Professions Santé Infirmier Infirmière N° 56 • juin-juillet 2004
C
ontrairement à la maladie
de Hodgkin, l’incidence
mondiale des lymphomes
malins non hodgkiniens (LNH) aug-
mente régulièrement depuis plu-
sieurs décennies, soit de 3 à 4 %
par an. En France, entre 1972 et
1992, le taux d’incidence a été mul-
tiplié par 2 pour toutes les tranches
d’âge. Toutefois, il est plus import a n t
après 64 ans et atteint son max i-
mum à l’âge de 90 ans. Entre 1978
et 2000, le taux annuel moyen
d’évolution de l’incidence est de
+3 , 28 % chez l’homme et de
+3 , 4 6 % chez la femme. De
même, entre 1980 et 2000, le
nombre de décès par LNH passe de
989 à 2 664 chez l’homme et de
793 à 2 579 chez la femme. À noter
que le risque de décès par LNH aug-
mente selon les années de nais-
s a n c e : pour un homme né en
19 53, ce risque est 2,5 fois supé-
rieur à celui d’un homme né en
19 28, et il est 2,4 fois supérieur
pour une femme née en 19 5 3 par
r a p p o rt à une femme née en 19 2 8 .
Plusieurs facteurs peuvent expliquer
cette augmentation des lymphomes
non hodgkiniens : une meilleure
tenue des registres du cancer, une
augmentation de l’espérance de vie
(les personnes âgées sont les plus
touchées) et la réalisation du dia-
gnostic plus souvent, même s’il n’y a
pas d’indication de traitement, l’ap-
parition du sida (le risque est multi-
plié par 180 à 200 chez les patients
V I H positifs par rapport aux sujets
V I H négatifs), une augmentation du
nombre de greffes allogéniques
d’organes qui peuvent provoquer
des cas de LNH liés au traitement
i m m u n o s u p p r e s s e u r, sans oublier
des facteurs d’environnement, dont
le rôle est suspecté par de nom-
breuses publications. Ces dernières
p o r tent sur des risques liés à des
expositions professionnelles, y com-
pris dans le milieu agricole (pesti-
cides, insecticides), et soulignent
l ’ i m p o rtance d’études approfondies
dans ce domaine. En revanche, les
études ne sont pas unanimes quant
à l’augmentation du risque lié aux
radiations ionisantes.
D i a g n o s t i c
Concernant les circonstances de
d é c o u v e r te du lymphome, le pa-
tient présente des ganglions indo-
lores localisés ou disséminés depuis
plus d’un mois, une fièvre supé-
rieure à 38 °C sans cause infectieu-
se, un amaigrissement, des syndro-
mes compressifs (dyspnée, œdème,
troubles du transit, troubles de la
marche), une insuffisance médul-
laire se traduisant par une anémie
ou une thrombopénie, et l’examen
clinique découvre une hépatos-
plénomégalie et une infiltration
c u t a n é e .
Le diagnostic repose sur l’histologi e ,
avec une ponction cyt o l o g ique à
l’aiguille fine pour orienter avant de
pratiquer une biopsie au niveau du
ganglion ou d’une partie d’un orga-
ne (estomac, peau, foie). En cas de
ganglions profonds, la biopsie est
guidée sous scanner. Le prélève-
ment doit fournir suffisamment de
matières pour l’anatomopathologi e ,
la détermination de l’immunophé-
notype, la cytogénétique et la con-
gélation d’un fragment pour biologi e
moléculaire. Comme la prolifération
des lymphocytes peut survenir à
divers stades de leur différenciation
et de leur maturation, il existe de
nombreuses variétés de lympho-
mes. Celles-ci sont définies grâce à
l’analyse histologique des cellules
(forme diffuse ou nodulaire, gr a n -
des ou petites cellules) couplée à
l’identification des marqueurs cellu-
laires visant à distinguer les sous-
populations lymphoïdes malignes.
On assiste au développement des
techniques de cytogénétique utili-
sant des sondes couleurs pour
détecter des anomalies des chro-
mosomes, des méthodes de la bio-
l o g ie moléculaire capables d’identi-
fier les gènes-oncogènes et des
techniques au niveau du transcrip-
tome, qui consistent à suivre par
PCR un marqueur moléculaire com-
me le bcl-2. Le diagnostic de plus
en plus précis est essentiel en
termes de pronostic : la survie glo-
bale à 5 ans est de 46 % pour le
lymphome diffus grandes cellules B
( 3 0 % des lymphomes), de 72 %
pour le lymphome folliculaire (deu-
xième lymphome le plus fréquent),
de 74 % pour les lymphomes de la
zone margi n a l e B et de seulement
27 % pour les lymphomes du man-
teau. Pour le Dr C . Th i e b l e m o n t
( Lyon), des techniques d’analyse de
marqueurs cellulaires et molécu-
laires sont en mesure d’établir les
caractéristiques protéiques et géno-
miques de la tumeur avec toutes les
signatures moléculaires et d’identi-
fier les gènes prédictifs d’évolution
des patients. Les nouveaux traite-
ments utilisant les anticorps mono-
clonaux (rituximab, alemtuzumab)
donnent des résultats encoura-
geants. Néanmoins, des questions
persistent, telles que : faut-il les utili-
ser avant la greffe de moelle pour
purger la maladie résiduelle, et
après la greffe pour l’entretien. À
quelle dose et pendant combien de
t e m p s ? Quelle est leur efficacité en
association à la chimiothérapie ?
Ludmila Couturier
CA NC É R OLO GIE
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Le lymphome est une prolifération maligne des lymphocytes B (8O %) ou des lympho-
cytes T (20 %). On distingue la maladie de Hodgkin (caractérisée par la présence de cel-
lules de Sternberg au niveau des ganglions) et les lymphomes non hodgkiniens diffus
ou ganglionnaires (nodulaires).
Les lymphomes non hodgkiniens
En augmentation constante