au taux d’intérêt nominal : ceci étant dit, l’écart entre taux d’intérêt et croissance est encore trop faible pour contribuer significativement à la baisse de la dette publique allemande. En revanche, en Espagne et en Italie, les taux d’intérêt sont très supérieurs à la croissance nominale du PIB. L’effet « boule de neige » reste préoccupant, et ce d’autant plus que les anticipations de croissance sont redevenues importantes dans la détermination du prix des actifs. Taux d’intérêt moyen payé sur la dette publique 6 T1 2001 On voit bien le canal par lequel la déflation joue négativement sur les finances publiques : en plus d’une croissance réelle anémique, la faiblesse de l’inflation ou sa négativité pousse le taux d’intérêt réel à la hausse et potentiellement au-dessus de la croissance réelle du PIB, ce qui contribue à l’augmentation du ratio dette sur PIB. Tout passage en déflation dégrade sérieusement la solvabilité des pays de la zone euro car, toutes choses égales par ailleurs, la dette publique continue de grimper. En 2014, les taux d’intérêt nominaux ont poursuivi leur baisse, encore plus pour les pays périphériques, ce qui est positif pour la soutenabilité de la dette publique. Mais la croissance et l’inflation ont, elles aussi, fléchi dans le même temps. Rappelons que la récente baisse des taux nominaux ne concerne que les emprunts d’État à venir et il faudra un certain temps pour qu’elle se communique à la totalité de la dette publique et allège le service de celle-ci. Cela illustre à quel point la lutte pour la stabilisation du ratio dette sur PIB sera difficile. Nous ne pouvons plus espérer grand-chose en ce qui concerne la baisse des taux nominaux (les taux auxquels empruntent les États de la zone sont proches ou très proches de zéro jusqu’à la maturité 5 ans). Tout au plus, et ce serait déjà beaucoup, la BCE pourrait contribuer à maintenir les taux d’intérêt aux niveaux actuels pendant une longue période. Source : BCE, Recherche Amundi L’effet « boule de neige » reste préoccupant, et ce d’autant plus que les anticipations de croissance sont redevenues importantes dans la détermination du prix des actifs 38 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 7 Dette émergente : 2015 sera marquée L’essentiel par moins de volatilité des devises mais plus de dispersion des rendements 2015 sera marquée par plus de disparité de rendements mais moins de volatilité devises. Les actifs émergents libellés en dollar devraient en bénéficier. A contrario, les actifs liés aux matières premières (devises, dettes des économies exportatrices de matières premières) seront négativement impactés. Par ailleurs, la modération de l’inflation est un facteur de surperformance des taux locaux nominaux par rapport aux indexés à l’inflation. MARC-ALI BEN ABDALLAH, Stratégie et Recherche Économique – Paris 2014 : une nouvelle année de hausse des primes de risque On observe, cette année, que la hiérarchie des performances présente une relation inverse avec le portage des actifs (carry). En effet, ce sont les actifs avec les rendements les plus faibles, à savoir les obligations d’État de meilleure qualité, qui terminent l’année avec des performances bien au-delà de 10 %. C’est la deuxième fois que les marchés obligataires prennent cette configuration au cours des cinq dernières années, la précédente remontant à l’année 2011. Dans les deux cas, ce sont les interrogations relatives à la normalisation de la politique de la Réserve Fédérale qui ont engendré un retour significatif de la volatilité obligataire. Si les trajectoires passées nous renseignent sur le futur, cela signifie que l’année prochaine pourrait être une année porteuse pour les dettes souveraines émergentes émises en devises de réserve ou en devises locales. De plus, 2015 sera caractérisée par une hausse de la dispersion des spreads résultante à la fois d’une plus grande dispersion des fondamentaux des économies émergentes et d’une hausse de la volatilité des actifs sans risque notamment des Treasuries. Dans l’environnement actuel toujours caractérisé par des banques centrales du G4 en mode procyclique et une impulsion à la croissance via la récente baisse des prix de l’énergie, le risque de retour de la volatilité des devises émergentes est plus limité. Ceci est favorable à la dette locale dont le portage demeure très attractif. > Décomposition des performances des indices dette émergente L’année 2014 se termine sur une performance en dollar assez confortable pour la dette émergente en devises de réserve. Le spread de l’indice EMBI était à fin octobre à 338 pb environ 34 pb au-dessus de son niveau de début d’année. Cette hausse a induit un impact négatif estimé à -2,7 % depuis le début de l’année que compense le portage des spreads. Au final, la performance de l’indice ressort légèrement en dessous de celle des taux longs américains à 8,3 % en raison d’une érosion de l’appétit pour les actifs risqués. La performance de la dette en devises locales apparaît, quant à elle, bien moins reluisante une fois exprimée en dollar. A fin octobre, la performance cumulée s’élève à 1,3 % après avoir atteint les 6 % fin juin. En cause, la réévaluation des risques cycliques liés au ralentissement de la Chine et des économies européennes qui a entraîné une forte baisse des actifs cycliques émergents et notamment les devises. A fin octobre, on estimait en devises locales le gain lié au portage à 5,8 %, celui lié à la baisse de rendement de 37 pb à quelques 2 %, l’ensemble contrebalancé par un choc de 6 % sur les devises. Le dollar devrait s’apprécier Ceci étant, l’analogie s’arrête au facteur déclencheur, à savoir la normalisation de la politique de la Réserve Fédérale. On note au moins trois différences substantielles. Premièrement, les risques macroéconomiques au niveau mondial ont totalement changé de nature. La visibilité sur la stratégie de la Réserve Fédérale s’est renforcée comme en témoigne la baisse quasi continue de l’indicateur d’incertitude de politique économique aux États-Unis1. Deuxièmement, l’économie américaine a repris son rôle de moteur du cycle économique mondial dans un contexte où l’Europe reste aux prises avec le risque de déflation et où les économies émergentes tentent de s’attaquer à bras le corps à leurs déséquilibres. Cette configuration a pour conséquence : i. de rendre plus crédible un retour à l’orthodoxie de la politique monétaire américaine à moyen terme ; ii. de renforcer l’attractivité des actifs libellés en dollar. 1 L’indicateur d’incertitude sur la politique monétaire américaine est basé sur un décompte du nombre d’articles de presse aux États-Unis contenant au moins l’un des termes des trois ensembles de mots suivants: (i) économique, économie (ii) incertain, incertitude (iii) législation, défi cit, régulation, Réserve Fédérale ou Maison Blanche. Ce décompte est réalisé sur plus de 1800 journaux pour l’indice américain répertorié dans la base de données NewsBank Access World. Source : http://www.policyuncertainty.com 1 Indicateur d’incertitude de politique économique 320 320 280 280 240 240 200 200 160 160 120 120 80 80 40 2011 40 2012 2013 2014 Source: EPU, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 39 11 # Novembre 2014 Le dollar dispose d’un potentiel important d’appréciation (cf. Cross Asset Investment Strategy octobre 2014 - Le dollar s’est-il tant apprécié ?). Les actifs émergents libellés en dollar devraient en bénéficier. A contrario, les actifs liés aux matières premières comme les devises ou la dette des économies exportatrices de matières premières seront négativement impactés. Une autre conséquence à envisager, et qui découle du risque de modération de l’infl ation dans un contexte de baisse des prix des matières premières, est une performance moindre des indexés à l’inflation par rapport aux taux locaux nominaux. Les niveaux de spread sont plutôt attractifs La première problématique à laquelle font face les marchés de dette émergents est la perspective d’une hausse du spread de terme de la courbe américaine. C’est le premier risque qui vient à l’esprit dans une perspective de normalisation de la politique monétaire américaine. Toutefois, une pentification de la courbe des taux américaine via une hausse des taux longs (bear-steepening) est loin d’être garantie en 2015. Contre toute attente, une des anomalies récentes observées est la corrélation négative entre le segment court de la courbe américaine et son segment long. Calculée sur une fenêtre 200 jours glissants, cette corrélation est passée d’un plus haut de 0,9 atteint en octobre l’an passé à un minimum de -0,7 atteint fi n août dernier et qui représente un plus bas de 25 ans. Elle s’est, depuis, légèrement redressée pour atteindre -0,6. Segment long de la courbe US : corrélations segment court US et Euro 2 1,0 1,0 0,8 0,8 0,6 0,6 0,4 0,4 0,2 0,2 0,0 0,0 -0,2 -0,2 -0,4 -0,4 -0,6 -0,6 -0,8 1989 -0,8 1994 1999 2004 2009 2014 US 1 an à terme / EUR 1 an à terme US 1 an à terme / 5 ans à terme Source: Bloomberg, Recherche Amundi De fait, le spread de terme de la courbe américaine entre les maturités 2 ans et 30 ans s’est réduit d’environ 100 pb sur l’année de 360 pb à 250 pb alors que le changement d’anticipation, résultant de la perspective de normalisation à venir, aurait dû induire une pentification que nous estimons à une trentaine de pb. Le spread de terme 2-30 ans américain serait alors revenu à son niveau de 2011 soit 390 pb. De surcroît, l’année 2015 sera marquée par une remontée de la dispersion et de la volatilité des spreads souverains Certes, il existe plusieurs facteurs qui militent en faveur d’une baisse de ce spread aux États-Unis et qui sont : • un flux de nouvelles macroéconomiques dont la capacité de surprendre à la hausse s’érode ; • des actifs risqués (actions et crédit) aux États-Unis dont les primes de risques sont de moins en moins attractives ; • la montée du risque lié au ralentissement chinois qui pourrait créer des turbulences sur les marchés de crédit en Asie ; • enfi n, et ce qui n’est pas des moindres, nous associons une assez faible probabilité à une rapide hausse des taux de la Réserve Fédérale. Toutefois, cette anomalie s’explique, de notre point de vue, par l’anticipation d’une mise en place d’une stratégie d’expansion bilancielle d’envergure par la BCE. D’ailleurs, la corrélation élevée entre taux à terme 1 an euro et taux longs américains vient étayer cette causalité potentielle. Par conséquent, le maintien de la stratégie actuelle par la BCE d’expansion bilancielle sans achats de titres souverains devrait amener