Pauline Deschodt1,2, Grégory Mollot2,3 , Manon Lefebvre2,4 , Jérôme Olivares2, Pierre Franck2 1SupAgro, Montpellier ; 2 INRA unité PSH, Avignon 3CEFE, Montpellier 4Ctifl, centre Balandran [email protected] Résultats Introduction En verger de pommiers, le contrôle des insectes ravageurs peut entrainer l’utilisation de 10 à 20 traitements insecticides par an. Cette forte utilisation d’intrants cible principalement le carpocapse, Cydia pomonella (Lepidoptera, Tortricidae), insecte ravageur majeur de cette culture. Suite à l’apparition récurrente de résistances et dans un contexte de réduction de l’utilisation d’intrants, il est nécessaire de développer des solutions alternatives durables et efficaces. Les vergers sont des cultures pérennes qui peuvent favoriser la mise en place de communautés de prédateurs stables dans le temps. Considérant la lutte biologique par conservation, il est important de préserver et de maximiser la présence des ennemis naturels dans les vergers et à proximité. Dans le sud-est de la France, les parcelles sont soumises au vent violent venu du nord : le mistral. Il en résulte la mise en place de larges haies de cyprès ou de peupliers au nord des parcelles. Cette particularité du paysage est intéressante du point de vue de la lutte biologique par conservation car ces haies, structures pérennes, peuvent représenter un apport en terme de sites d’hibernation et de reproduction, de zones refuges et de nourritures alternatives pour les auxiliaires1. Dans cette étude, on s’intéresse plus particulièrement aux prédateurs généralistes présents au sol, carabidés et araignées. Analyse du marquage protéique (641 individus) • • 46% des individus testés sont ressortis positifs à l’ovalbumine, indiquant un contact avec la haie (pour les taxons les plus abondants, 37%, 29%, 39% respectivement pour les P. melanarius, N. brevicollis et Trochosa spp) Capture des individus testés positifs à la protéine dans l’ensemble du verger Modèle linéaire généralisé: la distance, le type de haie, la porosité de la haie, le système de culture et le type de désherbage ont-ils un effet sur la probabilité d’un individus d’être marqué à l’ovalbumine (OV)? Tableau1: Résultats du modèle linéaire généralisé. pvalues associées aux facteurs significatifs du modèle. (Population totale: analyse sur tous les échantillons testés, carabidés et araignées) Haie nord de cyprès Objectifs Cette Etude s’inscrit dans le projet ANR PEERLESS, « Viabilité d’une gestion écologique renforcée de la santé des plantes dans les paysages agricoles », qui a pour objectif de fournir des solutions de contrôle des ravageurs suivant une approche intégrative comprenant à la fois le paysage, la culture et les interactions entre les ravageurs et les auxiliaires. L’étude présentée ci-dessous fait partie de l’identification des critères du paysage liés au contrôle des insectes ravageurs dans les vergers de pommiers. L’objectif principal étant d’évaluer l’effet des haies brise-vent sur les communautés de prédateurs généralistes en termes d’abondance et de composition, de dispersion mais aussi dans un objectif de biocontrôle, en termes de prédation des insectes ravageurs (carpocapse et puceron cendré). • Effet significatif de la porosité sur la probabilité qu’un individu dans la communauté soit marqué ou non à l’ovalbumine On retrouve plus d’individus marqués à l’ovalbumine dans les vergers qui ont une haie brise-vent compact (fig.6) Matériels et méthodes Système d’étude Figure 6: Taux d’individus marqués à l’ovalbumine suivant la porosité de la haie et la distance à la haie • Zone géographique de la vallée de la basse Durance échantillonnée (carré bleu fig.1) • 13 vergers échantillonnés (fig.2) 2 témoins sans haie 11 vergers avec une haie nord Marquage2 et capture (Fig.3) • Figure 1: Localisation des parcelles étudiées dans la basse vallée de la Durance. Source : Scan25® , IGN, 2004 Effets significatifs différents suivants le taxon étudié: Nebria brevicollis: on retrouve l’effet significatif de la porosité de la haie et un effet marqué de la distance en interactions avec les caractéristiques de la haie. Figure 2: Caractéristiques des 13 vergers de pommiers échantillonnées Pterostichus melanarius: effet significatif de l’interaction distance à la haie x type de haie • Pulvérisation d’une solution diluée de blanc d’œuf (ovalbumine) sur les haies nord • Capture des arthropodes du sol: pots barber géo localisés dans la haie et dans le verger • Echantillonnage: 3 sessions dans la 2ième quinzaine de mai Trochosa spp: nous avons détecté plus de Trochosa marqués à l’ovalbumine dans les vergers conventionnels. Analyse