"Le petit botaniste" Groupe Solabia Clin d’oeil ethnobotanique Sept.99– N°15 Dans sa collection “Histoires botaniques d’hier et d’aujourd’hui”, Le Petit Botaniste vous annonce la prochaine parution de : “Il était une fois les Légumes du Potager...” A l’origine, il y a de cela plusieurs milliers d’années, l’homme se nourrissait des produits de la chasse et de la cueillette. Les légumes ont depuis toujours existé et l’homme a su très vite reconnaître en eux leurs multiples vertus digestives, médicinales et bien sûr culinaires... Mais ne brûlons pas les étapes et commençons plutôt à faire un retour en arrière... Au commencement, ce furent les légumes secs (fèves, pois, haricots...) qui furent les honorables ancêtres du Monde des légumes. Fruits spécifiques de la famille des légumineuses, leurs graines étaient contenues dans une gousse appelée également légume... C’est seulement par extension que plus tard le mot légume qualifiera un grand nombre d’autres végétaux. Bien qu’historiquement très célèbres, citons par exemple “l’histoire d’Esaü qui vendit à son frère son droit d’aînesse pour un plat de lentilles”, les légumes secs ont eu beaucoup de mal à s’imposer au fil des années car ils constituaient la base de l’alimentation des petites gens et n’étaient donc guère prisés à la table des grands... La hiérarchie et la noblesse des aliments existaient déjà à cette époque... Quoiqu’il en soit, il n’était pas rare de trouver sur les marchés d’Athènes, mais aussi à Rome et plus tard, au Moyen Age “à l’ère de la potée médiévale”, les courges, potirons, radis, concombres, roquettes, oignons, choux, carottes, lentilles, cressons, citrouilles et autres bettes et betteraves. Le terme de “plantes potagères” fut d’ailleurs très vite introduit dans le langage courant pour distinguer les légumes cuits dans des pots... Puis, arriva ensuite la période de la Renaissance pour une “vraie renaissance” des légumes... L’engouement général pour l’Italie eut pour effet de faire venir de nombreux légumes verts sur les tables princières. La mode des légumes était lancée ! Les bulbes, champignons et racines, bien souvent négligés en raison de leur origine roturière (issus de la terre), gagnèrent aussi leurs lettres de noblesse. Le Roi Soleil, Louis XIV, fut à cette époque l’un des premiers à développer l’horticulture à Versailles ! Il fit créer des étuves (aujourd’hui appelées serres) pour obtenir des légumes hors-saison destinés au Royaume et plus particulièrement à la table royale. La découverte au XVIème siècle de la très connue tomate venue d’Amérique du Sud et l’arrivée des haricots verts au XVIIIème siècle ne firent qu’amplifier cet enthousiasme botanique. Dans ce même temps, devant l’ampleur que prenait le commerce des légumes, les premiers agriculteurs décidèrent alors de sélectionner les plus gros légumes pour en récupérer les graines et engendrer des descendances dites améliorées d’où la fameuse expression “prenez-en de la graine” pour caractériser un acte modèle dont on souhaite qu’il se reproduise... Les expressions françaises ont elles aussi leurs petites histoires et anecdotes... Parcourons ensemble maintenant l’histoire “des Légumes d’hier et d’aujourd’hui” Le petit botaniste L e s p l u s c o s m é t i q u e s d u “ Petit Botaniste” CAROTTE, EPINARD, PISSENLIT, CRESSON, ARTICHAUT, CONCOMBRE, CORNICHON, MELON, TOMATE "Le petit botaniste" Groupe Solabia Clin d’oeil ethnobotanique Sept.99– N°15 Dans sa collection “ Histoires botaniques d’hier et d’aujourd’hui”, “Il était une fois les Légumes du Potager...” A rtichaut (Cynara scolymus) : Ce « légumefleur » était à l’origine un cardon sauvage poussant sur les rivages méditerranéens à l’ère gallo-romaine. Considéré comme un légume de luxe, ce “bérigoule” arborait de petites fleurs bleu violacé incrustées dans un réceptacle en forme de plat à tarte (c’est le fameux fond d’artichaut) et protégées par des écailles ou bractées (improprement appelées feuilles) munies chacune d’une épine acérée ! Les plantes à piquants avaient cependant jadis très mauvaise réputation et les “jardiniers-transformateurs” en firent très vite leur affaire. Ces