La magie des calculs
Peut-on imaginer la terreur qui s’abattait sur celles et
ceux qui ignoraient la nature des éclipses totales de
Soleil, au moment où la nuit tombait soudain en plein
jour ? Cela devait être épouvantable ! Les éclipses ont
d’ailleurs souvent été associées à des prophéties de
malheurs et de désastres. Ce dernier mot, qui signifie
« contre les astres », révèle bien les conséquences
supposées de certains phénomènes cosmiques sur
l’Humanité. Le mot éclipse, quant à lui, vient du grec
ekleipsis qui signifie abandon ou omission, rappelant la
peur de l’abandon que devaient ressentir des peuples
ignorant le mécanisme du phénomène, en voyant
disparaître le Soleil ou la Lune.
Le cycle des éclipses
Pourtant, dès l’époque babylonienne, les astronomes ont
observé et noté avec attention ces phénomènes astronomiques.
Ils ont pu en tirer de premières « lois » démontrant une
régularité et des cycles dans l’observation des événements
célestes. L’un de leur plus grand titre de gloire serait la
découverte du cycle du Saros. Lorsqu’une éclipse se produit, une
autre se réalise automatiquement 18 ans 11 jours et 8 heures
plus tard quelque part dans le monde. À partir du 17ème siècle,
les prévisions des éclipses atteignent une précision étonnante.
C’est la « magie » de la mécanique céleste.
Profiter d’une éclipse pour s’imposer…
Certains aventuriers ou explorateurs ont profité de l’ignorance
des peuples pour s’imposer auprès d’eux. L’un des plus beaux
exemples est l’éclipse de Lune du 29 février 1504, qui permit à
Christophe Colomb de faire croire aux habitants d’une île,
aujourd’hui jamaïquaine, qu’il était capable de commander aux
Dieux de faire disparaître la Lune. Convaincus de ses pouvoirs
surnaturels alors que la Lune s’obscurcissait dans une couleur
rouge sang au moment annoncé, les habitants effrayés
acceptèrent d’aider le navigateur et son équipage. Bien
entendu, Christophe Colomb avait simplement lu dans ses
almanachs les prévisions de l’éclipse pour profiter de la
crédulité des indigènes. L’anecdote rappelle naturellement
l’éclipse vécue par Tintin dans l’album Le Temple du Soleil.
Le récit de Frédéric Cailliaud contant son observation de
l’éclipse de Lune du 10 juin 1816, lors de son voyage en
Égypte, est nettement plus sympathique. Sa « prédiction » du
phénomène lui a tout de même permis de gagner « une haute
considération » auprès des « indigènes » et d’être pris pour
« un second Mahomet » !
Les courbes noires dessinées sur cette carte terrestre montrent le passage
de l’ombre de la Lune pour trois éclipses faisant parties de la même « famille »
d’un cycle du Saros. Avec une période de 18 ans 11 jours et 8 heures,
l’éclipse de Soleil se reproduit, mais avec un décalage de 120° en longitude
ouest. Illustration extraite de l’ouvrage Les Éclipses, de l’Abbé Th. Moreux
(début 20ème).
Cette gravure du 19ème siècle montre une peuplade tirant sur l’éclipse pour
tenter de délivrer le Soleil ! Illustration extraite de l’ouvrage Les Merveilles
célestes, Camille Flammarion, 1897.
Série de photographies de l'éclipse totale de Soleil du 1
er
août 2008 en Sibérie.