la hongrie dans le systeme sovietique

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AP 219
EC/EW (97) 7
Original: anglais
SOUS-COMMISSION SUR LA COOPERATION
ET LA CONVERGENCE EST-OUEST
LA HONGRIE DANS LE SYSTEME SOVIETIQUE
PROJET DE RAPPORT INTERIMAIRE
M. KEES ZIJLSTRA (PAYS-BAS)
RAPPORTEUR*
Secrétariat international
*
4 septembre 1997
Aussi longtemps que ce document n’a pas été approuvé par la Commission économique, il ne
représente que les vues du rapporteur.
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i
TABLE DES MATIERES
I. INTRODUCTION - LA HONGRIE DANS LE SYSTÈME SOVIÉTIQUE .................................. 1
II. LE GOUVERNEMENT HORN - L’AUSTÉRITÉ VOULUE PAR LA GAUCHE ....................... 3
III. LE PROBLEME DE LA CROISSANCE ECONOMIQUE ........................................................ 7
IV. LE MARCHE DU TRAVAIL ..................................................................................................... 9
V. LA PRIVATISATION ............................................................................................................... 10
V. LA SITUATION COMMERCIALE ........................................................................................... 14
VI. LA BANQUE CENTRALE ET LE SECTEUR FINANCIER .................................................. 15
VII. L’AGRICULTURE ................................................................................................................. 17
VIII. LES PERSPECTIVES POLITIQUES .................................................................................. 19
IX. CONCLUSIONS .................................................................................................................... 21
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I.
1
INTRODUCTION - LA HONGRIE DANS LE SYSTEME
SOVIETIQUE
1.
Toute évaluation générale de l’économie hongroise et de son passage du socialisme à
des structures de marché doit en premier lieu prendre en compte les éléments propres à une
économie de marché qui étaient déjà en place avant la disparition de l’ancien ordre
communiste. Si l’invasion soviétique de la Hongrie en 1956 mit un terme à la brève
expérience de pluralisme politique du peuple hongrois, les autorités communistes n’en
commencèrent pas moins, dans les années qui suivirent, à expérimenter des modèles
alternatifs à l’économie dirigée soviétique.
2.
C’est ainsi qu’en 1968, les autorités communistes autorisèrent les forces du marché à
jouer un plus grand rôle quant aux décisions relatives aux investissements, à la production et
à la fixation des prix, tout en continuant à surveiller étroitement l’orientation économique
générale de la Hongrie en restreignant l’accès au capital et en limitant la taille des entreprises
privées. Les prix des producteurs étaient désormais censés refléter leur valeur réelle sur le
marché, et l’Etat recalculait partiellement les prix industriels, les prix à la consommation et,
dans une moindre mesure, les prix agricoles. Les bénéfices devaient servir à garantir les
primes à la productivité et les nouveaux investissements, auxquels une plus grande
importance était accordée qu’aux objectifs de production. Il n’en demeure pas moins que les
restrictions, les subventions et les taxes instaurées par le gouvernement pour protéger
certains secteurs économiques entraînaient une considérable distorsion des prix sur le
marché intérieur.
3.
L’Etat confirma son contrôle sur les investissements et la fixation des prix dans les
années 70, en partie pour répondre à la récession mondiale associée à la crise des prix
énergétiques de 1973. Lorsque le déficit des comptes courants atteignit une hauteur
historique en 1978, la réponse du gouvernement consista toutefois à faire du développement
des exportations une priorité absolue. Les responsables reconnaissent aujourd’hui que c’est
une réforme des prix à la consommation et à la production qui aurait été impérative pour
corriger ce déséquilibre extérieur. Au fil des années 80, le gouvernement réforma en partie le
système de taxation, assouplit les réglementations sur les salaires et encouragea les
initiatives au niveau des entreprises par le biais d’une dérégulation modérée. En 1987, une
réforme importante mit sur pied un système bancaire à deux niveaux, tandis que la création
de banques commerciales permettait à la Banque centrale de se concentrer sur le contrôle de
la masse monétaire et sur le financement du déficit budgétaire de l’Etat. Les investissements
étrangers directs commencèrent en outre à affluer en Hongrie bien avant 1989, mais cet
apport de capitaux s’avéra être une arme à deux tranchants. Comme les réformes n’étaient
pas suffisamment ambitieuses pour supprimer la mainmise de l’Etat sur l’économie et mettre
un terme au régime privilégié réservé aux monopoles d’Etat, aucune structure de prix
rationnelle ne se matérialisa jamais vraiment. Les distorsions de prix en Hongrie, résultant des
subventions restantes, des contrôles administratifs, de la taxation et du soutien systématique
de l’Etat aux grandes entreprises au détriment des PME, étaient donc similaires à celles qui
handicapaient les autres anciens pays du COMECON. Une structure de prix rationnelle est
manifestement essentielle pour garantir le déploiement correct des investissements et, en
Hongrie communiste, la plupart des capitaux affluant dans le pays furent donc dilapidés. En
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2
conséquence, la dette extérieure s’accrut encore pour atteindre 11 milliards de dollars au
début des années 80 1 et le crédit intérieur ne fut que très peu alimenté. Les anciens dirigeants
communistes abandonnèrent ainsi derrière eux un secteur public envahissant, des grandes
industries inefficaces et dépendantes des subventions, un ensemble complexe de
programmes sociaux qui se sont avérés politiquement difficiles à rationaliser, une dette
élevée, une inflation galopante et une structure budgétaire complexe.
4.
En dépit de ce sérieux problème d’endettement, la Hongrie possédait certains éléments
d’une économie de marché et les acteurs du marché affichèrent, avant les autorités, leur
volonté d’adopter des structures capitalistes. A de nombreux égards, l’expérience contribua à
préparer le pays au changement paradigmatique qui devait survenir dans le courant des
années 90. L’ouverture relative de la Hongrie avait exigé de certaines entreprises d’entamer
une restructuration dans les années 80 et leurs dirigeants d’obédience virtuellement
capitaliste avaient déjà établi des liens commerciaux et financiers avec l’Occident.
5.
Les premières années de la transition se caractérisèrent par de formidables fluctuations
des principaux indicateurs économiques. L’inflation parvint à un sommet en 1991, les prix à la
consommation augmentant de 35 %,2 avant de commencer à diminuer en 1992-1993, puis de
repartir à la hausse. En 1991, la balance commerciale enregistra un excédent, mais se
dégrada rapidement ensuite. L’importance des dépenses de l’Etat et la demande à la
consommation alimentaient une croissance du niveau des importations qualifiée
d’insoutenable par les responsables du FMI. Les emprunts souscrits à l’étranger contribuaient
à financer le déficit budgétaire, mais les primes de risque associées à l’incertitude politique,
l’inflation et l’importance du recours à l’emprunt par l’Etat poussaient les taux d’intérêt à la
hausse. Cela représentait une lourde charge pour l’économie. De plus, une nouvelle
législation en matière comptable affectant les secteurs de la banque et du commerce révéla
soudain que des entreprises censées être bénéficiaires étaient en réalité en faillite. 3 Entre
1990 et 1992, la production industrielle s’effondra, avant de se redresser en 1993-1995 en
raison de l’expansion des marchés à l’exportation. 4 Certains commencèrent alors à comparer
la situation internationale et nationale de la Hongrie à celle du Mexique, également confronté
à un grave problème d’endettement à l’époque. 5 Jusqu’en 1995, les gouvernements
postcommunistes hongrois ont fait preuve de lenteur pour résoudre cette myriade de
problèmes, même si certaines réformes importantes sont intervenues au début des années
90.
1
"Hungary", Economist Intelligence Unit, Londres, 1997, p. 3
2
Ibid, P. 15
3
Rencontre de la Sous-commission avec M. Riecke Werner, directeur général de la Banque nationale de
Hongrie, 20 mars 1997
4
Op. cit., note 1, p. 10
5
Rencontre de la Sous-commission avec M. Szabolcs Fazakas, ministre de l’Industrie et du Commerce
hongrois, 20 mars 1997
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II.
3
LE GOUVERNEMENT HORN - L’AUSTERITE VOULUE PAR
LA GAUCHE
6.
Le rythme des réformes s’est cependant formidablement accéléré en 1995, avec
l’accession au pouvoir du gouvernement de coalition de Gyula Horn. Tout le monde pensait
que ce gouvernement ralentirait, voire abandonnerait, les réformes. Or, le parti socialiste de
M. Horn (MSZP) et l’alliance libérale des démocrates libres (SZDSZ) ont démenti ces
prévisions en entreprenant d’énormes efforts pour moderniser l’Etat hongrois et établir une
distinction plus nette entre ledit Etat et le marché.
7.
