|4|perspectives|septembre 2015
La Chine tremble, l’économie mondiale résiste
Les acteurs économiques et financiers s’interrogent sur l’intensité de la croissance économique chinoise. Le
fléchissement d’indicateurs avancés fait craindre un ralentissement brutal. Les moyens dont disposent les
autorités pour contrer les forces déflationnistes restent néanmoins substantiels.
Christophe Donay, Nadia Gharbi, Jacques Henry et Bernard Lambert
Alors que la Chine inquiète, la croissance de l’économie
mondiale reste soutenue par l’accélération de la croissance amé-
ricaine et par celle, plus modeste, de l’Europe.
L’objectif de croissance économique des autorités chinoises
se situe autour de 6,5%. Pour contrer le ralentissement, la
Banque populaire de Chine (BPC) dispose de deux outils
efficaces pour stimuler le crédit: l’abaissement des taux
de réserve obligatoire des banques et la réduction des taux
directeurs.
La politique budgétaire dispose quant à elle encore de
suffisamment de marge de manœuvre pour stimuler les
dépenses en infrastructures. L’Empire du milieu poursuit
ainsi sa politique globale de type stop-and-go, qui
correspond à une politique économique stimulante lorsque
l’activité ralentit et à un ralentissement des injections de
crédit lorsqu’elle accélère.
L’alternance entre les espoirs et les craintes de ralentisse-
ment génère de la volatilité, à la fois dans la sphère écono-
mique et financière.
Chine: le scénario d’un hard landing cee année reste
peu probable
La timide amélioration conjoncturelle observée au
2etrimestre a débouché sur une nouvelle détérioration en
juillet-août, notamment au niveau des indices des
directeurs d’achat (PMI) et des chiffres du commerce exté-
rieur. La perception négative a encore été amplifiée par le
krach boursier. Cee dégradation économique doit toute-
fois être relativisée. D’une part, elle s’explique en partie par
des facteurs non récurrents: cyclones sur la côte, frein
temporaire à la production polluante dans la région de
Pékin et explosion à Tianjin. D’autre part, le secteur des
services – qui a sensiblement gagné en importance dans
l’économie chinoise – paraît se porter neement mieux que
le secteur manufacturier.
Dès lors, que faut-il anticiper? La récente dévaluation du
yuan (voir pages 7 et 12) ne devrait pas apporter un
soutien important, mais les injections de liquidités, les
baisses de taux d’intérêt et les réductions des ratios de
réserves obligatoires décidées ces derniers mois (les der-
niers mouvements datant du 25 août), alliées à une poli-
tique budgétaire plus expansive, devraient avoir un impact
bénéfique, même si c’est avec un certain décalage. Sans être
particulièrement optimiste concernant la croissance
chinoise, un aerrissage brutal (hard landing) au second
semestre 2015 nous semble peu probable. Au contraire, une
légère amélioration conjoncturelle au cours des prochains
MACROÉCONOMIE
mois paraît le scénario le plus vraisemblable. A moyen
terme, les excès du crédit et les nécessaires transitions
structurelles font toutefois peser des risques considérables
sur l’économie chinoise.
Etats-Unis: perspectives de croissance toujours favorables
Outre-Atlantique, la croissance au 2etrimestre a été révisée
à la hausse à 3,7%. Ainsi, en moyenne au 1er semestre, la
progression du PIB s’est élevée à 2,2%. D’un côté, un tel
résultat est largement supérieur aux prévisions qui préva-
laient il y a à peine plus d’un mois. D’un autre côté, le
rythme de croissance aeint le semestre dernier ne paraît
pas particulièrement robuste, puisqu’il est exactement
équivalent à celui observé en moyenne depuis que la
reprise a débuté il y a six ans. Les statistiques disponibles
pour le 3etrimestre sont globalement demeurées favorables,
pointant vers une croissance toujours solide. La hausse du
dollar en valeur moyenne , encore amplifiée par le mouve-
ment observé ces dernières semaines, les incertitudes en-
tourant la croissance mondiale et les récentes turbulences
secouant les marchés financiers devraient peser sur la crois-
sance de l’économie américaine. Néanmoins, l’effondre-
ment de l’investissement dans le secteur pétrolier le
semestre dernier – qui a fortement pénalisé la progression
du PIB (0,6 point de pourcentage) – devrait déboucher sur
une contraction largement plus modeste au second
semestre. En outre, la solide progression de l’emploi et
l’impact bénéfique de la chute du prix de l’essence sur
le revenu réel des ménages devraient continuer de soute-
nir la consommation, tandis que le secteur immobilier de-
vrait toujours avoir le vent en poupe. Dans ce contexte,
nous tablons sur une croissance robuste de quelque 2,7%
au second semestre 2015.
Les inquiétudes relatives à la croissance chinoise et le
récent revers des marchés financiers internationaux ont
réduit les probabilités de hausse des taux des Fed funds en
septembre. Le scénario le plus probable reste selon nous
celui où la Réserve fédérale remontera ses taux d’intérêt en
décembre. Et nous sommes aussi toujours d’avis que, suite
au resserrement en cours des conditions monétaires et
financières, ce mouvement initial de remontée des taux sera
«Les excès du crédit et les nécessaires
transitions structurelles font peser
des risques considérables sur l’économie chinoise»