À la recherche de la neuvième planète En utilisant les observations

À la recherche de la neuvième planète
En utilisant les observations de la sonde Cassini, une équipe d'astronomes français de
l’Observatoire de Paris (Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides
IMCCE : Observatoire de Paris / CNRS / UPMC / PSL Research university), et de
l’Observatoire de la Côte d’Azur (Laboratoire GeoAzur: OCA / Université de Nice-Sophia
Antipolis / CNRS / IRD) parviennent à préciser les positions possibles d’une 9e planète dans
le système solaire. Ce résultat fait l’objet d’un article scientifique paru le 22 février 2016
dans Astronomy & Astrophysics letters.
Les objets de la ceinture de Kuiper, petits corps similaires à Pluton au-delà de Neptune,
présentent une répartition particulière qu’il est difficile d’expliquer par le simple hasard.
C’est ce qui a conduit Konstantin Batygin et Mike Brown (Caltech/USA) à proposer dans un
article paru le 20 janvier 2016 dans Astronomical Journal, l’existence d’une neuvième planète
de 10 masses terrestres dont les perturbations sur les objets de Kuiper aurait pu conduire à
leur distribution actuelle. Par des simulations numériques, ils ont déterminé l’orbite possible
de cette planète. Pour permettre de reproduire la distribution observée des objets de Kuiper,
cette orbite, avec un demi grand axe de 700 UA, doit être très excentrique (e=0.6) (voir
Figure 2) et inclinée (i=30), mais aucune contrainte sur la position actuelle de cette planète
n'est proposée par l'étude de Batygin et Brown. Ceci ne facilite pas la tâche des observateurs
qui doivent scruter toutes les directions possibles en longitude sur 360° pour tenter de
l’apercevoir.
Depuis 2003, A. Fienga (Astronome à l’Observatoire de la Côte d’Azur), J. Laskar (Astronome à
l’Observatoire de Paris, directeur de recherche au CNRS), et leur équipe, développent les
éphémérides planétaires INPOP1, qui permettent de calculer le mouvement des planètes dans
le système solaire avec la plus grande précision.
En particulier, grâce aux données de la sonde Cassini (NASA / ESA / ASI), la distance entre la
Terre et Saturne est connue avec une incertitude de l’ordre de 100 m. Les chercheurs ont
alors eu l’idée d’utiliser ces données pour tester la possibilité de rajouter une neuvième
planète dans le système solaire, comme il a été proposé par Batygin et Brown.
Dans l'étude publiée le 22 février 2016 dans Astronomy & Astrophysics letters, l'équipe
française montre que selon la position de la planète par rapport à son périhélie true
anomaly » sur la figure 1), cette planète induit des perturbations sur l'orbite de Saturne qui
peuvent être détectées par l'analyse des données de la sonde Cassini, en orbite autour de
Saturne depuis 2004.
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1 Depuis 2003, l'Observatoire de Paris et l'Observatoire de la Côte d'Azur étudient le mouvement des planètes du
système solaire et de la Lune grâce à un modèle baptisé INPOP. Ce modèle utilise sur les positions planétaires
déduites de l'analyse des données de navigation de sondes telles Mars Express, Venus Express... INPOP a ainsi
généré les premières éphémérides indépendantes européennes, actuellement valorisées par la mission GAIA. Le
CNES a soutenu son développement de 2011 à 2015.
http://www.imcce.fr/fr/presentation/equipes/ASD/inpop/indexinpop10e.html
!
Figure 1 : Analyse des données radio de la sonde Cassini qui fournissent une mesure très précise de la distance
Terre-Saturne, avec un résidu de 75 m. Si on rajoute la 9e planète dans le modèle, les écarts entre calcul et
observation se dégradent considérablement (en bleu). Après réajustement de tous les paramètres du système
solaire, ces différences sont fortement réduites (en rouge). Un excès de résidus de plus de 10% après ajustement
est le signe de non existence de la planète (zone grise) (voir Fig.2).
Les chercheurs ont pu calculer cet effet induit par la 9e planète et comparer l’orbite
perturbée aux données de Cassini. Pour des directions par rapport au périhélie inférieures à
85° ou supérieures à - 65°, les perturbations induites par la 9e planète sont incompatibles
avec les distances observées par la sonde Cassini, de même que pour des directions entre -
130° et -100° (Fig. 1).
Ce résultat permet d’exclure une moitié des directions en longitude dans laquelle la planète
ne peut pas se trouver (Fig. 2).
D'autre part, il apparait que pour certaines directions, l’ajout de la 9e planète diminue les
écarts entre le modèle calculé par les astronomes et les distances observées, par rapport à un
modèle qui ne comprendrait pas cette neuvième planète. Ceci rend plausible la présence de
celle-ci dans une zone comprise entre 108° et 129° par rapport au périhélie, avec un
maximum de probabilité pour 118°(Fig. 2).
0
50
100
150
200
-150 -100 -50 0 50 100 150
POST FIT (Rms -Rms0)/Rms0 (%)
true anomaly (deg)
0
50
100
150
200
-150 -100 -50 0 50 100 150
POST FIT (Rms -Rms0)/Rms0 (%)
true anomaly (deg)
0
50
100
150
200
-150 -100 -50 0 50 100 150
POST FIT (Rms -Rms0)/Rms0 (%)
true anomaly (deg)
0
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100
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200
-150 -100 -50 0 50 100 150
POST FIT (Rms -Rms0)/Rms0 (%)
true anomaly (deg)
0
300
1200
900
2400
PRE FIT (Rms -Rms0)/Rms0 (%)
Figure 2 : Orbite pour une possible neuvième planète (Batygin & Brown 2016). L’analyse des données de la sonde
Cassini permet de définir des zones interdites (en rouge) où les perturbations créées par la planète sont
incompatibles avec les observations, et une zone probable (en vert) où l’introduction de la planète améliore le
modèle de prédiction des distances Terre-Saturne en réduisant les différences entre les calculs et les données de
Cassini. Le minimum de résidu, et donc l’emplacement le plus probable pour une planète, est donné en P9. Les
échelles sont en unités astronomiques (AU).
L’existence d’une neuvième planète ne pourra être confirmée que par son observation
directe, mais en restreignant les directions possibles de recherche, l’équipe française apporte
une importante contribution dans cette quête.
Référence
Constraints on the location of a possible 9th planet derived from the Cassini data, in A&A
Letters, A. Fienga, J. Laskar, H. Manche, M. Gastineau.
http://www.aanda.org/component/article?access=doi&doi=10.1051/0004-6361/201628227
Contacts chercheurs :
Observatoire de la Côte d’Azur, Agnès Fienga Astronome-adjoint
+33 (0)4 83 61 85 29
fienga@oca.eu
IMCCE/Observatoire de Paris, Jacques Laskar
Directeur de recherche CNRS
+33 (0)1 40 51 21 14
jacques.laskar@obspm.fr
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