En mars 1995, le ministre des Finances, M. Lajos Bokros mettait en oeuvre un
programme d’austérité draconien pour réduire les dépenses de l’Etat et de consommation,
s’attaquer radicalement à l’inflation, limiter l’accroissement endémique du déficit des comptes
courants et du recours à l’emprunt extérieur, et donc entraîner une diminution des taux
d’intérêt. Ce programme incluait une politique des revenus et une dévaluation par étapes,
mensuelle et annoncée anticipativement, du forint, afin de permettre au taux de change de
mieux refléter les prix relatifs. Ces douloureuses réformes n’ont pas tardé à produire leurs
effets : la balance des comptes courants s’est améliorée de façon marquée et le niveau de la
dette extérieure a commencé à diminuer. Le déficit des comptes courants pour 1996 a atteint
1,7 milliard de dollars, entièrement couvert par des investissements directs étrangers. En
1995, ce déficit avait atteint 2,5 milliards de dollars, exclusivement couverts par le recours à
l’emprunt. Ces mesures ont ralenti la spéculation sur le forint. La dette extérieure représentait,
fin 1996, 62 % du PIB, contre 71,5% l’année précédente. 6
8.
La confiance internationale dans l’économie hongroise s’est fortement raffermie et de
récentes émissions de bons du Trésor de la Banque nationale se sont négociées à un taux de
base de 20 points seulement au-dessus du LIBOR ( London Inter Bank Offered Rates), alors
qu’il était de 150 points au-dessus du LIBOR l’année passée. 7 Les réserves en devises fortes
ont doublé et sont passées à 12 milliards de dollars entre 1994 et 1995, en raison, dans une
large mesure, des rentrées apportées par la privatisation et de l’amélioration des comptes
courants.8 De 1995 à 1996, les dépenses publiques totales (hors intérêts) en pourcentage du
PIB sont passées de 53 % à 40 % environ9 : une étape importante, mais qui a représenté une
dure épreuve. Le coût de l’unité de travail a diminué de 8,7 % en 1995,10 tandis que les
salaires réels chutaient de 12 %, puis de 4 à 5 % supplémentaires en 1996. 11 La diminution
des salaires a, à son tour, fait chuter la demande intérieure de manière spectaculaire, en
6
“Recent economic developments in Hungary”, National Bank of Hungary, Juillet 1997
7
Ibid.
8
Ibid.
9
Ibid.
10
"Saving Graces", The Economist, 9 novembre 1996
11
Rencontre de la Sous-commission avec M. Laszlo Akar, 20 mars 1997
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4
particulier pour les biens de consommation. 12 Les analystes attribuent le ralentissement de la
croissance économique (entre 0 et 1 % en 1996) à cet effondrement de la demande.
9.
D’autre part, la baisse des salaires et les créations d’emplois ont permis au niveau du
chômage de demeurer relativement inchangé à un niveau de 10 à 11 %, mais pour la
première fois depuis longtemps, le nombre de personnes actives a augmenté de 10.000 au
cours du premier trimestre 1997 par rapport au premier trimestre 1996 Il s’agit là d’un résultat
assez impressionnant lorsqu’on considère l’effondrement des réseaux commerciaux vitaux du
COMECON et le fait que de nombreux travailleurs hongrois ont été licenciés à la suite de la
disparition de vieux dinosaures industriels et de la restructuration de nombreuses autres
entreprises.13 Un écart croissant entre les revenus fait son apparition en Hongrie entre l’élite
naissante et la classe laborieuse. C’est ainsi, par exemple, que la sous-commission a appris
que l’écart de salaires entre les travailleurs de General Electric-Tungsram à Budapest et les
travailleurs de General Electric dans les pays d’Europe de l’Ouest est approximativement de
8 pour 1. Pour les emplois de directi on, cet écart n’est toutefois que de 3 pour 1. 14 La
divergence croissante en matière de revenus constitue un élément habituel de la transition
économique. Toutefois, si les salaires réels et le niveau de vie au bas de l’échelle des
revenus ne progressent pas très bientôt, de nouvelles tensions politiques pourraient se
manifester.
10. Les politiques fiscale et monétaire plus rigoureuses du gouvernement Horn ont en outre
ralenti d’inquiétantes tendances en matière d’accroissement du déficit et d’inflation. Le déficit
budgétaire central atteignait 130,4 milliards de forints (791 millions de dollars) en 1996, en
excluant les recettes liées aux privatisations. Cela représente quelques 100 milliards de
forints (606 millions de dollars) de moins qu’attendu, en raison des revenus générés des
droits de douane et de l’impôt sur les sociétés. Le déficit des finances publiques pourrait
même tomber à 3,2 % du PIB en 1996 et le budget principal à fi n 1996 affichait un excédent
de 4,3% 15. Si le service de la dette demeure assez élevé puisqu’il représente 4 % du PIB, un
haut responsable du ministère des Finances nous a révélé que l’endettement global de l’Etat
est passé de 90% à 70 % du PIB (1996).. 16 L’objectif consiste à ramener ce chiffre en dessous
du seuil de Maastricht, fixé à 60 %. Il n’en demeure pas moins que le budget 1997, que le
gouvernement a établi en considérant que l’inflation reculerait des 23 % de l’année dernière à
18 %, prévoit un déficit de 309,7 milliards de forints (1,93 milliard de dollars), soit 50 millions
de dollars de plus que les prévisions. 17 Enfin, le recouvrement de l’impôt demeure
problématique et la situation est encore aggravée par une fraude fiscale généralisée.
12
Op. cit., Note 6.
13
Op. cit., Note 3.
14
Réunion de la sous-commission avec les directeurs de GE-Tungsram à Budapest, 21 mars 1997
15
Op. cit. , Note 6.
16
Ibid.
17
BNA's Eastern Europe Reporter, 13 janvier 1997
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5
11. Le régime d’austérité imposé par M. Lajos Bokros a valu à la Hongrie les
applaudissements de la communauté financière internationale. Les analystes considèrent que
tant l’octroi récent par le FMI d’un prêt de 387 millions de dollars que l’admission de la
Hongrie au sein de l’OCDE constituent un vote de confiance sur la crédibilité du programme
gouvernemental. 18 Disposant désormais de réserves suffisantes pour couvrir 8 mois
d’importations, la Hongrie ne se voit pas contrainte de dépenser ces fonds et n’en a d’ailleurs
pas l’intention. 19 En mars 1996, le gouverneur de la Banque centrale a annoncé que la
Hongrie s’apprêtait à rembourser 1,5 milliard de dollars de sa dette extérieure avant
échéance. Il s’en est suivi une réduction de la dette extérieure nette à 8 milliards de dollars
pour la fin 1996, soit le niveau le plus bas depuis 10 ans. Les responsables considèrent le
prêt du FMI comme un soutien supplémentaire pour de difficiles mesures d’austérité et
chacun des audits périodiques obligatoires menés par le FMI comme autant d’examens de
passage pour leur politique.
12. Des règles de marché transparentes et souvent rigoureuses ont réduit de manière
spectaculaire l’anxiété des investisseurs étrangers. Cela s’avère crucial pour encourager
l’afflux de capitaux et les investissements en Hongrie, où les investissements étrangers
directs par tête d’habitant atteignent 129 dollars, contre 58 dollars en République tchèque et
40 dollars en Pologne. 20 Ces investissements étrangers totalisent désormais 13 milliards de
dollars,21 soit environ la moitié de tous les investissements en Europe centrale et orientale. 22
Récemment, IBM, Philips, Ford et Audi ont annoncé leur intention d’agrandir leurs
installations de fabrication en Hongrie, ce qui révèle une confiance internationale d’un niveau
élevé dans la direction adoptée par le gouvernement et un sentiment de plus en plus répandu
que la Hongrie offre un contexte propice et favorable aux affaires.
13. Si 1995 a été une année de compression sévère des dépenses, l’année dernière a
toutefois été marquée par un relâchement des efforts, au grand déplaisir de certains
économistes. En février 1996, M. Lajos Bokros a présenté sa démissi on après le refus du
gouvernement de soutenir une nouvelle série d’efforts. M. Horn a chargé
M. Peter Medgyessy, ministre des Finances en 1987 et président de la Banque hongroise
d’investissement et de développement, de le remplacer.M. Peter Medgyessy est le huitième
ministre des Finances hongrois en neuf ans, ce qui révèle les difficultés de la situation
économique du pays. Il s’est engagé à maîtriser les dépenses publiques et à les aligner sur
les recettes, tout en améliorant le système de sécurité sociale par le biais d’une réforme des
pensions et des soins de santé. 23 M. Medgyessy est toutefois politiquement plus prudent que
18
19
"Government says membership in OECD to bolster ties, cut borrowing costs", BNA's Eastern Europe
Reporter, 9 avril 1996.
"The War Minister", Central European, February 1997, p. 11
20
Ibid.
21
“Dream On”, Business Central Europe, février 1997, page 24.
