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Il convient de rappeler que le commentaire stylistique n’équivaut pas à une paraphrase
interprétative, plus ou moins, élégante, d’un texte, donnant quelques exemples de propriétés
formelles : c’est un relevé systématique de faits d’expression (morphologiques, lexicaux,
phraséologiques, syntaxiques) bien identifiés sur le plan grammatical, classés, triés, regroupés et
interprétés en fonction d’hypothèses, énonciatives, pragmatiques, rhétoriques, tenant compte du
genre de l’œuvre, de son époque, de la nature de l’extrait, des parties qui le composent.
Rappelons enfin qu’un sort est toujours fait, lors de la correction du commentaire
stylistique, aux qualités de rédaction des candidats ainsi qu’à l’orthographe. Ah, « ellipse »,
« élidé », « occurrence » et « métonymie »…
Le corrigé qui suit, détaillé dans ses deux premières parties et synthétique dans sa partie
stylistique, n’entend pas décourager les candidats par son volume : il ne correspond aucunement à
une copie à laquelle nous nous serions attendu ; il correspond plutôt à un manière d’hommage
que nous rendons à la complexité de la langue française. Nous voudrions seulement que les
candidats futurs puissent, nous lisant, se dire à de certains moments : « Cela, je le sais, je pourrais
l’écrire ! » ou encore : « Cela se voyait clairement dans le texte, j’aurais pu y penser ! »
TEXTE 1
1. Grammaire
1.1. Vocabulaire (4 points)
Expliquez les mots soulignés dans le texte :
– sied (vers 2) ;
Sied est formé sur le radical fort sié- suivi d’un d graphique étymologisant (vs séant) qui a
pu, en plus du e étymologique de seoir, mettre les candidats sur la voix du latin classique sedere
(I.-E. : *sed), le tout prononcé [sje], une syllabe.
Il s’agit de la P3 du présent de l’indicatif de la voix active du verbe seoir.
Ce verbe est éminemment défectif : voix passive, mode impératif, tiroir du passé simple,
temps composés n’existent pas ; P1, P2, P4 et P5 sont rarissimes.
NB : On a accepté la mention des formes seyait, seyaient aussi bien que de séyait,
séyaient.
Le verbe est en emploi intransitif, et non dans son vieil emploi pronominal (synonyme de
« s’asseoir » encore chez Anatole France en 1896 : « Chevalier, seyez-vous et buvez, je vous
prie »). Le verbe est en emploi impersonnel (« quelque chose sied à quelqu’un ou à quelque
chose »), comme au vers précédent : « il n’est plus temps de répandre des pleurs ». Ici, c’est
l’apostrophe qui précise à qui s’adresse le rappel d’une vérité par ailleurs générale : « Ma fille,
[…] il sied mal […] ».
Le verbe est de sens abstrait et non concret, comme au sens juridique de « tenir séance »
(« L’Assemblée du Clergé, séante en 1705, s’empressa de la recevoir [la Bulle du Pape] sur
l’invitation du roi », chez Sainte-Beuve en 1859). La dérivation de sens remonte au bas latin
(V
e
siècle).
Le verbe est pris au sens moral de « convenir ».
La convenance est ici morale et non vestimentaire (cf. « Cette coiffure me sied à ravir »,
chez Jouy en 1812), quoique le vieil Horace pourrait dans son intransigeance qualifier
d’esthétique la déploration de Camille. Corneille dans ce passage utilise aussi « devoir » (v. 6,