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I. le phénomène Be
1. Historique
L’histoire commença en 1866 avec la découverte de « lignes brillantes » dans le spectre de γ
Cassiopeiae par le Père Angelo Secchi (1), astronome au Vatican. Ces lignes plusieurs fois
plus brillantes que le spectre avoisinant étaient situées à la place des raies en absorption de
l’hydrogène déjà observées dans les spectres d’étoiles, en particulier pour le Soleil. Leurs
positions ne permettant pas de douter de leur identité, elles furent qualifiées de raies en
émission de l’hydrogène. γ Cas étant une étoile chaude de type B, le qualificatif Be viendra
plus tard de la réunion de ce B et du e d’émission.
Plusieurs autres étoiles de type B possédant des raies en émission furent ensuite découvertes
parmis les étoiles relativement brillantes des deux hémisphères, ce qui permit de donner de la
substance au qualificatif d’étoiles Be. Et pour compliquer le tout, des étoiles de type O et A
présentant des raies en émission ont aussi été classées parmis les étoiles Be.
En 1931 Otto Struve (2) proposa un modèle d’étoile déformée par l’action de sa propre
rotation et qui, devenant instable, éjecterait de la matière à l’équateur. Le disque en rotation
autour de l’étoile ainsi formé pourrait donner naissance aux raies en émission par simple
recombinaison radiative.
Cette hypothèse sur la présence d’une enveloppe de gaz autour de l’étoile fut vite adoptée,
mais sa forme de disque ou d’anneaux (Struve prenant comme modèle les anneaux de
Saturne) ne faisant pas l’unanimité, elle dut cohabiter avec celle d’une enveloppe sphérique
jusqu’au milieu des années 1980 qui permirent, grâce au développement de l’interférométrie,
de mesurer l’aplatissement de l’enveloppe (3) (ou l’angle d’ouverture du disque) .
Son hypothèse sur la rotation rapide qui permettrait d’arracher de la matière à l’étoile fit
encore moins l’unanimité car elle laissait supposer que toutes les étoiles Be tournaient à la
vitesse critique, d’autres théories furent alors mises en avant. La binarité fut d’abord évoquée,
puis dans les années 1970, ce fut le tour de vents stellaire qui éjecteraient la matière hors de la
photosphère de l’étoile par la pression radiative (4). Dans les années 90 la compression de la
matière au niveau de l’équateur par ce vent (Wind Compressed Disc) a été avancée (5). Des
oscillations non-radiales et la présence de forts champs magnétiques ont aussi été proposées.
Très récemment de nouveaux modèles et de nouvelles observations ont remis la rotation
rapide au goût du jour. Jusqu’à présent aucune de ces hypothèses ne peut être écartée ou
privilégiée.
L’observation des étoiles Be sur une période de plus de cents ans permit aussi de mettre en
évidence une autre caractéristique intéressante de étoiles Be : la variabilité . Plusieurs types de
variations mettant en jeu le profil des raies, leur intensité, le flux de l’étoile et même son type
spectral furent ainsi découvertes. Leur période (ou pseudo période) varie selon le phénomène
entre quelques heures et plusieurs décennies .