22
Ce chiffre pourrait tomber à 35 %. Voir Anatol Lieven, "Hungary poised for modest recovery", Financial
Times, 9 avril 1997
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son prédécesseur, et le processus de réforme semble avoir pris du retard à la fin de l’année
dernière. Cela s’explique en partie par la réticence des syndicats et par une résistance à
l’encontre de certaines réformes au sein même du gouvernement. 24 Certains redoutent que la
circonspection de M. Peter Medgyessy retarde le calendrier de restructuration de
l’administration publique et des systèmes sociaux et de pension, qui connaissent une situation
précaire. Etant donné que les dépenses de l’Etat continuent à représenter plus de la moitié du
PIB, des nouvelles mesures d’économie sont sans aucun doute nécessaires. Enfin, bien que
l’austérité ait freiné la demande des consommateurs, les investissements ont progressé, 25 de
même que les bénéfices. 26
14. M. Peter Medgyessy considère la lutte contre l’inflation comme sa principale priorité. Il
fait valoir que si la hausse des prix ne marque pas une pause et que les taux d’intérêt ne
continuent pas à diminuer, la réforme structurelle des secteurs bancaire et industriel n’aura
que peu d’impact sur l’économie. 27 Il annonce que l’inflation atteindra un taux à un seul chiffre
pour l’an 2000 et déclare que le gouvernement est décidé à réduire le taux de croissance des
prix de 5 % par an. L’objectif de l’année dernière a été atteint : l’inflation pour 1996 s’est
cantonnée à 23 %, contre 28 % l’année précédente. 28 L’objectif, cette année, consiste à
ramener l’inflation à 18 %, en dépit de récentes hausses du prix de l’électricité (35 %), de
l’essence (11 %) et des appels téléphoniques locaux (31 %).29 Des hausses des prix des
transports et des services publics sont également prévues. Ces nouveaux tarifs reflètent plus
adéquatement les prix relatifs réels, ce qui est considéré par les responsables comme
indispensable pour que les efforts anti-inflationnistes du gouvernement soient couronnés de
succès.30 Le Premier Ministre Horn a demandé au Président de la Banque Nationale et au
Ministre des Finances de ramener l’inflation en deçà de 10% d’ici le début 1998. Le
gouvernement a en outre promis d’accroître les dépenses en matière d’enseignement
supérieur, de culture et d’infrastructure économique. Cela incite à penser que même la
réduction de 5 % du taux d’inflation comme cela s’est vu l’année dernière pourrait s’avérer
particulièrement difficile, même si le marché envisage de moins en moins la possibilité d’une
tendance inflationniste.
23
Zsofia Szilagyi, "Slowing the Pace of Economic Reform",Transition, vol. 2, n° 20, Octobre 1997, p 40.
24
Ibid.
25
Op. cit., Note 3.
26
Op. cit., Note 11.
27
"The War Minister", Central European, February 1997, p. 10.
28
Ibid.
29
“Dream On”, Business Central Europe, février 1997, page 24.Op. cit., Note 6.
30
Op. cit., Note 3.
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III.
7
LE PROBLEME DE LA CROISSANCE ECONOMIQUE
15. L’un des domaines de préoccupation réside dans la croissance relativement faible de la
Hongrie. La croissance du PIB n’a atteint qu’environ 1 % en 1996,31 bien loin donc des taux
de croissance de 5 % prévus pour la Pologne et la République tchèque. Certains analystes
considèrent qu’il s’agit là d’un problème temporaire, des séquelles de politiques de transition
draconiennes, incluant de larges pans des secteurs industriel et bancaire couplées à des
mesures d’austérité monétaire et fiscale conçues pour réduire l’absorption et le déficit des
comptes courants. 32 Il est un fait qu’une faible croissance puisse être le prix à payer pour
surmonter une grave crise de liquidités, associée à des obligations souscrites envers
l’étranger, une demande intérieure élevée et une inflation endémique. Les trois principaux
partis s’accordent dans l’ensemble à considérer qu’il n’existe pas de solutions keynesiennes
au problème de la croissance ; ils considèrent que la restructuration de l’offre est à présent la
clef d’une croissance soutenue. Les responsables affichent un optimisme prudent et estiment
que la croissance devrait atteindre 2,5 % au cours de l’année à venir. Les premières
indications semblent confirmer ces estimations. Entre-temps, l’Etat doit rationaliser et
améliorer l’économie nationale, l’infrastructure sociale et des transports, tout en sabrant dans
les programmes qui entraînent des gaspillages et en prenant de nouvelles initiatives en
matière de privatisation. Il s’agit là d’un programme pour le moins chargé !
16. La réussite économique de la Hongrie dépendra également de son aptitude à s’intégrer
dans les marchés régionaux, européens et mondiaux. La taille réduite de la Hongrie et son
ouverture croissante aux marchés mondiaux contraignent son industrie à concevoir des
produits concurrentiels qui répondent aux exigences des marchés étrangers. Même s’il existe
un large consensus politique quant à la nécessité d’améliorer les fondements
macroéconomiques, de stimuler la compétitivité et d’intégrer totalement la Hongrie au marché
unique européen (70 % de l’opinion publique se prononce en faveur de l’accession à l’Union
européenne),33 la manière dont les sacrifices seront consentis et l’ampleur réelle de la
compression des dépenses demeurent une source d’affrontement politique.
17. Il ne fait aucun doute que l’ampleur suivant laquelle les gouvernements d’Europe
centrale parviendront à rationaliser des secteurs gouvernementaux hypertrophiés, à éliminer
les distorsions de prix résultant des subventions et d’autres formes de protection, à ouvrir
leurs économies à la concurrence internationale et à encourager une augmentation de
l’épargne et des investissements jouera un rôle essentiel dans la réussite économique. Mais il
y a d’autres mesures que les responsables hongrois doivent prendre, telles que la
dérégulation industrielle, la poursuite des privatisations et la rationalisation des soins de santé
et des pensions. La Hongrie a fait des progrès sur plusieurs de ces fronts, mais il lui reste un
long chemin à parcourir. Les dépenses gouvernementales (à l’exclusion des intérêts)
31
Op. cit., Note 6.
32
Planecon, par exemple, prévoit un taux de croissance de 3 % en Hongrie au cours de l’année à venir, et
ce, même si les responsables hongrois se montrent, quant à eux, plus circonspects ; Op. cit., Note 3.
33
Rencontre de la Sous-commission avec des responsables du ministère des Affaires étrangères, 21 mars
1997..
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continuent à représenter 40 % du PIB (en comparaison, le chiffre pour les membres à faibles
revenus de l’Union européenne est de 44,3 % et il est de 46,6 % pour la République
tchèque).34. Les investissements représentent 21,3 % du PIB (contre 23 et 30,4 %.). 35
L’épargne atteint 17,1 % du PIB (contre 20,1 et 18,8 %). La faiblesse du taux d’épargne
hongrois est en partie structurelle, en raison des sommes très considérables allouées par
l’Etat aux personnes âgées. Les personnes du troisième âge représentent 20,2 % de la
population active, ce qui indique qu’il s’agit là d’un problème à long terme, qui continuera à
peser lourdement sur le budget de l’Etat et donc sur l’épargne nationale.
18. Les investissements étrangers progressent de manière soutenue (les investissements
étrangers directs totalisent, en cash, 13,3 milliards de dollars, soit plus de la moitié de
l’ensemble des investissements étrangers réalisés en Europe centrale et orientale). A eux
seuls, ils ne peuvent cependant se substituer à un taux d’épargne intérieur plus important
comme base des capitaux d’investissement. En raison du manque d’efficacité du système, de
la fraude fiscale et de la situation démographique, le système hongrois des pensions affaiblit
gravement la capacité du pays à accroître son épargne et à générer des ressources pour
financer de nouveaux investissements. Un système des pensions inefficace faiblement lié aux
marchés des capitaux augmente invariablement le coût des capitaux financiers, réduit les
investissements et mine les perspectives à long terme de développement national. Le
problème se pose avec une acuité particulière en Hongrie, où il y a un retraité pour cinq
personnes au travail. 36 Le déficit combiné des fonds de pension et de santé a atteint 73
milliards de forints (417 millions de dollars) en 1996. L’objectif négocié avec le FMI était de
101 millions de dollars. 37
19. Le gouvernement a approuvé et le Parlement a approuvé une réforme en profondeur du
système des pensions destiné à remplacer l’actuel système de prélèvements automatiques
par un programme en trois volets qui, s’il est approuvé par le parlement, sera mis en oeuvre
l’année prochaine. Le FMI a salué cette initiative. D’après le plan , une partie des cotisations
de retraite acquittées par l’employeur et l’employé irait à des fonds privés, et ceux qui
souhaitent épargner davantage pourraient payer des sommes supplémentaires à ces fonds.
