Rev. sci. tech. Off. int. Epiz., 1986, 5 (1), 179-187
La contribution de l'OIE à la lutte
contre les maladies du cheval*
L.
BLAJAN**
Résumé : Informer les Pays Membres de l'OIE sur l'évolution des principales
maladies animales contagieuses et harmoniser les règlements zoo-sanitaires consti-
tuent
les
fonctions prioritaires de cette organisation.
Dans le domaine de
la
pathologie équine, dix-sept maladies sont prises en con-
sidération dans le système d'information. Elles font l'objet d'une notification à
l'OIE en cas de foyer nouveau, et d'une surveillance particulière lors d'échanges
internationaux.
A partir des données régulièrement transmises par les Services vétérinaires des
Pays Membres, l'auteur analyse la situation épizootiologique et les principaux
moyens de lutte mis en œuvre contre cinq maladies équines
:
peste équine, anémie
infectieuse, encephalomyélite équine vénézuélienne, métrite contagieuse équine et
grippe équine.
Les risques sanitaires très importants auxquels sont exposés les chevaux de
course et de sport, peuvent être minimisés par une information sanitaire immé-
diate et des interventions rapides et concertées.
MOTS-CLÉS : Commerce international - Haemophilus equigenitalis - Maladies
du cheval - OIE -Prophylaxie - Surveillance des maladies - Vaccination - Virus de
l'anémie infectieuse des équidés - Virus de l'encéphalomyélite équine vénézué-
lienne - Virus de la grippe équine - Virus de la peste équine.
L'Office International des Epizooties (OIE) est une organisation intergouvernemen-
tale créée en 1924 à l'initiative de la France pour coordonner la lutte contre les grandes
maladies contagieuses des animaux. L'apparition de la peste bovine en Belgique, à la
suite du transit dans le port d'Anvers de zébus en provenance du Pakistan, en a été
l'occasion. Il s'agissait pour les pays fondateurs, à l'origine au nombre de vingt-huit, de
s'informer mutuellement de leur situation sanitaire, d'unir leurs connaissances, de coor-
donner leurs recherches, afin de mieux lutter chez eux contre ces maladies et aussi d'en
éviter la diffusion au-delà des frontières à l'occasion des échanges.
Cette préoccupation ainsi que le souci d'harmoniser les réglementations sanitaires
applicables aux échanges d'animaux ont conduit à la rédaction d'un recueil de recom-
mandations, appelé Code Zoo-sanitaire International, adopté par le Comité de l'OIE
en 1968.
Le Code indique en premier lieu les obligations des Pays Membres et du Bureau
Central de l'OIE en matière de notification des maladies animales. Il constitue donc la
* Rapport présenté à la 9e Conférence internationale bisannuelle du cheval de trot, Brisbane (Australie),
7-11 octobre 1985.
** Directeur Général de l'OIE, 12 rue de Prony, 75017 Paris, France.
180
base du système d'information sanitaire de l'OIE. L'information sur la situation sani-
taire est en effet une condition essentielle des échanges d'animaux et de produits ani-
maux, reconnue explicitement par l'article 1.3.1.1. (1), qui stipule notamment que :
"Il doit être tenu compte des éléments suivants :
1.
Informations sur la situation sanitaire et le système national d'information
sur les maladies animales du pays exportateur afin d'établir qu'il est indemne
ou dispose de zones indemnes des maladies de la Liste A.
2.
Régularité et rapidité des informations fournies par le pays exportateur sur les
maladies contagieuses, notamment celles mentionnées dans les Listes A et
B...".
La Liste A comporte les maladies qui sont considérées les plus importantes pour
les échanges internationaux du fait de leur caractère hautement contagieux. La
Liste B comporte celles qui, tout en étant moins contagieuses, doivent cependant
être prises en considération dans les échanges.
Dix-sept maladies des chevaux figurent sur ces listes :
peste équine, métrite contagieuse équine, dourine, lymphangite épizootique,
méningo-encéphalomyélite enzootique des équidés, anémie infectieuse des
équidés, grippe équine (virus type A), Piroplasmose équine, rhinopneumonie
équine, morve, variole équine, artérite infectieuse des équidés, encéphalite
japonaise, gale des équidés, salmonellose (S. abortus equi), surra, encépha-
lomyélite équine vénézuélienne.
