de l`Office de Génie Écologique

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n°23 – A NNÉE 2012
La lettre
de l'Office de Génie Écologique
ÉDITO … LE GÉNIE ECOLOGIQUE
Depuis quelque temps la profession et le ministère chargé de l’Environnement mènent des
réflexions sur le développement du génie écologique en France. De même, lors du récent
salon Pollutec, nous avons participé au village
du génie écologique organisé pour la première
fois par le pôle de compétitivité Hydreos.
Il nous a donc semblé important de faire un
numéro de la lettre sur le génie écologique.
Cette discipline a été lancée au cours des
années 1980 pour développer des modes de
gestion de l’espace ou d’aménagement du
territoire qui tirent parti des processus naturels. Les actions permettent une meilleure
intégration écologique des projets et tendent
vers la préservation et la restauration de la
nature. Les savoir-faire du génie écologique
comprennent une grande diversité d’actions :
le génie végétal, les passages pour la faune,
la gestion d’habitats naturels par le pâturage,
la fauche, l’étrépage...
Depuis plus de vingt ans notre entreprise mène des opérations de génie écologique. Elles
découlent souvent des études d'impact que
nous avons menées ou bien de mesures de
réhabilitation sur des infrastructures anciennes. Ces opérations visent à réparer la nature
malmenée par des projets ou des modes de
gestion inadaptés, à restaurer des continuités
écologiques entre des habitats naturels fragmentés.
Nous attachons beaucoup d’importance au
suivi des opérations, depuis les études amont
jusqu’aux réalisations. Lorsque nous les avons
conçues, nous nous sommes investis sur le
terrain pour comprendre le fonctionnement
des écosystèmes présents.
Il est aussi important qu'un suivi ait lieu sur
toutes les opérations réalisées afin de pouvoir
améliorer les savoir-faire pour de futures opérations.
Ce numéro présente plusieurs exemples de
réalisation d’opérations menées par O.G.E.
Je vous souhaite bonne lecture de cette 23ème
lettre d’O.G.E.
Jean François Asmodé
RESTAURATION DE LANDES ET PELOUSES EN VOIE DE
DISPARITION
Le projet porte sur le Bois du Roi situé dans l’Oise. Dans le cadre des mesures de réduction et de compensation des impacts d’un projet de centre
de traitement et de valorisation des matériaux incluant un CET, O.G.E. a
proposé la restauration des habitats naturels à enjeu : les landes à bruyères.
Une première tranche
de travaux a eu lieu
avant la réalisation du
projet. Nous sommes
intervenus sur trois
sites pour deux types
de restauration : la
réouverture de landes
partiellement boisées
par une colonisation
spontanée de bouleaux et de pins sylvestres et la réouverture d’une très remarquable pelouse sur sables comportant une population majeure pour la Picardie d’une plante menacée
d’extinction, la Véronique en épi (Veronica spicata).
L’opération s’est déroulée en hiver 2010-11 par arrachage des aulnes
blancs et des bouleaux qui avaient colonisé le milieu. La station de Véronique en épi a été confortée avec une augmentation d’environ 10 % de sa
surface. D’autres espèces végétales rares ont bénéficié de la gestion comme l’Ibéride amer (Iberis amara) dont les populations ont doublé.
Une analyse diachronique des photographies aériennes a permis d’estimer
que les landes ont régressé de 86 % en une soixantaine d’année. Sans
une gestion active, ces milieux disparaissent. Le projet comprend d’autres
étapes de restauration, notamment par le pâturage, dans une perspective
de réseau de landes entretenues à long terme.
Vincent Vignon
SOMMAIRE
Page 2
LES DOSSIERS D’O.G.E. : Opérations de génie écologique
en accompagnement des travaux de la LGV Est européenne - 2ème phase
Page 3
PARLONS-EN ...
Restauration d’habitats en bordure d’un vieil étang en
Sologne dans les emprises de l’autoroute A71
Page 4
LE POINT SUR…
Le génie écologique
VEILLE ECOLOGIQUE
Le génie végétal
LES DOSSIERS
OPÉRATIONS DE GÉNIE ÉCOLOGIQUE EN ACCOMPAGNEMENT DES TRAVAUX DE
LA LGV EST EUROPÉENNE - 2ÈME PHASE
Les travaux de la seconde phase de la
LGV Est européenne ont débuté en été
2010. Suite à la mise à jour des inventaires faune-flore réalisés par O.G.E. en
2008 et 2009 sur le tronçon H, plusieurs
espèces protégées ont fait l’objet d’une
demande de dérogation aux interdictions
de destruction. En application des arrêtés préfectoraux obtenus, il a été demandé au maître d’ouvrage de déplacer des
espèces protégées impactées par les
travaux. Deux opérations de génie écologique effectuées à cette fin sont présentées dans cet article : le transfert de l’Oenanthe à feuilles de peucédan et la création d’andains, mesure accompagnant
les opérations de déplacement des lézards. .