une hausse de la corrélation entre partie courte et longue de la courbe aux États-Unis Ces considérations sont importantes pour la dette émergente, le yield ratio de l’indice dette en dollar EMBI évolue en opposition avec le spread de terme de la courbe des taux américaine depuis la mise en place d’une politique hétérodoxe aux États-Unis (cf. encadré page suivante). Qu’anticipe-t-on sur l’évolution du spread de terme aux États-Unis ? Nous anticipons une expansion du spread de terme 2-30 ans aux États-Unis de 100 pb sur 2015 pour atteindre les 340 pb. A partir de la relation observée depuis 2010 entre ce spread de terme et le yield ratio de la dette émergente libellée en dollar, nous anticipons une performance de 2,5 % pour l’indice EMBI à douze mois pour un objectif de spread de 320 pb. Cette prévision repose sur un portage de spread de 3,3 %, diminué d’une performance légèrement négative des obligations du Trésor, puisque notre scenario central 40 3 Dette EM $ : ratio spread / taux US 10 ans contre spread de terme US 2-30 ans (éch inversée) 200 3,0 240 2,5 280 2,0 320 1,5 360 1,0 400 2011 0,5 2012 2013 2014 Spread de terme US 2-30 Ratio spread/taux 10 ans US éch droite Source: Bloomberg, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 intègre une cible de taux 10 ans à 2,8 % d’ici à fin 2015. Etant donné que cette relation devrait changer en conséquence d’un retour à l’orthodoxie de la Fed, on ne peut exclure une performance meilleure pouvant atteindre les 3,5 %. > Spread de terme et yield ratio 4 Volatilité implicite emprunts d’État US contre dispersion des spreads souverains 280 2000 1750 240 1500 Définition du spread de terme Le spread de terme est le supplément de rémunération qu’offre la détention d’un actif de maturité longue par rapport à un actif de maturité plus courte. Cet écart de rendement est constitué de deux composantes : une composante reflétant les anticipations de trajectoire future des taux courts, une prime de risque liée au fait que l’actif est de maturité plus longue (incertitude sur la politique monétaire, stabilité future des prix, etc.). 200 1250 1000 160 750 120 500 80 250 Définition du yield ratio Le yield ratio est une normalisation de la prime de risque de crédit. Elle consiste à exprimer le spread de crédit en unité de taux longs. Il s’agit donc du ratio du spread de crédit au taux 10 ans. 40 1996 En régime de politique monétaire hétérodoxe, i.e. lorsque les taux directeurs de la banque centrale sont à zéro, et notamment en cas de recours par la banque centrale à un assouplissement quantitatif via l’achat d’obligations souveraines, les spreads de crédit et le spread de terme sont corrélés. Lorsque les investisseurs anticipent le lancement d’un nouveau programme d’achat de titres souverains de maturité longue, le spread de terme s’abaisse via la baisse des taux longs. En retour, cette baisse des taux longs permet d’accroître le prix des actifs risqués et en particulier les actifs de crédit induisant une baisse des spreads de crédit. A contrario, l’anticipation d’un arrêt de programme d’achat amène une révision des anticipations relatives aux trajectoires futures des taux courts. Ce changement de la composante anticipation du spread de terme induit tout à la fois une hausse de ce spread et des pressions haussières sur les spreads de crédit via une hausse des taux longs sans risque. Une hausse de la dispersion des spreads est néanmoins inévitable De surcroît, l’année 2015 sera marquée par une remontée de la dispersion et de la volatilité des spreads souverains. L’accroissement de la dispersion des spreads sera alimenté par deux phénomènes distincts: d’une part, la hausse de la volatilité des obligations américaines, et d’autre part, l’altération des fondamentaux émergents. Le mécanisme sous-tendant la remontée de la volatilité a été explicité précédemment. Il est à mettre en relation avec l’anticipation d’accroissement de la corrélation entre la partie courte et la partie longue de la courbe des taux aux États-Unis. Comme l’indique le graphique n°5, les anticipations de trajectoire future des taux directeurs – ici évaluées par le taux à terme 1 an – sont un bon indicateur avancé sur le directionnel de la volatilité obligataire. Dès lors, les atermoiements à venir sur le retour à l’orthodoxie de la Fed se traduiront par plus de volatilité obligataire. L’autre facteur de volatilité des spreads concerne la détérioration des fondamentaux émergents. En ligne de mire se trouvent les producteurs de matières premières, et plus particulièrement des économies pétrolières. Notre scenario 2006 2011 2016 Volatilité implicite emprunts d'Etat US Comportement du yield ratio et de la prime de terme sur données historiques Sur données historiques, l’observation empirique de la relation entre le spread de terme est difficile à appréhender. On remarque, cependant, que la hausse du spread de terme est souvent précédée par une augmentation substantielle du yield ratio ou de manière équivalente des spreads de crédit. L’interprétation la plus immédiate de cette relation est assez directe. En régime de politique monétaire orthodoxe - le seul disponible sur données historiques -, les spreads de crédit tendent à s’accroître avant le spread de terme. Il y a, en effet, préalablement à un durcissement des conditions monétaires une dégradation des conditions de crédit. Ce décalage temporel s’explique par le fait que la hausse continue de la demande de crédit induit, en général, une remontée des primes de risque de crédit (spread de crédit) en anticipation d’un risque de détérioration de la qualité de crédit du bilan des emprunteurs. Ce n’est que dans un deuxième temps que la banque centrale entame un cycle de hausse de ses taux directeurs pour contrer les éventuelles tensions inflationnistes pouvant émerger en raison de la vigueur de la demande. L’anticipation de ce cycle de resserrement est à l’origine de la hausse du spread de terme via la révision des anticipations futures de trajectoire des taux courts. 0 2001 Dispersion des spreads éch droite Source: Datastream, Recherche Amundi La baisse récente du prix du pétrole va se traduire par de plus larges écarts de spreads entre les économies exportatrices de pétrole 5 Anticipations de politique monétaire contre volatilité obligataire 140 2,0% 130 1,8% 120 1,6% 110 1,4% 100 1,2% 90 1,0% 80 0,8% 70 0,6% 60 0,4% 50 2010 0,2% 2011 2012 2013 2014 2015 Vol implicite Treasuries éch gauche Taux US à terme 1 an retardés 8m Source: Datastream, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 41 11 # Novembre 2014 Les petites économies pétrolières comme le Venezuela sont particulièrement fragilisées. Le spread souverain du Venezuela a récemment abaissé de 300 pb, mais à 1500 pb, il demeure proche d’un plus haut de six ans. A eux deux, l’Argentine et le Venezuela ont réintroduit le risque de défaut cette année sur les marchés de la dette émergente. Autre risque identifi é dans notre scenario, le ralentissement chinois qui pourrait peser très sérieusement sur les marchés de capitaux asiatiques. Dispersion des spreads des exportateurs de pétrole 6 520 ͲϰϬ 460 ͲϯϬ 400 ͲϮϬ 340 ͲϭϬ 280 Ϭ 220 ϭϬ 160 ϮϬ 100 ϯϬ 40 2011 Dans le cas de dettes émises en devises locales, cette année (comme l’année 2011) a rappelé à quel point la volatilité des devises émergentes est importante. Des réévaluations de risques cycliques mondiaux de l’ampleur de ce que nous avons connu sont le plus souvent coûteuses du fait que les devises à plus fort beta sont aussi celles dont la couverture est la plus onéreuse. En conséquence, par crainte de voir la valeur de leur portefeuille d’investissement sévèrement amputée par un choc de volatilité, les investisseurs tendent à se délester rapidement des dettes à rendement élevé. Avec des banques centrales (Fed, BCE et BoJ) accommodantes et le soutien à la croissance que représente la baisse des prix de l’énergie, le risque de retour de la volatilité des devises émergentes est limité. De plus, l’écart de rentabilité des principales devises émergentes par rapport au dollar sur le segment long des courbes ne devrait pas diminuer substantiellement au regard des éléments que nous avons fourni sur l’évolution anticipée du spread de terme. Comme nous le notions le mois dernier, l’attractivité des devises émergentes réside dans leur capacité à être peu influencées par les divergences entre banques centrales, notamment du G4. Dans la correction cyclique récente, la volatilité implicite des devises émergentes s’est assez peu écartée de celles des devises du G7. Avec un portage de 6,4 %, nous anticipons une poursuite de baisse du rendement et un objectif de rendement de 6 %, ce qui revient à anticiper une performance de 6,4 % auquel il faut ajouter 2 % d’effet duration, soit un peu plus de 8 % en devises locales pour 2015. A ce stade, seule une intensification du ralentissement chinois pourrait conduire à une nouvelle correction des devises émergentes. 2013 2014 Dispersion des spreads souverains Les taux locaux seront soutenus dans un premier temps par une faible volatilité excédentaire Comme souligné dans notre scenario, la baisse des prix du pétrole devrait permettre de réduire les tensions infl ationnistes en particulier pour les économies en proie à d’importants déséquilibres macroéconomiques, à l’instar de l’Afrique du Sud, la Turquie, l’Indonésie, l’Inde, le Brésil ou la Russie. Une stabilisation des dynamiques de prix – actuellement bien amorcée en Indonésie – ouvrirait la voie à une baisse des anticipations d’infl ation et, de fait, à une hausse des taux réels. Dans ce contexte, la capacité des banques centrales à maintenir une politique crédible de ciblage d’infl ation sera décisive. Sur ce point, l’Afrique du Sud et la Turquie restent vulnérables. Hormis ces deux économies, les obligations indexées à l’inflation conservent de l’attractivité pour les économies minières d’Amérique latine, à l’instar du Chili2, dans la mesure où le risque baissier pesant sur leur devises peut entretenir des tensions infl ationnistes. Plus généralement, en anticipation d’une poursuite de la modération de l’infl ation mondiale, nous préférons les taux locaux nominaux aux indexés à l’inflation. ϰϬ 2012 Variation 12m du prix du brut éch droite inversée Source: Datastream, Recherche Amundi 7 Rdts locaux contre potentiel d’appréciation de la devise 20% 3,0 16% 2,5 12% 2,0 8% 1,5 4% 1,0 0% 0,5 -4% BRESIL RUSSIE TURQUIE INDE INDONESIE AFRIQUE DU SUD COLOMBIE MEXIQUE PEROU CHILE MALAISIE CHINE HONGRIE ROUMANIE POLOGNE concernant les économies émergentes (texte n°4 « Économies émergentes : les gouvernements sont maintenant seuls face à leurs engagements ») met en exergue que le maintien de prix bas du pétrole devrait peser sur les équilibres fiscaux des économies pétrolières. La baisse récente du prix du pétrole va se traduire par de plus larges écarts de spreads entre les économies exportatrices de pétrole en fonction du degré de diversification de leur économie domestique. Plus une économie est diversifi ée et plus sa capacité à amortir la baisse de revenus pétroliers est importante. Rdt local Potentiel d'appréciation devise Ratio Portage-Risque (Dette Souv. $) 2 Le taux d’inflation est à 4,9 % au Chili en octobre contre une cible d’inflation officielle de 3 % +/- 1 %. 