Soins de santé Est-il possible de prévenir le diabète de type 2 ? Ce que disent les directives factuelles ` Ruth Colagiuri Le diabète est la maladie non transmissible la plus courante au monde. Les chercheurs prévoient une augmentation du nombre de personnes atteintes de diabète de plus ou moins 160 % d'ici 2025. Malheureusement, la majorité de cette augmentation se manifestera dans les pays en voie de développement qui disposent du moins de ressources pour faire face à ce problème. Même dans les pays les plus développés, les systèmes de santé doivent se battre pour faire face à la demande de services. Ces dernières années, cette situation a conduit à un intérêt croissant pour la recherche orientée vers la prévention. >> En ce qui concerne le diabète de type 1, la recherche préventive est prometteuse, mais il reste beaucoup de travail à faire avant que des traitements préventifs puissent être offerts à grande échelle aux personnes qui présentent un risque élevé de développer un diabète de type 1 ou aux personnes qui se trouvent à un stade précoce de la maladie. Pour le diabète de type 2, cependant, les directives factuelles sont claires "oui, il est possible de prévenir le diabète de type 2". Décembre 2002 Volume 47 Numéro 4 Ces directives basent leur affirmation sur de vastes études scientifiques internationales qui démontrent que le développement du diabète peut être réduit ou du moins retardé de façon significative (Tuomilehto et al 2001; DPP Research Group, 2002; Pan et al, 1997). Ces études ont été menées chez des personnes qui présentaient un risque élevé de développer le diabète et se sont concentrées sur une amélioration du régime 18 alimentaire, une augmentation de l'activité physique (exercice) et, dans certains cas, l'absorption de comprimés anti-hyperglycémiques, normalement utilisés dans le traitement du diabète déclaré. Quelles sont les personnes à risque ? Des lignes directrices pour la prévention primaire du diabète de type 2 ont été récemment développées en Australie sur base de preuves scientifiques issues de la littérature médicale internationale (O'Dea et al 2001). Ces lignes directrices identifient un certain nombre de facteurs de risque du diabète de type 2 qui devraient être pris en compte pour la prévention ou le retardement de l'apparition de ce type de diabète. Les facteurs identifiant les personnes qui présentent le risque le plus élevé de développer un diabète de type 2 sont les suivants : la personne présente une surcharge pondérale, évaluée par une mesure de la taille et du poids et un calcul de l'indice de masse corporelle (IMC), ou par la Soins de santé mesure du tour de taille (> 100 cm pour les hommes adultes de type caucasien et > 90 cm pour les femmes adultes de type caucasien) ; la personne présente une altération de la tolérance au glucose (la glycémie est constamment supérieure à la normale mais n'est pas systématiquement assez élevée que pour parler de diabète) ; la personne est une femme qui présente des antécédents de diabète gestatif. La prévention du diabète de type 2 Bien que certains facteurs de risque, comme l'âge ou les antécédents familiaux, sont incontournables, les faits montrent qu'une modification du mode de vie de toutes personnes présentant des facteurs de risque identifiables permettrait de réduire les risques de développer un diabète de type 2. ( Augmenter l'activité physique, adopter une alimentation plus saine et perdre du poids en cas de surcharge pondérale peuvent contribuer à prévenir ou retarder l'apparition du diabète de type 2. ) peut contribuer à prévenir ou à retarder le développement du diabète de type 2. Cela a été démontré dans le cadre du Diabetes Prevention Program (DPP) mené par les Etats-Unis (DPP Research Group, 2002), qui a évalué l'impact de l'adoption d'un mode de vie plus sain ou de la prise de metformine, un médicament utilisé dans le traitement du diabète. Chez les personnes traitées à la metformine, le développement du diabète de type 2 a été réduit de 31 %, tandis que chez les personnes qui ont participé au programme de modification du mode de vie, la réduction était de 58 %. Il a donc été démontré que l'adoption d'un mode de vie plus sain était le moyen le plus efficace de réduire le développement du diabète de type 2. Le programme d'amélioration du mode de vie encourageait les participants à faire 150 minutes d'activité physique modérée par semaine, par exemple une promenade à bon pas.Tous les participants ont été invités à réduire leur poids de 7 %. Cette perte de poids ne permettait pas de placer le groupe dans la fourchette normale de poids mais était toutefois suffisante pour être bénéfique pour leur santé. Les différents groupes ont également modifié leur apport en graisses, s'efforçant de réduire les graisses alimentaires sous le seuil des 30 % de leur apport énergétique (calorique) total sur un délai d'une année à compter du début de l'étude. Ces modifications du mode de vie ont impliqué de nombreuses consultations individuelles. A l'heure actuelle, la recherche n'a pas encore explicitement fait la différence entre l'efficacité relative du régime alimentaire et de l'activité physique comme seule intervention. Ce qui signifie que les activités de prévention devraient combiner de nouvelles habitudes alimentaires visant à réduire le poids et un nouveau mode de vie visant à augmenter l'activité physique. Dans l'ensemble, l'étude montre qu'il est possible de réduire le risque de développer un diabète de type 2 en : participant à une activité physique régulière (de préférence