Réunis à Paris le 22 février,les ministres des fi-
nances et gouverneurs de banque centrale du G7
se sont dits prêts à réagir si les perspectives écono-
miques se dégradaient. Faisant allusion aux tensions
au Moyen-Orient et ailleurs,ils ont reconnu que «les
incertitudes géopolitiques se sont accrues,mais que
leurs économies «conservent une capacité de rebond».
Les ministres et gouver-
neurs du G7 s’engagent à
rester en étroite coopération,
et se déclarent «prêts à
prendre les mesures qui
s’imposent si les perspectives
économiques devaient s’as-
sombrir». Ils entendent aussi
continuer à surveiller de
près les marchés des changes
et à agir en conséquence.
Si certains indices
semblent faire état,pour
cette année,d’une crois-
sance plus faible que prévu
dans les pays du G7,le FMI s’apprête à publier le
9 avril ses prévisions semestrielles de l’économie
mondiale, en préalable aux réunions de printemps.
Les ministres et gouverneurs reconnaissent qu’il est
nécessaire de stimuler la croissance et sont convenus
d’agir dans ce sens.Ainsi «l’Europe s’engage à accélé-
rer les réformes qu’elle a entreprises sur les marchés
du travail,des produits et des
capitaux afin d’accroître la
réactivité de son économie; le
Japon a réaffirmé sa volonté
d’entreprendre des réformes
structurelles,notamment
dans le secteur financier et
des entreprises; enfin,les
États-Unis prennent des ini-
tiatives pour créer des em-
plois,favoriser l’accumulation
du capital et l’épargne et ac-
croître la productivité».
Le G7 se compose de
l’Allemagne,
Fonds monétaire
international
VOLUME 32
NUMÉRO 4
10 mars 2003
Dans ce numéro
49
Eduardo Aninat
évoque la situation
en Amérique latine
49
Réunion du Groupe
des Sept à Paris
54
Paul Krugman
n’exclut pas
un effondrement
économique majeur
56
Les générations
de la transition
économique
58
Pourquoi plus
de transparence?
60
Les réformes
prioritaires des
sept pays les plus
pauvres de la CEI
62
L’interconnexion
croissante
des économies
Lire aussi . . .
55
Publications récentes
57
Sur le site du FMI
58
Principaux taux
du FMI
49
Lors de sa tournée en Amérique latine en janvier, M.Aninat,Directeur
général adjoint du FMI, a proposé une stratégie en trois volets pour
faire face à la récente cascade de crises.Voici des extraits d’allocutions
prononcées à l’université Viña del Mar (Chili) et à la Banque centrale
du Pérou à Lima.
On a pris l’habitude de décrire les péripéties économiques de
l’Amérique latine en termes extrêmes,et la période troublée des
dernières années ne fait pas exception à la règle. Dans un article de
novembre intitulé «Au bord du volcan»,le Guardian britannique
proclamait «l’échec du néolibéralisme,du marché planétaire et des
politiques recommandées par le FMI».D’autres se font l’écho de cette
idée qu’à cause de sa faiblesse économique des deux dernières années,
l’Amérique latine est au bord du gouffre — à la veille de bouleverse-
ments soudains et majeurs.
La réalité est plus prosaïque. Le continent n’est pas au bord du
gouffre, mais à un tournant conjoncturel — après le ralentisse-
ment causé par le cycle économique mondial, la reprise s’an-
nonce. Il ne faut voir dans les résultats économiques récents ni le
www.imf.org/imfsurvey
Pour Eduardo Aninat, l’Amérique latine
est à un point décisif et non au bord du gouffre
M. Aninat : «2003 sera un tournant décisif,
car la croissance devrait redémarrer
(suite à la page 53)
Le G7 prêt à réagir à tout signe de faiblesse
Francis Mer, Ministre français des finances, en
conversation avec John Snow (à droite), Secré-
taire américain au Trésor, à la réunion de Paris.
