CAS CLINIQUE Mots-clés IRM rachidienne - Fracture vertébrale - Radiographie - Maladie de Paget L’IRM c’est bien, la radio ça peut être mieux… M.G. Bray* M adame M., âgée de 66 ans, est adressée au service des urgences pour une fracture vertébrale de L1 avec recul du mur postérieur et effet de masse intramédullaire. Cette fracture a été mise en évidence sur une IRM rachidienne prescrite à la suite de dorsalgies avec réveils nocturnes évoluant depuis un mois et demi. Devant l’aspect hétérogène du corps vertébral de L1 en IRM, le recul du mur postérieur et l’hypersignal intramédullaire, une cause secondaire tumorale est évoquée par les médecins aux urgences (figures 1 et 2). Redoutant le risque élevé de compression médullaire symptomatique, une indication opératoire est posée : la patiente est opérée par laminectomie, biopsie vertébrale et ostéosynthèse. Les suites opératoires sont simples. Après l’intervention, elle est hospitalisée dans le service de rhumatologie à la recherche de la cause du processus tumoral. Le bilan biologique initial montre un léger syndrome inflammatoire en postopératoire. Les marqueurs tumoraux (CA15-3, CA19-9, ACE), l’électrophorèse des protéines sériques, l’immuno-électrophorèse et la recherche de chaînes légères urinaires sont négatifs. Le bilan d’iconographie initial est complété par un scanner thoraco-abdomino-pelvien à la recherche d’une tumeur primitive, lequel s’avère normal. En reprenant la lecture des radiographies préopératoires, on décèle alors une épineuse plus volumineuse que les autres en L1 (figure 3), ainsi qu’une augmentation de taille du corps vertébral de L1 (figure 4). Le diagnostic de tumeur est remis en question tandis que celui de maladie de Paget est suspecté. La réinterprétation collégiale des images d’IRM initiales confirme l’augmentation de taille globale du corps vertébral et de l’épineuse de L1 concordant avec le diagnostic de maladie de Paget (figures 5 et 6). Le bilan de maladie de Paget est complété par une scintigraphie osseuse du corps entier qui montre une hyperfixation intense de T12, de L1, de la branche ilio-pubienne droite, de la branche ilio-ischiatique droite et du rocher gauche (figure 7). La maladie de Paget est finalement confirmée par l’analyse anatomopathologique de la biopsie chirurgicale de la vertèbre L1, qui conclut à l’absence de cellule maligne et à l’existence d’un intense remodelage osseux compatible avec ce diagnostic. Étant donné le caractère agressif de la lésion, la patiente est traitée par une perfusion de 5 mg d’acide zolédronique. On retient donc le diagnostic de fracture sur vertèbre pagétique, pathologie osseuse dont l’aspect en IRM peut mimer une infiltration tumorale. Même à l’heure de l’IRM, les radiographies standard gardent leur place et permettent parfois de redresser le diagnostic ou d’éviter d’autres explorations invasives, à la recherche d’une tumeur primitive. Elles doivent donc toujours être lues avec attention ! ■ 6 | La Lettre du Rhumatologue • Suppl. 3 au n° 357 - décembre 2009 Légendes Figure 1. Coupe sagittale d’IRM rachidienne pondérée en T1. Figure 2. Coupe sagittale d’IRM rachidienne pondérée en T1 avec injection de gadolinium. Figure 3. Radiographie du rachis lombaire centrée sur L1 ; épineuse plus large et plus dense que l’épineuse de L2. Figure 4. Radiographie de profil centrée sur L1 ; vertèbre plus large que la vertèbre L2. Figure 5. Vertèbre dorsale normale chez cette patiente. Figure 6. Vertèbre lombaire L2 pagétique chez la même patiente (même échelle). Figure 7. Scintigraphie osseuse du corps entier. * Service de rhumatologie, groupe hospitalier de la Pitié-­ Salpêtrière, Paris. CAS CLINIQUE 1 2 3 4 5 7 6 D G G D Antérieure Antérieure Postérieure Postérieure La Lettre du Rhumatologue • Suppl. 3 au n° 357 - décembre 2009 | 7