Mais le Code est avant tout le guide mis à la disposition des Services vétérinaires
pour fixer les règles sanitaires pour l'importation et l'exportation des animaux et
produits animaux. Il a l'avantage de proposer aux problèmes posés par les échanges
des solutions scientifiquement fondées qui peuvent être pragmatiquement définies
par les pays importateurs et exportateurs, en fonction de leur situation zoo-sanitaire
respective.
Il comporte également un ensemble de recommandations pour les mesures sani-
taires applicables pendant le transport depuis leur élevage d'origine jusqu'au lieu de
destination des animaux. Il convient à cet égard de signaler que les experts de l'OIE
participent aux travaux du Groupe de collaboration des transports internationaux
d'animaux, dans le cadre de l'Association internationale des Transports aériens
(IATA).
Le Code décrit enfin les méthodes à suivre pour effectuer les tests sanitaires
dont l'objet est de confirmer que les animaux sont indemnes de maladies des Listes
A et B. Il est important, en effet, que tous les pays parlent le même langage et que
les tests effectués dans le lieu d'origine soient réalisés selon les mêmes méthodes
qu'à destination. Les méthodes sont standardisées par la Commission des Normes,
de même que les techniques de préparation et de contrôle des produits biologiques
qu'il peut être utile d'administrer aux animaux avant l'exportation.
Il ne saurait être question ici d'analyser et de discuter tous les chapitres concer-
nant les équidés, mais d'examiner quelques-uns d'entre eux qui ont pour les échan-
ges de chevaux une importance particulière. Parmi les maladies qui ont, à cet égard,
suscité des difficultés, il nous a paru intéressant de retenir la peste équine, l'anémie
infectieuse, l'encéphalomyélite équine vénézuélienne, la métrite contagieuse équine
et la grippe équine.
181
PESTE ÉQUINE
Jusqu'à l'invasion du Moyen-Orient en 1959-1960, la peste équine était, à
l'exception de quelques incursions au-delà de la Mer Rouge, restée cantonnée à
l'Afrique au sud du Sahara. Dans ces régions où elle est enzootique, la maladie pro-
voque une mortalité peu élevée. Par contre, dans les régions vierges, elle est la cause
d'épizooties graves. C'est ainsi qu'on estima à 300 000 au moins le nombre d'équi-
s morts au cours de la première phase de l'épizootie au Proche-Orient et dans
l'Asie du Sud-Ouest. On comprend donc l'inquiétude suscitée dans les milieux du
cheval, en Europe tout particulièrement, par l'extension de la peste équine au
Maghreb en 1965.
La réunion d'urgence sur la peste équine, tenue en janvier 1961 au siège de
l'OIE à Paris, avait établi le schéma des mesures à adopter pour faire face à la
maladie. Tous les pays désireux de protéger leur industrie du cheval édictèrent,
comme le préconise le Code de l'OIE, une prohibition d'entrée sur leur territoire
des équidés en provenance des pays infectés. Cette interdition efficace pour les pays
éloignés des foyers d'infection, donc hors de portée des insectes vecteurs de la mala-
die,
ne fut pas suffisante pour empêcher l'Espagne d'être contaminée à partir du
Maghreb en octobre 1965. Mais, grâce à la mise en œuvre immédiate et énergique
par les Services vétérinaires espagnols des mesures préconisées par l'OIE, l'épizoo-
tie fut rapidement éteinte et, le 1er février 1967, l'Espagne pouvait être considérée
comme totalement indemne.
Dans le Maghreb, les derniers foyers étaient signalés en juin 1967.
