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Bull. Soc. Mycol. Bot. Région Chambérienne - n° 12 - 2007.
LES CÔTES DU RHÔNE
COMPTE RENDU DE LA SORTIE DU 25 MARS 2006
Texte et dessins par Anne-Marie PRIEUR
Les botanistes auraient-ils, aujourd’hui, changé leur traditionnelle sortie sur la flore vernale
en une visite des caves ? Ma foi, cela ne paraît pas improbable, surtout lorsqu’il s’agit de se régaler
le palais ! Un bon Côtes-du-Rhône !
Mais c’est d’un cru tout à fait original, aux senteurs printanières, dont il va être question ce samedi
après-midi ; un cru dominant le Rhône dans l’Avant-Pays savoyard, sur la commune de Lucey, au
lieu-dit La Patavine.
Après un court moment de doute, au moment du départ, constatant l’absence de notre guide Arthur
LEQUAY, nous avions rejoint La Patavine, persuadés qu’il nous attendait sur les lieux.
Comme de bien entendu, au point de rencontre prévu, droit comme un "i" sur le talus qui bordait la
route, notre ami Arthur guettait l’arrivée de la troupe.
S’il ne s’agissait pas d’œnologie mais bien de botanique, il en fut cependant question quelques
minutes. Arthur, prenant la parole, nous rappela gentiment qu’un pari pour une fleur lui avait coûté
une bouteille de champagne lors de la première sortie du printemps 2005. Très sûr de lui, il
renouvela son pari, si nous ne trouvions pas la fameuse fleur. Mais à peine avions-nous fait
cinquante mètres que nous voilà en arrêt devant la petite merveille. Sourire de notre guide ! Il ne
nous payera pas le champagne cette année ! Dommage !
Une élégance toute particulière pour fêter le printemps
Émergeant de deux feuilles basales d’une teinte vert sombre jaspées de brun rougeâtre, presque
irréelle, témoignant du pinceau de quelque peintre en délire, une superbe fleur se balance au
sommet de son pédoncule rougeâtre. Elle a fière allure, avec ses grands tépales réfléchis, qu’un
rouge violacé rehausse magnifiquement et qui laissent apparaître des anthères d’une teinte violette
inhabituelle. Tout semble avoir été fait pour attirer l’attention. Eh bien ! C’est réussi. Chaque
printemps la voit refleurir et chaque printemps les botanistes accourent de toutes parts pour la voir,
prêts à parier gros !
Sa famille : les liliacées.
Son nom : érythrone dent de chien, Erythronium dens-canis, à cause de son bulbe oblong-pointu,
blanchâtre, en forme de croc.
Sa distribution : les montagnes du sud de l'Europe et en France, le Jura, les Alpes, le Massif central
et les Pyrénées ; là où elle trouve un terrain favorable, elle croît en grande quantité.
Comme beaucoup de plantes qui composent la flore vernale, c'est une géophyte sylvicole à la
floraison rapide et précoce, profitant de la lumière avant que les arbres n’aient revêtu leur parure de
feuilles.
Une géométrie parfaite pour des rosettes de feuilles
L’arrivée des fleurs et des couleurs sont les indices qui généralement réveillent les botanistes au
sortir de l’hiver. À l’affût des premières fleurs, ils n’ont pas toujours l’idée de regarder autre chose et
passent parfois à côté d’étonnantes rosettes de feuilles sans leur prêter la moindre attention. Et
pourtant… Avant de déployer leur floraison, certaines plantes mettent un point d’honneur à soigner
leur feuillage, en plaquant au sol d’extraordinaires rosettes à la géométrie parfaite.
Nous en eûmes la preuve au cours de cette balade avec la tanaisie en corymbe (Tanacetum
corymbosum) et la remarquable finesse de ses feuilles très découpées, plaquées au sol en une
rosette vert tendre qui se détache merveilleusement sur la teinte sombre de la terre.
Deux autres rosettes furent à l’honneur ce jour : celle de la digitale jaune (Digitalis lutea) et celle très
commune du plantain moyen (Plantago media).
La première s’étalait en formant un cercle d’environ 25 à 30 cm de diamètre. Ses feuilles d’un vert
franc, spatulées, étonnaient par leur taille.
Quand au plantain moyen, il avait déposé sur le pré de jolis nœuds avec ses feuilles largement
ovales, pubescentes aux nervures saillantes.
Une charmante pilosité pour supporter la sécheresse
Une petite traversée du bois et nous voilà à découvert, sur les assises jurassiques surplombant le
Rhône. Tout de suite, nous nous apercevons qu’il y a un changement total de milieu. La forte pente,
l’exposition au soleil, sud-ouest, un sol calcaire, en font un endroit chaud et sec occupé par un