10 mars 2003
50
signe de l’échec des politiques mises en œuvre
dans les années 90, ni la preuve des dangers de la
mondialisation. Sans bon nombre des réformes de
la dernière décennie, la région aurait encore bien
plus souffert du
ralentissement
mondial. Et loin
de tourner le dos
à la mondiali-
sation, il faut,
comme le notait
récemment une
agence régionale
des Nations
Unies, que les
pays conçoivent
des stratégies na-
tionales «visant à
tirer parti [de la
mondialisation]
et à répondre
aux exigences d’une plus grande intégration dans
l’économie mondiale».
Interconnexions mondiales
La faiblesse dont témoigne depuis deux ans l’écono-
mie latino-américaine tient pour une large part au
cycle mondial,en particulier au ralentissement de
l’activité aux États-Unis en 2001.En 2000,la région
affichait un rythme de croissance un peu inférieur
seulement à la moyenne mondiale. Sur les 33 pays de
la zone Amérique latine et Caraïbes, deux seulement
— l’Argentine et l’Uruguay — étaient en récession.
Les autres connaissaient une croissance modérée à
raisonnable, les pays en pointe étant le Brésil,le Chili
et le Mexique.
Vers la fin de 2000,nous avons vu le terme de ce
qui avait été une très longue phase d’expansion de
l’économie mondiale et des États-Unis. La croissance
s’est ralentie sur l’ensemble de l’année 2001,et
l’Amérique latine s’en est bien sûr ressentie,puis-
qu’elle est déjà à maints égards dans une relation
d’intégration avec son voisin du Nord.
Le cas du Mexique est exemplaire.Jamais l’ancien
Président Porfirio Díaz, à qui l’on attribue souvent la
boutade décrivant le Mexique comme «si proche des
États-Unis et si loin de Dieu»,n’aurait pu s’imaginer
que les plus récents de ses successeurs entrepren-
draient de propos délibéré de tisser des liens encore
plus étroits entre leur pays et les États-Unis,notam-
ment en signant l’ALENA.Fait remarquable,la cor-
rélation entre la variation sur 12 mois de la produc-
tion industrielle aux États-Unis et au Mexique est
passée de 0,15 avant l’ALENA à 0,9 ces dernières an-
nées : une correspondance presque parfaite.Le
Mexique a donc été le premier à subir le contrecoup
du ralentissement aux États-Unis, avec une légère
contraction de l’activité en 2001. Mais le rebond y a
aussi été rapide, à l’image du redressement que les
États-Unis ont connu en 2002. Pour 2003, on table
sur une croissance de 3 % au Mexique, selon les
dernières prévisions du secteur privé.
Dans bien d’autres pays,le schéma est le même :
repli de la croissance lors du ralentissement mondial
et signes de reprise en 2003 à mesure que la conjonc-
ture s’améliore.
Mais la région ne doit évidemment pas se contenter
d’attendre que la vague de croissance mondiale la
remette à flot.Je suggère pour chaque pays une dé-
marche volontariste en trois volets :d’abord, faire en
sorte que le cadre macroéconomique et financier soit
«à l’épreuve des crises»; ensuite,accélérer les réformes
structurelles nécessaires pour stimuler la croissance
(et,dans certains cas, faciliter la prévention des crises);
et,enfin, tirer mieux parti de la mondialisation.
Prévention
Pour que les pays d’Amérique latine soient moins su-
jets aux crises, il faudra,au minimum, les doter de
régimes de change souples (avec ciblage de l’inflation,
pour ancrer la politique monétaire),limiter stricte-
ment l’endettement public et éviter la dollarisation
excessive de la dette.