cinq fois par semaine) ; réduisant son poids en cas d'obésité, en particulier dans le cas d'une obésité abdominale ; adoptant un régime alimentaire avec moins de 30 % de graisses et moins de 10 % de graisses saturées ; adoptant un régime alimentaire d'une densité énergétique réduite à base d'aliments variés à forte teneur en glucides riches en fibres alimentaires et avec un indice glycémique bas (céréales, légumes, légumes secs et fruits). >> Les graisses saturées sont le type de graisse généralement dérivées de certains aliments d'origine animale, notamment le boeuf et le lait. Bien qu'ayant une teneur en calories similaire aux autres graisses et huiles, elles ont des effets défavorables sur les lipides sanguins y compris le cholestérol, et contribuent donc aux complications cardiovasculaires. L'indice glycémique permet de mesurer la vitesse à laquelle les sucres présents dans les aliments à forte teneur en glucides pénètrent dans le sang, et donc le niveau de glycémie Il est à présent prouvé qu'augmenter l'activité physique, adopter une alimentation plus saine et perdre du poids en cas de surcharge pondérale chez les personnes atteintes de diabète. Le sucre rapide a l'indice le plus élevé, tandis que les glucides de certains aliments comme les pâtes et les aliments à forte teneur en fibres ont un indice bas. 19 Décembre 2002 Volume 47 Numéro 4 Soins de santé Que pouvez-vous faire pour prévenir l'apparition du diabète de type 2 chez vos proches ? Si vous êtes vous-même atteint de diabète, votre famille fait partie des personnes à risque, soit en raison d'une forte consanguinité, soit parce que les familles partagent généralement les mêmes facteurs et habitudes de mode de vie, comme l'alimentation et l'exercice physique ainsi qu'une tendance à une surcharge pondérale.Vous pouvez contribuer à prévenir le développement du diabète chez vos proches en leur expliquant les facteurs de risque et en les informant des choses simples qu'ils peuvent faire pour réduire ce risque.Vous pouvez adopter une alimentation plus saine pour toute la famille. ( ) Nous pouvons tous montrer l'exemple en intensifiant notre activité physique, en en faisant un moment de plaisir et en encourageant nos familles à se joindre à nous. Que vous soyez atteint de diabète ou pas, vous pouvez également montrer l'exemple en intensifiant votre activité physique, en en faisant un moment de plaisir et en encourageant votre famille à se joindre à vous. Cela vous aidera également à contrôler votre propre diabète et à éviter les complications. Les mêmes principes s'appliquent aux personnes qui présentent une surcharge pondérale mais qui ne sont pas encore atteintes de diabète. Si vous êtes un professionnel de la santé, vous devriez être attentif aux facteurs de risque chez vos patients habituels, donner les conseils Décembre 2002 Volume 47 Numéro 4 spécifiques et intervenir auprès des personnes identifiées comme présentant un risque élevé de développer le diabète de type 2. ( ) Les gouvernements peuvent contribuer à cette prévention en rendant les options saines moins chères et plus facilement disponibles. Les gouvernements peuvent faire une grande différence en ce qui concerne la santé de leurs citoyens en introduisant des politiques et des mesures pratiques visant à garantir que les options saines sont largement disponibles et font partie de la vie quotidienne de chacun. Les organisations nationales et professionnelles du diabète et les citoyens eux-mêmes peuvent contribuer à prévenir le diabète de type 2 en devenant des lobbyistes et des activistes qui encouragent leur gouvernement à : rendre meilleur marché et plus facile l'achat d'aliments sains et plus difficile et plus cher l'achat d'aliments néfastes pour la santé (par exemple en augmentant les taxes sur les aliments néfastes pour la santé et en réduisant les taxes sur les produits sains) ; interdire ou réduire la publicité sur les aliments néfastes pour la santé, de la même façon que certains pays ont interdit la publicité sur le tabac ; garantir la présence dans nos villes d'espaces ouverts favorables à la pratique du sport et d'activités d'extérieur et s'assurer que les rues de nos villes soient sûres pour de longues promenades ; encourager l'exercice physique et les 20 programmes d'alimentation saine dans les écoles, les universités et sur le lieu de travail. Il est possible de prévenir le diabète de type 2. Les conclusions des essais cliniques contrôlés l'ont prouvé. L'étape suivante est de mettre tout cela en pratique dans notre vie quotidienne. ` Ruth Colagiuri Ruth Colagiuri est Directrice du Australian Centre for Diabetes Strategies au Prince of Wales Hospital de Randwick, Australie. Pour en savoir plus DPP Research Group, 2002. The Diabetes Prevention Program. Reduction in the incidence of Type 2 diabetes with lifestyle intervention or metformin. N Engl J Med 2002; 346: 393-403. O'Dea K, Colagiuri S, Walker K, Hepburn A, Holt P, Colagiuri R. Evidence Based Guidelines for Type 2 Diabetes: Primary Prevention. Canberra: Diabetes Australia & NHMRC, 2001. Pan XR, Li GW, Hu YH, Wang JX, et al. Effects of diet and exercise in preventing NIDDM in people with impaired glucose tolerance. The Da Qing IGT and Diabetes Study. Diabetes Care 1997; 20: 537-44. Tuomilehto J, Lindström J, Eriksson JG, Valle TT, Hamalaninen H, IlanneParikka P, Keinanen-Kiukaanniemi S, Louheranta A, Rastas M, Salminen V, Uustipa M. Prevention of Type 2 diabetes mellitus by changes in lifestyle among subjects with impaired glucose tolerance. N Engl J Med 2001; 344: 1343-50.