L’actuel système de prélèvements automatiques serait complété par des versements
obligatoires à des fonds de pension privés et le paiement des retraites serait fonction des
contributions versées sur des comptes individuels. Le troisième pilier du plan impliquerait des
34
Les économies en croissance rapide inclues dans cette statistique sont le Chili, Hong-Kong, la Corée du
Sud, la Malaisie, l’île Maurice, Singapour, Taiwan et la Thaïlande. Voir "Tigers or tortoises?", The
Economist, 26 octobre 1996. Voir également "Achieving Rapid Growth in the Transition Economies of
Central Europe" de Jeffrey Sachs et Andrew Warner, HIID Development Discussion Paper n° 544, juillet
1996
35
Les pays à faibles revenus de l’Union européenne inclus dans cette statistique sont l’Espagne la Grèce,
l’Irlande et le Portugal.
36
Tigers or tortoises’, The Economist, 26 octobre 1996.
37
"Cabinet Approves Sweeping Reform Plan That Would Bolster Funds, Capital Markets" BNA's Eastern
Europe Reporter, 24 mars 1997.
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contributions volontaires à des fonds de pension privés. Une pension de vieillesse serait
payée aux personnes de plus de 6 2 ans dont les revenus sont inférieurs à 80 -95 % de la
retraite la moins élevée. Le pourcentage de la cotisation de retraite serait graduellement
augmenté et les contributions à des fonds privés pourraient être volontairement augmentées
jusqu’à 10 % et seraient déductibles fiscalement. Les personnes qui effectuent leur entrée
dans le monde du travail relèveraient automatiquement du nouveau système. Celles qui
prévoient de travailler pendant quinze années supplémentaires au moins pourraient choisir
entre les deux systèmes. Les paiements effectués par les fonds de pension privés seraient
garantis par l’Etat et les montants des retraites relevant du système des prélèvements
automatiques seraient liés à l’index des prix à la consommation et au salaire nominal.
Actuellement, l’accroissement des retraites est exclusivement lié aux augmentations salariales
nominales.38 L’année dernière, le parlement a porté l’âge de la retraite à 62 ans pour les
hommes et les femmes d’ici à l’an 2009. La réforme des pensions élargira (??) le marché des
capitaux domestiques et permettra aux fonds de pension de jouer un rôle de plus en plus
important sur les marchés des mobiliers actuellement dominés par les investisseurs
étrangers. On pense que ces organismes auront accumulé 781 milliards de forints d'ici 2005,
soit 4,2 % du PIB. 39
IV.
LE MARCHE DU TRAVAIL
20. La réduction des subventions, l’effondrement du CO MECON, la loi rigoureuse de 1992
sur les faillites et la restructuration industrielle de ces dernières années ont contribué à
entraîner une chute précipitée de la production et une augmentation très marquée du
chômage, qui a culminé à la mi-1993 à 13,6 %. En décembre 1995, le chômage était tombé à
10,2 % et, fin 1996 , il se situait aux alentours de 10,5 %, à un niveau proche de la moyenne
de l’UE.40 Ces chiffres consolidés dissimulent toutefois des variations régionales. C’est ainsi
que Budapest présente un taux de chômage beaucoup plus bas (5,7 % en décembre 1995)
que les régions industrielles, où il dépasse encore 20 %. Comme le chômage est
naturellement plus élevé chez les travailleurs non qualifiés, cela a sans nul doute contribué à
la victoire du parti socialiste hongrois aux élections de 1994. Les salaires réels ont encore
diminué de 4,4 % au cours des huit premiers mois de 1996, et ce n’est qu’en 1989 et en 1994
seulement, que la Hongrie a connu une forte augmentation des salaires réels. 41 Les
rigoureuses mesures d’austérité de 1995 n’ont pas entraîné une augmentation du chômage.
L’ajustement à la baisse des salaires indique en outre un certain degré de flexibilité salariale
qui a contribué à préserver les emplois. D’autre part, le fait que le chômage n’ait pas
fortement progressé en 1995-1996 peut contribuer à expliquer pourquoi il n’y a pas eu
davantage de protestations sérieuses à l’encontre de la politique draconienne du
gouvernement. Le niveau de l’emploi devrait quelque peu progresser l’année prochaine.
38
Ibid.
39
Margit Fher & Jack Grone “Hungary’s Pension Reforms Aid Private Funds”, The Wall Street Journal, 23
juillet 1997
40
Op. cit., Note 6.
41
Ibid.
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10
21. Les emplois dans les grandes entreprises ont reculé d’environ 8 % en 1994, tandis que
les emplois dans les petites sociétés s’accroissaient de 6 %.42 Ces tendances reflètent
l’importance croissante du secteur hongrois des services. Même sous la houlette communiste,
les Hongrois étaient réputés être des entrepreneurs actifs, mais la récente imposition fiscale
des indépendants constitue une véritable douche froide pour l’esprit d’entreprise. Pour tenter
de mettre un terme aux échappatoires permettant aux indépendants de se soustraire aux
cotisations sociales, le gouvernement a porté la contribution mensuelle de tous les
indépendants à 49 % des revenus, avec un minimum de 7 650 forints (45 dollars). Lorsqu’on
considère le salaire moyen de 328 dollars en août 1996 43, ce chiffre constitue un véritable
frein pour les entrepreneurs éventuels. 44 Certains membres du gouvernement s’interrogent sur
l’opportunité d’un niveau d’imposition à ce point dissuasif. En effet, de très nombreux
indépendants sont repassés au travail au noir, qui représente environ 30 % du PIB.45 Une
mesure proposée consisterait à diminuer de moitié la contribution des indépendants qui
travaillent également à temps partiel. L’impôt maximum sur le revenu est de 42 % pour les
particuliers, tandis que l’impôt des sociétés est de 18 %. Les entreprises étrangères acquittent
en outre une taxe sur les dividendes de 18 %.46
V.
LA PRIVATISATION
22. A la différence de ce qui se passe en République tchèque, la privatisation en Hongrie ne
repose pas sur le système des coupons et n’a donc jamais suscité une participation des
masses. Si le système des coupons présente l’avantage manifeste de permettre à tous les
citoyens de devenir actionnaires, il peut aussi embrouiller la signification du terme « droit de
propriété », tout en obscurcissant singulièrement la prise de décision dans les entreprises
privatisées.
23. Suite au mouvement de privatisation en Hongrie, près de 70% des biens autrefois
propriété de l’état étaient passés aux mains du secteur privé fin 1996. La part du secteur privé
dans le PIB oscille entre 75 et 80% . Une nouvelle élite de chefs d’entreprise est donc en
position de procéder à davantage de changements fondamentaux et audacieux au niveau
microéconomique. La méthode préférée de privatisation consiste à vendre directement les
actifs à des citoyens Hongrois ou à des étrangers. Les appels d’offres et les offres au
comptant constituent les moyens typiques par le biais desquels des personnes ou des
groupes font l’acquisition d’actifs appartenant à l’Etat, même si des rachats par l’encadrement
et des prêts « d’existence » (des prêts parrainés par le gouvernement, accordé s à des PME
ou à des indépendants à des taux d’intérêt préférentiels) ont également été utilisés au début
de la décennie. On estime que 800 000 emprunteurs ont bénéficié de ces prêts, dont les taux
42
Ibid.
43
Business Central Europe, The Annual, 1996/97
44
Kester Eddy, "Hungarians go back to their old life",Financial Times, 19 février 1997
45
Op. cit., Note 11.
46
Op. cit., Note 11.
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d’intérêt pouvaient être de moitié inférieurs au taux du marché. Nombreux sont toutefois les
emprunteurs qui ont fait ultérieurement faillite, mais la Banque centrale a couvert les pertes,
car elle était caution solidaire. Le gouvernement a, depuis lors, arrêté le programme sous sa
forme première, pour en faire un véritable outil de complément de revenu.
24. Au cours du processus de transition, les gouvernements différents ont, dans une large
mesure, évité les solutions de « semi-privatisation », même si l’Etat continue à détenir des
parts dans un certain nombre d’entreprises. Treize entreprises industrielles de taille
importante qui enregistrent des pertes, les « 13 canards boiteux », ont par exemple été
soustraites au processus de privatisation car leurs résultats financiers n’étaient guère
susceptibles de susciter l’intérêt des investisseurs. L’agence de privatisation d’Etat APV Rt.
supervisa alors leur restructuration, par le biais de « programmes de gestion de crise
industrielle »47, et nombre de ces entreprises ont, depuis lors, été privatisées ou sont sur le
point de l’être. Certaines d’entre elles, comme Ruba, génèrent d’ailleurs à présent de
substantiels bénéfices à l’exportation. 48 Ces entreprises ont cependant subi une profonde
reconfiguration. Le constructeur d’autocars Icarus produisait jadis quinze mille véhicules par
an. Après une tentative avortée de privatisation, l’Etat a supervisé sa restructuration. La
société fortement rationalisée issue de ce processus honore actuellement 3 000 commandes
par an et est bénéficiaire. 49 Il convient encore de privatiser certaines parties de l’industrie
déficitaire de l’acier et les responsables sont arrivés à la conclusion qu’il valait mieux ne pas
approcher le problème comme une question sectorielle, mais plutôt sous son aspect régional
en raison de la concentration élevée d’usines de ce type dans l’est de la Hongrie. Trois
centrales thermiques n’ont, par deux fois, pu susciter des offres acceptables, en raison de leur
vétusté, de l’importance des coûts potentiels de remise en état et de la surabondance du
personnel.50 En dépit de ces problèmes, le processus de privatisation est à présent bien
avancé. D’après les estimations, 7 5 à 80 % du PIB sont générés par un secteur privé dont la
composition va des indépendants aux multinationales. Les 30 % restants incluent non
seulement les quelques rares entreprises qui doivent encore être privatisées, mais également
le secteur public : les postes, les chemins de fer, les fonctionnaires et les professeurs.
