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1) Quelles sont les causes de la baisse de consommation chez les séniors?
1.1 Changements physiologiques:
Chez les personnes âgées, l’acuité des sens diminue et «l’appétit avec». L’odorat et la perception des goûts sont progres-
sivement altérés. Après 75 ans, le nombre de papilles gustatives diminue, elles s’appauvrissent en bourgeons gustatifs.
Seul un tiers de ce que nous possédions plus jeune est encore actif. Le salé est la saveur la plus atteinte si bien que les
séniors ont tendance à plus saler les aliments au risque d’augmenter leur pression artérielle. A l’inverse, la sensation
gustative du sucré persiste voire augmente avec l’âge et cela peut conduire à une prise excessive d’aliments riches en
sucres. Les odeurs ont également un rôle important dans la stimulation de l’appétit. Pourtant, les capacités olfactives di-
minuent constamment et progressivement avec l’âge ce qui peut avoir un impact négatif sur la prise alimentaire. Souvent
niés par la personne âgée, ces changements peuvent entraîner un abandon lent, progressif et inconscient de la consom-
mation. La situation devient alors dangereuse!
A cette perte d’envie de manger se greffent souvent, du fait de leur âge, des problèmes de dentition et de mâchoire, des
sécheresses buccales donnant lieu à des difficultés masticatoires et des troubles de la déglutition. Par conséquent, la
personne âgée prendra plus de temps pour terminer ses repas et ces difficultés instaureront des choix sur l’alimentation.
Ainsi, la consommation de fruits frais, de viande ou de légumes se verra restreinte et pourra apporter des insuffisances sur
le plan nutritionnel.
Chez les personnes âgées, les capacités de l’appareil digestif diminuent: les muqueuses s’atrophient, les sécrétions enzy-
matiques digestives diminuent ce qui entraîne un retard à l’assimilation des nutriments dans l’intestin grêle, les fibres
musculaires de l’estomac et de l’intestin perdent leur tonus. La digestion prend alors plus de temps, imposant de respecter
un intervalle de 3 heures entre deux prises alimentaires en évitant le grignotage intempestif.
A noter que les prises importantes de médicaments mises en place suite à l’apparition de maladies chroniques peuvent
aussi affecter l’appétit ainsi que le goût. De même, les interdits alimentaires induits par des pathologies (sel, sucres, ma-
tières grasses, gluten, …) peuvent aboutir à une impasse diététique.
1.2 Changements psychologiques:
La mort du conjoint, des amis, le départ des enfants, autant
de bouleversements qui peuvent amener à la solitude, l’iso-
lement, l’ennui voire à la dépression annihilent le désir de
manger.
Avec l’avancée en âge, l’incidence et la fréquence des
troubles neuropsychologiques augmentent. On note une
diminution des performances liées à la perception, à la mé-
moire ou encore à l’attention. Les troubles de la mémoire
viennent perturber le quotidien de la personne âgée: elle
peut être amenée, par exemple, lorsqu’elle prépare son re-
pas à chercher ses aliments. Cuisiner devient alors une
contrainte et cela entraîne un certain abandon de l’alimenta-
tion et donc une dénutrition.
1.3 Changements sociologiques:
La diminution des revenus après la retraite, l’isolement des personnes, l’augmentation de la dépendance peuvent avoir
un impact très négatif sur les choix alimentaires.
2) Quels sont les besoins spécifiques en terme de Nutrition?
La synthèse protéique diminue dès l’âge de 50 ans alors que le catabolisme protéique musculaire est conservé ce qui
aboutit à une minuscule perte quotidienne de muscle qui, à long terme, fragilise le sénior. A l’âge de 65 ans, la fonte mus-
culaire moyenne est de 40%. La consommation de protéines doit donc être augmentée pour éviter cette perte alors même
que l’appétence diminue et que la personne âgée croit souvent que ses besoins sont moindres. Chez les personnes
âgées, des apports de protéines de bonne qualité sont donc indispensables pour préserver la masse musculaire soit 1g/
kg/j chez les plus de 60 ans contre 0.83 g/kg/j chez l’adulte en bonne santé (Source
Apport en protéines: consommation,
qualité, besoins et recommandations, AFSSA, 2007
). La dénutrition protéino-énergétique peut toucher jusqu’à 4% des
séniors à domicile et bien plus en institution. Elle multiplie par 2 à 6 le risque de morbidité et par 4 le risque de mortalité.
L’apport en calcium et en vitamine D doit être augmenté pour lutter contre l’ostéoporose, maladie qui provoque une dimi-
nution de la résistance des os.
Le rendement métabolique diminue avec l’âge: la dépense énergétique pour une activité physique donnée est augmentée
de 20 à 30% par rapport à un adulte plus jeune. Les sujets âgés actifs physiquement doivent donc augmenter leur
consommation alimentaire, ce qui est loin d’être toujours le cas. Les apports nutritionnels sont désormais évalués à 36
kcal/kg/jour soit 2000 à 2400 kcal/j chez l’homme et 1800 à 2000 kcal/j chez la femme.
Les besoins nutritionnels comprennent les besoins en eau qui sont de l’ordre de 1 à 1.5 litre par jour en plus de l’eau des
aliments. Il est important de les respecter chez les séniors car la déshydratation peut avoir des conséquences patholo-
giques graves, notamment neurologiques, cardio-vasculaires et rénales et augmente les risques de décès. Parce que la
sensation de soif est altérée chez les personnes âgées, il faut les inciter à «boire sans soif» tout au long de la journée.