Lorsqu'a lieu la table ronde organisée au siège de l'OIE, les 26 et 27 mai 1971,
sous la présidence du Docteur Mirchamsy (Institut Razi, Iran), quatre ans se sont
écoulés sans apparition de nouveaux cas dans les pays d'Afrique du Nord, malgré
les importations de chevaux neufs en provenance d'Europe. Les experts estiment en
conséquence que le virus de la peste équine paraît avoir disparu des régions anté-
rieurement envahies. Cette opinion est conforme aux dispositions du Code selon
lesquelles "un pays peut être considéré indemne de peste équine lorsqu'aucun cas
n'y a été confirmé depuis deux ans et qu'aucune vaccination contre la maladie n'y a
été pratiquée pendant cette période. En outre, le pays en question ne doit pas avoir
importé d'équidés en provenance de pays la maladie a été confirmée au cours
des deux années précédentes ou dans lesquels la vaccination contre la peste équine a
été pratiquée pendant cette période".
Un certain nombre de pays, dont la France, reprennent leurs échanges tradition-
nels de chevaux avec les pays du Maghreb, sans qu'il en résulte le moindre inconvé-
nient sanitaire, montrant ainsi la justesse des mesures prévues par le Code. Celui-ci
prévoit également la possibilité d'importation de chevaux en provenance de pays où
la peste équine est présente.
Une telle éventualité ne pourrait pas être envisagée pour les pays indemnes, si les
équidés venant de pays infectés pouvaient être porteurs de virus. A cette question
posée à la réunion spéciale tenue le 21 juillet 1972 au siège de l'OIE, les experts
répondirent par la négative, la phase de virémie durant habituellement de 7 à 9
jours chez le malade et le virus disparaissant rapidement chez le guéri.
Le mouvement des chevaux à partir des pays considérés infectés est donc possi-
ble sous le couvert des conditions précisées dans l'article 2.1.11.6. (1) du Code, à
savoir :
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choix de la saison de non-activité des insectes vecteurs de la maladie, les culi-
coïdes;
mise en quarantaine à l'abri des insectes pendant 40 jours, durée correspon-
dant à la période maximale d'incubation de la maladie;
deux épreuves de fixation du complément avec résultat négatif à intervalle
d'au moins 21 jours et au plus de 30 jours.
Dans la perspective des prochains Jeux Olympiques de Séoul en 1988, le Rap-
port sur les maladies du cheval présenté à la 53e Session Générale de l'OIE en mai
1985,
appelle l'attention du Comité sur les dispositions prévues par le Code, notam-
ment pour la peste équine.
ANÉMIE INFECTIEUSE DES ÉQUIDÉS
L'anémie infectieuse des équidés est une maladie généralement chronique qui
frappe surtout le cheval. L'ampleur qu'elle a prise en 1966 dans certains centres
européens de chevaux de compétition a amené l'OIE à l'inclure dans les travaux de
la Commission du Code et de la Commission des Normes.
Dans un premier temps, le Code a prévu pour les chevaux admis dans les échan-
ges internationaux :
1) qu'ils ne présentent le jour de leur embarquement aucun signe clinique d'ané-
mie infectieuse;
2) qu'aucun cas d'anémie infectieuse ne doit avoir été constaté dans les lieux
les animaux ont séjourné au cours des trois mois précédant leur exportation.
Cependant, ces garanties apparaissent insuffisantes, les animaux atteints d'ané-
mie infectieuse pouvant être source de contage, sans présenter de symptômes, au
moins pendant certaines périodes. Il était donc important que puisse être mise en
œuvre une méthode diagnostique permettant de reconnaître les animaux infectés
chroniques.
Le test de Coggins qui correspond à cet objectif a été introduit dans le Code à la
suite de la 3e Réunion sur les maladies du cheval, tenue à Lyon en 1977, qui avait
favorisé la rencontre des experts, et de l'OIE.
Selon le Code, le test doit être pratiqué dans les 30 jours avant le départ des che-
vaux. Cette exigence est difficile à satisfaire dans le cas des chevaux de compétition
qui se déplacent souvent. C'est pourquoi, les organisations hippiques ont souhaité
un test périodique, par exemple annuel.