25. Fondée en 1990, l’Agence des propriétés de l’Etat (SPA)) a assuré la gestion de
1 848 sociétés dans le but de les restructurer ou de leur trouver des acquéreurs adéquats.
Deux années plus tard, le gouvernement a créé la Société des holdings publiques pour
assurer la gestion des firmes directement placées sous le contrôle de l’Etat. Après deux ans,
elle détenait des intérêts dans 158 entreprises.51 Le gouvernement a alors adopté une
nouvelle loi sur les privatisations en mai 1995, qui a conduit à la fusion des deux organismes.
. La Société hongroise des holdings publiques et des propriétés d’Etat (APV Rt) est désormais
chargée de générer des revenus en vendant des sociétés dont l’Etat détient la totalité ou une
47
BNA's Eastern Europe Reporter, 4 novembre 1996
48
Op. cit., Note 5
49
Ibid.
50
Kester Eddy, "Hungary seeks new power bids",Financial Times, 14 février 1997.
51
Ibid.
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partie des actions, généralement contre paiement comptant. Elle a toutefois aussi parfois
recours à la cession des actions au personnel et à d’autres techniques. 52
26. En 1996, Marta Tocsik, juriste indépendant, a été accusée d’avoir réalisé des profits
personnels de 4,7 millions de dollars en rémunération de son rôle d’intermédiaire dans la
négociation de contrats entre la holding et différents conseils municipaux répartis dans tout le
pays.53 Le Premier ministre a licencié l’ensemble du conseil de gestion au début octobre, y
compris le ministre des Privatisations, M. Tamas Suchman, qui a été remplacé par Judit
Csiha, du ministère de la Justice. Quant à M. Arpad Kovacs, de la Cour des comptes, il a été
nommé président du conseil de gestion de la APV Rt. M. Kovacs a promis d’exercer des
contrôles plus stricts et de conférer plus de transparence au processus de privatisation. Il
s’est en outre engagé à concentrer les activités de l’agence sur la gestion des actifs qu’elle
conserve. Le gouvernement espère conclure le processus de privatisation en 1997, bien qu’il
répugne à fixer des dates butoirs, susceptibles d’avoir un effet défavorable sur les prix de
vente finals.54
27. Un second et très important élément du processus de privatisation réside dans le fait
que les capitaux étrangers et nationaux sont sur un pied d'égalité. Les dirigeants nationaux
avaient, avant cela, reconnu que, depuis de nombreuses années, la faiblesse de l'épargne
plaçait les hongrois en très mauvaise position pour acquérir les actifs disponibles. Cela
explique la décision d'ouvrir les privatisations aux investisseurs internationaux. En raison de
la taille très réduite du marché intérieur, la réussite économique repose sur les liens
susceptibles d'être établis entre l'économie nationale et les marchés mondiaux. Les
investissements étrangers directs sont essentiels en la matière et les responsables travaillent
d'arrache-pied à favoriser l'afflux de capitaux par le biais du processus de privatisation et de
la formation de coentreprises, ainsi qu'en encourageant les investissements par implantation
propre (greenfields) ces derniers représentant d'ailleurs actuellement 70 % des
investissements étrangers directs. 55
28. La croissance relativement faible de la Hongrie (qui affiche cependant une progression
de 2,5% pour le premier trimestre 1997) peut également être considérée comme une manière
de jeter les bases d’une croissance ultérieure. Le fait de juguler la consommation a généré
des capitaux pour de nouveaux investissements, ce qui améliore en fin de compte les
perspectives économiques à long terme. Les acteurs économiques sont apparemment du
même avis. En 1996, la Bourse hongroise a enregistré la deuxième croissance la plus rapide
au monde. De nombreux analystes pensent que le renchérissement de la valeur des actions
traduit la foi du marché dans les possibilités qui s’offrent à l’économie hongroise et, en
particulier, aux entreprises cotées à la Bourse hongroise. En d’autres termes, ce gigantesque
afflux de capitaux ne repose pas simplement sur la spéculation, mais constitue aussi une
52
Op. cit., Note 1, p. 13.
53
Wall Street Journal Europe, 11 février 1997.
54
.Op. cit., Note 47.
55
Op. cit., Note 52.
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véritable reconnaissance des perspectives dont bénéficient les entreprises hongroises cotées
en bourse.
29. Il est manifeste que l’ouverture de la Hongrie aux capitaux étrangers porte ses fruits.
Des sociétés étrangères sont désormais présentes à part entière ou sous la forme de
coentreprises dans de nombreux secteurs essentiels, dont la vente en gros et au détail,
l’alimentation, la construction, l’énergie et les produits pharmaceutiques. C’est ainsi, par
exemple, que IBM fabrique des lecteurs de disques en Hongrie et génère plus de 1,2 milliard
de dollars à l’exportation, tandis que Suzuki, Audi, Ford et General Motors y assemblent des
voitures ou y fabriquent des pièces.56 GE a racheté Tungsram et réalise désormais une
grande partie de ses recherches dans des laboratoires hongrois. Les responsables
considèrent l’émergence de PME spécialisées dans la fourniture de composants comme la
prochaine étape du développement d’une économie plus articulée. De nombreux fabricants
étrangers présents en Hongrie se tournent vers des fournisseurs locaux pour parvenir à une
rotation plus rapide et à une diminution des stocks de leurs produits. Les fournisseurs locaux
de composants sont appelés à jouer un rôle essentiel en matière de croissance soutenue à
long terme.
30. La moitié environ de tous les investissements étrangers réalisés en Europe centrale et
orientale est allée à la Hongrie. 57 L’Allemagne constitue le principal investisseur, avant, dans
l’ordre, les Etats-Unis, l’Italie et l’Autriche. La qualification de la main-d’oeuvre, un système
d’enseignement relativement performant et des niveaux de rémunération qui, pour les
ouvriers, peuvent être jusqu’à huit fois inférieurs à ceux pratiqués pour des fonctions
comparables en Europe occidentale rendent la Hongrie particulièrement attirante pour les
investisseurs étrangers, de même d’ailleurs que le fait que la plupart des entreprises
privatisables ont d’ores et déjà été restructurées. 58
31. Tant les investisseurs étrangers que les sociétés hongroises continuent toutefois à être
confrontés aux restrictions qui frappent l’acquisition de terrains. Même si les responsables
reconnaissent que ces restrictions rendent très difficile la rationalisation du système agricole,
handicapé d’autre part par la sous-capitalisation et la fragmentation, l’assouplissement de ces
restrictions se heurte à une forte opposition politique.
32. En raison de la taille relativement modeste du marché hongrois et de la faiblesse
actuelle de la demande, les investisseurs étrangers considèrent le pays comme une base
potentielle pour des opérations au niveau régional. A long terme toutefois, la demande
intérieure devrait être redynamisée. Comme, en Hongrie, de nombreux dirigeants d’entreprise
ont rationalisé leurs activités, réduit le personnel et disposent d’intéressants réseaux de
clients et de fournisseurs à l’étranger, leurs firmes s’avèrent particulièrement séduisantes pour
les investisseurs étrangers désireux d’être présents sur ce marché régional en pleine
expansion. Le processus de privatisation proprement dit ne représente que la moitié des 15
56
Op. cit., Note 5.
57
Visite de la Sous-commission avec M. Zoltan Gal, Président du parlement, 20 mars 1997.
58
Op. cit., Note 14.
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milliards de dollars d’investissements étrangers directs dont a bénéficié la Hongrie à ce jour,
l’autre moitié ayant été affectée à la création de nouvelles entreprises et de nouvelles
usines.59
VI.
LA SITUATION COMMERCIALE
33. Depuis 1990, la base industrielle de la Hongrie est moins concentrée et moins axée sur
l’industrie lourde. Le processus pour parvenir à ce résultat a toutefois été douloureux.
