« Des reptiles ? Quelle horreur ! »
d’expliquer les comportements et la culture humaine à travers la conservation de
caractères génétiques issue de la sélection naturelle. Il est alors supposé que la peur des
serpents soit un caractère hérité de nos ancêtres : seuls ceux qui se méfiaient
instinctivement de ces bêtes venimeuses et rampantes ne se sont pas fait attaquer. Ils ont
donc survécu et transmis à leurs descendants le gène « peur des serpents ». Sauf que le
gène en question n'a pas été identifié formellement. Même si elle est capable d'expliquer
de nombreux comportements, la sociobiologie adaptationniste appliquée à toute la culture
humaine peut dériver vers la spéculation pure et simple comme le montre Stephen Jay
Gould dans son livre « un hérisson dans la tempête ». De manière purement théorique,
tout pourrait s’expliquer à travers une adaptation ancestrale conservée dans nos gènes : le
machisme, Dieu, la lutte des classes, le rose pour les filles ou l'attirance pour les blondes.
Cette théorie du « tout s'explique par les gènes » est aujourd'hui critiquée quand elle est
se revendique comme l’explication universelle de nos comportements et considère
l’influence de l’environnement comme secondaire voire nulle.
A contrario, on peut considérer qu’il y a des comportements ne trouvant aucune
explication dans la génétique car ils sont le pur fruit de l'évolution culturelle de
l'humanité et de sa capacité à transmettre sa culture aux générations suivantes. La peur
des serpents peut tout à fait provenir du danger qu'ils représentaient pour nos ancêtres,
mais cette peur aurait tout aussi bien pu se fixer culturellement et non génétiquement à
travers l'évolution des mythes qui étaient un moyen de transmission du savoir il y a
encore pas si longtemps… et le sont encore aujourd'hui. De ce point de vue, la peur des
reptiles est considérée comme une fabrication avant tout culturelle et relative car la
perception de ces animaux est très différente selon les civilisations.
Ce débat est très bien illustré par les propos des deux herpétologues français,
Nicolas Vidal et Xavier Bonnet, le 21 juin 2011 lors de l’émission de vulgarisation
scientifique « la tête au carré », présentée par Mathieu Vidard sur France Inter. Les deux
chercheurs sont d’accord sur l’impact de la culture dans la perception des serpents et la
différence d’interprétation entre les civilisations : animaux maléfiques chez les uns,
bénéfiques chez les autres, parfois les deux en même temps ! Nicolas Vidal évoque
néanmoins une origine biologique, celle de l’héritage génétique de la peur des serpents
datant d’il y a 7 millions d’années. Xavier Bonnet lui n’est pas convaincu par les
expériences menées pour étayer la thèse de l’héritage génétique et penche davantage pour
l’héritage culturel. Une étude, à laquelle se réfère Nicolas Vidal, montre que les primates
ont tous peur des serpents, penchant donc pour une aptitude innée ; mais Xavier Bonnet,
rappelle que les petits enfants humains (jusqu’à l’âge de 4-5 ans) n’ont absolument pas
peur de ces reptiles, qu’ils osent les toucher sans appréhension et que cette peur vient
avec l’âge en fonction de l’éducation. La question est loin d’être tranchée (et nous n’y
contribuerons pas ici) car l'inné et l'acquis ne sont pas deux concepts totalement opposés
et insolubles, où il faut choisir entre l'un ou l'autre ; c'est souvent bien plus subtile que
cela. En effet, nous ne sommes pas tant esclaves de nos gènes, l’acquis – l’éducation et