Si les régimes de stabilisation des changes ont per-
mis au début des années 90 d’abaisser l’inflation,ils
ont à la longue engendré des rigidités qui ont empê-
ché de réagir efficacement aux chocs internes et ex-
ternes.Ils ont aussi encouragé les afflux de capitaux et
déséquilibré les bilans du fait de la dollarisation indi-
recte.Les entrées de capitaux ont d’abord stimulé
l’activité, mais,en définitive,la compétitivité a été
minée par l’appréciation de la monnaie en termes
réels.L’encouragement des entrées de capitaux a aussi
été dommageable à la discipline budgétaire.La libé-
ralisation commerciale a en outre été stoppée dans
son élan,car il manquait la souplesse du taux de
change qu’il aurait fallu pour en absorber les effets.
L’Amérique latine, forte de cette leçon,devrait donc
se défier des régimes de parités fixes qui,presque
partout ailleurs, ont eu des effets désastreux.
Autres facteurs courants à l’origine des crises ré-
centes :la hausse de l’endettement public et la dolla-
risation de la dette.Même s’ils ne sont pas particu-
lièrement élevés en comparaison de certains autres
pays,le ratio dette/PIB des pays d’Amérique latine
masque souvent d’importantes faiblesses. Dans cer-
tains cas,par exemple,le ratio d’endettement n’a
cessé d’augmenter durant la dernière décennie,même
M. Aninat propose un schéma d’autosuffisance
Il ne faut voir
dans les résul-
tats écono-
miques récents
ni le signe de
l’échec des
politiques mises
en œuvre
dans les
années 90, ni
la preuve des
dangers de la
mondialisation.
Eduardo Aninat
Ouvriers de l’usine
Ford de Hermosillo
(Mexique) préparant
des pièces détachées
pour le montage.
10 mars 2003
51
en période d’expansion, ce qui dénote un manque de
discipline budgétaire.Ajoutons à cela le manque de
crédibilité,qui a obligé les pays à s’endetter en dollars
ou en instruments indexés sur le dollar. Notons aussi
que,du fait de la surévaluation des monnaies na-
tionales,le ratio dette/PIB était,dans une perspective
à moyen terme,sous-estimé et mal interprété.
La hausse de l’endettement est causée par des failles
plus profondes du système budgétaire.Citons pêle-mêle
l’étroitesse de la base d’imposition et l’inefficacité du re-
couvrement de l’impôt;les rigidités des dépenses cou-
rantes (en majorité préaffectées, à partir d’un niveau
plancher); la rigidité des relations avec les échelons in-
franationaux de l’administration. Il importe d’améliorer
les structures et les institutions pour assouplir la mise
en œuvre de la politique budgétaire,favoriser la pro-
gression des dépenses sociales et stimuler la croissance à
long terme.C’est en fait là un élément essentiel de la
stratégie de changement de l’Amérique latine.
Un nouvel élan pour les réformes
Les efforts de réformes structurelles sur bien des
fronts,notamment la libéralisation du commerce et la
fiscalité,se sont essoufflés dans la deuxième moitié
des années 90,et il faut maintenant les ranimer.
L’intégration commerciale des pays d’Amérique la-
tine a pris du retard par rapport à l’ouverture de leurs
marchés de capitaux.Cela a accru leur vulnérabilité,
sous forme notamment de ratios dette (publique en
particulier) extérieure/exportations très élevés, qui
éclipsent le fait qu’en général le ratio dette exté-
rieure/PIB est plus bas.Leur potentiel de croissance en
a souffert. Il apparaît que les pays dont les échanges
extérieurs sont développés progressent plus vite que
ceux qui sont davantage autocentrés.La part du com-
merce extérieur est en général deux fois plus faible
dans les pays latino-américains que dans les pays
d’Asie orientale,et leurs taux de croissance à long
terme ont aussi toujours été plus faibles.
