Décembre 2008
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REPÈRES
COUP DE SONDE
La société française
face aux courants
créationnistes*
En 2009, la communauté scienti-
fique fêtera le deuxième centenaire de
la naissance de Charles Darwin et le
cent cinquantième anniversaire de la
publication de son livre l’Origine des
espèces. La théorie que le savant
anglais y défend a pris une telle impor-
tance dans la compréhension contem-
poraine du vivant et de son évolution,
associée qu’elle est à d’autres décou-
vertes et d’autres champs de la
connaissance (de la génétique à l’éco-
logie, en passant par la taxonomie),
qu’il paraît difficile, sinon impossible
de la récuser. Pourtant, les objections
qu’elle a suscitées depuis les années
1860 – jusqu’à donner naissance aux
mouvements auxquels est dorénavant
accolé le qualificatif de « création-
nistes » – n’ont toujours pas disparu.
Bien plus, elles paraissent connaître
aujourd’hui un nouvel essor et, à tra-
vers des mouvances d’origine musul-
mane, prendre une réelle importance
en Europe. Certains milieux catho-
liques ne sont pas en reste et prennent
leurs distances même vis-à-vis de pro-
pos tenus par Jean-Paul II, en octobre
1996 devant l’Académie pontificale
des sciences. Le pape avait alors
affirmé que la théorie ou plutôt, préci-
sait-il, les théories de l’évolution
devaient être reconnues comme étant
« plus qu’une hypothèse », et elles ne
peuvent plus être rejetées par les
catholiques sous prétexte de matéria-
lisme. Bref, la contestation de l’évolu-
tion ou simplement de la vision évolu-
tive du vivant héritée de Darwin n’est
plus réservée aux États-Unis ni à de
petits groupes réfractaires : elle est
devenue un vrai thème de conflit au
sein de la société européenne et, en
particulier, française.
Une contestation montante
Quatre interventions ont rappelé le
contexte. En janvier 2007, la France
est assez brutalement sortie de la tor-
peur voire de l’ignorance qui avait
cours jusqu’alors à propos des mouve-
ments créationnistes. De très nombreux
chefs d’établissement de l’Enseigne-
ment public, des responsables de
centres de documentation, des direc-
teurs de laboratoires, des journalistes
et même des responsables militaires et
religieux ont reçu l’ouvrage d’Adnan
Oktar, Atlas de la Création, publié sous
le pseudonyme de Harun Yahya. Fait
stupéfiant : le premier d’une série de
sept volumes annoncés, comptant
700 pages et pesant 7 kg, a été envoyé
de manière nominative à partir de l’Al-
* Fondé il y a un peu plus de vingt ans par
des dominicains engagés dans la rencontre et
le dialogue entre la culture scientifique et la
culture théologique, le groupe Albert-le-Grand
a organisé à Paris, le 8 février 2008, avec l’ap-
pui technique du centre d’études du Saulchoir,
un colloque sur ce thème, en invitant les acteurs
ou les représentants des différents partenaires
du débat : enseignants, politiques, scientifiques,
théologiens.
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