article 75 de la loi 2002-203 du 4 mars 2002 relative
aux droits du malade et à la qualité du système de santé
publiée au Journal Officiel n° 54, le 5 mars 2002,
page 4118, définit un nouvel usage professionnel du titre
d’ostéopatheet de chiropracteur,en particulier pour les non-
médecins :
“L’usage professionnel du titre d’ostéopathe ou de chiro-
practeur est réservé aux personnes titulaires d’un diplôme
sanctionnant une formation spécifique à l’ostéopathie ou à la
chiropraxie délivré par un établissement de formation agréé
par le ministre chargé de la Santé dans des conditions fixées
par décret. Le programme et la durée des études préparatoires
et des épreuves après lesquelles peut être délivré ce diplôme
sont fixés par voie réglementaire.
S’il s’agit d’un diplôme délivré à l’étranger, il doit conférer à
son titulaire une qualification reconnue analogue, selon des
modalités fixées par le décret.
Les praticiens en exercice à la date d’application de la pré-
sente loi peuvent se voir reconnaître le titre d’ostéopathe ou
de chiropracteur s’ils satisfont à des conditions de formation
ou d’expérience professionnelle analogues à celles des titu-
laires du diplôme mentionné au premier alinéa. Ces condi-
tions sont déterminées par décret.
Toute personne faisant un usage professionnel du titre d’os-
téopathe ou de chiropracteur est soumise à une obligation de
formation continue, dans des conditions définies par décret.
L’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé
est chargée d’élaborer et de valider des recommandations de
bonne pratique. Elle établit une liste de ces pratiques à ensei-
gner dans les établissements de formation délivrant le diplôme
mentionné au premier alinéa.
Un décret établit la liste des actes que les praticiens justifiant
du titre d’ostéopathe ou de chiropracteur sont autorisés à
effectuer, ainsi que les conditions dans lesquelles ils sont appe-
lés à les accomplir.
Ces praticiens ne peuvent exercer leur profession que s’ils sont
inscrits sur une liste dressée par le représentant de l’État dans
le département de leur résidence professionnelle, qui enre-
gistre leurs diplômes, certificats, titres ou autorisations.
Ainsi l’ostéopathie serait-elle “enfin reconnue”, comme l’af-
firment les non-médecins et la presse non médicale ! L’ostéo-
pathie et les autres thérapeutiques manuelles sont, en fait,
reconnues en France depuis des décennies, et leur exercice est
toujours réservé aux seuls docteurs en médecine (arrêté minis-
tériel du 06/01/1962). Le “ton” de la commission Nicolas, mise
sur pied par les précédents ministères de la Santé, n’était pas
à la reconnaissance de cette pratique pour les non-médecins ;
mais ceux-ci, en particulier les “DO, MROF” (diplômé d’os-
téopathie, membre du registre des ostéopathes de France), ont
su se faire entendre très efficacement auprès de certains
conseillers et politiques, pratiquement à l’exclusion de toutes
les autres parties. Cet article de loi, considéré comme un véri-
table camouflet par une partie du corps médical français, risque
à l’avenir de poser de nombreux problèmes.
En effet, l’ostéopathie et, à un degré moindre, la chiropraxie-
restent très largement en débat dans le monde médical français ;
même la définition de ces pratiques n’est pas précise et a conduit
l’Ordre des médecins, il y a cinq ans, à reconnaître – avec dif-
ficulté cette discipline sous l’intitulé “Médecine manuelle
(ostéopathie)”. Alors, que dire de l’ostéopathie non médicale
s’appuyant sur des concepts non ou peu scientifiques (ostéo-
pathie fonctionnelle, viscérale, crânienne...) ? Pourquoi l’État
apporte-t-il sa caution à la “mobilité du sphénoïde” à l’heure
de l’evidence-based medicine ? Pourquoi pas à la microkinési-
thérapie, à l’étiopathie, à la musicothérapie et autres disciplines
paramédicales, en marge et non validées ?
Le problème doit également être posé en termes de santé
publique et de protection du patient. Nous continuons à pen-
ser que, en France, tout acte de thérapie manuelle de type
ostéopathique ou chiropractique doit être précédé d’un dia-
gnostic, précis et rigoureux, réalisé uniquement par un doc-
teur en médecine. De plus, seul celui qui pose le diagnostic
est en mesure de pratiquer la manipulation vertébrale ou arti-
culaire avec le moins de risques possible pour le patient. Nous
avons beaucoup de difficultés à envisager une prescription
médicale, sur ordonnance, de “cinq séances de manipulations
cervicales pour cervicalgies”, qui seraient réalisées par un tiers.
Seules les techniques d’ostéopathie dite douce (myotensifs
,
étirements...), sans “craquement”, pourraient éventuellement
être prescrites ; mais elles relèvent déjà actuellement de la
compétence et de la pratique des masseurs-kinésithérapeutes...
La Lettre du Rhumatologue - n° 292 - mai 2003
3
ÉDITORIAL
La “reconnaissance”de l’ostéopathie...
The acknowledgement of osteopathy
!
Ph. Vautravers*
*Hôpitaux universitaires, Strasbourg.
L’
La Lettre du Rhumatologue - n° 292 - mai 2003
4
UNE EXCEPTION FRANÇAISE
Mais le mieux est l’ennemi du bien. Depuis des années, les
ostéopathes non médecins demandent à être reconnus. Depuis
des années, le juge ne condamne plus personne, et nos voisins
européens légifèrent en la matière. Depuis des années, cer-
tains médecins travaillent ouvertement avec des ostéopathes
non médecins, alors que d’autres participent à leur formation...
Les décrets qui préciseront les conditions d’application du
nouveau texte de loi délimiteront les compétences des uns et
des autres et le champ d’application de ce nouveau corps de
paramédicaux. Il faut espérer que leur formation sera très
sérieusement encadrée et sanctionnée par un diplôme d’État
public, à l’instar de celui des masseurs-kinésithérapeutes,
sages-femmes, ou autres orthophonistes. Il faut souhaiter que
la pratique de ces ostéopathes et chiropracteurs non médecins
soit encadrée aussi sérieusement que l’est la pratique des
médecins en termes d’éthique, de déontologie, d’hygiène, de
sécurité, de procédures...
Les médecins français, généralistes ou spécialistes, évoluent
actuellement dans un système de formation initiale et postuni-
versitaire de très bonne qualité, unique en Europe dans le
domaine de la médecine manuelle. Cette “exception française”
doit être renforcée ; le DIU, pour survivre, doit se développer et
passer à l’étape universitaire supérieure, qui est celle de la Capa-
cité.La médecine manuelle orthopédique et l’ostéopathie se doi-
vent d’être plus présentes dans le cursus médical, en particulier
aux 2eet 3ecycles, ainsi que dans les maquettes des futurs DES
de médecine générale, de médecine physique et de rhumatolo-
gie. Tout médecin doit connaître les grandes lignes de cette pra-
tique, les indications et contre-indications, les règles d’applica-
tion, les incidents et accidents, surtout si, à l’avenir, elles devaient
être prescrites par les médecins, puis réalisées légalement par
les chiropracteurs ou ostéopathes non médecins...
"
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