L’effondrement du COMECON, la pénurie des capitaux, la libéralisation du commerce et la
crise financière de l’Etat ont supprimé des entreprises et des emplois. Les investisseurs
étrangers et nationaux saluent la ténacité avec laquelle la nouvelle élite de chefs d’entreprise
hongrois a restructuré de nombreuses entreprises privatisées, tout en les exposant à la
discipline des prix des marchés internationaux. A court terme, ce processus engendre du
chômage, mais les chefs d’entreprise hongrois réduisent les effectifs et augmentent
l’agressivité commerciale de leurs firmes afin qu’elles soient concurrentielles au niveau
international et qu’elles attirent des partenaires étrangers. Les investissements étrangers
affluent en Hongrie grâce à la transparence du marché, l’absence d’ambiguïté quant à la
composition de l’actionnariat et l’intérêt que présentent les sociétés ouvertes aux capitaux qui
ont déjà fait l’objet d’une rigoureuse restructuration. Les investisseurs étrangers sont
évidemment moins susceptibles d’acquérir des sociétés qui se singularisent par une pléthore
de personnel et des systèmes d’administration et de comptabilité archaïques.
34. La loi sur les faillites de 1992 a renforcé les efforts de restructuration, tout en excluant
virtuellement la survie des entreprises déficitaires. Cela a permis l’élimination d’une grande
partie du « bois mort ». Certains ont cependant fait valoir que la loi était si rigoureuse qu’elle
ne laissait aux firmes confrontées à des difficultés passagères que peu de chances de
résoudre leurs problèmes. C’est pourquoi elle a été assouplie, afin d’apporter des solutions
plus constructives aux problèmes associés au manque temporaire de liquidités. 60 En Hongrie,
les actifs non productifs ont été effacés de manière relativement brutale, tandis que les
travailleurs étaient remerciés. Cela a engendré à court terme de graves problèmes politiques,
mais a aligné le pays sur les tendances internationales, tout en encourageant la
restructuration radicale des entreprises, la compression des coûts et l’accroissement de la
productivité. Depuis 1994, la productivité industrielle s’est nettement accrue, mais, en 1995, la
production industrielle n’atteignait encore que 75 % de son niveau de 1990.
35. Les petites et moyennes entreprises (PME) se développent à un rythme impressionnant,
avec les promesses que cela suppose pour l’avenir. Il est toutefois difficile de mesurer leur
statut réel. Les charges fiscales élevées et les obligations en matière de pensions qui pèsent
sur les PME encouragent la sous-évaluation des bénéfices, tout en incitant de nombreux
entrepreneurs potentiels à entrer dans l’économie parallèle.
59
D'après le ministres des Finances, M. Medgyessy, voir "The War Minister", Central European, février 1997,
p. 11.
60
"Hungary", EBRD Economic Review, juillet 1993, p. 67.
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36. La Hongrie constituait probablement le pays le plus dynamique de l’ancien COMECON,
ce qui lui avait permis d’établir un important marché régional pour ses produits. La
déliquescence du commerce régional engendrée par l’effondrement du COMECON s’est donc
avérée particulièrement dommageable pour les entreprises hongroises. Les responsables
hongrois consacrent de nombreux efforts pour rétablir ces relations commerciales, qui
reposent sur des fondements aussi bien historiques que géographiques. L’Accord de libreéchange centre-européen a permis à la Hongrie, à la République tchèque, à la République
slovaque, à la Pologne et à la Slovénie de supprimer les droits de douane sur 90 % des
produits industriels qu’elles échangent entre elles. 61
37. La Hongrie a adhéré à l’OMC et a conclu un accord d’association avec l’UE. Elle est à
présent invitée à négocier les conditions de son accession à cet organisme.
er
Le 1 janvier 1997, elle a diminué ses tarifs douaniers à l’importation, tout en supprimant le
droit pour statistiques de 1 % et les frais de dédouanement de 12 % qui pesaient sur les
importations des 128 Etats membres de l’OMC. Les droits de douane moyens sur les produits
industriels sont ainsi passés de 8 à 7,5 %, tandis que ceux appliqués aux produits agricoles
ont diminué de 38 à 36 %. En gros, les deux tiers des échanges commerciaux de la Hongrie
s’effectuent avec l’UE. 62 Plus de la moitié des produits industriels importés de l’UE sont
exemptés de droits de douane à leur entrée en Hongrie, tandis que les droits appliqués sur
les produits restants devraient être réduits de 40 %.
38. Les responsables de la Banque centrale reconnaissent que leur objectif consiste à
satisfaire aux critères de Maastricht dans un délai de cinq à huit ans, non seulement pour que
la Hongrie soit membre à part entière de l’Europe, mais pour garantir des bases solides à la
politique économique. 63 Le commissaire européen aux Affaires extérieures, M. Hans van den
Broek, a cependant récemment attiré l’attention sur le fait que, mis à part ses importantes
réformes économiques et financières, la Hongrie n’a pas accompli de progrès suffisants pour
satisfaire aux normes européennes, particulièrement dans les domaines de la réduction de
l’inflation, la réforme des soins de santé, les transports, et la protection de l’environnement. 64
De nombreuses réglementations financières et commerciales ne répondent pas, elles non
plus, aux normes européennes, même si le gouvernement s’occupe actuellement de corriger
la situation.
VII.
LA BANQUE CENTRALE ET LE SECTEUR FINANCIER
39. Les dirigeants ont pris des mesures pour garantir l’autonomie de la Banque centrale.
Avant 1995, celle-ci faisait l’acquisition de bons du trésor et garantissait le découvert de l’Etat.
Une nouvelle loi accroît cependant l’autonomie de la banque, qui n’est plus tenue d’acquérir
les titres représentant les emprunts de l’Etat. Elle peut en outre opérer sur les marchés
61
Op. cit., Note 17.
62
Op. cit., Note 5.
63
Op. cit., Note 3.
64
Op. cit., Note 29.
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secondaires afin de contrôler la masse monétaire.. 65 Actuellement, le marché lui-même
garantit dans sa totalité la dette de l’Etat et les échéances s’allongent, ce qui indique une
confiance croissante du marché envers les bases de l’économie et la politique
macroéconomique du gouvernement. Les dernières émissions de bons du trésor reflètent en
outre l’allégement des pressions inflationnistes.
40. La tâche essentielle de la Banque centrale consiste à garantir la stabilité des prix et elle
dispose de plusieurs outils pour ce faire, tels que le contrôle des taux d’intérêt et de la masse
monétaire. Comme la banque a annoncé l’adoption d’une politique de taux de change à
parités mobiles, l’afflux de capitaux peut augmenter la masse monétaire. Elle doit, dès lors,
mener des politiques de stérilisation (en vendant, par exemple, des fonds d’Etat). Le taux
mensuel de dévaluation a diminué de manière significative, puisqu'il est passé de 1,9 en mars
1995 à 1,1 % mi-97.. 66
41. Les plus importantes banques hongroises ont entamé une profonde restructuration.
Leurs effectifs ont été dégraissés, les créances douteuses, apurées et les agences peu
rentables, fermées. Elles ont pris ces mesures non seulement pour améliorer leur productivité
et supprimer les activités générant des pertes, mais aussi pour augmenter leur attrait aux
yeux des investisseurs étrangers. Les responsables hongrois sont apparemment convaincus
que des partenaires étrangers sont nécessaires à l’acquisition d’un avantage concurrentiel et
à l’accession à des pools bancaires plus importants. Les conditions régissant l’accession de
la Hongrie à l’OCDE exigeaient l’octroi, pour le mois de janvier 1998, de l’accès à son marché
intérieur aux banques étrangères sur un pied d’égalité, la libéralisation de ses marchés de
change67 et la modernisation de sa législation en matière de secret bancaire pour éviter les
blanchiments de capitaux d’origine douteuse. Dans ce cadre, les changements intervenus
dans le système bancaire hongrois sont approuvés. Les marchés de change ont été
libéralisés, ce qui permet aux firmes étrangères de faire beaucoup plus facilement des
affaires. Les investisseurs étrangers qui vendent leurs actions en Hongrie ne sont plus tenus
de déposer le fruit de ces ventes sur un compte convertible en forints dans une banque
hongroise, mais peuvent désormais le transférer directement sur des comptes en devises
étrangères, en Hongrie ou à l’étranger. 68
42. Les banquiers hongrois pensent que leurs partenaires étrangers sont susceptibles de
bénéficier considérablement de leur connaissance du marché et des réseaux locaux, ainsi
que de leur expérience au niveau régional. Cette stratégie porte ses fruits. Presque toutes les
institutions bancaires importantes appartiennent d’ores et déjà, partiellement ou dans leur
totalité, à des banques étrangères. La RZB possède la Unicbank, la GE Capital détient une
65
Op. cit., Note 3.
66
Ibid.
67
En novembre 1995, le parlement a adopté une loi rendant le forint convertible pou r les transactions
impliquant des comptes courants, et ce conformément aux exigences de l'article 8 des statuts du FMI. Voir
"Hungary", Economist Intelligence Unit, Londres, 1997, p. 9.
68
Op. cit., Note 17.