Il est évident qu'un tel assouplissement peut être prévu dans l'esprit du Code, en
fonction d'accords bilatéraux et de la connaissance que les pays partenaires peuvent
avoir de leurs conditions sanitaires réciproques. Les organisations hippiques doi-
vent apporter leur collaboration aux autorités vétérinaires pour procéder à des
enquêtes méthodiques dans les effectifs de chevaux souvent regroupés dans les Cen-
tres d'entraînement et les hippodromes d'où peuvent être, le cas échéant, éliminés
les animaux malades.
Pour donner au test de Coggins une valeur incontestable dans le cadre des
échanges, la méthode standardisée fait l'objet de l'Annexe
4.4.3.1.
(1) du Code :
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"En vue d'une harmonisation de l'interprétation des résultats obtenus dans les
divers pays, les laboratoires réalisant ce test devront utiliser un sérum de référence
pour vérifier le niveau de sensibilité de leur technique. Ce sérum de référence est
stérile, traité par la chaleur et lyophilisé. Il est préparé par le Comité de
référence...".
Ce Comité comporte le "National Institute of Animal Health" à Tokyo pour
l'Asie et l'Australie, les "Veterinary Services Laboratories" de l'USDA à Ames
(Iowa) pour les Amériques, et l'École Vétérinaire d'Alfort (France) pour l'Europe
et l'Afrique. Ainsi, toutes les bases techniques pour l'assainissement des effectifs
équins et la circulation sans risque des chevaux sont réunies.
ENCÉPHALOMYÉLITE ÉQUINE VÉNÉZUÉLIENNE
L'encéphalomyélite équine vénézuélienne (EEV) est une zoonose grave qui
atteint l'homme et le cheval, mais dont l'épidémiologie complexe met en jeu de
nombreuses espèces animales (équidés, ruminants, suidés, carnivores, chiroptères,
édentés, marsupiaux, rongeurs, oiseaux et reptiles) et de nombreux arthropodes
(Culex, Aedes, Anopheles, Psorophora, Mansonia).
Les foyers naturels d'infection sont localisés aux forêts humides de l'Amérique
tropicale, habituellement dans les régions marécageuses. Les principaux réservoirs
sont différentes espèces de rongeurs; les moustiques Culex servent de vecteur pour
la transmission du virus aux animaux sensibles. Lors de l'apparition de conditions
écologiques favorables (pluies, chaleur intense), les rongeurs se multiplient et la pul-
lulation des moustiques amplifie sa propagation.
Le complexe EEV comporte plusieurs souches (IA - IB - IC - ID - IE - II - III -
IV).
L'épizoodémie la plus récente et la plus meurtrière fut celle de 1969 provoquée
par le sous-type IB. Elle se propagea de l'Equateur au Guatemala puis à d'autres
pays d'Amérique Centrale, au Mexique pour atteindre le Texas, aux États-Unis en
1971.
Au cours de cette épizoodémie, 38 000 à 50 000 chevaux seraient morts;
quant aux cas humains, on en a recensé 31 000 environ dont 310 mortels pour le
seul Equateur. Cette flambée de la maladie justifia l'embargo, tel qu'il est recom-
mandé par le Code, placé par les pays indemnes sur les importations de chevaux en
provenance des pays contaminés.
Cependant, une lutte antivectorielle d'ampleur sans précédent et une vaccina-
tion très large avec un virus vivant modifié d'une souche Donkey Trinidad 1943,
puis clonée sous le nom de TC 83, ont enrayé l'extension de la maladie dans le sud
des États-Unis d'Amérique.
En mai 1972 (un an après l'épisode IB de l'infection du Texas), une table ronde
sur l'EEV se tient au siège de l'Office à Paris sous la présidence du Pr. C. Han-
noun, Chef du Service d'Ecologie virale à l'Institut Pasteur.
Les experts confirment l'intérêt pour les pays indemnes de se protéger par
l'interdiction totale d'importation des chevaux pendant la période d'activité des
moustiques. Ils préconisent, lors de la reprise des importations, la mise en quaran-
taine des animaux pendant deux semaines, le critère considéré le plus important
pour s'assurer qu'ils sont sains étant l'examen de leur courbe thermique pendant la
période d'observation. Ce n'est en effet que pendant la courte période virémique de
la maladie que le cheval est porteur de virus. Ces principes sont repris dans le Code
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