L’étroitesse relative du secteur exportateur dans les
pays d’Amérique latine et la concentration des expor-
tations sur un petit nombre de produits primaires ont
amplifié les problèmes liés à la hausse de l’endette-
ment extérieur, à la fragilité des structures financières
et à la rigidité du régime de change.Comme les ex-
portations représentent une petite part du PIB,il au-
rait fallu de vastes mouvements des taux de change
pour améliorer les comptes extérieurs afin de faire face
à la hausse du service de la dette ou à d’autres chocs,
ce qui ajoutait à la difficulté de maintenir la solvabilité
externe.Par contre,les pays asiatiques ont pu rebondir
plus vite après la crise de 1997–98 grâce à l’ouverture
de leur économie qui a permis aux exportations de
réagir plus fermement aux dévaluations.
Les réformes structurelles dans les domaines com-
mercial,budgétaire et autres ne porteront pas pleine-
ment leurs fruits à moins que la gouvernance ne soit
aussi réformée. La corruption rampante a entravé la
croissance et miné la popularité des réformes,et plu-
sieurs pays d’Amérique latine sont classés parmi les
plus corrompus au monde.Il serait clairement souhai-
table de réduire visiblement la corruption pour rallier
le soutien au processus de réforme,car il en résulterait
une société plus juste et équitable.Il est prouvé que la
qualité de l’investissement étranger dépend de la
transparence et de l’absence de corruption. Les ré-
formes, notamment les privatisations,doivent être
conçues de façon à donner le moins de prise possible
à l’appropriation illégale des profits.Il est indispen-
sable d’établir un pouvoir judiciaire indépendant et
responsable pour accroître la crédibilité de l’état de
droit et créer un climat plus propice au fonctionne-
ment des forces du marché.
Un consensus mondial?
Dans l’économie mondiale intégrée,les pays ne doivent
pas seulement poursuivre leurs objectifs internes,mais
aussi savoir comment tirer au mieux parti de la mon-
dialisation.Chacun sait maintenant combien les
échanges sont bénéfiques à la croissance et à l’amé-
lioration du niveau de vie.Le constat a été particulière-
ment clair en Asie de l’Est : en Corée,par exemple, le
revenu réel a doublé tous les 12 ans depuis 1960.De
même que le commerce s’est développé,l’intégration
des marchés de capitaux a progressé.Les apports de
capitaux privés aux pays émergents et en développe-
ment dépassent désormais très largement l’aide
publique au développement.L’ouverture aux flux de
capitaux,accompagnée de bonnes politiques internes,
donne aux pays accès à un gisement beaucoup plus im-
portant de fonds pour financer leur développement.
Mais les avis — y compris celui du FMI — convergent
sur l’idée que les pays en développement doivent créer
certaines conditions pour bénéficier de la libéralisation
financière sans amplifier les risques de crise monétaire
ou bancaire.C’est pourquoi la libéralisation des mou-
vements de capitaux suscite beaucoup plus de circons-
pection : comme le dit Kenneth Rogoff,Conseiller
économique du FMI,les pays en développement
«cherchent à s’abreuver dans les eaux des marchés de
capitaux internationaux sans s’y noyer».
Il faut certes encourager l’investissement direct
étranger (IDE), car il est plus stable que les autres
formes de financement extérieur et qu’il accélère l’accu-
mulation de capital et l’absorption des technologies
étrangères.Il est démontré que,comme le commerce,
l’IDE favorise la croissance économique. Les prises de
participations étrangères,bien que parfois instables, ont
l’avantage de répartir les risques. Et leur instabilité tient
sans doute plutôt aux régimes de parités fixes rigides en
place qu’à je ne sais quelle caractéristique propre aux
participations transfrontalières.La question des restric-
La corruption
rampante a
entravé la
croissance
et miné la
popularité des
réformes, et
plusieurs pays
d’Amérique
latine sont
classés parmi
les plus
corrompus
au monde.
