Espèces natives proliférantes et espèces introduites invasives Université de Marseille Contact : Marc VERLAQUE Mail : [email protected] OBJECTIFS Donner aux gestionnaires les éléments biologiques, écologiques concernant le développement des macrophytes, leur permettre d’avoir une vision globale de la problématique sur la façade méditerranéenne afin de prendre davantage de recul sur les problèmes rencontrés par certains sur leur lagune et de mesurer réellement l’impact et le danger pour l’équilibre du milieu, voire les activités. La prolifération d’une espèce peut alerter les gestionnaires de lagunes et poser des problèmes pour les activités et les usages. Néanmoins, lutter contre cette espèce à court terme (ramassage, suppression…) peut entraîner des impacts environnementaux importants et déséquilibrer davantage le milieu (arrachage de l’herbier, remise en suspension …). CONCLUSION Depuis la fin du siècle dernier, une préoccupante homogénéisation des habitats méditerranéens est en cours : de riches peuplements cèdent progressivement la place à des communautés appauvries dominées par un petit nombre de macrophytes introduits très invasifs et déjà présents dans l'ensemble du bassin méditerranéen. Concernant les lagunes côtières, le gestionnaire doit faire face à deux types de problème : (1) la pullulation d'espèces natives très tolérantes liée à une eutrophisation du milieu, et (2) le développement d'espèces exotiques envahissantes indépendant des phénomènes d'eutrophisation ou de perturbation. Le premier problème peut être résolu par une réduction des apports nutritifs du bassin versant, alors que le second ne peut être traité qu'en amont au niveau des vecteurs d'introduction puisque une fois introduite, une espèce exotique est quasiment incontrôlable. BIBLIOGRAPHIE Boudouresque C.F., 2008. Les espèces introduites et invasives en milieu marin (Troisième édition). GIS Posidonie publ., Marseilles : 201 p. http://www.com.univ-mrs.fr/~boudouresque/Documents_Enseignement.htm Boudouresque C.F. et M. Verlaque, 2002. Biological pollution in the Mediterranean Sea: invasive versus introduced macrophytes. Mar. Pollut. Bull., 44: 32-38. http://www.com.univ-mrs.fr/~boudouresque/Publications.htm Flagella, M.M., Verlaque, M., Soria, A. et M.C. Buia., 2007. Macroalgal survival in ballast water tanks. Marine Pollution Bulletin, 54: 1395-1401. Mineur, F., Belsher, T. Johnson, M.P., Maggs, C.A. et M. Verlaque, 2007. Experimental assessment of oyster transfers as a vector for macroalgal introductions. Biological Conservation, 137 :237-247. Simberloff, D. et Rejmanek M. (Eds), 2010. Encyclopedia of Biological Invasions. University of California Press, 765 p. Verlaque, M., 2001. Checklist of the macroalgae of Thau Lagoon (Hérault, France): a hot spot of marine species introduction in Europe. 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Mediterranean Marine Science, 11/2: 381-493. http://www.medit-mar-sc.net/listview2-content.php?id=556&cid=156&bc=156 RESUME La Méditerranée est un hotspot de biodiversité (12% des espèces décrites de macrophytes pour 0.8% de la surface des océans) mais c'est aussi un hotspot pour les introductions d'espèces. 125 espèces introduites de macrophytes ont été à ce jour recensées pour un total approximatif de 1200 espèces indigènes. Les principaux vecteurs d'introduction sont le Canal de Suez pour la Méditerranée Orientale et les transferts de coquillage pour l'Adriatique et la Méditerranée Occidentale, viennent ensuite le trafic maritime (fouling, eaux de ballast) et les aquariums. 21 espèces introduites en Méditerranée sont considérées comme invasives ou potentiellement invasives, c'est à dire qu'elles ont la capacité d'impacter les communautés méditerranéennes, le fonctionnement de l'écosystème et les activités économiques. Contrairement aux espèces natives proliférantes qui sont des espèces opportunistes très tolérantes qui pullulent dans les milieux perturbés et eutrophisés, les espèces introduites invasives ont la capacité de se développer en l'absence de perturbations. En Méditerranée, la végétation des lagunes côtières abritant des activités conchylicoles a été fortement modifiée par les introductions d'espèces : par exemple, à Thau, les espèces exotiques représentent 32 % de la flore totale et peuvent constituer la quasi totalité de la biomasse végétale des substrats durs au printemps. Cependant, à ce jour, dans les lagunes, hormis la gêne causée par les plus grandes espèces (Sargassum muticum, Undaria pinnatifida), aucune crise grave n'a pu être imputée aux macrophytes introduits. Néanmoins, la richesse de leur flore exotique illustre la très grande efficacité des transferts de coquillages en tant que vecteur d'introduction d'espèces et les risques élevés de dissémination d'autres groupes beaucoup plus dangereux (parasites, maladies, phytoplancton toxique, gastéropodes perceurs, crépidules...). En conclusion, depuis la fin du siècle dernier, une préoccupante homogénéisation des habitats méditerranéens est en cours : de riches peuplements cèdent progressivement la place à des communautés appauvries dominées par un petit nombre d'espèces introduites très invasives et déjà présentes dans l'ensemble du bassin méditerranéen. Une fois introduite, une espèce exotique étant quasiment incontrôlable, une action préventive en amont par le contrôle des vecteurs d'introduction est donc fortement souhaitable.