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majorité dans la Banque de Budapest, la Bayerische Landesbank contrôle la Banque
hongroise de commerce extérieur et l’ING contrôle la Dunabank. Récemment, deux grandes
banques appartenant à l’Etat, la Banque Magyar Hitel (MHB) et la Banque de commerce et de
crédit (K&H) ont été privatisées . La MHB, dirigée par le dynamique Zsigmond Járai , a subi
une restructuration plus draconienne après avoir frôlé la faillite en 1994. M. Zsigmond Járai a
licencié 70 % de la direction et 30 % du personnel. Il a en outre cédé les actifs non
performants et les créances douteuses à un groupe, Risk Limited, exclusivement chargé de
s’occuper des canards boiteux. Ces mesures permettent à la MHB de se concentrer sur ses
clients stratégiques. La K&H a également fait l’objet d’une restructuration, moins intensive
toutefois. Il en résulte qu’elle est susceptible de moins attirer les investisseurs. Le ministère
des Finances et l’APV Rt travaillent activement au marketing de la K&H auprès d’acheteurs
potentiels. Les responsables espèrent que la privatisation des deux banques entraînera une
considérable expansion des capitaux disponibles au niveau national.
43. Les banques étrangères sont actuellement particulièrement désireuses de développer
une présence au niveau des agences et du financement auprès des particuliers de voitures et
d’autres produits de consommation. 69 Les prêts immobiliers garantis par des hypothèques
sont considérés comme un nouveau marché potentiel, étant donné que la plupart des ventes
de maisons et d’appartements sont liées à un paiement comptant.
44. De récentes réformes des réglementations applicables aux compagnies d’assurance
ont, elles aussi, contribué à libéraliser le marché. Le secteur des assurances demeure soumis
à une forte concentration, et les réformes sont conçues pour encourager la concurrence en
attirant de nouveaux acteurs étrangers et en renforçant les petites compagnies déjà présentes
sur le marché.
VIII.
L’AGRICULTURE
45. L’agriculture a constitué le secteur le plus difficile à rationaliser tout au long du
processus de transition, et sa réforme demeure une source d’affrontement politique. Les
responsables communistes collectivisèrent l’agriculture hongroise entre 1959 et 1962, avec
des résultats désastreux. La diminution des récoltes contraignit les autorités à entreprendre
une nouvelle série de réformes, qui réduisirent le rôle de l’Etat dans tout ce qui était étranger
à la production de certains aliments « stratégiques ». Dès les années 80, la Hongrie redevint
un exportateur net de produits agricoles, avec des ventes particulièrement importantes à
destination de l’Union soviétique. En 1989, les fermes d’Etat ne représentaient plus que 25 %
des terres cultivables et 17 % seulement de la main-d’oeuvre agricole, alors que les
coopératives cultivaient 75 % des terres et employaient 75 % de la main-d’oeuvre. Les deux
systèmes d’exploitation étaient toutefois fortement endettés envers l’Etat et cette situation fut
encore aggravée par les sécheresses de 1990 et 1992, ainsi que par l’effondrement du
marché soviétique. En 1990, la production chuta de 30 %, tandis que le cheptel enregistrait
une diminution soudaine. Le gouvernement répondit à cette situation en entreprenant une
redistribution des terres, qui s’avéra désastreuse, car la taille des lots de terre était beaucoup
trop réduite pour fournir la base d’une agriculture rentable. La plupart des fermiers ne
69
Op. cit., Note 6.
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travaillent actuellement qu’à temps partiel et ne peuvent donc travailler leurs terres de
manière intensive. 70 L’emploi global dans l’agriculture a diminué de 50 % depuis 1990. 71 La
lenteur du processus de privatisation, le manque d’investissements en capital , une forte
résistance aux projets de réformes et la diminution spectaculaire des subventions octroyées
par l’Etat se combinent pour affaiblir considérablement le secteur.
46. La loi d’indemnisation de 1991 a établi les paramètres destinés à régir le transfert de la
propriété des terres, mais la privatisation des fermes d’Etat s’avère une tâche difficile. Le
potentiel de rentabilité peu prometteur du secteur refroidit l’enthousiasme des investisseurs,
de même que les limites de superficie fixées lors de l’acquisition de terres arables. Le
gouvernement s’est concentré sur la réglementation du marché et les droits de propriété, au
détriment des changements structurels. En sabrant dans les subventions à l’agriculture, qui
sont passées de 9,1 % du budget de 1990 à 3,7 % pour celui de 1994, le gouvernement
cherchait à rapprocher les prix agricoles des niveaux européens. Les subventions pour 1996
ont été fixées à 86,5 milliards de forints (568 millions de dollars), un tiers allant aux
exportations et le reste à la promotion des ventes intérieures et des investissements. Ces
subventions à l’exportation qui demeurent élevées violent la réglementation du GATT qui,
pour 1996, avait fixé les subventions à l’exportation pour la Hongrie à un maximum de 19,5
milliards de forints. Le gouvernement devrait les réduire à un rythme de 6 % par an jusqu’en
l’an 2000. Le problème réside dans le fait que ces subventions sont considérées comme
vitales à la stabilité sociale dans les campagnes.
47. Les efforts de rationalisation de l’agriculture hongroise se heurtent à une forte
résistance, en particulier de la part des petits exploitants bien organisés, dont les
manifestations ont paralysé Budapest à plusieurs reprises cette année. Voici peu, près de
15 000 fermiers ont envahi des centres urbains pour faire pression sur le gouvernement, afin
qu’il amende les mesures d’augmentation des impôts et des cotisations à la sécurité sociale
imposées aux fermiers. Dans une lettre adressée au Premier ministre, le parti indépendant
des petits propriétaires, dans l’opposition, exige des subventions d’Etat d’une valeur de 60
milliards de forints pour les fermiers. 72 Les crédits destinés au secteur agraire sous-capitalisé
demeurent limités mais, d’autre part, les fermiers ne sont guère familiarisés avec les
méthodes de comptabilité et la gestion financière. Cela n’incite guère les institutions
financières à aiguiller des capitaux vers les campagnes. Le gouvernement espère à la fois
améliorer la qualification commerciale de la Hongrie rurale et éliminer progressivement les
prêts ruraux subventionnés. 73
48. Le secteur agricole fournit 12% du PIB de la Hongrie, alors que la moyenne de l’UE e st
de 3 %. Si les pays de l’ACELE devaient adhérer à l’UE sans modification du système
agricole actuel de l’Union européenne, les coûts de la PAC s’accroîtraient de 30 %, pour une
70
Op. cit., Note 11.
71
Op. cit., Note 33.
72
Radio hongroise, Budapest, 6 mars 1997.
73
Op. cit., Note 3.
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augmentation de 3,5 % du PIB de l’Union et un coût net de 19 -25 milliards de dollars. 74 Il n’est
donc pas surprenant que la réforme de la PAC soit appelée à constituer un élément critique
des discussions sur l’élargissement de l’UE. Il ne fait aucun doute que cette même UE
adaptera la PAC, tout comme il semble hautement improbable que les nouveaux membres
d’Europe centrale et orientale bénéficieront des mêmes privilèges que ceux qui ont été
octroyés à la Grèce, au Portugal et à l’Espagne. Les responsables hongrois espèrent parvenir
à dissocier les politiques agricole et sociale, ce qui pourrait survenir plus tôt que prévu, dans
la foulée de la libéralisation de l’agriculture sous les auspices de l’OMC.
49. Le gouvernement a élaboré un plan économique triennal prévoyant une croissance de 3
à 4% du PIB en 1998 et de 4 à 5% les deux années suivantes. L’inflation est projetée à 1314% en 1998 et 9-10% l’année suivante, tandis que le plan prévoit une augmentation de 1 à
2% des revenus des ménages. Le chômage devrait tomber en deçà des 10% d’ici l’an 2000.
Le gouvernement anticipe également un accroissement des p ôles d’investissements en
capitaux et une progression annuelle de 12 à 14% du développement de l’infrastructure75.
(Recent Economic Developments, in Hungary, Banque Nationale de Hongrie, juillet 1997).
IX.
LES PERSPECTIVES POLITIQUES
50. La situation politique actuelle de la Hongrie présente des aspects à la fois positifs et
inquiétants. Tous les partis souhaitent l’entrée de la Hongrie dans l’OTAN et l’Union
européenne, et les principaux partis s’accordent, dans les grandes lignes, sur l’adoption
rapide par la Hongrie de structures de marché. La lenteur de la croissance économique
entraîne cependant des problèmes politiques. Il est relativement facile pour les politiciens
d’expliquer la nécessité de comprimer les dépenses pour renforcer les bases de l’économie
nationale, mais la chose se complique singulièrement lorsqu’en dépit de l’adoption de
mesures d’austérité, les signes d’une amélioration sont à peine visibles. Si les Polonais
engrangent les bénéfices des mesures rigoureuses adoptées par leur gouvernement à un
stade antérieur de la période de transition, le taux de croissance de la Hongrie continue à
stagner. La lenteur de la croissance en Europe occidentale n’arrange pas les choses et, si la
situation ne s’améliore pas, de nouvelles pressions se manifesteront en faveur de l’abandon
de l’austérité. L’aggravation des différences de revenus et le fossé qui commence à se
creuser entre les régions prospères et les zones plus pauvres de l’est ainsi que les régions
agricoles sont également susceptibles d’entraîner de sérieuses tensions politiques. Des
problèmes se posent également avec le parti des petits propriétaires, qui a récemment
demandé aux petits fermiers de manifester contre le gouvernement dans les rues de la
capitale.