Eduardo Aninat
10 mars 2003
52
tions se pose donc plus dans le cas des instruments de
créance,tant à court terme (capitaux fébriles) qu’à long
terme (dettes remboursables en devises ou indexées sur
les taux d’intérêt courts intérieurs, par exemple). L’em-
prunt ne permet pas comme l’IDE et l’investissement
de portefeuille de répartir le risque, et les pays sont à la
merci d’un revirement de l’attitude de leurs créanciers,
qui peut causer des revers de fortune et même,dans
certains cas,des problèmes d’insolvabilité.
Maintenir le contact
Les échanges internationaux et le recours prudent
aux capitaux étrangers sont deux moyens importants
pour les pays en développement de mettre à profit la
mondialisation.Mais,de plus en plus, les pays en
développement devront s’efforcer de tirer parti des
progrès technologiques à l’étranger.
Au début du XXesiècle,l’Amérique latine a laissé
passer des chances d’expansion rapide dans les
secteurs forestier ou minier,qui ont été exploités par
des pays dotés de ressources similaires, comme l’Aus-
tralie, le Canada,les pays scandinaves et,dans une
certaine mesure,les États-Unis.Pourquoi? Une étude
récente de la Banque mondiale suggère deux
réponses.Premièrement,le pouvoir de monopole
créé par des politiques d’industrialisation introspec-
tives a fait obstacle à l’innovation et à l’adoption des
techniques nouvelles.Les industriels préféraient jouir
des rentes de monopole garanties par des décisions
gouvernementales plutôt que de se lancer dans la
course au profit en cherchant à gagner un avantage
technologique sur leurs concurrents.
Deuxièmement,le capital humain et les réseaux
institutionnels qui facilitent l’adoption et la création
de nouvelles technologies étaient déficients par rap-
port à ceux des autres nations.L’Amérique latine avait
un bien moindre pourcentage d’ingénieurs que les
autres régions au début du XXesiècle.La réussite des
États-Unis et de l’Australie dans le secteur minier doit
beaucoup à l’existence de réseaux intellectuels établis
entre des universités de classe mondiale et par les ef-
forts de recherche tant publics que privés.De même,
la prééminence de la Scandinavie dans l’exploitation
forestière tient en grande partie aux réseaux de savoir
rassemblant universités et instituts de recherche
publics et privés,qui ont favorisé la croissance de la
productivité.Ce n’est sans doute pas un effet du
hasard si la première usine de pâte à papier de Fin-
lande a été créée à Nokia, qui est maintenant le siège
et le symbole du leadership national dans les télécom-
munications.Bien sûr, il y a de rares exceptions dans
quelques pays latino-américains.
L’Amérique latine d’aujourd’hui n’a pas le même
visage. La plupart des pays de la région sont résolu-
ment tournés vers l’extérieur.Et beaucoup ont investi
pour améliorer leur capital humain et la qualité de
leurs établissements éducatifs.De plus, l’accès aux
technologies de l’information (TI) permet aux pays de
combler leur retard de connaissances par rapport aux
nations plus avancées plus vite qu’auparavant. Les TI
permettent de dispenser l’enseignement à moindre
frais à un ensemble bien plus vaste d’individus. Ceux
qui se trouvent en marge des marchés intérieur et in-
ternational peuvent s’y intégrer grâce à de meilleures
informations et des coûts de transaction réduits.
Les dépenses de TI,certes fort basses au départ, ont
augmenté tout au long des années 90 dans la plupart
des pays en développement,souvent à un rythme bien
plus rapide que dans les pays avancés.Par ailleurs,les
TI se sont diffusées plus vite que les précédentes tech-
nologies universelles.Bref,les pays en développement,
d’Amérique latine et d’ailleurs,font les investisse-
ments dans les TI qui leur permettront de maintenir
le contact.
En résumé
Nul doute que la région a été bien plus à la peine ces
dernières années que beaucoup d’autres.Elle a, bien
sûr, subi les conséquences du ralentissement écono-
mique mondial.Mais des facteurs particuliers ont
aussi joué dans certains pays,l’abandon désordonné
de la parité fixe par l’Argentine,par exemple, dans un
contexte de débâcle budgétaire; l’effet sur les marchés
de l’incertitude quant à l’issue des élections au Brésil
en 2002; les graves troubles politiques au Venezuela,
etc.Mais d’après nos prévisions, 2003 sera un tour-
nant marqué par le redémarrage de la croissance
dans la région.
