Évaluation de la néphropathie vasculaire athéromateuse chez le patient hypertendu Claire Mounier-Vehier*, Olivier Jaboureck*, Stephan Haulon**, Valérie Boivin***, Alain Carre*, Jean-Paul Beregi*** La néphropathie ischémique correspond à une perte progressive de la masse néphronique fonctionnelle, secondaire à une sténose ou à une obstruction des artères rénales tronculaires et/ou intrarénales préglomérulaires (1-6). Le terme de néphropathie vasculaire est un terme beaucoup plus général puisqu’il englobe la néphropathie ischémique, les lésions de néphroangiosclérose, les lésions d’athérome intrarénal et les lésions propres aux emboles de cholestérol (2, 7). La néphropathie vasculaire athéromateuse (NVA) est une cause croissante d’insuffisance rénale chronique en raison du vieillissement de la population et de l’amélioration de la prise en charge des maladies cardiovasculaires (1, 2, 8-11). La NVA est un problème de santé publique de plus en plus préoccupant puisque si l'on se réfère à la base de données américaine concernant la période 1991-1995 (8), cette pathologie est retrouvée chez 12 à 14 % des nouveaux patients entrant dans un programme de dialyse, soit 14 % des insuffisances rénales chroniques (1). Ces chiffres sont comparables à ceux publiés par Mailloux en 1988 (10). C’est la NVA qui va conditionner le pronostic de la maladie et le succès d’une éventuelle angioplastie, d’une sténose artérielle associée (3). L'objectif pour les années à venir ne sera pas tant de diagnostiquer les sténoses rénales, car les techniques de dépistage se sont considérablement améliorées, mais sera surtout d’identifier des marqueurs d’atteinte rénale réversible qui permettront d’adapter la prise en charge thérapeutique et d’éviter l’évolution vers l’insuffisance rénale terminale. Ces notions font ainsi référence au concept de protection néphronique dont l’objectif principal est de protéger le capital néphronique en prévenant la survenue de lésions rénales fixées. Un certain nombre de marqueurs de la néphropathie vasculaire sont actuellement à notre disposition mais ils sont pour la plupart trop tardifs, témoignant de lésions le plus souvent déjà évoluées. Marqueurs cliniques et biologiques Ces marqueurs ne sont pas spécifiques de la néphropathie vasculaire ni de la sténose rénale. C’est leur présence dans des situations cliniques à risque qui doit faire poursuivre les investigations I l est nécessaire en préambule et pour la clarté de l’exposé de bien définir les termes qui vont être utilisés par la suite. La pathologie vasculorénale athéromateuse est en effet une entité complexe qui associe : 1. les sténoses exo-rénales des artères rénales ; 2. leur retentissement d’aval sur le rein ; 3. les lésions distales dues à la localisation intrarénale de la maladie athéromateuse ; 4. les lésions dues aux emboles de cholestérol (1-3).. complémentaires à la recherche d’une pathologie vasculorénale (11-17). Certaines situations cliniques comme l’insuffisance rénale rapidement évolutive, les œdèmes pulmonaires répétés, l’HTA réfractaire au traitement, l’HTA maligne et certains paramètres biologiques, comme la protéinurie supérieure à 3 g/24 heures, ou encore la créatinine plasmatique supérieure à 30 mg/l sont ainsi des marqueurs de néphropathie vasculaire évoluée (5, 11, 14, 16, 17). À l’inverse, une protéinurie non détectable, une micro-albuminurie inférieure à 200* g/ mn, une créatinine plasmatique comprise entre 15 et 30 mg/l ou encore l’aggravation datée de la fonction rénale sous traitement antihypertenseur sont de meilleurs pronostiques et peuvent inciter à une revascularisation en présence d’une sténose rénale significative (5, 11,14, 16-18). La microalbuminurie traduit l’existence de lésions vasculaires fixées et sa présence est associée à un moins bon résultat clinique de la revascularisation (18). La microalbuminurie est donc plus un marqueur de sévérité de la néphropathie vasculaire qu’un marqueur diagnostique précoce. La créatininémie et sa clairance font partie des marqueurs biologiques les plus couramment utilisés pour la prise en charge de la néphropathie vasculaire. Mais en étudiant la filtration glomérulaire globale des deux reins, la clairance de la créatinine plasmatique sous-estime en réalité l’atteinte fonctionnelle du rein sténosé, ce d’autant que le rein controlatéral va présenter une hyperfiltration compensatrice. Pour les mêmes raisons, elle n’évalue pas non plus précisément la récupération fonctionnelle du rein revascularisé (1, 15, 19, 20, 21). Par conséquent, ces marqueurs cliniques et biologiques ne sont pas appropriés pour le dépistage précoce de la néphropathie vasculaire. Médecine vasculaire plus Médecine vasculaire plus *Service de médecine interne et HTA, hôpital cardiologique, CHRU, Lille. ** Service de chirurgie vasculaire, hôpital cardiologique, CHRU, Lille. *** Service de radiologie vasculaire diagnostique et interventionnelle, hôpital cardiologique, CHRU, Lille. 97