42 Source: Datastream, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 8 2015 : un environnement toujours favorable aux marchés du crédit VALENTINE AINOUZ, Stratégie et Recherche Économique – Paris SERGIO BERTONCINI, Stratégie et Recherche Économique – Milan Depuis la crise de Lehman, les banques centrales ont favorisé un environnement de taux bas et de fortes liquidités. Ce contexte devrait perdurer en 2015. La divergence économique entre les États-Unis et la zone euro se traduira par une désynchronisation plus prononcée des politiques monétaires. Notre scenario central intègre de nouvelles mesures non conventionnelles de la BCE pour lutter contre la faible inflation. Mario Draghi a annoncé que l’objectif visé par la BCE était de ramener la taille de son bilan à son niveau de 2012. Cette cible ne pourra pas être atteinte uniquement via des achats d’ABS et de covered bonds. A l’inverse, les États-Unis offrent de meilleures perspectives de croissance qui ont permis l’arrêt du QE. Mais, le cycle de remontée des fed funds sera lent et de faible amplitude, notamment car les conditions sur le marché du travail sont structurellement moins favorables que lors des cycles précédents (cf. texte 6 « Des taux durablement bas dans le monde développé »). La valorisation des actifs a été dictée ces dernières années par les actions des banques centrales. Les politiques monétaires accommodantes resteront favorables aux marchés du crédit tant que les investisseurs ne douteront pas de la capacité des banques centrales à agir sur l’inflation et la croissance. Jusqu’ici, la recherche de rendement/spread a été un élément important dans la performance des actifs. Il y a fort à parier que les conditions économiques joueront un rôle plus important dans la détermination du prix des actifs en 2015. Le marché IG : les facteurs techniques resteront déterminants… Depuis le début de l’année, le marché IG euro a offert de très belles performances et a surperformé le marché du haut rendement aux États-Unis et en Europe. Dans les deux zones, les émetteurs BBB ont offert les meilleurs rendements. Notons également la surperformance du marché IG européen par rapport à son homologue américain essentiellement à la faveur des émetteurs de la périphérie et des émetteurs financiers. Après avoir touché des plus bas historiques, la volatilité a fortement augmenté en octobre suite à la publication de chiffres suggérant un affaiblissement de l’activité et des pressions déflationnistes accrues à travers le monde. Dans ce contexte de remontée de l’aversion au risque, (i) l’euro IG s’est montré particulièrement résilient par rapport aux autres segments des marchés du crédit et (ii) les investisseurs plus préoccupés par les conditions économiques ont favorisé les émetteurs notés AA et A. Que faut-il attendre de l’univers IG en 2015 ? Les entreprises IG demeureront creditor-friendly en Europe et aux États-Unis Les fondamentaux resteront cependant en ligne avec les intérêts des porteurs obligataires dans les deux zones : pas de forte détérioration attendue dans les ratios d’endettement. Les divergences dans les dynamiques économiques sont néanmoins visibles dans les bilans des entreprises. Les entreprises américaines et européennes se situent à des niveaux différents dans le cycle de crédit : les entreprises américaines se réendettent contrairement aux entreprises européennes qui restent plus prudentes quant à leurs investissements. En Europe : • Les entreprises ont stabilisé leur levier d’endettement via un ralentissement de la croissance de leur dette. Les dépenses d’investissement ont été fortement réduites. Contrairement aux entreprises outre-Atlantique, elles n’ont pas connu de croissance de leurs profits. L’essentiel En 2015, les marchés du crédit resteront portés par des politiques monétaires accommodantes. Notre scénario intègre de nouvelles mesures non conventionnelles de la BCE et un cycle de remontée des fed funds qui sera lent et de faible amplitude. Les fondamentaux des entreprises demeureront creditor friendly en Europe et aux États-Unis : pas de forte détérioration attendue dans les ratios d’endettement. Le réendettement des entreprises américaines est limité par défaut de demande agrégée. De plus, les entreprises européennes restent dans un mode de préservation des cash flows du fait de la mauvaise conjoncture dans la zone euro. Notons que les émetteurs HY dans les deux zones sont entrés dans un régime marqué par des taux de défaut très faibles en raison d’une politique monétaire ultra-accommodante. En 2015, les facteurs techniques resteront un fort soutien pour le crédit IG en zone euro et le déficit de l’offre de la part des émetteurs (notamment financiers) sera persistant. Les banques ont en effet accès à de la liquidité bon marché via la BCE. Ce ne sera pas le cas de son homologue américain. La valorisation des actifs a été dictée ces dernières années par les actions des banques centrales qui ont favorisé la recherche de rendement. Les politiques monétaires accommodantes resteront favorables aux marchés du crédit tant que les investisseurs ne douteront pas de la capacité des banques centrales à agir sur l’inflation et la croissance. Il y a fort à parier que les conditions économiques joueront un rôle plus important dans la détermination du prix des actifs en 2015. De part et d’autre de l’Atlantique, les titres IG notés BBB et les obligations HY les moins risquées (BB) semblent être les plus intéressants. Un positionnement sur la partie longue de la courbe permet de capter du rendement en Europe et de protéger les investisseurs contre le risque d’un aplatissement baissier (bear flattening) aux États-Unis. • Les émetteurs de la périphérie demeurent plus endettés que ceux du cœur. Ces entreprises trop fortement dépendantes de leur marché domestique ne Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 43 11 # Novembre 2014 génèrent pas suffisamment de profits pour se désendetter. Rappelons, au passage, que le secteur des utilities et des télécoms représentent 68 % de l’encours actuel de dette des entreprises non-financières périphériques. Performances depuis le début de l’année (en %, en date du 24/10/2014) 1 • Les entreprises profitent du contexte de taux historiquement bas et du fort appétit des investisseurs pour allonger la maturité de leur dette et réduire leur coût de financement. La duration effective de l’indice Euro IG atteint aujourd’hui 4,8 ans contre 3,9 ans début 2012. 7,8 6,9 • Les émetteurs Euro IG évoquent toujours un avenir économique incertain. Par conséquent, ils demeurent dans une stratégie de préservation des cash flows et conservent un niveau de liquidités élevé au bilan. A plus long terme, une faiblesse prolongée de l’économie pourrait affecter les profits des entreprises européennes. 3,2 2 2,6 0,7 0,4 -1,5 Aux États-Unis : Euro IG • Le réendettement des entreprises américaines a été moins prononcé que prévu. Les ratios d’endettement sont restés stables grâce à une croissance simultanée des profits. • Une partie des liquidités détenues au bilan a été utilisée pour fi nancer les acquisitions. Elles restent cependant sur des niveaux élevés. Euro HY US IG Excess Return versus Govt US HY Total return Source : Bloomberg, Recherche Amundi • Les dépenses d’investissement ont légèrement accéléré au deuxième trimestre. Une grande partie des profi ts est toujours reversée aux actionnaires via les dividendes et les rachats d’actions. • Nous n’anticipons pas un réendettement plus prononcé des entreprises américaines. La faiblesse de la demande n’incite pas à investir. Attention, les fond de pensions à prestation défi nie risquent de pâtir de l’environnement prolongé de taux bas. Les facteurs techniques : un fort soutien pour le crédit euro en 2015 Le déficit de l’offre de la part des émetteurs financiers sera persistant en 2015 Le déficit de l’offre de la part des émetteurs (notamment financiers) sera persistant en 2015. Les banques ont accès à de la liquidité bon marché via la BCE : les T-LTROs permettront de « roller » les précédents LTROs avec des échéances plus longues. De plus, les besoins en fi nancement de marché des banques ont fortement diminué sous l’effet des changements réglementaires et de la crise souveraine. L’incitation des banques à émettre sur le marché obligataire sera faible. Le besoin de fi nancement des émetteurs non-fi nanciers est resté également limité, par défaut de demande agrégée. Le marché américain IG ne sera pas soutenu comme son homologue européen par les facteurs techniques en 2015. La Fed a arrêté sa politique de QE. Le QE a été un facteur technique positif pour le crédit depuis plusieurs années. En rachetant de la dette publique, la Fed a maintenu les taux bas et a incité les investisseurs à se reporter sur les obligations d’entreprise. L’appétit pour le crédit devrait se maintenir face à la faiblesse durable des taux souverains. 2 Performances depuis le début de l’année (en %, en date du 24/10/2014) Valorisation 2,4 1,7 1,4 Il y a fort à parier que les conditions économiques seront plus déterminantes dans la valorisation des actifs. 44 US IG AA Euro IG BBB Euro IG A 0 Euro IG AA • C’est déjà le cas aux États-Unis. Avec l’arrêt du QE, les injections de liquidité de la Fed seront de moins en moins un facteur de soutien pour les valorisations des obligations d’entreprises. Toutes choses égales par ailleurs, les spreads devraient donc mécaniquement s’écarter. Ainsi, les spreads se sont élargis tandis que les taux longs américains remontaient (en général le mouvement inverse s’observe : l’économie s’améliore les taux montent et les spreads se resserrent). 