Transfert de l’Oenanthe à feuille de
peucédan
Trois noyaux de population ont été identifiés par O.G.E. en 2009. La station la
plus importante des trois (plus de 500
pieds sur 70 ares) est impactée par les
travaux.
L’intégralité de la surface impactée (50
pieds sur 30 ares) constitue la zone de
prélèvement. Deux sites d’accueil (les
deux noyaux de population non impactés) ont été choisis. Parallèlement, trois
exclos ont été mis en place pour récolter
des graines de trois sous-populations
(récolte des graines de 80 pieds) pour
conservation ex-situ.
Le protocole de déplacement a été élaboré conjointement par l’expert botaniste
de O.G.E., l’expert botaniste désigné par
RFF (J.-P. Reduron) et l’entreprise Nature et Techniques spécialisée dans les
travaux en milieux naturels.
Station d’Oenanthe à feuille de peucédan
(non impactée) située en bordure du chantier
Le transfert a eu lieu juste après la fructification de l’espèce (fin juin-début juillet 2010). Les pieds ont été prélevés un
à un à la pelle mécanique et transportés
sur le site d’accueil. Là, une fosse de la
taille du godet a été creusée pour accueillir la motte prélevée. Ont suivi un
arrosage abondant et l’installation d’une
clôture sur les sites d’accueil. Ainsi, 60
pieds ont été transplantés en deux zones d’accueil.
Transfert des pieds d’Oenanthe à feuille de
peucédan à la pelle mécanique
des individus sur la zone de chantier.
Ainsi, une quarantaine de lézards a été
déplacée en 2011 sur les trois andains.
Andain finalisé
Création d’andains
Des suivis sur plusieurs années
Il s’agit de recréer un gîte artificiel pour
les populations de Lézard des souches
et de Lézard des murailles capturés et
déplacés. Ce type d’aménagement possède différentes fonctions biologiques :
abri nocturne, sites d’hivernage, zone de
chasse, de cache, de repos et de ponte.
Pour l’Oenanthe, un suivi sur 10 ans a
été mis en place. Des mesures de gestion, calquées sur celles en place avant
les travaux, prévoient la fauche tardive
des surfaces d’accueil avec export du
produit de fauche.
Schéma de principe d’un gîte artificiel ou andain
Le choix de l’emplacement d’installation
des andains est effectué en respectant
une bonne distance des zones de chantier mais également en prenant en compte la disponibilité d’un espace de chasse
à proximité et une bonne exposition.
L’opération a consisté à creuser à la
pelle mécanique une fosse d’environ 80
cm de profondeur sur 2 X 1,50 m. Celleci a été remplie de sable (matériau drainant) et successivement de souches, de
pierres et de branchages de différentes
tailles. Les matériaux végétaux ont été
prélevés directement sur place sur les
zones de chantier. Un espace de sable
et de mulsh (broyats de ligneux) a été
mis en place autour de l’andain pour
offrir des lieux de ponte favorables.
Les trois andains ont été entourés d’une
clôture couplée à une bâche pour éviter
les dégradations volontaires et la sortie
En 2011 (un an après les déplacements), 20 pieds ont été retrouvés sur 60
transplantés. L’état sanitaire des transplants est médiocre (attaque parasitaire,
abroutissement intense). Ces résultats
mitigés sont à analyser au regard des
conditions météorologiques exceptionnelles du printemps 2011 (déficit hydrique important) et n’augurent en rien des
résultats ultérieurs.
Pour les andains, un suivi de la recolonisation est prévu pendant au moins les
deux années suivant la réalisation. Un
entretien des andains est également
prévu pour éviter leur embroussaillement.
Claude Laury & Florian Schaller
PARLONS EN...
RESTAURATION D’HABITATS EN BORDURE D’UN VIEIL ÉTANG EN SOLOGNE
DANS LES EMPRISES DE L’AUTOROUTE A71
A la suite du Grenelle de l’Environnement et dans le cadre du Paquet Vert
Autoroutier signé avec l’État en janvier
2010, la société Cofiroute investit 215
millions d’euros pour améliorer la prise
en compte des enjeux écologiques sur
l’ensemble de son réseau autoroutier
(1200 km).
