D OSSIER thématique Cancers et transplantation Coordinateur : E. Morelon, service de néphrologie adultes, hôpital Necker, 75015 Paris. ✔ Cancers post-transplantation d’organes : un enjeu majeur pour les vingt prochaines années - E. Morelon ● Épidémiologie des cancers en transplantation rénale C. Antoine, P. Landais ● Cancers transmis par le greffon - N. Lefrançois ● Conduite à tenir vis-à-vis des tumeurs préexistantes en transplantation d’organes - B. Barou, K. Bensalah, L. Mercadal, M.O. Bitker ● Carcinomes cutanés et transplantation - S. Euvrard ● Immunosuppression et cancers : effet pro- et antitumoral des traitements immunosuppresseurs - O. Thaunat, E. Morelon Cancers post-transplantation d’organes : un enjeu majeur pour les vingt prochaines années ● E. Morelon* L‘ augmentation de l’incidence des cancers chez les patients transplantés d’organe est connue depuis longtemps, et de nombreux travaux ont été consacrés à ce qui reste une des principales complications de l’immunosuppression au long cours. Il était logique que le Courrier de la Transplantation lui consacre un dossier entier, tant le sujet est vaste. La plupart des cancers post-transplantation sont liés à des virus, la réponse antivirale étant particulièrement inhibée par l’immunosuppression non spécifique dirigée contre la réponse allogénique. La survenue d’un cancer “viroinduit” chez un transplanté après la greffe est donc la marque d’une trop forte immunosuppression, qu’il convient de diminuer pour éviter la récidive, la rechute ou l’apparition de métastases. Cette problématique est bien illustrée par l’exemple des lymphomes liés au virus EBV ou du sarcome de Kaposi, associé au virus HHV8. Pour les cancers cutanés, les plus fréquents après transplantation, la baisse de l’immunosuppression peut éventuellement en diminuer la récidive, mais faut-il faire prendre le risque de l’aggravation d’un rejet chronique pour un type de cancer facile à détecter, et dont la prise en charge chirurgicale précoce entraîne une guérison sans traitement complémentaire ? L’attitude thérapeutique est encore moins bien définie quand le cancer ne peut être attribué de façon certaine à la transplantation. C’est dire l’intérêt des registres des cancers de bonne qualité, qui, seuls, peuvent permettre * Service de néphrologie adultes, hôpital Necker, 75015 Paris. 58 d’incriminer l’immunosuppression dans la genèse du cancer. Ce dossier fait aussi le point sur la difficile question des cancers transmis par le greffon, ainsi que sur le dépistage des tumeurs et la conduite à tenir devant l’apparition d’une tumeur chez un patient en attente de greffe. La nature de l’immunosuppression pourrait aussi influer sur la survenue des cancers postgreffe. Des résultats récents provenant d’études in vitro et chez l’animal suggèrent que certains immunosuppresseurs, comme la ciclosporine, pourraient faciliter la survenue de métastases, tandis que d’autres, comme les inhibiteurs de la mTOR, sirolimus et everolimus, ont des propriétés antitumorales. Si ces données expérimentales étaient confirmées chez l’homme, les conséquences sur la prise en charge des cancers seraient d’une portée considérable. Non seulement les inhibiteurs de la mTOR pourraient permettre ne plus arrêter l’immunosuppression quand un cancer survient, évitant ainsi le risque de perdre l’organe, mais ils pourraient aussi être une aide thérapeutique par leurs propriétés antitumorales. Leur utilisation pourrait également diminuer l’incidence des cancers dans les vingt prochaines années. Les questions posées par les cancers après transplantation d’organe sont si nombreuses qu’elles ne peuvent pas être toutes traitées dans un seul dossier du Courrier de la Transplantation. Un article sur les lymphomes a été publié en 2001, d’autres suivront, dans les rubriques Recherche ou Mise au point. En attendant, bonne lecture ! ■ Le Courrier de la Transplantation - Volume III - n o 2 - avril-mai-juin 2003