0,2 US IG BBB 1,8 US IG A Les rendements et les resserrements de spreads attendus seront plus faibles qu’en 2014. Nous favorisons les stratégies de portage. La performance des actifs a été dictée par les mesures de politiques monétaires. La publication de chiffres économiques décevants a jusqu’à présent peu perturbé les investisseurs car ces derniers comptaient sur de nouvelles mesures à venir des banques centrales. Excess Return versus Govt Source : Bloomberg, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 3 Performances entre le 01/09/2014 and le 24/10/2014 (en %) 0,4 0,3 -0,1 La partie longue de la courbe est favorisée aux États-Unis et en Europe, mais pour des raisons différentes : -1,1 -2,4-2,3 • Aux États-Unis, le risque de remontée est plus élevé sur la partie courte de la courbe. Nous n’anticipons pas une remontée brutale des taux longs. La Fed elle-même a dégradé sa prévision de croissance de long terme à 2,1% en septembre dernier. De plus, le spread plus élevé sur la partie longue offre une protection contre la remontée des rendements obligataires. US HY Euro HY -4,2 Euro IG • En Europe, les taux resteront bas pour une longue période. Les nouvelles mesures de la BCE accentueront la quête de rendement des investisseurs. Ces derniers devront se diriger vers des maturités plus longues pour trouver du rendement additionnel. -3 US IG • En Europe, les doutes des investisseurs sur la capacité des banques centrales à agir sur l’infl ation et la croissance pourraient augmenter. Les investisseurs pourraient alors privilégier les émetteurs les mieux notés ou les moins exposés au cycle. Dans ce contexte, n’oublions pas que les facteurs techniques (déséquilibre offre/demande) resteront un facteur de soutien important pour les spreads. Excess Return versus Govt Total return Source : Bloomberg, Recherche Amundi Le marché HY reste soutenu par la quête de rendement Les fondamentaux restent favorables Comme nous l’avons souligné dans l’édition du Cross Asset du mois de septembre, les émetteurs HY tant américains qu’européens sont entrés dans un régime marqué par des taux de défaut très faibles. Ainsi, en dépit d’une tendance baissière de la croissance macroéconomique à long terme, les taux de défaut ont diminué en raison d’une politique monétaire ultra-accommodante qui a favorisé une quête persistante de rendement et, au fi nal, permis aux entreprises d’obtenir les liquidités dont elles avaient besoin. La faillite de Lehman a rendu les entreprises plus prudentes que lors des précédents cycles. Aussi, malgré des conditions de financement extrêmement favorables, la plupart d’entre elles n’ont pas pris le risque de se réendetter et ont préféré allongé la maturité de leurs dettes. Les conditions de fi nancement via le crédit bancaire ou les marchés sont restées très favorables aux États-Unis, et elles s’améliorent en Europe grâce à l’activisme de la BCE. La conjoncture macroéconomique devrait s’améliorer en 2015 et, comme nos analyses l’ont déjà montré, ce n’est pas tant le niveau absolu de la croissance qui détermine l’évolution des taux de défaut mais l’écart de la croissance du PIB avec sa tendance à long terme. Nos analyses top down et bottom up nous amènent à penser que les taux de défaut resteront faibles en 2015 des deux côtés de l’Atlantique. Les taux de défaut ont diminué en raison d’une politique monétaire ultra-accommodante Facteurs techniques : des divergences croissantes de part et d’autre de l’Atlantique : Le marché HY européen est dans une situation plus favorable Demande/offre. Ces derniers mois, les conditions de demande et d’offre d’obligations d’entreprise HY ont commencé à prendre des trajectoires divergentes en Europe et aux États-Unis. Côté demande, après la collecte spectaculaire de 2012 et, dans une moindre mesure, de 2013, ces derniers mois ont été le théâtre d’un fort mouvement de décollecte aux États-Unis pour les fonds et les ETF investis en obligations HY américaines et mondiales. En revanche, cette tendance n’a pas été observée sur le marché des obligations HY libellées en euro. Comme le montre le graphique, les fonds HY américains ont subi une décollecte d’environ 43 Mds € en seulement quatre mois, en particulier entre juin et septembre. Ces sorties représentent 50 % de la collecte cumulée des 30 mois précédents. Le graphique témoigne d’une différence marquée dans l’évolution des fonds HY européens : le mouvement de collecte est intervenu plus tardivement qu’aux États-Unis (essentiellement en 2013) et, surtout, les fonds européens ont bien mieux résisté que les fonds américains à la volatilité de l’été dernier. Concernant l’offre, des différences apparaissent également des deux côtés de l’Atlantique : 2014 est une année record en termes de volumes d’émission de dette HY européenne, en dépit du ralentissement récent. En revanche, la dette nouvelle émise par les entreprises américaines en catégorie spéculative augmente plus lentement que lors des deux dernières années. A Euro IG : Govt OAS (au 24/10/2014) 4 167 148 140 93 74 59 50 38 1-3 3-5 AA 90 94 61 60 5-7 A 7-10 BBB V Source : Bloomberg, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 45 11 # Novembre 2014 noter toutefois que les sorties massives des quatre derniers mois ne semblent pas du tout avoir dissuadé les entreprises de faire appel au marché primaire. US IG : Govt OAS (au 24/10/2014) 5 Le fait que les facteurs techniques des obligations HY européennes soient meilleurs reflète les trajectoires divergentes que prendront les politiques monétaires de la Fed et de la BCE l’année prochaine. Alors que la Fed passe le relais à la BCE en matière d’assouplissement quantitatif et se prépare à relever ses taux (pas avant plusieurs trimestres néanmoins), la BCE a commencé à acheter des obligations sécurisées, est sur le point d’acquérir des ABS et pourrait prendre des décisions supplémentaires pour atteindre l’objectif de 1 000 Mds € de titres achetés, annoncé par Mario Draghi. La seconde opération de refinancement à très long terme (TLTRO) va aussi permettre de maintenir une liquidité abondante et réduira probablement les besoins de refinancement des établissements sur les marchés obligataires. 138 119 110 97 77 55 36 Des « oasis » de moins en moins nombreuses dans le « désert » des rendements. D’après nos derniers calculs, il ne reste plus que de rares « oasis » dans le « désert » des taux en euro. Le rendement moyen des emprunts d’État ayant été divisé par deux lors des 9 premiers mois de 2014 (passant de 2 % à 1 %), les obligations offrant un rendement supérieur à 2 % se font de plus en plus rares. Au 30 septembre, si l’on considère le marché obligataire global en euro (c’està-dire en incluant les titres souverains ainsi que les obligations d’entreprises IG et HY), 11 % de la dette présentaient un rendement négatif. 15 % du total offrent un rendement proche de zéro et 58 % proposent un rendement entre 0,5 % et 2 %. Autrement dit, au moment où nous rédigeons, 85 % des obligations en euro offrent un rendement inférieur à 2 %. Cette proportion a plus que doublé depuis janvier 2014 (elle était alors de « seulement » 40 %). Les obligations HY ne représentent plus que 4 % de la dette globale et les titres d’entreprise BBB 10 %. En outre, les spreads des obligations souveraines des pays de la périphérie se sont nettement resserrés sur les segments à court et moyen terme de la courbe. Par conséquent, les obligations d’entreprises BBB et BB constituent les dernières « oasis » de rendement et devraient logiquement être très recherchées par les investisseurs en 2015. 185 173 92 73 54 1-3 3-5 AA 5-7 7-10 BBB A Source : Bloomberg, Recherche Amundi Le marché euro IG offre de moins en moins de poches de rendement Les valorisations des obligations HY sont devenues plus attractives de part et d’autre de l’Atlantique, mais surtout aux États-Unis 46 Volume cumulé des fl ux dans les fonds dédiés HY et ETF HY (en bn $) 100 80 60 40 20 0 European HY 30/09/2014 31/05/2014 31/01/2014 30/09/2013 31/05/2013 31/01/2013 30/09/2012 -20 31/05/2012 Les investisseurs en quête de rendement sur le marché en euro pourraient être intéressés par ce segment. En outre, nous prévoyons une hausse du dollar américain et son degré d’appréciation pourrait faire office de « couverture naturelle » contre le risque de hausse des taux. 6 31/01/2012 Après leur passage à vide récent, les valorisations des obligations HY ont baissé en valeur absolue et relative. Les spreads avaient atteint un plus bas en avril mais le mouvement de resserrement s’était interrompu au printemps lorsque les investisseurs, inquiets des niveaux de valorisations atteints, ont jugé que le potentiel de compression des primes de risque devenait très limité. La correction des marchés HY américains durant l’été était liée aux inquiétudes croissantes des investisseurs quant à une hausse des taux plus précoce que prévu, alors que la baisse du mois d’octobre s’est davantage inscrite dans un contexte global d’aversion pour le risque. Compte tenu des tendances des derniers mois, les rendements et les spreads de certains segments HY américains ont rapidement renoué avec leurs niveaux de 2013. Le pourcentage élevé d’obligations remboursables par anticipation fait baisser la duration réelle des obligations spéculatives américaines, en particulier sur les échéances 3 et 5 ans. Ainsi, dans un régime marqué comme aujourd’hui par des taux de défaut très faibles, les valorisations actuelles semblent propices à un nouveau resserrement des spreads. Par exemple, au moment où nous rédigeons, une obligation HY américaine d’échéance 4 ans présente un spread moyen proche de 550 pb par rapport aux bons du Trésor, alors que la perte sur défaut subie par les titres spéculatifs américains au cours des 12 derniers mois n’est que de 2 %. Dans la mesure où les taux de défaut devraient rester faibles au cours des trimestres à venir, les valorisations actuelles font plus que compenser (rémunérer) les risques fondamentaux. US & Global HY Source : Bloomberg, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 2014 100 2013 2012 80 2011 2010 60 40 20 déc. oct. nov. sept. juil. août juin mai avr. 0 févr. > Offre d’obligations d’entreprises en euro : tendances récentes et perspectives 2015 120 mars Les politiques monétaires devraient rester un déterminant majeur de l’évolution des marchés du crédit, notamment en Europe, et auront deux conséquence clés : une poursuite de la quête de rendement et un environnement technique favorable pour les obligations d’entreprises en 2015. Avec l’évolution récente des spreads, les valorisations sont redevenues attractives des deux côtés de l’Atlantique : la zone crossover semble être la plus intéressante dans les catégories IG et HY. Ce sont les titres IG notés BBB et les obligations HY