O.G.E. a eu pour mission de sélectionner un ensemble de sites remarquables
pouvant faire l’objet d’un plan de gestion écologique. Cinq sites présentant
un fort intérêt écologique ont été retenus par Cofiroute, les inventaires et les
plans de gestion ont été réalisés au
cours des années 2009 et 2010.
Le site le plus remarquable du point de
vue écologique est un vieil étang situé
en bordure de l’autoroute A71 en Sologne. Celui-ci a fait l’objet de travaux de
restauration et d’opérations de génie
écologique durant l’hiver 2010-2011
avec pour objectif principal de préserver
et de restaurer les milieux ouverts caractéristiques des zones humides.
Restauration d’une mosaïque de milieux
Le boisement spontané du site
(conséquence d’une absence de gestion) banalise la flore dans les habitats
de landes et les ceintures de végétation
de l’étang.
Un déboisement partiel a donc été réalisé pour restaurer une mosaïque d’habitats et notamment des espaces ouverts.
Arrachage des jeunes bouleaux à la pince
pour éviter une intervention trop destructrice sur le milieu (17 janvier 2011)
Reprofilage de mares
Deux mares ont fait l’objet d’un reprofilage. Ce dernier a consisté en l’adoucissement de la pente des berges et à
l’augmentation de leur profondeur. Ceci
pour éviter la disparition par envasement et faciliter l’installation d’une ceinture de végétation. Le caractère temporaire des mares a été conservé afin
d’empêcher la colonisation par les poissons, prédateurs des larves d’amphibiens. L’une d’elles a également fait
l’objet d’un éclaircissement (coupe des
arbres en bordure) favorable au développement larvaire des amphibiens et
de la végétation aquatique et amphibie.
Le suivi écologique réalisé au cours de
la saison de végétation 2011 par le
Conservatoire botanique national du
bassin parisien, par Théma Environnement et par O.G.E. a confirmé les effets
positifs des travaux de génie écologique
et de restauration des habitats naturels.
Ces derniers ont particulièrement bien
réagi aux actions entreprises.
Deux espèces végétales remarquables
ont bénéficié du remplacement de la
bonde :
• le Fluteau nageant Luronium natans.
Plante rare, protégée en France,
inscrite en annexe II de la directive
Habitats ;
• la Pilulaire à globules Pilularia globulifera. Plante rare, protégée en France.
Vue sur l’étang (19 août 2011) © Cofiroute
Remplacement de la bonde
ème
La bonde datant du 19
siècle et inutilisable a été remplacée afin de pouvoir
maîtriser les niveaux d’eau pour permettre aux communautés remarquables d’espèces de se succéder dans le
milieu.
Le niveau de l’étang est régulé pour
favoriser les plantes immergées
(remplissage maximal en hiver et au
printemps) et les larves aquatiques d’insectes, les oiseaux limicoles, les ceintures de végétation (abaissement du niveau au cours de l’été jusqu’à l’automne).
Étrépage d’une lande humide
Les landes humides sont des milieux
aux très fortes potentialités pour la flore
et la faune lorsque le couvert végétal
n'est pas trop dense, et en particulier
sur les sols nus où une végétation très
originale peut s'installer avec des espèces rares et protégées comme les Rossolis (Drosera sp.).
Un étrépage (décapage du sol sur 10 à
20 cm d’épaisseur) a eu lieu sur deux
parcelles de 50 m² de lande afin de
rajeunir le milieu et permettre aux graines stockées dans le sol de s’exprimer.
Rossolis intermédiaire Drosera intermedia
Deux autres espèces végétales carnivores remarquables ont bénéficié des
travaux d’étrépage de la lande :
• la Grasette (vue sans fleur, mais
probablement Grassette du Portugal) plante rare et protégée dans la
Région Centre ;
• le Rossolis intermédiaire Drosera
intermedia apparu sur les mêmes
terrains que la Grassette. Plante
rare et protégée en France.
Claude Laury & Vincent Vignon
NOUVELLES BRÈVES
Le coup d’œil d’O.G.E. :
VEILLE ÉCOLOGIQUE
Le génie végétal : Un manuel
technique au service de
l’aménagement et de la
restauration des milieux
aquatiques
Photo : © Ph. Thévenin et B. Macé O.G.E.
Une nouvelle espèce pour l’Île-de-France, la Piloselle de Bauhin Hieracium bauhinii
découverte à Melz-sur-Seine (77)
LE POINT SUR ...
Le génie écologique
Les contours d’une notion
D’après l’Union des Professionnels du
Génie Ecologique (UPGE), « le génie
écologique s’inscrit dans une démarche
durable qui vise à valoriser et à développer la biodiversité en menant des actions concrètes et adaptées sur des
écosystèmes ciblés ».