de la prédation Rang tampon • Rang central Pas d’ADN de carpocapse détecté dans l’estomac des prédateurs • Présence d’ADN de pucerons 50% 4,5 45% 4 40% 35% pot barber Pulvérisation du blanc d’œuf sur la haie Figure 3: Schéma d’une parcelle type Pot barber positionné dans le rang Détection des protéines: • Tests immunologiques: ELISA indirecte • Lecture de la densité optique (DO) à 450 nm Analyse du contenu stomacal des prédateurs • Dissection des carabidés et araignées puis broyage des tissus à l’aide d’un broyeur à bille • Extraction de l’ADN: kit DNeasy ® (Qiagen) • Analyse PCR: présence d’ADN de carpocapse, de puceron cendré (Dysaphis plantaginea (Homoptera: Aphididae)) Résultats 14 individus positifs sur les 353 testés (uniquement N. brevicollis, P. melanarius et Trochosa spp on été testés) (fig.7) Pas de corrélation entre le nombre de prédateurs positifs au puceron et le % d’arbres attaqués par parcelles 3 30% 2,5 25% 2 20% 1,5 15% 1 10% 0,5 5% 0% 0 28 29 35 55 170 179 % arbres attaqués puceron 181 190 191 194 1971 2101 3773 nb predateur positif puceron Figure 7: Pourcentage d’arbres attaqués par le puceron cendré et nombre de prédateurs ayant répondus positivement à l’ADN de puceron cendré dans chaque les parcelles échantillonnées Conclusions et perspectives Capture et communautés de prédateurs • Au total 641 individus capturés (51% carabidés et 49% araignées) • Nous avons pu démontrer que les communautés de prédateurs échantillonnées dans les parcelles sont dominées par un nombre limité d’espèces, dans notre cas, 2 espèces de carabidés (N. brevicollis et P. melanarius) et le genre d’araignée Trochosa. • La diversité des haies est le principal facteur structurant les communautés de carabidés et d’araignées du sol. • Dans les facteurs pris en compte pour l’analyse de l’activité des prédateurs entre la haie et le verger, c’est la porosité qui explique le mieux les résultats des tests immunologiques. Cela indique que le rôle physique des haies en tant que protection contre les vents violents influence également l’activité des prédateurs généralistes du sol dans le verger. Parmi les individus échantillonnées, on retrouve principalement (fig.4): - Nebria brevicollis - Pterostichus melanarius - Trochosa spp Figure 4: Représentation et identification des individus récoltés dans les pots barber Effet des haies sur les communautés de prédateurs Que ce soit pour les communautés de carabidés (fig. 5) ou d’araignées, l’élément « diversité des haies » discrimine fortement les individus dans la population. Les espèces telles que N. brevicollis et D. germanus sont associées à une forte diversité des haies, contrairement à P. melanarius qui est associé à des vergers à faible indice de Shannon (fig.5). 3,5 Désherbage chimique conventionnel AB Désherbage mécanique Figure 5: Analyse de redondance Etude de l’effet de la diversité des haies (indice de Shannon), du système de culture (AB vs conventionnel) et du type de désherbage sur la répartition des individus dans la communauté de carabidés • En plus de l’analyse globale de la population de prédateurs présents au sol, nous avons pu mettre en évidence des particularités spécifiques à certaines espèces qui peuvent être liées à la biologie et aux capacités de dispersion des prédateurs dans le vergers. Il serait intéressant d’étudier plus en détail les limites de dispersion des prédateurs mais aussi l’effet du système de culture et des perturbations sur l’activité des araignées (Trochosa spp). • En termes d’efficacité du contrôle, les faibles effectifs d’individus positifs ne nous permettent pas de conclure précisément qu’en à la prédation des insectes ravageurs. Malgré tout, les résultats obtenus dans une période peu propice à la prédation3 pourraient être utilisés en comparaison à un échantillonnage plus tardif à l’automne. 1. Landis, D. A., Wratten, S. D., & Gurr, G. M. (2000). Habitat management to conserve natural enemies of arthropod pests in agriculture. Annual Review of Entomology, 45, pp. 175-201. 2. Jones, V., Hagler, J., Brunner, J., Baker, C., & Wilburn, T. (2006). inexpensive immunomarking technique for studying movement patterns of naturally occurring insect populations. Environmental Entomology, 35, pp. 827-836 3. Boreau de Roincé, C., Lavigne, C., Ricard, J.-M., Franck, P., Bouvier, J.-C., Garcin, A., & Symondson, W. O. (2012). Predation by generalist predators on the codling moth versus a closely-related emerging pest the oriental fruit moth: a molecular analysis. Agricultural and Forest Entomology, pp. 1-10. Pauline Deschodt Adresse: Rue Brugh straete, 59284 PITGAM Tél: 06.05.15.48.80