les moins risquées (BB) qui présentent le meilleur profil rendement-risque sur les marchés du crédit. Les obligations HY notées BB devraient être davantage en mesure de contribuer au portage que les titres HY de qualité moyenne à faible tout en protégeant les investisseurs contre la volatilité que pourraient entraîner des déceptions macroéconomiques. Les titres d’entreprises à plus long terme semblent aussi en mesure de capter du rendement en Europe et de protéger les investisseurs contre le risque d’un aplatissement baissier (bear flattening) aux États-Unis. Euro HY : volume cumulé des nouvelles émissions (en Mds $) 7 janv. Conclusion Source : Bloomberg, Recherche Amundi En règle générale, en septembre, le marché primaire des obligations d’entreprises s’ouvre avec une activité dynamique. Cette année, avec plus de 30 Mds € émis, l’activité sur le marché primaire IG a même été plus vigoureuse que prévu, et a enregistré son volume mensuel le plus élevé de 2014. Malgré l’allocation du premier TLTRO par la BCE, il est intéressant de noter que les émetteurs financiers se sont montrés relativement actifs. Si l’on s’intéresse aux chiffres d’émissions nettes, les émetteurs financiers ont mis un terme à la tendance négative qui a prévalu lors des mois précédents et ont affiché un montant net d’émission de 12,6 Mds €. Dans le même temps, les émetteurs industriels et des services aux collectivités ont émis respectivement 15,2 et 3,4 Mds € (chiffres nets). Les titres IG notés BBB et les titres HY notés BB présentent le meilleur profil rendement-risque sur les marchés du crédit Nous avons déjà fait remarquer dans de précédents numéros du Cross Asset que l’année 2014 se révèle moins négative que prévu pour la dette d’entreprise IG en Europe, en particulier pour les établissements financiers. Après trois années d’émissions nettes très négatives (-184 Mds € en 2011, -210 Mds € en 2012 et -176 Mds € en 2013), les émetteurs financiers européens de la catégorie IG ont réduit leur encours de dette de seulement 45 milliards d’euros lors des 9 premiers mois de l’année 2014. Parallèlement, les entreprises ont émis quasiment 40 milliards d’euros (chiffre net) sur le marché primaire depuis janvier. En revanche, en raison de la résurgence de la volatilité et l’aversion temporaire pour le risque, les émissions d’obligations spéculatives ont ralenti en septembre et surtout en octobre, marquant donc une divergence nette avec les tendances du marché IG. Que peut-on déduire des dernières tendances pour anticiper l’avenir ? Premièrement, l’impact négatif des émetteurs financiers devrait être moins prononcé sur l’offre de titres en 2015, en raison des efforts considérables de désendettement consentis ces dernières années. Les dernières informations laissent augurer une stabilisation voire une amélioration à venir des conditions de crédit, notamment après la revue de la qualité des actifs par la BCE. De plus, la quête de rendement contribuera à la solidité de la demande en titres de créance émis par des entreprises des secteurs industriels ou des services aux collectivités. En 2015, le marché primaire des obligations spéculatives sera probablement plus sélectif, notamment si la croissance n’accélère pas dans le sillage des mesures de la BCE. Il est donc probable que les obligations BB soient de nouveau plus prisées que les émissions de moindre qualité sur le marché primaire. Les émissions d’obligations HY devraient bénéficier d’une configuration technique favorable en Europe, mais des phases ponctuelles d’augmentation de l’aversion pour le risque sont possibles si la macroéconomie déçoit, ce qui pourrait réorienter la demande vers les titres IG, lesquels devraient largement contribuer à la croissance de l’offre d’obligations d’entreprises. USD HY : volume cumulé des nouvelles émissions (en Mds $) 8 300 2014 250 2013 2012 200 2011 2010 150 100 50 déc. nov. oct. août sept. juil. juin mai avr. févr. mars janv. 0 Source : Bloomberg, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 47 11 # Novembre 2014 > La BCE va-t-elle vraiment s’engager dans des achats d’obligations d’entreprises ? Les marchés ont réagi positivement aux rumeurs de rachats d’obligations d’entreprises par la BCE. Ces rachats viendraient s’ajouter à ceux de covered bonds et d’ABS et porteraient vraisemblablement sur les émissions non-financières notées en Investment Grade, i.e. les moins risquées. L’encours de ces titres se monte aujourd’hui à 963 Mds €. L’intérêt intrinsèque (i.e. en termes de facilitation de nouveaux crédits aux agents non-financiers) de cette mesure s’avère à priori très limité ; 1. Les entreprises qui émettent sur le marché obligataire euro IG bénéficient déjà de très bonnes conditions de financement. A l’opposé des PME qui sont plus durement touchées par le rationnement du crédit, elles n’ont pas été pénalisées par le durcissement des conditions d’octroi de prêts bancaires. Ces entreprises ont profité du fort appétit des investisseurs couplé à des taux historiquement bas pour allonger la maturité de leur dette et réduire significativement leur coût de financement. 2. Le marché euro IG souffre d’un déficit d’offre par les émetteurs (notamment financiers) depuis plusieurs années. Les besoins en financement de marché des banques ont fortement diminué sous l’effet des changements réglementaires, de la crise souveraine et surtout des mesures exceptionnelles de la BCE (LTRO et TLTRO). Dans le même temps, le besoin de financement des émetteurs non-financiers est resté limité, par défaut de demande agrégée. Pour ces raisons, une intervention de la BCE sur le marché des obligations privées d’entreprises aurait aujourd’hui un impact limité sur l’économie réelle. Cette mesure entraînerait une baisse (excessive) des rendements des obligations et déséquilibrerait davantage l’équation technique offre/demande du marché euro IG. Plus important encore, les conditions d’emprunts des PME demeureraient par ailleurs inchangées, de sorte que le véritable objectif de politique monétaire (relancer le crédit aux entreprises) serait manqué. Les motivations de la BCE sont probablement différentes… Ne serait-ce que pour tenter de satisfaire a minima les attentes déçues des marchés suite aux propos initiaux de Mario Draghi. En effet, ce dernier a déclaré que l’objectif visé par la BCE afin de relancer l’inflation était de ramener la taille de son bilan à son niveau de 2012, ce qui équivaut à une augmentation de 700 à 1000 Mds €. Cette cible ne pourra pas être atteinte uniquement via des achats d’ABS et de covered bonds, dont les marchés sont trop étroits; c’est le meilleur (si ce n’est le seul) argument en faveur d’un lancement d’un programme d’achat d’obligations d’entreprises. La liquidité étant limitée sur le marché secondaire, la BCE devrait se porter acheteuse sur le marché primaire, sachant que les émetteurs euro IG ont placé un montant total de plus 300 Mds € depuis le début de l’année. Une intervention de la BCE sur les marchés des obligations privées d’entreprises aurait aujourd’hui un impact limité sur l’économie réelle La zone euro se trouve à un stade crucial qui nécessite que le programme de la BCE (déjà suracheté par le marché) soit mis en place rapidement tel qu’annoncé aux marchés, ce qui inclut d’atteindre la cible de taille de bilan communiquée par Mario Draghi. La BCE ne doit pas, ou plutôt ne peut pas, se décrédibiliser davantage. En effet, une expansion trop lente du bilan de la BCE aboutirait à une appréciation de l’euro face au dollar, qui serait génératrice de pressions déflationnistes additionnelles. De ce point de vue, un programme ciblé sur les dettes d’État aurait plus de sens à plusieurs égards ; (i) sa faisabilité technique étant supérieure (marchés plus larges et profonds), (ii) ses chances d’accroître la taille du bilan de la BCE sont plus grandes tandis que (iii) son impact sur l’inflation est susceptible d’être bien plus marqué avec un véritable QE (achat d’obligations souveraines) qu’avec des mesures de credit easing comme celles proposées. Il reste cependant à résoudre le débat interne à la BCE à ce sujet, ce qui ne semble pas être une mince affaire, au regard des récentes déclarations. 48 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 9 2015 : une nouvelle donne pour les actions L’essentiel ÉRIC MIJOT, Stratégie et Recherche Économique – Paris Le premier semestre 2014 aura été favorable aux actions. Ce mouvement s’est interrompu début juin avec le retour des tensions déflationnistes en zone euro. Le marché de la zone euro aura été le premier à baisser ; les liens inter-marchés ont fait le reste. L’annonce du QE de la BCE a entraîné la hausse du dollar qui a fait baisser les prix des matières premières et les marchés émergents (début septembre). Puis les craintes sur la croissance globale ont entraîné le marché américain (mi-septembre). Fin septembre, c’est au tour du Japon de lâcher prise. En octobre, la baisse a été généralisée. Le contexte d’une croissance mondiale légèrement au-dessus de 3 % et d’une liquidité toujours abondante reste globalement porteur pour la classe d’actifs des actions à moyen terme. Cependant, les marchés d’actions sont dans une phase de transition, chacun à un stade différent du cycle. Le marché américain pourrait désormais évoluer sans grande tendance. La zone euro présente le plus de risque mais aussi le plus de potentiel. Entre les deux, le Japon a un profil potentiel-risque un peu moins élevé. Les émergents sont plus à considérer au cas par cas. Il est possible que ce mouvement de correction (qui compte déjà 2 jambes de baisse en Europe – voir graphique 1) se poursuive sur le début de 2015 avant de reprendre une allure plus constructive. En effet, on peut penser que le réajustement du risque des portefeuilles n’est pas tout à fait fini. Par ailleurs, il faudra encore attendre un ou plusieurs trimestres pour que le bas niveau des taux longs, du prix du pétrole et la faiblesse des devises des pays déflationnistes (zone euro, Japon) produisent leurs effets positifs sur l’économie et les profits des entreprises. Nous identifions 4 axes d’investissement : Si le passage de relais entre la Fed et les autres grandes banques centrales, BCE et BoJ en tête, a été un peu délicat, il débouchera sur une poursuite de la progression de la liquidité mondiale. Alors que la croissance globale devrait se maintenir au-dessus des 3 %, ce contexte reste dans l’ensemble favorable à la classe d’actifs des actions. Dans cette phase de transition, chaque marché est à un stade différent du cycle. 