Plus largement, cette notion englobe
toutes les étapes visant à préserver ou
accroître la biodiversité d’un milieu ou
d’un territoire en ayant recours à des
méthodes imitant les processus naturels
des écosystèmes. Ces méthodes se
substituent ainsi aux techniques courantes du « génie civil ».
Les techniques du génie écologique
sont employées dans différentes actions
de gestion, d’entretien ou de restauration des milieux naturels.
Toute opération de génie écologique fait
suite à la réalisation d’un état initial
(diagnostic écologique) et à la définition
d’objectifs. Ces opérations sont par
ailleurs nécessairement accompagnées
d’une gestion adaptée et de suivis
scientifiques sur la base d’indicateurs
définis au préalable.
Une filière qui se structure
La filière génie écologique fait partie des
18 « filières industrielles stratégiques de
l’économie verte » identifiées par le ministère du Développement durable en
2010. C’est dans ce cadre que le ministère a mis en place un plan d’actions
pour favoriser le développement de la
filière. Ce plan d’actions vise, entre autres, à structurer la filière professionnelle
et à créer des outils communs.
Parallèlement, l’UPGE travaille activement depuis 2009 sur l’élaboration d’une
norme AFNOR (norme X10GE) détaillant une méthodologie qui intègre les
différentes étapes d’une d’intervention
de génie écologique, plus spécifiquement sur zones humides et cours d’eau.
Cette norme est en voie d’achèvement
et sera soumise à enquête publique en
mars 2012.
Office de Génie Ecologique
Notre entreprise utilise depuis plus de
20 ans les techniques du génie écologique dans différents projets d’aménagement ou de gestion. Ces différentes
expériences soulignent toutes la complexité du fonctionnement et de la dynamique des systèmes écologiques et
ainsi poussent à une réelle humilité face
aux opérations menées avec le
« vivant ».
Cet ouvrage paru en 2008 succède
à un premier ouvrage publié en
1994, le Guide de protection des
berges de cours d’eau en techniques végétales, constituant une référence pour les acteurs de l’aménagement et de la restauration des
milieux aquatiques.
Après plus d’une décennie de pratique dans le domaine du génie végétal, les retours d’expérience sont
nombreux et les techniques et savoir
-faire se sont nettement affinés. Cet
ouvrage vise ainsi à faire le point sur
les connaissances acquises en proposant un manuel technique des
différentes méthodes utilisées.
La première partie du livre est
consacrée à la compréhension des
milieux aquatiques comme des systèmes vivants, complexes et en évolution permanente. Ensuite, les auteurs font le point sur les différentes
techniques
du
génie
végétal
(confortement ou végétalisation des
sols) en illustrant leurs propos de
photos de réalisations et de coupes
et schéma de principe. Enfin, dans
une troisième partie, une vingtaine
de cas concrets sont illustrés, intégrant les différentes étapes de la
conception à la réalisation et au suivi
des aménagements.
Alors que les États membres de
l’Union européenne ont pour objectif
l’atteinte d’un « bon état écologique » (directive cadre sur l’eau ou
DCE), ce manuel, à destination des
différents acteurs agissant dans les
domaines de la gestion, de l’aménagement et la restauration des milieux aquatiques, illustre les méthodes du génie végétal reposant sur la
connaissance et la compréhension
du fonctionnement naturel des écosystèmes.
Florian Schaller
Florian Schaller
AGENDA :
Le jeudi 9 février 2012 à Paris Bercy (ministère) se tiendra le 3ème Forum National
des Éco-entreprises. L’objectif de cette journée consiste en l’accélération des
partenariats commerciaux et technologiques entre éco-entreprises.
Référence : P. ADAM, N. DEBIAIS, F. GERBER, B. LACHAT, 2008. Le génie végétal
Un manuel technique au service de l’aménagement et de la restauration des
milieux aquatiques. Biotec Biologie appliquée, Ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de
l’Aménagement du territoire. La documentation Française. 290 p.
La lettre d'O.G.E.
Ce document est réalisé par la société O.G.E. à destination de ses partenaires professionnels exclusivement.
O.G.E. – 5, boulevard de Créteil – F-94100 Saint-Maur-des-Fossés – Tél. 01 42 83 21 21 – Fax 01 42 83 92 13 – mél : [email protected]
Directeur de la publication : J.-F. Asmodé – Rédaction : J.-F. Asmodé, V. Vignon, C. Laury, F. Schaller, P. Thévenin, O. Labbaye & B. Toury
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