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présent 80% du PIB. Près de dix ans d’instabilité politique ont
dégradé le climat des affaires et empêché les investissements
nécessaires en infrastructures et recherche et développement (R&D).
D’un point de vue externe, le degré d’ouverture de l’économie (les
importations et exportations de biens et services représentent plus
de 130% du PIB) l’expose aux effets du ralentissement chinois et
aux prix des matières premières, même si le pays n’est pas le plus
exposé.
■ Mais les risques restent limités à court terme
La contraction des importations et la progression continue des
recettes de tourisme ont permis une progression de l’excédent
courant. Ce dernier atteignait 6% du PIB au T2, en hausse pour le
cinquième trimestre consécutif. Malgré l’absence de vraie reprise
des exportations, on s’attend à une hausse significative de
l’excédent courant en 2015 à 7% du PIB (après 3,4% en 2014).
Parallèlement, les entrées nettes d’IDE devraient être soutenues par
les nouveaux projets gouvernementaux, si ceux-ci sont effectivement
réalisés. A situation politique et sociale inchangée, les flux
d’investissement de portefeuille seront probablement liés aux
décisions de politique monétaire américaine. Mais comme lors des
épisodes précédents, la période d’instabilité financière de l’été 2015
ne s’est pas soldée par des sorties massives de capitaux. Les
primes de risque sur les obligations souveraines ne se sont pas
élargies au point de mettre à mal la dynamique de la dette publique.
Enfin, les réserves de change ont diminué. Elles restent toutefois
très confortables et atteignaient près de USD 150 mds en août 2015,
couvrant plus de huit mois d’importations. Pour le moment, les
risques financiers restent faibles. La dette extérieure comme la dette
publique se maintiennent à des niveaux modérés, soit 38% et 32,5%
du PIB respectivement.
■ Vulnérabilité en hausse
Pourtant, les turbulences financières induites par la matérialisation
du ralentissement chinois et la perspective de resserrement de la
politique américaine ont pesé sur l’évolution du taux de change, alors
que celui-ci était resté relativement stable au moment de
l’intensification de la crise politique. Depuis le début de l’année, la
monnaie s’est dépréciée de 8%, illustrant la fragilité accrue du pays
face à une crise de confiance des investisseurs.
A court-moyen terme, la Thaïlande apparaît pourtant relativement
moins exposée au ralentissement chinois que d’autres pays d’Asie.
Du point de vue des échanges extérieurs, principal canal de
transmission, les secteurs les plus susceptibles d’être impactés
(exportations de minerais, métaux, combustibles, produits
chimiques) représentent 56% du total des exportations à destination
de la Chine, mais moins de 4% du PIB. En ajoutant les machines et
matériels de transports, secteur susceptible d’être touché dans un
deuxième temps, l’exposition s’élève à 6% du PIB. A titre de
comparaison, celles-ci représentent plus de 8% du PIB à Taiwan et
en Corée par exemple (plus de 70% des exportations vers la Chine)
et 15% du PIB à Singapour (90% du total des exportations vers la
Chine). Par ailleurs, les indicateurs de valeur ajoutée incorporée
dans les exportations conjoints à l’OCDE et à l’OMC, illustrent
également que, d’une part, l’exposition à la Chine, en termes de
valeur ajoutée, est moins significative en Thaïlande que pour
d’autres pays d’Asie, et d’autre part que la prépondérance de la
demande en provenance des pays du G3 est toujours vérifiée (Etats-
Unis, Europe, Japon).
A plus longue échéance, l’érosion de la compétitivité-prix de la Chine
devrait profiter aux autres pays d’Asie. Ainsi, alors que les pays
bénéficiant d’avantages comparatifs en termes de coûts
augmenteront leur attractivité (Mongolie, Bengladesh, Vietnam dans
une moindre mesure), les avantages hors-prix (qualité des
infrastructures, qualification de la main d’œuvre, climat des affaires)
permettront de distinguer les pays pour lesquels le différentiel de
salaire avec la Chine est le plus faible. Or, ils ne sont pas
spécialement en faveur de la Thaïlande.
En simplifiant, on peut mesurer l’attractivité d’un pays à l’aide des
flux d’IDE qui lui sont destinés. De ce point de vue, près de dix
années d’instabilité politique ont amoindri l’attractivité du pays. Le
manque d’infrastructures compétitives, s’il n’est pas rapidement
comblé, pèsera sur les entrées d’IDE et, par la suite, sur la solidité
de l’économie et sur sa croissance potentielle. Mesurés en
pourcentage du PIB, les IDE à destination de la Thaïlande ont déjà
diminué. Ils représentaient 2,6% en moyenne entre 2010 et 2014,
contre 3,5% en moyenne entre 2005 et 2009. En Malaisie, ils
représentaient 3,7% du PIB entre 2010 et 2014, 3% entre 2005 et
2009. A terme, les pays voisins, le Vietnam surtout, mais aussi le
Cambodge, le Laos, la Birmanie, compte tenu de leur
développement rapide, pourraient capter les IDE initialement
destinés à la Thaïlande.
Ainsi, au-delà des préoccupations conjoncturelles, le gouvernement
a défini un ensemble d’objectifs ambitieux destinés à restaurer la
compétitivité et l’attractivité de l’économie thaïlandaise. Le
programme reprend les projets de modernisation des infrastructures
plusieurs fois repoussés, ainsi que l’engagement de poursuivre
l’assainissement des finances publiques et de réformer les
entreprises publiques. La mise en place de ces réformes
structurelles sera essentielle pour permettre au pays de conserver
son attractivité au sein de l’Asie.
Hélène Drouot
helene.drouot@bnpparibas.com
3- Valeur ajoutée incorporée dans les exportations
En % du PIB, par destination (2011)
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25
30
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