1. Positionnement dans le cycle : valeurs de croissance (États-Unis), reflation (zone euro), momentum des profits (Japon), importateurs de matières premières (émergents). 2. Des taux bas pour longtemps : stratégies de rendement (soutenabilité des dividendes, valeurs immobilières, rachats d’actions). Les États-Unis, en avance dans le cycle, sont entrés dans une phase plus mûre (phase iii de notre feuille de route) En mai 2013, le discours de B. Bernanke sur le tapering de la Fed marque le passage de la phase i à la phase ii (voir Discussion Paper Series DP-07 : « Le cycle court de l’investissement : notre feuille de route » et le graphique 2). Avant son intervention, le marché craignait la déflation et les actions évoluaient dans le même sens que les anticipations d’inflation (voir graphique 3). Après, le marché ne craignait plus la déflation sans pour autant redouter l’inflation, ce qui a constitué une période exceptionnellement positive pour les actions américaines ; tant que les anticipations d’inflation étaient étales, les actions grimpaient. 130 125 120 115 110 105 100 S&P 500 Composite 10-14 08-14 06-14 04-14 02-14 12-13 10-13 95 08-13 À ce stade, la valorisation ne nous apparaît pas non plus être un argument décisif pour trancher sur la direction du marché à l’horizon 12-18 mois. Si la valorisation peut apparaître comme un handicap pour la performance à long Indices actions États-Unis et zone euro (100 = avril 2013) 1 06-13 Cette phase du cycle de l’investissement est plus incertaine. Il est possible que le marché américain évolue sans grande tendance et que la volatilité reste présente. La baisse des prix du pétrole et des taux longs aideront l’économie à garder le cap d’une reprise graduelle au-dessus de son potentiel, estimé à 1,9 %. Faute d’accélérer, les profits des sociétés devraient au moins résister ; un petit chiffre de croissance est envisageable (entre 0 et 8 % dont 2 % dû à l’effet relutif des rachats d’actions). Une inflexion probable du discours de la Fed devrait aussi contribuer à rassurer ; la baisse des anticipations d’inflation va dans ce sens (voir graphique 3) ; elles s’approchent même des niveaux où la Fed avait lancé ses précédentes opérations de QE. Ce qui peut faire penser qu’elle pourrait à nouveau y recourir si nécessaire. Communiquer peut aussi s’avérer suffisant. Mais à l’inverse, toute amélioration notoire de la conjoncture fera ressurgir l’épée de Damoclès d’une hausse des taux directeurs que les marchés pourraient juger comme inadéquate. 4. Retour de la volatilité : préférer les grandes valeurs aux petites capitalisations. 04-13 L’anticipation de la fin effective du QE de la Fed marque le passage à la phase iii. Le recul des petites valeurs, l’incapacité du segment High Yield à battre ses plus hauts de l’année, le retour de la volatilité, fonction retardée de 18 à 24 mois de la politique monétaire, et la baisse des prix des matières premières corroborent cette thèse. 3. Divergence de politique monétaire entre États-Unis d’une part et Europe et Japon d’autre part : valeurs domestiques aux États-Unis, internationales en Europe et au Japon. MSCI EMU Source : Datastream, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 49 11 # Novembre 2014 terme des actions américaines (PER de Schiller à 26x les profits déclarés et 23x les profits opérationnels), le contexte de faible inflation justifie les niveaux actuels du PER (16,7x les profits des 12 derniers mois). En effet, selon le graphique 4, un régime d’inflation de 2 % est cohérent en moyenne avec un niveau de PER de 18x les profits connus. Comportement stylisé des principaux actifs financiers 2 La zone euro (phase i) est aussi entrée dans une phase de transition, plus en amont du cycle Vente Obligations Le MSCI EMU a connu une phase de « rerating » (le PER est passé de 8x à 14x depuis 2011 jusqu’à son point haut de 2014 avant de rebaisser récemment). Pour aller de l’avant, le marché doit désormais être tiré par l’amélioration des profits qui tarde à venir. Mais la transition entre ces deux phases est compliquée par la faiblesse de la croissance économique (inférieure à sa croissance potentielle de seulement 1,2 %) et le retour du risque de spirale déflationniste (probabilité de 30 % selon le FMI). Tendance du PIB Ceci dit, la faiblesse de l’euro devrait finir par ajouter une dizaine de pourcents à la croissance bénéficiaire si l’on intègre notre scénario sur le change (notamment euro dollar à 1,20 d’ici un an). Le consensus prévoit des profi ts en hausse de 15 % sur les 12 mois à venir. Ce chiffre est peut-être un peu élevé mais pas aberrant ; les révisions positives suite à l’effet change pourraient compenser celles relatives à l’atonie de la croissance domestique. Le fait que la BCE ait pris les choses en main est également favorable. Enfin, les initiatives de relance comme le plan Juncker (300 Mds €) sont une bonne chose. Le risque en zone euro tient plus au délai d’implémentation de ces bonnes intentions. Le ralentissement chinois, même maîtrisé, et la hausse du dollar, sont deux paramètres négatifs pour les matières premières, les devises et les marchés d’actions qui leur sont associés. Ce double mouvement a été très rapide ces dernières semaines et un mouvement de rappel est bien sûr possible. Mais la Chine conservera sa politique des petits pas pour gérer son ralentissement et la divergence de politique monétaire entre les États-Unis et le reste du monde est amenée à persister. En tendance, l’Asie émergente (importatrice de matières premières) devrait faire mieux que l’Amérique Latine (exportatrice de matières premières). Au niveau géographique, la zone euro pourrait finir par revenir sur le devant de la scène courant 2015. Mais au-delà des paris régionaux, il nous semble plus judicieux de travailler les marchés d’actions autour de thématiques transversales. 50 ii iii i iv Achat Obligations Achat Actions Achat Matières Première Assouplissement de politique monétaire Durcissement de politique monétaire Source : Recherche Amundi Le marché américain pourrait évoluer sans grande tendance Le Japon (proche de la phase ii) peut être considéré comme une alternative à la zone euro Quant aux marchés émergents (phase iv), ils sont sous la double infl uence de la Chine et du dollar US Préférer les Liquidités PIB Si le risque de déflation s’installe, il est clair que les niveaux d’évaluation seront revus à la baisse, de même que les profits (double peine). Et inversement si ces risques s’apaisent (double bonus). La mise en relation des PER avec les niveaux d’inflation sur longue période aux États-Unis nous rappelle en effet cette mécanique implacable (voir graphique 4). Aussi, la zone euro, qui évolue en phase i de notre schéma stylisé, est certainement la région du monde développé qui présente à la fois le plus de risque et le plus de potentiel (« high risk-high return »). Le Japon essaye lui aussi de sortir de déflation, mais a pris des mesures un peu plus tôt dans ce cycle ; les « Abenomics » ont démarré avant les « Draghinomics ». La baisse de 30 % du yen a permis une hausse de 75 % des profits en 2013. Le momentum à cet égard s’est ralenti mais reste positif (+6 % en 2014, +12 % en 2015 selon le consensus Ibes). Il devrait profiter d’une prolongation de l’accommodation de la BoJ alors que la croissance économique devrait bientôt croître au-dessus de son potentiel, estimé aux alentours de 0,7 %. Le Japon pourrait bien être proche de la phase ii de notre feuille de route. À court terme, il présente un profil potentiel-risque (« riskreturn ») moins élevé que celui de la zone euro. Vente Matières Premières Vente Actions 3 Marché américain : actions/obligations et breakeven 10 ans 9 Bernanke parle du tapering 4 8 7 3 6 2 5 4 3 2 2008 QE 2 OperaƟŽn Twist PEUR DE LA DEFLATION 2009 2010 Actions/Obligations 2011 2012 PAS ENCORE PEUR DE L'INFLATION 2013 1 0 2014 Breakeven 10 ans (Ech. D.) Source : Datastream, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 4. La volatilité restera présente et incitera à préférer les grandes capitalisations aux petites, moins liquides. [15 [12;15] [6;9] [9;12] [3;6] [0;3] [-3;0] [-6;-3] [-9;-6] [-12;-9] 3. La divergence de politique monétaire entre les États-Unis d’une part et l’Europe et le Japon d’autre part, devrait persister et le dollar devrait continuer de s’apprécier, ce qui favorise les valeurs domestiques aux ÉtatsUnis et les valeurs internationales en Europe et au Japon. [-15;-12] 2. Les taux resteront longtemps bas : les stratégies de rendement sont à privilégier sous différentes formes. On s’intéressera à la soutenabilité des dividendes ou aux « rachats d’actions » aux États-Unis. Le rendement attractif est une des caractéristiques des valeurs européennes en général. Le secteur de l’immobilier coté retrouve aussi de l’intérêt au sein des pays développés. 20 18 16 14 12 10 8 6 4 2 0 -15 1. Le positionnement dans le cycle de l’investissement : il suggère d’avoir une approche plus conservatrice aux États-Unis en s’intéressant aux valeurs de croissance : technologie et santé. En Europe, il faut garder une approche en faveur de la reflation (banques) et au Japon, le momentum des profits. Au sein des émergents, il faut encore privilégier les pays importateurs de matières premières (Asie, Inde en particulier). PER et inflation aux États-Unis depuis 1914 4 PER Nous identifions 4 axes d’investissement pour 2015 : Régimes d'inŇaƟŽn Médiane 20-inflation Source : Datastream, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 51 11 # Novembre 2014 10 Actions européennes : L’essentiel préférences sectorielles en période de faible croissance et faible inflation Étant donné la faiblesse de la conjoncture européenne, les taux d’intérêt vont demeurer bas et l’euro sera sous pression pendant longtemps. Comme par ailleurs, les ratios du marché européen se sont déjà renchéris, l’évolution des bénéfices va devenir cruciale. IBRA WANE, Stratégie et Recherche Économique – Paris Depuis le début de l’année, le MSCI Europe est en légère baisse (-2 % au 23/10) avec une nette surperformance des secteurs défensifs (+5 % relatif). Peu marquées à mi-année, ces tendances se sont affirmées avec la décélération de la croissance et des prix en zone euro. Depuis lors, on a assisté en effet à un retour en force des fi nancières (+4 % relatif du 30/6 au 23/10) et des défensives (+2 % relatif) au détriment des cycliques (-3 % relatif) et surtout de l’énergie (-10 % relatif). Dans ce contexte de taux durablement bas, on privilégiera tout d’abord les stratégies de reflation (banques) et plus largement de dividendes (assurance, immobilier, pharmacie, télécom) ainsi que les secteurs dotés d’une bonne visibilité relative en matière de momentum bénéficiaire. Ultérieurement, avec l’extinction progressive des couvertures de change, l’effet bénéfique de l’euro faible devrait monter en puissance et bénéficier plus particulièrement à certains secteurs comme le luxe, la pharmacie, l’agroalimentaire, l’automobile, les produits domestiques et les biens d’équipement. Plus largement, lorsqu’on analyse les performances par secteur en Europe depuis le début de la crise, on s’aperçoit nettement qu’il y a eu un avant et un après Draghi. Le graphique 1 souligne l’importance de ces deux dates charnières : le krach de Lehman en septembre 2008 et le fameux « what ever it takes » de M. Draghi en juillet 2012. Si le MSCI Europe est quasiment demeuré stable depuis 2008 (+3 %), ceci est la résultante d’une baisse de 16 % sur la 1re période et d’un rebond de 23 % sur la seconde. Par ailleurs, les secteurs ont évolué de façon parfois très différente selon les périodes. Par exemple, si les financières ont réalisé l’une des plus mauvaises performances cumulées depuis 2008, avec -26 %, c’est néanmoins la thématique qui a le mieux performé depuis Draghi avec +45 %. À l’inverse, l’énergie qui avait bien résisté en relatif avant Draghi (-6 % absolu et +11 % relatif) a sous-performé depuis (-7 % absolu et -30 % relatif). On voit ainsi qu’au fur et mesure du cycle d’investissement, les secteurs en vue peuvent varier en fonction de leur sensibilité au régime de croissance et de taux d’intérêt. Après un bref rappel de l’environnement actuel, nous verrons ensuite quelles incidences cela peut avoir sur nos préférences sectorielles 2015. Entre une croissance atone, des pressions défl ationistes persistantes et un endettement qui demeure problématique, les perspectives économiques de la zone euro demeurent fragiles. En retour, ceci suggère des taux d’intérêts très bas et un euro plus compétitif pour une période prolongée, ce qui est assurément positif… à moyen terme ! Un avant et un après Draghi À plus court terme cependant, les investisseurs vont continuer de se poser de nombreuses questions tant en ce qui concerne : - l’Europe, avec l’efficacité des mesures envisagées par la BCE (assouplissement quantitatif) et l’Union Européenne (programme d’investissements public et privé), De Lehman (Sep. 08) à Draghi 56% 58% 51% Depuis Draghi (Juil 12) Depuis Sept. 2008 40% 0% -20% -12% -15% -1% 52 Santé MSCI Europe Conso. discret. Industrielles Source : Datastream, Recherche Amundi Conso. courante -26% IT -32% -2% Télécoms -40% -60% 3% 9% 20% Energie Concernant nos préférences sectorielles 2015, rappelons au préalable notre grille de lecture récurrente. En premier lieu, nous analysons les secteurs à l’aide d’une cartographie 3D permettant d’identifi er simultanément les secteurs plus ou moins richement valorisés, plus ou moins consensuels et ceux dont la dynamique progresse ou non (cf. Spécial Focus du 10 janvier 2013 sur la méthodologie de l’allocation sectorielle actions). Le résultat fi nal n’est pas une allocation type mais c’est à tout le moins un outil précieux permettant de 60% Matériaux Dans ce contexte, alors que les ratios du marché européen se sont déjà renchéris de près de 50 % depuis juillet 2012 (PE Forward de 9,5x alors à 14,0x aujourd’hui) et que les résultats étaient censés prendre le relais dès 2015, ces multiples interrogations jettent une ombre. En attendant qu’une clarifi cation s’opère d’ici quelque mois, les actions européennes pourraient demeurer volatiles alternant les périodes d’abattement et de rebond technique. 80% Financières - la Chine où l’atterrissage en douceur, relativement réussi jusqu’à présent, n’a pas épuisé les interrogations sur les surcapacités de production, la situation du marché immobilier, celle du système bancaire et des collectivités locales. Performances du MSCI Europe par secteur depuis septembre 2008 1 Sv. collectifs - les États-Unis, avec les nouvelles orientations de la Fed à l’issue du tapering et le tour des futures discussions budgétaires après les élections de mi-mandat, Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 s’interroger sur les opportunités (assurances, banques, immobilier, pharmacie, services collectifs, télécom) et les pièges potentiels du marché (automobile, biens d’équipement, luxe, équipements & services de santé). En second lieu, compte tenu d’un environnement où la croissance sera durablement faible, les taux d’intérêt très bas, la devise plus compétitive et la visibilité réduite, notre allocation privilégiera plus particulièrement : - les secteurs sensibles aux bas taux d’intérêt, - et les secteurs dotés d’une bonne visibilité relative en matière de momentum bénéficiaire. Dans un troisième temps seulement, on complétera cette approche par les secteurs les plus à même de bénéfi cier d’un effet change favorable, car, compte tenu des couvertures en place, ce phénomène pourrait prendre trois à six mois avant de commencer à impacter les résultats. À l’issue de ces différents fi ltres – cartographie 3D, sensibilité au taux d’intérêt, momentum bénéficiaire, impact de l’effet change – nous effectuons un classement (cf. tableau) permettant de dégager nos préférences sectorielles. Concernant les secteurs sensibles aux bas taux d’intérêt, ce vocable désigne tout à la fois ceux dont a. le dividende est élevé (cf. graphique 2) et idéalement en progression et b. ceux dont les résultats bénéficient d’un net effet de levier quand les taux diminuent ; les deux caractéristiques allant parfois de pair mais pas nécessairement. Dans la première catégorie fi gure par exemple des secteurs comme l’assurance, l’énergie et la pharmacie, dans la seconde les télécoms et dans les deux à la fois les banques et l’immobilier. En revanche, malgré un dividende élevé, la distribution alimentaire nous semble présenter trop peu de visibilité en matière de résultats et, partant, de distribution. 2 Semis & Equip. Equip. & Svs Santé Logiciels & Svs Prod. dom & soins Luxe Svs. Part. Tech. Hwre & Equip. Svs. Prof. Transport Pharmacie Ali. & Tabac Retailing Matériaux Autos Biens Equip. Div. Fin Media MSCI Europe Banques Distrib. Ali. Immobilier Svs. collectifs Télécoms Assurance Energie Le tableau page suivante classe et regroupe en trois catégories – surpondérer, neutre, sous-pondérer – nos préférences sectorielles 2015. La pharmacie qui cumule un bon mapping sectoriel, un bon momentum bénéficiaire, une très forte exposition internationale et un dividende convenable conserve la 1re note du classement avec un total de 8 points. Viennent ensuite l’assurance et la banque, avec 7 points puis les services collectifs et l’immobilier avec 6 points. Le point commun de ces quatre secteurs est d’avoir un bon mapping, un bon momentum bénéficiaire, un très bon rendement et / ou une sensibilité positive au taux d’intérêt mais une faible sensibilité au taux de change. Ce dernier élément ne devrait pas constituer un obstacle tant que la visibilité et le rendement seront privilégiés, mais ceci pourrait être plus pénalisant d’ici quelques mois si l’horizon se dégage. 3,8% 0% 1% 2% 3% Source : Factset, Recherche Amundi Concernant la visibilité en matière bénéficiaire il y a différentes façons d’approcher le sujet. Une démarche qualitative permet de distinguer les business model les plus solides. À cette aune-là, le luxe où les biens d’équipements sont très bien classés. Mais la qualité des fondamentaux nous renseigne peu sur les dynamiques de court terme. Pour cela, nous suivons une démarche plus quantitative, le net-up, qui mesure le solde net mensuel de révisions bénéficiaires des BPA des 12 derniers mois en pourcentage du nombre total de révisions. Selon cet indicateur, malgré la qualité de leurs fondamentaux, le luxe et les biens d’équipement ont eu de très mauvais scores de net-up en se classant respectivement 22e et 17e parmi 24 secteurs au cours des trois derniers mois. À l’inverse, les logiciels & services dont les fondamentaux sont plus discutés, avec une valorisation relative au plus bas depuis 12 ans, affichent pourtant un net-up enviable avec une surprenante 2e place. Concernant l’impact du change sur les résultats, dans le Cross asset du mois précédent nous indiquions qu’une baisse de 10 % du taux de change effectif de l’euro aurait un impact de l’ordre de +12,5 % sur les résultats. Cet impact ne sera toutefois pas le même selon qu’il s’agisse d’un secteur très ouvert ou non à l’international. Le graphique 3 montre ainsi que le luxe, les produits alimentaires & boisson & tabac, l’automobile, les produits domestiques & soin personnel, les biens d’équipement ainsi que les équipements & services de santé seront a priori plus concernés que la moyenne. MSCI Europe : rendement du dividende 2014e 4% 5% 6% Privilégier le momentum bénéficiaire, la sensibilité aux bas taux d’intérêt et à un euro faible 3 MSCI Europe : % des ventes hors d’Europe Immobilier Retailing Svs. collectifs Télécoms Svs. Part. Assurance Transport Banques Logiciels & Svs Distrib. Ali. Svs. Prof. Media MSCI Europe Equip. & Svs Santé Biens Equip. Div. Fin Prod. dom & soins Autos Ali. & Tabac Tech. Hwre & Equip. Matériaux Pharmacie Energie Luxe Semis & Equip. 36% N.M. N.M. N.M. N.M. 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% Source : Factset, Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 53 11 # Novembre 2014 En milieu de tableau figurent les secteurs classés en neutre. Le point commun de l’automobile, des biens d’équipement et du luxe est leur mauvais mapping sectoriel ; la catégorie « Pièges potentiels (?) » désignant des secteurs relativement prisés des investisseurs mais dont les dynamiques récentes se dégradent. En revanche, ces trois secteurs seraient parmi les premiers bénéficiaires d’un euro plus faible. La balance des deux éléments est donc neutre pour l’instant mais pourrait évoluer plus favorablement dans les prochains mois. Concernant l’énergie, son score neutre, malgré un excellent rendement, est lié aux interrogations sur la dynamique bénéficiaire qui, si elles se confirmaient pourraient peser sur la capacité de distribution. Les logiciels & services et la technologie ne sont ni des secteurs de rendement, ni très sensibles à la devise, mais ils présentent un bon score de révision bénéficiaire. Ces deux secteurs délaissés pourraient ainsi être redécouverts si ceci se confirmait. Un classement multicritère pour mettre en lumière les lignes de force En bas de classement, fi gurent 9 secteurs dont le mapping est au mieux quelconque (la catégorie « positif & consensuel » n’est pas un gage de surperformance future car l’aspect consensuel annihile une bonne part de l’aspect positif…), le rendement plutôt en dessous de la moyenne ou entaché de visibilité (distribution alimentaire), la dynamique bénéficiaire médiocre et l’exposition internationale peu décisive. MSCI Europe : préférences sectorielles multicritères Score Classement Secteurs Europe 8,0 Sur pondérer Pharmacie Opportunités ? 