Certains ont tiré argument des déboires des der-
nières années pour dire qu’il faut tourner le dos aux
politiques économiques des années 90 et aux avancées
de la mondialisation au cours des dernières décennies.
Je m’incris en faux contre ces propos.Les années 90
ont été riches d’accomplissements en Amérique latine,
nous sommes nombreux à en être convaincus et nom-
breux sont les citoyens de la région qui en ont profité.
Certes, aucune époque n’est parfaite,il y a toujours
des choses que l’on aurait pu mieux faire.Et les
avancées des années 90,quoique honorables, sont bien
en deçà de ce qu’il aurait fallu accomplir.Nous pou-
vons tirer les leçons de la décennie 90 et des dernières
années pour rendre la région moins vulnérable aux
crises et instaurer une croissance plus vigoureuse.
L’Amérique latine ne doit pas non plus tourner le
dos à la mondialisation.En dépit des protestations
véhémentes de certains,il se dégage en fait un con-
sensus sur la manière dont les pays en développe-
ment peuvent tirer avantage de la mondialisation.
Les pays en développement — d’Amérique latine no-
tamment — devraient se lancer à cœur ouvert dans
la voie de la mondialisation,en s’y adaptant par
toutes sortes de méthodes plus perfectionnées.
Nous pouvons
tirer les leçons
de la décennie 90
et des dernières
années pour
rendre la
région moins
vulnérable
aux crises et
instaurer une
croissance plus
vigoureuse.
Eduardo Aninat
10 mars 2003
53
du Canada,des États-Unis, de
la France,de l’Italie,du Japon et du Royaume-Uni. La
Russie participe à certaines réunions (on parle alors
de G8),tout comme les représentants de la Banque
mondiale,du FMI et de l’Union européenne.
Réunis dans la perspective du Sommet du G8 qui se
tiendra à Évian en juin, les ministres et gouverneurs ont
rappelé qu’ils mettent actuellement en
œuvre
leur plan
d’action d’avril 2002 visant à prévenir et résoudre les
crises financières dans les pays émergents.On constate
plus de rigueur dans l’octroi des financements publics
en situation de crise, qui précisent les niveaux d’accès
ordinaires et les conditions d’accès exceptionnel.
Évoquant certains grands programmes appuyés par
le FMI,les ministres et gouverneurs se sont félicités que
«le Brésil applique des politiques économiques saines et
procède à des réformes sociales» et ils attendent des au-
torités argentines «qu’elles prennent les mesures néces-
saires pour que les contrats soient de nouveau exécutés
et qu’elles entament un dialogue avec leurs créanciers
privés» en poursuivant la mise en
œuvre
des engage-
ments envers le FMI.Ils ont aussi salué la détermina-
tion de la Turquie à appliquer le programme de stabili-
sation économique et financière conclu avec le FMI.
Dette : des propositions complémentaires
S’agissant de l’initiative du FMI en vue d’un méca-
nisme collectif de restructuration des dettes souve-
raines intenables,le G7 a reconnu qu’il y avait plusieurs
parties au débat et que diverses solutions sont envisa-
geables.Les ministres et gouverneurs du G7 précisent
en effet : «Nous nous félicitons de la réaction favorable
du secteur privé sur les clauses d’action collective et des
travaux menés avec le secteur public sur des clauses
types. Nous espérons une mise en
œuvre
rapide des
clauses d’action collective et attendons avec intérêt
d’examiner, lors des réunions de printemps,une pro-
position concrète du FMI visant à instaurer un méca-
nisme de restructuration des dettes souveraines. Nous
nous félicitons que des travaux complémentaires aient
été engagés en vue de l’élaboration d’un code de bonne
conduite s’appuyant sur des principes de négociation.