51. A l’approche des élections de 1998, les dirigeants politiques pourraient rencontrer plus
de difficultés à résister aux demandes d’assouplissement de la politique macroéconomique,
surtout si la croissance ne repart pas bientôt de l’avant. Même si les partis au pouvoir
74
"Hungary’s Crisis-Ridden Agricultural Sector Prepares for EU Membership", Zsofia Szilagyi,Transition, 24
juillet 1996.
75
Op. cit., Note 6.
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contrôlent 72 % des sièges au parlement, les divisions qui se manifestent au sein du
gouvernement entravent sa capacité d’adoption de mesures décisives. Le gouvernement
socialo-libéral a perdu l’appui de ceux qui ont souffert des mesures de stabilisation comme de
ceux qui exigent des réductions plus importantes des dépenses et une réforme plus profonde
de l’appareil administratif. Les partis d’opposition sont cependant divisés. Le décès, en 1993,
de M. Jozsef Antall, qui dirigeait le Forum démocratique hongrois, a rendu difficile la formation
d’une force politique de centre droit susceptible de faire pression sur le gouvernement pour
qu’il accélère le processus des réformes. 76
52. Ce même gouvernement doit en outre faire face à un problème de criminalité en
expansion, et notamment à l’infiltration par des « groupes mafieux » des marchés privés. Le
maintien de l’ordre et l’arsenal juridique sont ainsi également devenus des questions
politiquement importantes. M. Gyula Horn avait lancé l’idée de la création d’une agence
relevant de l’exécutif, qui aurait été chargée de s’attaquer au crime en col blanc, mais la
proposition a été retirée lorsque le SZDSZ libéral a fait valoir qu’un tel organisme était
comparable à l’ancien appareil de sécurité communiste. Soit dit en passant, cela indique à
quel point il est difficile pour les sociétés postcommunistes de s’attaquer à de graves
problèmes de criminalité en adoptant des mesures qui renforcent, plutôt qu’elles ne minent, la
foi de l’opinion publique dans les institutions démocratiques. Le gouvernement est également
divisé sur la question de la modernisation de la Constitution de 1949. Les socialistes de Horn
veulent appeler « Etat social » la République de Hongrie et ils soutiennent l’idée de l’élection
au suffrage direct du président. Le SZDSZ s’oppose toutefois à ces deux propositions. Même
la mention des droits sociaux dans la Constitution est susceptible d’affaiblir les efforts visant à
réformer le concept d’Etat providence. La Constitution de 1949 fait déjà vaguement référence
à des droits sociaux et la cour constitutionnelle les évoque pour rejeter sélectivement
certaines dispositions en faveur des réformes. Rendre ces droits sociaux plus explicites
encore au niveau constitutionnel pourrait mettre en péril tout gouvernement cherchant à
rationaliser le rôle de l’Etat dans l’économie. 77
53. Les conflits d’intérêt compliquent les efforts visant à affronter immédiatement les
problèmes structurels. De nombreux parlementaires siègent dans les conseils d’administration
de sociétés et de holdings d’Etat, mais selon une loi votée récemment, il vont à présent devoir
choisir l’un ou l’autre étant donné la récente interdiction de cumuler un siège parlementaire et
un siège au sein d'un conseil d'administration d'entreprise 78. La cour constitutionnelle a
cependant déclaré qu’une partie de cette loi était anti-constitutionnelle si bien que son statut
exact reste incertain. Il n’en demeure pas mois qu’une partie importante de la classe politique
détient des intérêts directs et souvent personnels dans la survie de sociétés bien
déterminées, ce qui complique manifestement l’action générale de la structure publique et
quasi publique et rend le processus suspect. Le problème des conflits d’intérêts constitue
l’une des explications possibles au ralentissement des réformes et il a inspiré de très
sérieuses allégations de corruption. C’est ainsi, par exemple, que des responsables
76
Op. cit., Note 23, p. 41.
77
Op. cit., Note 23, p. 42.
78
Ibid.
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gouvernementaux, dont un ancien ministre de l’Industrie et du Commerce, ont récemment été
accusés d’utiliser leur influence pour obtenir des contrats liés au remboursement par la
Russie de sa dette à des sociétés favorisées. 79 Les personnes mises en cause ont nié les faits
et une enquête du gouvernement est arrivée à la conclusion qu’aucune loi n’avait été violée.
L’affaire suggère cependant que des procédures plus rigoureuses sont nécessaires pour
marquer plus nettement la distinction entre les intérêts publics et privés. Le parlement vient
d’adopter une loi de transparence qui va précisément dans ce sens. Les parlementaires sont
désormais tenus de révéler leurs intérêts et, dans certains cas, de faire un choix entre la
politique nationale et celle du secteur privé.
54. Enfin, si 70 % des Hongrois se prononcent en faveur de l’entrée de leur pays dans
l’Union européenne, ce chiffre tombe à 61 % seulement lorsqu’il s’agit de l’OTAN. 80 L’opinion
publique continue à lier l’OTAN presque exclusivement au domaine militaire, en ne tenant
pour l’instant pas compte des dimensions politique et diplomatique de l’Alliance, ni de son rôle
essentiel dans la cohésion des membres clés de la communauté atlantique. Les responsables
sont persuadés que le débat qui s’annonce permettra une prise de conscience de ces
paramètres par l’opinion publique, tout en renforçant son soutien à l’OTAN. Le gouvernement
prépare actuellement un référendum consultatif sur l’accession à lOTAN. Ce référendum aura
lieu en novembre 1997. Un deuxième problème politique concerne le contrôle des civils sur
les militaires. Dans ce domaine, les Hongrois s’orientent rapidement vers la création d’un
nouveau cadre d’experts militaires civils, qui n’existait tout simplement pas à l’époque
socialiste.81
X.
CONCLUSIONS
55. Il convient d’applaudir les responsables hongrois pour le caractère sérieux et réfléchi de
leur approche de la transition. Les mesures d’austérité sont certes douloureuses, mais
nécessaires. La prise de conscience par le gouvernement que les capitaux étrangers sont
susceptibles de compenser le manque de capitaux nationaux joue aussi un rôle essentiel
dans les succès engrangés par la Hongrie. La privatisation de la compagnie du téléphone
Matav est exemplaire à cet égard. Il s’agit, à ce jour, de la plus importante opération de
privatisation menée en Europe centrale et orientale, et tant Deutsche Telekom qu’Ameritech
ont contribué à transformer ce monopole d’Etat dépassé en un fournisseur de moyens de
communication dynamique et efficace, dont les services se sont améliorés de manière
spectaculaire, dont les coûts ont diminué et qui peut se retrouver en mesure d’affronter la
concurrence internationale. 82 En 1996, toutes les compagnies spécialisées dans la
79
Ce scandale a été appelé "l'Oilgate" par la presse hongroise, Op. cit., Note 23., page 43
80
Gallup pole, juin 1997
81
Op. cit., Note 33.
82
Paul Marer et Wade Davis, "How Hungary dialed up a privatization success", Wall Street
Journal, 13 mars 1997
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qualification des crédits (Duff & Phelps, IBCA, Standard & Poor ’s, Moody’s) avaient placé les
dettes publiques hongroises dans la catégorie “recommandé aux investisseurs”.
56. De sérieux problèmes demeurent pourtant. De nombreuses institutions gérées par l’Etat
sont inefficaces, les secteurs des transports et de l’enseignement exigent d’importants
investissements, tandis que le système des pensions s’oriente tout droit vers une catastrophe
si les réformes promises n’ont pas lieu. Les petites et moyennes entreprises ont besoin de
ressources pour se restructurer si elles veulent conquérir une place alors que la Hongrie
s’intègre peu à peu aux marchés mondiaux. Quant au système agricole, il représentera une
lourde charge sous sa forme actuelle et continuera à susciter des problèmes lors de
l’accession de la Hongrie à l’UE. Au niveau macroéconomique, la lutte contre l’inflation doit
continuer et il convient de poursuivre le processus de réduction de la dette publique. Les
méthodes de perception des impôts doivent être améliorées et, dès que le déficit commencera
à diminuer, les responsables devront sérieusement envisager un allégement fiscal, en
particulier pour les petites et moyennes entreprises. Les normes portant sur l’environnement
et les réglementations en général doivent aussi être renforcées et des mécanismes
permettant leur application efficace doivent être créés.
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