2. Rendement du dividende & sensibilité BCE 3,3 % Assurance Opportunités ? 5,1 % 7,0 1. Mapping secteurs 3. rang EPS momentum 3M 4. Rang % CA international 3 2 5 14 7,0 Banques Opportunités ? 4,1 % 8 12 6,0 Services collectifs Opportunités ? 5,0 % 7 17 6,0 Immobilier Opportunités ? 4,4 % 4 19 5,0 Télécoms Opportunités ? 5,0 % 13 16 5,0 Alimentation, Boi & Tab Neutre 3,3 % 18 3 5,0 5,0 4,5 4,5 Prod. Dom & soins Medias Autos Biens d'équipement Neutre Positif & consensuel 2,4 % 3,6 % 12 6 5 8 Piège potentiel ? Piège potentiel ? 3,4 % 3,4 % 21 17 4 6 Neutre 4,5 Luxe Piège potentiel ? 2,5 % 22 1 4,5 Énergie Négatif & consensuel 5,6 % 23 NS 4,5 Logiciels & services Négatif & consensuel 2,0 % 2 11 4,5 Tec Hardware Equip Négatif & consensuel 2,7 % 1 NS Sous pondérer Distribution alimentaire Négatif & consensuel 4,2 % 24 10 Financières diversifiées Neutre 3,5 % 15 NS 4,0 Transport Positif & consensuel 3,2 % 11 12 3,0 Matériaux de base Neutre 3,4 % 20 NS 4,0 4,0 3,0 Semi-conducteurs Neutre 1,4 % 10 NS 3,0 Services aux entreprises Positif & consensuel 3,0 % 16 9 2,0 Equip. & Svs de santé Piège potentiel ? 1,7 % 14 7 2,0 Retailing Positif & consensuel 3,3 % 19 18 2,0 Services aux particuliers Neutre 2,6 % 9 15 Pour conclure, les perspectives économiques de la zone euro demeurent fragiles et les investisseurs continueront de se poser de nombreuses questions à court terme. C’est pourquoi, avec des taux d’intérêt durablement bas, nous continuerons de privilégier les stratégies de refl ation (banques) et de dividendes, ainsi que la visibilité en matière de momentum bénéficiaire. Dans un second temps, avec l’extinction progressive des couvertures, l’effet bénéfique de l’euro faible devrait monter en puissance de même que les effets auto-stabilisateurs du bas prix du pétrole et des taux bas sur la croissance mondiale. C’est pourquoi il conviendra de rester attentif à certains secteurs comme l’automobile, le luxe ou les biens d’équipement qui sont parfois décriés aujourd’hui mais qui pourraient être réhabilités demain. 54 Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 11 # Novembre 2014 Prévisions macroéconomiques et financières PRÉVISIONS TAUX 2 ANS Consensus T2 2015 1,14 Forward + 6m. 0,93 Amundi + 12m. 1,20/1,40 États-Unis 0,52 Amundi + 6m. 0,80/1,00 Allemagne -0,06 0,00/0,20 0,02 -0,03 0,00/0,20 0,11 -0,02 Japon 0,02 0,00/0,20 0,09 0,03 0,00/0,20 0,12 0,04 Royaume-Uni 0,68 1,20/1,40 1,68 1,03 1,60/1,80 2,09 1,43 05/11/2015 Amundi + 6m. 2,60/2,80 0,80/1,00 0,60/0,80 2,60/2,80 Amundi + 12m. 2,60/2,80 0,80/1,00 0,80/1,00 2,60/2,80 Consensus T4 2015 3,37 1,54 0,85 3,36 Forward + 12m. 2,67 0,99 0,60 2,55 05/11/2015 Consensus T4 2015 1,66 Forward + 12m. 1,42 PRÉVISIONS TAUX 10 ANS États-Unis Allemagne Japon Royaume-Uni 2,34 0,82 0,47 2,25 Consensus T2 2015 3,03 1,27 0,72 3,15 Forward + 6m. 2,52 0,90 0,53 2,41 PRÉVISIONS TAUX DE CHANGE Amundi + 6m. 1,20 120 1,56 1,02 6,83 7,75 1,15 0,85 0,75 05/11/2015 EUR/USD USD/JPY GBP/USD USD/CHF USD/NOK USD/SEK USD/CAD AUD/USD NZD/USD 1,25 114 1,60 0,96 6,84 7,37 1,14 0,86 0,77 Consensus T2 2015 1,22 113 1,60 1,00 6,57 7,50 1,15 0,85 0,76 Amundi + 12m. 1,20 125 1,60 1,02 6,75 7,75 1,15 0,85 0,75 Consensus T4 2015 1,20 115 1,59 1,02 6,58 7,6 1,14 0,84 0,75 PRÉVISIONS MACROÉCONOMIQUES - AMUNDI Croissance du PIB réel, % Moyennes annuelles (%) États-Unis Japon Zone euro Allemagne France Italie Espagne Pays-Bas Grèce Portugal Irlande Royaume-Uni Russie Turquie Chine Inde Indonésie Brésil Pays développés Pays émergents Monde Inflation (IPC, a/a, %) 2013 2014 2015 2016 2013 2014 2015 2016 2,2 1,5 -0,4 0,5 0,3 -1,9 -1,2 -0,7 -3,9 -1,4 0,2 1,7 1,3 4,1 7,7 5,0 5,8 2,5 1,5 4,8 3,3 2,2 1,1 0,8 1,3 0,4 -0,3 1,3 -0,1 -0,4 0,4 1,9 3,0 0,3 2,5 7,4 5,4 5,2 0,3 1,7 4,5 3,3 2,6 1,3 1,0 1,3 0,7 0,2 1,7 0,9 1,8 1,1 2,2 2,3 1,0 3,0 7,1 6,0 5,4 1,4 1,9 4,9 3,5 2,7 0,8 1,1 1,6 0,9 0,4 1,6 1,6 3,7 1,7 2,5 2,4 1,5 3,7 6,8 6,5 5,8 2,2 1,9 5,0 3,6 1,5 0,3 1,3 1,6 1,0 1,3 1,5 2,5 -0,9 0,5 0,6 2,6 6,8 7,5 2,6 9,5 6,4 6,2 1,7 4,6 3,3 1,8 2,6 0,4 0,9 0,6 -0,3 -0,5 1,2 -0,4 0,8 1,2 1,7 7,4 9,0 2,3 7,8 6,0 6,3 1,4 4,4 3,1 1,5 1,5 0,6 1,1 0,5 0,2 0,2 0,9 -0,4 0,8 1,2 1,9 7,3 7,0 2,5 7,5 6,7 5,9 1,3 4,5 3,1 1,8 2,6 0,9 1,5 0,8 0,5 0,5 1,0 1,1 1,5 1,2 2,0 6,0 6,5 3,0 6,7 6,1 5,6 1,6 4,4 3,2 Source : Recherche Amundi Document à l’usage exclusif des clients professionnels, prestataires de services d’investissement et autres professionnels du secteur financier 55 MENSUEL 11 Novembre 2014 # Publications récentes Amundi Research Center Top-down Asset Allocation Bottom-up Corporate Bonds Fixed Income Working Papers The Art of Tracking Corporate Bond Portfolios L. GOUZILH, M. DE JONG, H. WU - Quantitative Research & T. LEBAUPAIN Portofolio Management at Amundi - High Yield Do Social Responsibility Screens Really Matter? A Comparison with Conventional Sources of Performances MARIE BRIÈRE - Research Analyst – Paris, JONATHAN PEILLEX - University of Picardie Jules Verne, LOREDANA URECHE-RANGAU - University of Picardie Jules Verne Is your Portfolio Effi ciently Diversifi ed? GIANNI POLA - Quantitative Research – Paris Discussion Papers Series Le cycle court de l’investissement : feuille de route ÉRIC MIJOT - Stratégie et Recherche Économique OK conference… a video, a a article, for an Search for arch Amundi Rese Center Gérer l’incertitude avec le concept DAMS (Diversifi cation Across Macroeconomic Scenarios) : de la segmentation des actifs à la gestion de portefeuille HEADLINES exchan ge modifi es its this have? e centra l bank The Chines What effects will rate policy… structur al impleme nt has major needs to that Chinacapital account . This to… its appears been aware liberalis e first step We have long wants to c policy. A NTS reforms, and for its economi MY DOCUME ADD TO consequ ences MORE u READ THOUGHT EXPERT TALK Talk 4 - Expert mics, Japan – Abeno by unexp ected challe nged was filled pheno mena in Japan the 4 - Thought March, On the 6th projectio ns. macroec onomic MY DOCUME ADD TO talk - Expert 4 in : What' s next Real Estate marke ts? g in 2H13… the Europ ean 11.03.201 of the Day projec tions ECB inflati on the ECB publishe d its new of 11, ever ywherefor the victims three On March sympathy ke and tsunami with renewed who offered ented earthqua unpreced Prime Minister Abe,centre of Tokyo, years ago. their souls at the unbearab le output… prayers for uncomfo rtable with industria l might feel weaknes s. While economic L’immobilier physique dans l’allocation d’actifs à long terme : le cas de la France % 1.5 11.03.201 14.03.201 SIMONE FACCHINATO - Gestion d’actifs – Milan, GIANNI POLA - Recherche Quantitative – Paris D MOST REA OF THE DAY s improvin the end onomic indicator news since Macro-ec tion of good widespre ad The accumula 2013 confirms onomic climate. of summerent in the macro-ec improvem MY DOCUME ADD TO MY DOCUME ADD TO NTS NTS NTS CÉCILE BLANCHARD - Recherche Immobilier, SYLVIE DE LAGUICHE, ALESSANDRO RUSSO Recherche Quantitative — Paris Stratégies Smart Beta : diversifi cation, investissement à faible risque et plus encore… ALESSANDRO RUSSO - Recherche Quantitative – Paris ISR et performance : impact des critères ESG dans les gestions actions et crédit F i E h Foreign Exchange Money Markets Equities Retrouvez l’ensemble de notre expertise sur le site : research-center.amundi.com Monetary Policies Forecasts Investment Strategies Quant Emerging Markets Sovereign Bonds Private Equity Real Estate High Yield FLORIAN BERG, SYLVIE DE LAGUICHE, TEGWEN LE BERTHE, ALESSANDRO RUSSO Recherche Quantitative, ANTOINE SORANGE - Analyse Extra Financière – Paris Spécial Focus Faut-il aller vers plus de régulation des fonds de pension en Europe ? Impact sur les allocations d’actifs (risque et procyclicité) LING-NI BOON - Recherche, Stratégie et Analyse, MARIE BRIERE - Recherche, Stratégie et Analyse, SANDRA RIGOT - CEPN – Paris Entropie, diversifi cation et frontière ineffi ciente GIANNI POLA - Recherche Quantitative – Paris Correspondants Rédacteur en chef – PHILIPPE ITHURBIDE Directeur Recherche, Stratégie et Analyse – Paris Rédacteurs en chef adjoints – DIDIER BOROWSKI – Paris, RICHARD BUTLER – Paris, ÉRIC MIJOT – Paris, SHIZUKO OHMI – Tokyo, STÉPHANE TAILLEPIED – Paris Support – PIA BERGER Recherche, Stratégie et Analyse – Paris – BENOIT PONCET Responsable Éditions - Recherche, Stratégie et Analyse – Paris AVERTISSEMENT Directeur de la publication : Pascal Blanqué Rédacteur en chef : Philippe Ithurbide Les destinataires de ce document sont en ce qui concerne l’Union Européenne, les investisseurs « Professionnels » au sens de la Directive 2004/39/CE du 21 avril 2004 « MIF », les prestataires de services d’investissements et professionnels du secteur financier, le cas échéant au sens de chaque réglementation locale et, dans la mesure où l’offre en Suisse est concernée, les « investisseurs qualifiés » au sens des dispositions de la Loi fédérale sur les placements collectifs (LPCC), de l’Ordonnance sur les placements collectifs du 22 novembre 2006 (OPCC) et de la Circulaire FINMA 08/8 au sens de la législation sur les placements collectifs du 20 novembre 2008. Ce document ne doit en aucun cas être remis dans l’Union Européenne à des investisseurs non « Professionnels » au sens de la MIF ou au sens de chaque réglementation locale, ou en Suisse à des investisseurs qui ne répondent pas à la définition d’« investisseurs qualifiés » au sens de la législation et de la réglementation applicable. Ce document n’est pas destiné à l’usage des résidents ou citoyens des États Unis d’Amérique et des « U.S. Persons », telle que cette expression est définie par la « Regulation S » de la Securities and Exchange Commission en vertu du U.S. Securities Act de 1933. Le présent document ne constitue en aucun cas une offre d’achat ou une sollicitation de vente et ne peut être assimilé ni à sollicitation pouvant être considérée comme illégale ni à un conseil en investissement. Amundi n’accepte aucune responsabilité, directe ou indirecte, qui pourrait résulter de l’utilisation de toutes informations contenues dans ce document. 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