Nous demandons au FMI d’améliorer le cadre de
prévention des crises,notamment en renforçant l’effi-
cacité de sa surveillance.»
Les propositions visant à inclure des clauses d’ac-
tion collective dans les contrats obligataires ont reçu
un nouvel élan le 24 février, lorsque le Mexique a an-
noncé qu’il entendait émettre 1 milliard de dollars
d’obligations assorties de ce type de clauses, qui per-
mettent à une majorité de détenteurs de décider
d’une renégociation lorsque le pays débiteur est en
difficulté.Saluant cette initiative,le FMI y voit «un
grand pas en avant pour faire de l’adoption de clauses
d’action collective une pratique courante à New York
et sur d’autres places,conformément à ce qui se fait
de longue date à Londres et à Luxembourg»,et sou-
ligne la complémentarité entre ces clauses et le méca-
nisme de restructuration qu’il propose.
Le communiqué ne fait pas référence à l’initiative
du Chancelier de l’Échiquier,Gordon Brown, pour la
création d’un nouveau mécanisme de financement
qui doublerait l’aide aux pays les plus pauvres d’ici
2015,en la portant à 100 milliards de dollars par an.Il
convient toutefois de relever résolument le défi que
constitue la pauvreté dans le monde.
Le G7 s’est déclaré prêt à fournir «un soutien
important aux pays africains qui appliquent les prin-
cipes du Nouveau partenariat pour le développement
de l’Afrique (NEPAD),ont à c
œur
d’améliorer leur
gouvernance et donnent la preuve de l’efficacité de
leurs politiques».
Lutte contre le financement du terrorisme
Le G7 a demandé au FMI et à la Banque mondiale d’in-
tensifier le concours qu’ils apportent aux pays pour com-
battre le financement du terrorisme. Un rapport d’étape
conjoint sur la question sera présenté aux deux institu-
tions durant leurs réunions de printemps.
Le G7 appelle «tous les pays à appliquer et à faire
respecter les législations visant à lutter contre le finance-
ment du terrorisme», s’engage à continuer d’«apporter
une assistance technique aux pays qui n’ont pas de dis-
positif approprié pour combattre le financement du
terrorisme», et demande «au FMI et à la Banque mon-
diale d’intensifier leurs évaluations du secteur financier
et, en concertation avec les Nations Unies,leur assis-
tance technique».
En novembre, le Conseil d’administration du FMI a
approuvé un projet pilote de douze mois qui devrait
renforcer substantiellement la contribution du FMI à la
lutte internationale contre le blanchiment de capitaux et
le financement du terrorisme.Le Conseil d’administra-
tion a ajouté aux domaines d’intervention et aux normes
et codes correspondants qui relèvent du FMI les quarante
recommandations pour un cadre efficace de lutte contre
le blanchiment de capitaux et les huit recommandations
spéciales sur le financement du terrorisme établies par le
Groupe d’action financière (GAFI).
Basé à Paris, le GAFI est un organisme intergouverne-
mental chargé de définir et de promouvoir des politiques
destinées à combattre le blanchiment de capitaux et le
financement du terrorisme. Le G7 a demandé au GAFI de
renforcer l’efficacité du gel des actifs financiers et recom-
mandé «l’exercice d’une surveillance plus efficace des ins-
titutions financières informelles et des organisations à but
non lucratif», et il attend «la conclusion en juin de la
révision des recommandations du GAFI».
Le G7 disposé à aider massivement l’Afrique
(suite de la première page)
Les propositions
visant à inclure
des clauses
d’action collec-
tive dans
les contrats
obligataires
ont reçu un
nouvel élan
le 24 février,
lorsque le
Mexique a
annoncé qu’il
entendait
émettre
1 milliard de
dollars d’obli-
gations assor-
ties de ce type
de clauses.
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