premiers horticulteurs décidèrent en effet de travailler à l’amélioration de ces plantes pour en atténuer leur agressivité. C’est ainsi que l’artichaut prit progressivement l’aspect que l’on lui connaît aujourd’hui : un réceptacle épaissit, des épines moins acérées. C’est en réalité au XVème siècle et en Italie que l’artichaut fit, sous cette forme, sa première apparition, avant d’être répandu en moins de 100 ans dans toute l’Europe. Le fond d’artichaut faisait fureur à la cour et Marie de Médicis, Reine de France par son mariage avec Henri IV, faisait partie de ses plus ferventes admiratrices et consommatrices. Hormis sa carrière illustre en tant que légume, l’artichaut fut très vite considéré comme un « légume-médicament ». Ses feuilles, au demeurant très amères, étaient préconisées en décoction pour être employées comme diurétique et pour lutter contre les P E T I T E S maladies du foie (ictères). L’artichaut est également reconnu pour sa richesse en flavonoïdes, en acides succinique, citrique et malique. C oncombre et cornichon (Cucumis sativus) : Curcubitacée originaire d’Inde et retrouvée en Chine, 5000 ans avant J.C., le cornichon est un concombre nain. Il provient d’un plant non taillé dont les fruits sont récoltés lorsqu’ils ont la grosseur d’un doigt. Le concombre, pour sa part, pousse sur des plants étêtés dont on ne laisse se développer qu’un nombre limité de fruits. Grecs et latins en firent leur gourmandise de choix. Légume favori des Empereurs romains Auguste et Tibère, on reconnut au concombre le pouvoir de rendre intelligent ses consommateurs... d’où sans doute l’origine de l’expression “tu es un cornichon ” pour caractériser quelqu’un de stupide, le cornichon n’étant en fait qu’un concombre non mené à terme... Très apprécié pour se désaltérer, le concombre fait partie des légumes les plus aqueux (près de 98 % d’eau, présence de soufre, de manganèse...). Il n’en reste pas moins une plante très fréquemment utilisée pour ses vertus adoucissantes, purifiantes et astringentes. Il était ainsi fréquent de préparer un lait de concombre à partir d’amandes douces et de jus de concombre afin de raviver le teint. H I S T O I R E S E T A N E C D O T E S ARTICHAUT, CONCOMBRE, CORNICHON "Le petit botaniste" Groupe Solabia Clin d’oeil ethnobotanique Sept.99– N°15 Dans sa collection “ Histoires botaniques d’hier et d’aujourd’hui”, “Il était une fois les Légumes du Potager...” M elon (Cucumis melo) : Fruit ou légume ? Tout va dépendre en fait s’il est servi en début ou en fin de repas... Unique légume originaire d’Afrique australe, le melon avait autrefois la forme d’une pomme d’où son nom “mêlon ” en grec et “malum” en latin. D’années en années, de siècles en siècles, le melon connut de multiples sélections pour aboutir notamment en Asie à de nombreuses variétés au goût plus ou moins sucré. Ce n’est encore qu’au XVème siècle que le melon fit son entrée triomphale en France lorsque le Roi de France Charles VIII (Fils de Louis XI et Charlotte de Savoie) le rapporta de ses campagnes italiennes et plus particulièrement de Cavaillon dans le Comtat Venaissin en 1495. Ce melon était à l’époque cultivé dans le Domaine des Papes à Canta Lupi, ce qui lui donna plus tard son nom de « melon cantalou ». Cependant, le melon connut une carrière assez controversée puisqu’il fut à l’origine de la mort des Papes Paul II et Clément VII. La gourmandise est un vilain défaut... Henri IV et Louis XIV eurent plus de chances mais n’échappèrent pas à une sévère indigestion... Riche en vitamines A et C, en sucres et en sels minéraux (calcium, fer, phosphore), la pulpe de melon était traditionnellement appliquée en cataplasmes pour apaiser et hydrater les peaux irritées et enflammées. P E T I T E S T omate (Solanum lycopersicum) : Originaire des Andes péruviennes où elle était déjà utilisée pour faire des sauces, la tomate (en aztèque “tomatl”) était il n’y a pas si longtemps un fruit de la grosseur d’une cerise (la mode des tomates cerise daterait-elle de cette époque ? Quelle clairvoyance !). Au fil des siècles, la tomate connut elle aussi de profondes modifications (sélection de variétés