36 Soins Libéraux Psychiatrie Quand l’hôpital “désinsère” pour soigner Insertion sociale et ouverture sur la société civile : tel est le mot d’ordre, le leitmotiv, voire la vocation de la Société Parisienne d’Aide à la Santé Mentale (SPASM). Sans sous-estimer l’importance du cadre du soin, la SPASM milite en faveur d’un soin en insertion et développe à cette fin, entre autres, des unités de soins de réadaptation. M Infos ... Adresses utiles • FNACM : Fédération Nationale des Associations Croix-Marine d’aide à la santé mentale 31, rue d’Amsterdam 75008 Paris Tél. 01 45 96 06 36 • UNAFAM : Union Nationale des Amis et des Familles de Malades Mentaux. 12, Villa Compoint, 75017 Paris. Tél. 01 42 63 03 03. À signaler aussi les familles d’accueil thérapeutique. Triées sur le volet, elles sont salariées et reçoivent des malades mentaux l’espace de quelques mois. Un exercice délicat. Des associations de réinsertion apportent également des aides aux patients. édecin-psychiatre, directeur général de la SPASM et président de la SFRR (1), le Dr Cacot a accepté de commenter la notion de soin en insertion. Pouvez-vous nous présenter succinctement la SPASM ? Dr Cacot : La SPASM est une association loi 1901, créée officiellement en 1959 dans le sillage de la Fédération Croix-Marine des Sociétés d’aide à la santé mentale. L’idée de départ était de proposer, parallèlement aux soins, une forme d’insertion sociale. Ainsi, l’association avait offert aux patientes qui sortaient d’une hospitalisation à Sainte-Anne et qui savaient coudre ou tricoter, la possibilité de vendre leurs travaux. La SPASM a ensuite créé un office pour le placement professionnel des patients sortant d’hospitalisation. La philosophie de l’association était certes de favoriser l’insertion, mais cela ne suffisait pas car il restait à définir le type de soins et d’encadrement les plus adaptés à ces patients. On peut dire aujourd’hui que la SPASM propose des soins adaptés tout en se préoccupant d’insertion. Comment définiriez-vous précisément la notion de soin en insertion ? Et pourquoi est-ce si important ? Dr Cacot : Dans notre société occidentale, on a séparé l’espace réservé aux soins et l’espace de la société civile. D’ailleurs, l’hôpital “désinsère” pour soigner. Les soins en insertion représentent le refus de cette séparation entre les soins et la société civile. Les soins en insertion permettent aux patients de se soigner sans Professions Santé Infirmier Infirmière N° 57 • août-septembre 2004 se désinsérer. L’environnement autour du soin doit être en continuité avec le tissu urbain. Il s’agit d’inventer ou de promouvoir des établissements sociaux-médicaux. Bien entendu, la première insertion est l’insertion familiale, c’est pourquoi nous prenons en compte l’ensemble de la famille du patient. De manière générale, nous faisons en sorte que le cadre du soin prenne pied dans un contenant social (exposition, restaurant, concert...). Comment contribuez-vous concrètement à favoriser cette insertion? Dr Cacot : Les unités de soins de réadaptation constituent les outils nécessaires à la mise en œuvre des soins en insertion. On part du constat suivant : pour favoriser la réadaptation et l’insertion, il faut mettre en contact les patients avec des professionnels soignants et d’autres professionnels (moniteurs, éducateurs, formateurs, etc.). Nos unités de soins de réadaptation ne sont pas des hôpitaux. La prise en charge des patients est limitée dans le temps (1 à 2 ans) ; elle est assurée par une équipe pluridisciplinaire. D’un côté, les patients sont considérés comme des patients par les soignants, et d’un autre côté, ils sont considérés comme des stagiaires par les moniteurs ou les formateurs. Ils peuvent acquérir des compétences professionnelles et découvrir ainsi une autre facette de leur personnalité au lieu de rester uniquement dans le cadre du soin. Le Centre Mogador et l’Espace jeunes adultes sont deux de nos unités de soins de réadaptation. Avez-vous procédé à une évaluation de cette démarche d’insertion ? Dr Cacot : Bien sûr. Pour les unités de soins de réadaptation, nous avons des résultats modestes : 30 à 40 % de nos patients sortent avec un emploi ou décident de reprendre des études. On en voudrait davantage, mais nous sommes aussi tributaires du marché de l’emploi. En tout cas, beaucoup de nos patients sortent avec l’idée de se débrouiller autrement dans la vie et progressent énormément sur le plan de la sociabilité. Ces patients qui sortent des unités de réadaptation ont un parcours différent et disposent de bagages que les autres patients n’ont pas. Un autre élément d’évaluation concerne l’augmentation régulière des demandes pour intégrer nos unités de soins de réadaptation. Propos recueillis par François Cohen (1) Société Française de Recherche en Réadaptation. Les alternatives à l'hospitalisation L’hôpital psychiatrique conserve une place éminente lors des phases aiguës de la maladie mentale. Lorsque le sujet recouvre une stabilité attestée, ou si son état ne requiert pas l’internement, d’autres structures assurent la relève. En premier lieu l’hôpital de jour. Celui-ci accueille des patients dont l’état permet un retour au domicile en soirée. Davantage d’activités thérapeutiques (sorties, ateliers...) figurent au programme. Les Centres Médico-Psychologiques (CMP) s’attachent aux consultations et aux visites à domicile. Quelques malades se reconstruisent par le biais de certains travaux. À signaler aussi les familles d’accueil thérapeutique.