à gros fruits) et fut importée en Italie au XVIème siècle par les Conquistadores. Toutefois, comme de nombreuses Solanacées (par exemple la pomme de terre) et comme la plupart des plantes américaines, la tomate eut beaucoup de mal à s’imposer. Elle débuta sa carrière comme plante d’ornement et avait la réputation d’être toxique. Aussi fut-elle appelée en latin Lycopersicum, “la pêche du loup” avant d’être baptisée plus tard “la pomme d’Or ” . Ce n’est qu’à partir de 1785 que la tomate fut sacrée officiellement légume par la plus ancienne Encyclopédie de jardinage, “le Bon Jardinier”. Mais déjà en Italie, la tomate faisait parler d’elle en cuisine... Avec près de 94 % d’eau et riche en matières minérales (calcium, phosphore, magnésium, soufre, zinc, cuivre, fer...), caroténoïdes et vitamines A, B et C, la tomate est décrite pour ses propriétés diurétiques, purifiantes, revitalisantes et rafraîchissantes. Sa pulpe est par ailleurs utilisée pour atténuer les érythèmes solaires. H I S T O I R E S E T MELON, TOMATE A N E C D O T E S "Le petit botaniste" Groupe Solabia Clin d’oeil ethnobotanique Sept.99– N°15 Dans sa collection “ Histoires botaniques d’hier et d’aujourd’hui”, “Il était une fois les Légumes du Potager...” C arotte (Daucus carota) : L’humble racine ligneuse et blanchâtre au goût âcre conserva son aspect sauvage et primitif jusqu’au XVIIIème siècle, époque à laquelle apparut en Hollande cette belle racine orange et charnue si commune dans nos potagers et sur nos marchés. Il fallut attendre 1831 pour que soit identifié pour la première fois le fameux βcarotène, précurseur de la vitamine A. La carotte est également source de vitamine A, d’oligo-éléments, d’αhydroxyacides et de pectine qui lui confèrent des propriétés tonifiantes et apaisantes. E pinard (Spinacia oleracea) : Naguère, préparer un plat d’épinards sans épinard était chose facile. Figurez-vous que le terme épinard désignait en réalité tout légume dont les feuilles cuites étaient comestibles... Originaire de Perse, l’épinard sauvage était reconnaissable par ses feuilles en forme de hallebarde et ses fruits bardés de piquants. Son nom arabe “esbanach” dérive du Perse “Ispany” pour donner plus tard en latin “Spinacia”. Très riche en calcium et en fer, ce qui fit le bonheur du célèbre “Popeye the Sailor man”, l’épinard possède des teneurs élevées en composés azotés, en sucres, en provitamine A, en acide folique et en vitamines C et K. N’oublions pas enfin de citer les délicieuses jeunes et tendres pousses d’épinard dont la saveur fait le ravissement des gourmets connaisseurs... P E T I T E S P issenlit (Taraxacum densleonis) : Herbe des plus communes habitant nos friches, prairies et mêmes nos villes, ses feuilles découpées en lobes aiguës lui valurent le nom de « dent de lion ». Originaire d’Asie Mineure, le pissenlit est très apprécié par les plus jeunes, non pas pour son goût, mais plutôt pour sa fine aigrette, ce petit parachute végétal sur lequel ils s’amusent à souffler au moment du printemps. Le nom “pissenlit” provient « littéralement » de ses propriétés diurétiques tandis que son nom latin évoquerait son action bénéfique pour les yeux. La racine de pissenlit est très riche en inuline au même titre que la chicorée. Ses feuilles contiennent des vitamines B et C et du zinc qui en fait une plante de choix dans le traitement des peaux grasses. C resson (Nasturtium officinale) : Plante aux vertus magiques puisque de nombreuses fois décrites comme l’antidote des philtres maléfiques, le cresson est un végétal aquatique qui fait plisser le nez d’où son nom latin. Cultivé en “cressonnières” pour sa valeur alimentaire et ses propriétés stimulantes, antiscorbutiques, dépuratives, sans oublier sa richesse en iode, le cresson est un reminéralisant et un excellent tonifiant (cf. la soupe au cresson de nos grands-mères) particulièrement indiqué dans les cas de dermatoses (eczéma, psoriasis...) et les affections du cuir chevelu. A l’instar des crucifères, le cresson contient une huile soufrée et azotée à l’odeur caractéristique. H I S T O I R E S E T A N E C D O T E S CAROTTE, EPINARD, PISSENLIT, CRESSON